ECS 922. Variables al´eatoires `a densit´e.
I D´efinition et caract´erisation
D´efinition :
On dit qu’une variable al´eatoire r´eelle Xest `a densit´e si sa fonction de r´epartition est continue
sur Ret de classe C1sur Rpriv´e d’un nombre fini de points.
Notons FXla fonction de r´epartition de X.
D´efinition :
Soit Xune variable al´eatoire `a densit´e. On dit qu’une application fde Rvers R+est une
densit´e de probabilit´e de Xsi fne diff`ere que F0
Xqu’en un nombre fini de points.
Remarque : Si l’on modifie la valeur de fen un nombre fini de points, la fonction obtenue est elle
aussi une densit´e de X.
Proposition : Soit Xune variable al´eatoire `a densit´e et fune densit´e de probabilit´e de X. On a :
xR, FX(x) = Zx
−∞
f(t) dt
D´emonstration : Notons Fla fonction de r´epartition de X, et El’ensemble des r´eels xtels que :
Fn’est pas d´erivable en x, ou F0n’est pas continue en x, ou F0(x)6=f(x). E´etant fini, ´ecrivons
E={a1, . . . , an}, o`u a1< a2< . . . < an, et notons a0=−∞ et an+1 = +.
Montrons par r´ecurrence l’assertion Hi:hh x], ai[,Zx
−∞
f(t) dt=F(x)ii (ce qui implique
que cette inegrale soit convergente).
- Si x < a1,F´etant une primitive de fsur ] − ∞, a1[, on a :
y < x, F (x)F(y) = Zx
y
f(t) dt, donc lim
y→−∞ Zx
y
f(t) dt=F(x)lim
−∞ F=F(x),
donc Zx
−∞
f(t) dtest convergente et F(x) = Zx
−∞
f(t) dt. Ceci montre que H1est vraie.
- Soit i[[1, n]] tel que Hisoit vraie.
D’une part, lim
xa
iZx
−∞
f(t) dt= lim
xa
i
F(x) = F(ai) car Fest continue, donc Zai
−∞
f(t) dtest
convergente et Zai
−∞
f(t) dt=F(ai).
D’autre part, si x]ai, ai+1[, on a : y]ai, x[,Zx
y
f(t) dt=F(x)F(y),
donc : lim
ya+
iZx
y
f(t) dt=F(x)F(ai), donc Zx
ai
f(t) dtexiste et Zx
ai
f(t) dt=F(x)F(ai), d’o`u
Zx
−∞
f(t) dt=Zx
−∞
f(t) dt=Zai
−∞
f(t) dt+Zx
ai
f(t) dt=F(ai) + F(x)F(ai) = F(x), ce qui
ach`eve la d´emonstration de Hi+1
Le principe de r´ecurrence finie permet de conclure que Hiest vraie pour tout ide [[1, n]], ce qui
´etablit le th´eor`eme.
Corollaire : Si Xest une variable `a densit´e, en tout point xo`u fest continue, F0(x) = f(x).
Id´ee de la d´emonstration : fest continue sauf en un nombre fini de points, donc si fest continue
en x0, il existe un intervalle ]a, b[ contenant x0et sur lequel fest continue. On sait (cous
d’inegration) que dans ce cas, la fonction G:x7→ Zx
x0
f(t) dtest d´erivable sur ]a, b[ et que
G0=f. Comme FGest une constante, on a aussi F0=fsur ]a, b[.
Th´eor`eme :
Une fonction fd´efinie sur Rest une densit´e de probabilit´e d’une variable al´eatoire si et
seulement si fest positive sur R, continue sur Rsauf en un nombre fini de points et v´erifie
Z+
−∞
f(t) dt= 1.
Id´ee de la d´emonstration : Si fest une densit´e de X,fest positive, continue sauf en un
nombre fini de points (les points o`u F0
Xn’est pas d´efinie ou pas continue ou diff`ere de f), et
lim
x+Zx
−∞
f(t) dt= lim
x+F(x) = 1 donc Z+
−∞
f(t) dt= 1.
