Espace normal non r´esoluble
Hubert Quatreville
2 octobre 2015
R´esum´e
Un espace espace topologique est qualifi´e de r´esoluble [1 Bourbaki]
lorsqu’il poss`ede une partie dense d’int´erieur vide, ou, ce qui revient au
mˆeme, lorsqu’il peut s’´ecrire comme r´eunion disjointe de deux parties denses.
Le but de cet article est de donner une exemple d’espace topologique normal
sans point isol´e non r´esoluble. Van Douwen en a donn´e un exemple [4 Vdo]
un examinant les topologie maximale parmi les topologies r´eguli`eres. J’ai
explor´e une autre piste. L’id´ee consiste `a le chercher parmi les espaces s´e-
par´es de dimension z´ero (encore appel´es ´eparpill´es dans [2 Bourbaki]).
Comme d’habitude, on s’int´eresse aux topologies maximales dans leur ca-
t´egorie.
A posteriori, il se trouve que les deux constructions sont ´equivalentes
puisqu’une topologie maximale parmi les topologie r´eguli`ere est de dimen-
sion z´ero et qu’une topologie maximale parmi les topologies de dimension
z´ero est r´eguli`ere. On y gagne au passage un peu de sym´etrie.
1 I-alg`ebre
D´efinition 1 Soit Eun ensemble infini. On appellera I-alg`ebre sur E, une partie
Bde Etelle que :
EB
XB, X est finie X=
XB, E \XB
(X, Y )(B)2, X YB
En clair, une I-alg`ebre est un treillis compl´emene de parties de Ene conte-
nant pas de partie finie non vide. La lettre Iveut dire infini. Les propri´et´es
´el´ementaires des alg`ebres de Boole nous permettent d’affirmer que :
Proposition 1 Soit Bune I-alg`ebre sur un ensemble infini E. Alors
(X, Y )(B)2, X YB
(X, Y )(B)2, X \YB
(X, Y )(B)2, X YB(o`u d´esigne la diff´erence sym´etrique.)
1
Appliquons maintenant le lemme de Zorn pour obtenir des I-alg`ebres maxi-
males. Commen¸cons par constater que :
Proposition 2 Soit Eun ensemble infini. Soit (Bi)une famille de I-alg`ebres
totalement ordonn´ee pour l’inclusion. Alors iBiest une I-alg`ebre.
L’ensemble des I-alg`ebres sur Eest inductif et donc
Proposition 3 Soit Eun ensemble infini. Toute I-alg`ebre sur Eest incluse dans
une I-alg`ebre maximale.
Remarquons que l’ensemble {∅, E}´etant une I-alg`ebre, l’existence d’une I-
alg`ebre maximale sur Eest assur´ee.
2 Topologie associ´ee `a une I-alg`ebre maximale
Soit Eun ensemble infini. Soit Bune I-alg`ebre sur E. On consid`ere alors la
topologie Tengendr´ee par B.´
Etant donn´e que Best stable par intersection finie,
c’est une base de T, c’est `a dire que tout ouvert de Test une r´eunion d’´el´ements
de B. Le triplet (E, B,T) sera appel´e MB-espace (MB comme maximal bool´een).
Dans cette situation, on a coutume d’appeler ouverts ´el´ementaires les ´el´ements
de B. Remarquons que, par construction, les ouverts ´el´ementaires sont aussi fer-
m´es. L’espace topologique obtenue est un espace topologique de dimension z´ero.
(On appelle espace topologique de dimension z´ero un espace admettant une base
d’ouverts-ferm´es.) Attention, cet espace n’est pas n´ecessairement s´epar´e et on
s’occupera de ce probl`eme dans le paragraphe suivant.
Proposition 4 Soit (E, B,T)un MB-espace. Alors Eest sans point isol´e.
D´
emonstration :
Tout ouvert non vide contient un ouvert ´el´ementaire non vide et est donc
infini. cqfd
Th´eor`eme 1 Tout MB-espace accessible (c’est `a dire dont les parties finies sont
ferm´ees, on dit aussi T1) est non r´esoluble.
D´
emonstration :
Soit Aune partie dense dans E, dont le compl´ementaire B=E\Aest dense.
