Figure 2. Examen tomodensitométrique, en coupe
axiale, sans injection de produit de contraste, d’un
patient présentant une dysosmie semblant consécu-
tive à une rhinite aiguë. Néanmoins, il présente depuis
des années des symptômes rhinologiques modérés
dominés par une obstruction nasale et une rhinorrhée
postérieure. Ces symptômes mineurs doivent conduire
à réaliser un examen tomodensitométrique, qui révèle
des opacités panethmoïdales modérées, antérieures
(EA) et postérieures (EP) en avant et en arrière de la
lame basale du cornet moyen (pointillés), permettant
de porter le diagnostic de rhino-sinusite diffuse.
La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 321 - avril-mai-juin 2010 | 7
DOSSIER THÉMATIQUE
Spécial “Odorat”
La pathologie de la transduction olfactive est riche.
Elle est largement dominée par les dysosmies post-
rhinitiques (postviral olfactory loss, influenza-like
infection, post upper respiratory infection [URI])
qui représentent la première cause de dysosmie
dans le monde, et dont la prévalence est estimée
entre 15 et 35 % des dysosmies. Aux États-Unis,
R.I. Henkin et al. ont estimé cette prévalence à
1 patient pour 400 habitants, ce qui représente-
rait 150 000 sujets en France (6-8). Ce type de
dysosmie affecte particulièrement les femmes
(65 à 70 %) d’un âge moyen compris entre 50 et
60 ans. La dysosmie serait essentiellement liée à
une destruction des neurones olfactifs primaires.
Le principal problème diagnostique est d’établir
avec certitude la relation exacte entre la rhinite
aiguë et la dysosmie. Durant toute rhinite aiguë,
une hyposmie transitoire – souvent une anosmie
– s’installe ; elle est liée à l’obstruction nasale
secondaire à l’œdème muqueux et à la présence
d’abondantes sécrétions. Lorsque l’obstruction et la
rhinorrhée s’estompent après une dizaine de jours,
l’odorat se normalise. Si la perte olfactive persiste
après la guérison de la rhinite, on parle de dysosmie
post-rhinitique. Dans la plupart des cas, la prise de
conscience de cette évolution inhabituelle de la
dysosmie n’est pas immédiate. Le patient attend
le plus souvent plusieurs mois avant de prendre
effectivement conscience de la persistance du
trouble olfactif. Le point capital du diagnostic est
d’établir la relation étroite entre la dysosmie et la
rhinite aiguë : la dysosmie doit être immédiatement
consécutive à la rhinite aiguë. La dysosmie est le
plus souvent à la fois une dysosmie quantitative
(l’hyposmie semble plus fréquente que l’anosmie
[60 versus 40 %]) et une dysosmie qualitative,
dominée par les parosmies, qui sont fréquentes
(30 à 50 % des cas). Ainsi, le diagnostic de dysosmie
post-rhinitique est clinique et repose sur l’interro-
gatoire : la chronologie de l’atteinte, l’absence de
symptômes rhino-sinusiens et neurologiques. Un
doute peut subsister lorsqu’il existe des symptômes
rhino-sinusiens (du fait de la fréquence des rhinosi-
nusites chroniques dans la population générale). Il
convient alors de différencier une dysosmie post-
rhinitique d’une dysosmie liée à une poussée de
rhinosinusite diffuse. La présence de polypes dans
les cavités nasales orientera le diagnostic. En leur
absence, il est préférable de réaliser un examen
tomodensitométrique des cavités naso-sinusiennes,
en coupes axiales et coronales, sans injection de
produit de contraste. La présence d’opacités diffuses
ethmoïdales antérieures et postérieures, en avant
et en arrière de la lame basale du cornet moyen,
permettra de rectifier le diagnostic (figure 2).
Les autres étiologies des dysosmies sont beau-
coup plus rares. L’altération des neurones olfac-
tifs primaires peut être d’origine toxique (chimie
lourde), médicamenteuse (exceptionnel), médicale
(pathologie rénale, hépatique) ou liée au vieillisse-
ment. Aucun examen radiographique n’est utile. Le
diagnostic est essentiellement fondé sur l’interro-
gatoire (9-12).
Les dysosmies centrales
La première étape centrale dans le système olfactif
est l’étape bulbaire. Le bulbe olfactif a une chimio-
topie : chaque glomérule est une unité fonction-
nelle. Ainsi, il semble exister un codage spatial des
odeurs dans le bulbe olfactif. Les axones des cellules
mitrales bulbaires empruntent le tractus olfactif
latéral et se projettent dans diverses structures,
dont le cortex olfactif. Le cortex piriforme est la
principale structure corticale olfactive. Les 2 prin-
cipales étiologies des dysosmies d’origine centrale
sont les traumatismes crâniens (13) et la maladie
d’Alzheimer (14).