On admet la r´eciproque. Dans le cas o`u f > 0, on pourra la faire en exercice apr`es l’´etude des
fonctions de variables `a densit´e et de la loi uniforme. Pour cela, on posera F(x) = Rx
−∞ f(t) dtet
X=F1Uo`u U → U([0,1]).
Corollaire : Si fet gsont deux densit´es de probabilit´es de variables al´eatoires et si elles sont
proportionnelles (c’est-`a-dire g=αf), alors, elles sont ´egales.
Remarque : Donner la loi de probabilit´e d’une variable `a densit´e, c’est donner, soit sa fonction de
r´epartition, soit l’une de ses densit´es de probabilit´e.
II Propri´et´es des variables `a densit´e.
Dans tout ce paragraphe, Xd´esigne une variable `a densit´e, fune densit´e de X, et Fsa fonction
de r´epartition.
La proposition suivante montre une diff´erence fondamentale entre variables discr`etes et variables
`a densit´e :
Proposition : aR, P (X=a) = 0
Id´ee de la d´emonstration :
P(X=a) = P(
\
n=1
(a1
n< X 6a)) (intersection d’une suite d´ecroissante d’´ev´enements)
P(X=a) = lim
n→∞ P(a1
n< X 6a) = lim
n→∞(F(a)F(a1
n)) = 0 car Fest continue.
Proposition : Pour tous r´eels aet btels que a < b,
P(a < X 6b) = P(a6X6b) = P(a6X < b) = P(a < X < b) = F(b)F(a) = Zb
a
f(t) dt
Id´ee de la d´emonstration : On sait que, pour toute variable al´eatoire,
P(a < X 6b) = F(b)F(a)
Les ´egalit´es entre probabilit´es se d´eduisent de la proposition pr´ec´edente. La derni`ere ´egalit´e
d´ecoule de la relation de Chasles.
III Fonctions de variables `a densit´e.
Xd´esigne une variable al´eatoire `a densit´e sur (Ω,B, P ).
1. Etude de ϕXsi ϕest une fonction en escalier sur tout segment
Cela signifie que, sur tout segment, ϕn’a qu’un nombre fini de points de discontinuit´e et est
constante sur chacun des intervalles ouverts d´elimit´es par ces points.
L’ensemble des valeurs prises par ϕest alors de la forme: ϕ(R) = {xi/i I}, o`u Iest un intervalle
de N(parfois Z) et (xn) est une suite monotone.
Dans ce cas, quelle que soit la variable al´eatoire `a densit´e X,ϕX( ou par abus ϕ(X)) est une
variable al´eatoire discr`ete.
Par exemple, si Xest une variable al´eatoire admettant une densit´e f, et ϕla fonction “partie
enti`ere”, bXcest une variable al´eatoire `a valeurs dans Z, dont la loi de probabilit´e est d´etermin´ee
par: kZ, P (bXc=k) = Zk+1
k
f(t) dt.
2
2. Etude de ϕXsi ϕest continue sur X(Ω).
La m´ethode est de rechercher la fonction de r´epartition de Y=ϕ(X), puis d’examiner si Yest
une variable `a densit´e et en donner ´eventuellement une densit´e.
Dans les exemples classiques suivants, nous noterons fet F(resp. get G) une fonction de densit´e
et la fonction de r´epartition de X(resp. Y).
Exemple: ϕ(x) = ax +bo`u a > 0.
G(x) = P(Y6x) = P(aX +b6x) = P(X6xb
a) = F(xb
a)
F´etant continue et, sauf peut-ˆetre en un nombre fini de points, d´erivable avec une d´eriv´ee
continue, Gv´erifie la mˆeme propri´et´e: Yest une variable a densit´e, une densit´e ´etant donn´ee en
tout point xtel que Fsoit d´erivable en xb
apar: g(x) = G0(x) = 1
af¡xb
a¢.
Remarque : On peut faire un raisonnement analogue si Y=aX +bo`u a < 0 ; on trouve dans les
deux cas: g(x) = 1
|a|f¡xb
a¢.
Remarque : Ceci montre au passage que la somme d’une variable al´eatoire `a densit´e et d’une
variable certaine est une variable `a densit´e.
Exemple: ϕ(x) = x2. Ici Y=X2.
G(x) = P(Y6x) = P(X26x) = ½0 si x60
P(x6X6x) = F(x)F(x) si x > 0
Comme dans l’exemple pr´ec´edent, X´etant une variable `a densit´e, Yl’est aussi, une densit´e ´etant
donn´ee en tout point xtel que Fsoit d´erivable en xet xpar:
g(x) = ½0 si x60
1
2x¡f(x) + f(x)¢si x > 0
Exemple: ϕ(x) = exp(x). Ici Y= eX.
G(x) = P(eX6x) = ½0 si x60
P(X6ln x) = F(ln(x)) si x > 0
Comme dans les exemples pr´ec´edents, X´etant une variable `a densit´e, Yl’est aussi, une densit´e
´etant donn´ee en tout point xtel que Fsoit d´erivable en ln xpar:
g(x) = ½0 si x60
1
xf(ln(x)) si x > 0
Exemple: d’utilisation courante : ϕest une bijection de classe C1de Rvers Ret ϕ0>0 (on traite
de mˆeme le cas ϕ0<0.
G(x) = P¡ϕ(X)6x¢=P¡X6ϕ1(x)¢=Fϕ1(x), donc Gest continue sur Ret de classe
C1sauf en un nombre fini de points (images par ϕdes points en lesquels Fn’est pas d´erivable ou
F0n’est pas continue). Yest donc une variable `a densit´e ; une densit´e est, sauf ´eventuellement
en un nombre fini de points, donn´ee par : g(x) = G0(x) = f¡ϕ1(x)¢
ϕ0¡ϕ1(x)¢
IV Moments d’une variable `a densit´e.
1. Moment d’ordre k.
D´efinition :
Soit kun entier naturel. On dit que la variable al´eatoire X, de densit´e f, admet un moment
d’ordre ksi l’inegrale Z+
−∞
tkf(t) dtest convergente. Si tel est le cas, le moment d’ordre k
de Xest:
mk(X) = Z+
−∞
tkf(t) dt
3
Remarque 1 : Si mk(X) existe, l’int´egrale qui le d´efinit est absolument convergente car les
inegrales de −∞ `a 0 et de 0 `a +sont convergentes et la fonction que l’on int`egre est de signe
constant sur chacun des intervalles ] − ∞,0] et [0,+[.
Remarque 2 : Le moment d’ordre 0 existe toujours: m0(X) = Z+
−∞
f(t) dt= 1.
2. Esp´erance.
D´efinition :
L’esp´erance d’une variable `a densit´e Xest, s’il existe, son moment d’ordre 1. C’est donc:
E(X) = Z+
−∞
tf(t) dt
si cette inegrale est convergente.
Remarque : Certaines variables al´eatoires n’ont pas d’esp´erance. On peut v´erifier, par exemple,
que si
f(t) = (0 si t < 0
1
(1 + t)2si t>0et g(t) = 1
(1 + |t|)3
une variable al´eatoire Xayant pour densit´e fn’a pas d’esp´erance tandis qu’une variable al´eatoire
de densit´e ga une esp´erance nulle.
Th´eor`eme : (Lin´earit´e de l’esp´erance)
Si Xet Ysont deux variables al´eatoires `a densit´e sur (Ω,B, P ), admettant chacune une
esp´erance, et si λest un r´eel, alors λX et X+Yadmettent aussi des esp´erances donn´ees par
E(λX) = λE(X) et E(X+Y) = E(X) + E(Y)
D´efinition :
Si la variable al´eatoire Xadmet une esp´erance m=E(X), la variable al´eatoire centr´ee
associ´ee `a Xest Xm.
Remarque : E(Xm) = 0.
Th´eor`eme : ( Th´eor`eme de transfert)
Si Xest une variable admettant la fonction fpour densit´e, et ϕune fonction continue sauf en
un nombre fini de points sur un intervalle contenant X(Ω), la variable al´eatoire ϕ(X) admet
une esp´erance
E¡ϕ(X)¢=Z+
−∞
ϕ(t)f(t) dt
si et seulement si cette int´egrale est absolument convergente.
Id´ee de la d´emonstration : dans le cas particulier o`u ϕest de classe C1sur Ret ϕ0>0.
ϕ(R) =]a, b[, o`u aest −∞ ou un r´eel, best +ou un r´eel > a.
En notant encore Gla fonction de r´epartition de Y=ϕ(X),
G(x) = P(ϕ(X)6x) =
0 si x6a(cas exclu si a=−∞)
P(X6ϕ1(x)) = F(ϕ1(x)) si a < x < b
1 si x>b(cas exclu si b= +)
Donc Gest continue, d´erivable avec une d´eriv´ee continue sauf aux points images par ϕdes points
de discontinuit´e de f, et admet pour densit´e la fonction gd´efinie par
g(x) = (0 si x6a
f(ϕ1(x)) 1
ϕ0(ϕ1(x)) si a<x<b
0 si x>b
4
E(Y) = Zb
a
xf(ϕ1(x)) 1
ϕ0(ϕ1(x)) dx
Le changement de variable d´efini par x=ϕ(t) donne le r´esultat.
3. Variance
D´efinition :
Si Xadmet une esp´erance et si ¡XE(X)¢2admet une esp´erance, on dit que Xadmet une
variance, et la variance de Xest alors d´efinie par: V(X) = E³¡XE(X)¢2´. Autrement dit,
en notant fune densit´e de Xet m=E(X),
V(X) = Z+
−∞
(tm)2f(t) dt
si cette inegrale est convergente.
Th´eor`eme : (m´ethode de calcul de la variance)
Xadmet une variance si et seulement si elle admet des moments d’ordre 1 et 2.
On a alors: V(X) = m2(X)m1(X)2=E(X2)E(X)2.
Id´ee de la d´emonstration :
Si m1(X) et m2(X) existent, Z+
−∞
(tm)2f(t) dt=Z+
−∞
[t2f(t)2mtf(t) + m2f(t)] dtest
convergente et ´egale `a
Z+
−∞
t2f(t) dt2mZ+
−∞
tf(t) dt+m2Z+
−∞
f(t) dt=E(X2)2m.m +m2=E(X2)E(X)2
R´eciproquement, si V(X) existe, la fonction
t7→ t2f(t) = (tm)2f(t)+2mf(t)m2f(t)
a une inegrale impropre sur ],+[ convergente car elle est combinaison lin´eaire de fonctions
dont l’int´egrale impropre est convergente.
Remarque : Il se peut qu’une variable al´eatoire admette une esp´erance, mais pas de variance: c’est
le cas, par exemple si Xadmet pour densit´e g:t7→ 1
(1+|t|)3.
Th´eor`eme :
Si Xadmet une variance, aX +baussi et V(aX +b) = a2V(X).
Id´ee de la d´emonstration : utiliser V(Y) = E(Y2)E(Y)2et la lin´earit´e de l’esp´erance.
D´efinition :
Si Xadmet une variance, l’´ecart-type de fest σX=pV(X).
La variable al´eatoire centr´ee r´eduite (en r´esum´e : r´eduite) associ´ee `a Xest X=XE(X)
σX
.
Remarque : E(X) = 0 et V(X) = 1.
V Somme de deux variables `a densit´e ind´ependantes
Rappel : Deux variables al´eatoires sur (Ω,B, P ), Xet Ysont ind´ependantes si pour tout couple
(a, b) de r´eels, les ´ev´enements (X6a) et (Y6b) sont ind´ependants. On a alors, quels que soient
les intervalles Iet Jde R,P¡(XI)(YJ)¢=P(XI).P (YJ).
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