Commen¸cons par d´emontrer que XB, X Aest infinie :
Supposons qu’il existe Xdans Btelle que XAest finie. Comme Eest
accessible, X\Aest alors un ouvert non vide dont l’intersection avec A
est vide, ce qui contredit la densit´e de A.
De mˆeme, on a XB, X Best infinie
2
On consid`ere alors
C={(AX)Y|(X, Y )(B)2}∪{BX)Y|(X, Y )(B)2}
C’est une I-alg`ebre strictement plus grande que B, ce qui contredit le
caract`ere maximal de B.
cqfd
Proposition 5 Une topologie associ´ee `a une I-alg`ebre est maximale parmi les
topologies associ´ees aux I-alg`ebres si et seulement si la Ialg`ebre `a laquelle elle
est associ´ee est maximale.
D´
emonstration :
Deux topologies ayant la mˆeme base sont identiques. cqfd
Th´eor`eme 2 Parmi les topologies T1, les MB-espace sont les espaces de dimen-
sion z´ero sans points isol´es maximaux.
D´
emonstration :
Une topologie de dimension z´ero plus fine que celle d’un MB-espace contien-
drait un ouvert-ferm´e fini non vide. Or tout espace fini T1est discret. Il contien-
drait donc au moins un point isol´e. cqfd
3 S´eparation
D´efinition 2 Soit Eun ensemble infini et Bune I-alg`ebre sur E. On dit que B
est s´epar´ee ssi la topologie associ´ee est s´epar´ee.
Il revient au mˆeme de dire que pour tout couple (x, y) d’´el´ements distincts de
E, il existe une partie XBtelle que xXet y /X.
Proposition 6 Soit Eun ensemble infini et Bune I-alg`ebre sur E. La topologie
associ´ee `a Best s´epar´ee si et seulement si elle est T0.
D´
emonstration :
On sait d´ej`a que T2T0. Supposons que l’espace associ´ee `a Best accessible.
Soit xet ydeux points distincts de E. Il existe un ouvert ´el´ementaire Utel que
xUet y /Uou vice-versa (le deuxi`eme cas est sym´etrique). Les ouverts Uet
E\Us´eparent les points xet y.cqfd
Exemple 1 Consid´erons E=Z.
Pour chaque entier naturel net pour chaque partie Ade J0,2n1K, notons
Xn,A ={kZ| ∃pA, p kmod 2n}=pA(p+ 2nZ).
La famille des Xn,A forme une I-alg`ebre s´epar´ee de Z. La topologie associ´ee
n’est autre que la topologie 2-adique de Z.
3
On pourrait esp´erer qu’une I-alg`ebre maximale soit automatiquement s´epar´ee
mais il n’en est rien.
Exemple 2 Soit Eun ensemble infini muni d’une I-alg`ebre maximale B. Soit
αun point de Eet βun point qui n’est pas dans E. Notons E0=E∪ {β}et
B0={XB|α /X}∪{X∪ {β} | XBet αX}. La I-alg`ebre B0est
maximale et non s´epar´ee. La topologie associ´ee n’est mˆeme pas T0.
On constate que
Proposition 7 Soit Eun ensemble infini. Toute I-alg`ebre sur Econtenant une
I-alg`ebre s´epar´ee est elle-mˆeme s´epar´ee.
Et en consid´erant l’exemple ci-dessus.
Th´eor`eme 3 Il existe une structure de MB-espace s´epar´e sur Z.
Cette structure est non r´esoluble en vertu du th´eor`eme 1. Les propositions
qui vont suivre permettent d´etablir que cet espace est normal.
Proposition 8 Tout espace topologique s´epar´e de dimension z´ero est compl`ete-
ment r´egulier.
D´
emonstration :
Soit Eun espace topologique s´epar´e admettant une base d’ouverts-ferm´es.
Soit xun ´el´ement de Eet Uun ouvert contenant x. Il existe un ouvert-ferm´e V
contenant xet inclus dans U. La fonction caract´eristique de Vest continue et
vaut 1 en xet 0 en dehors de U.cqfd
Proposition 9 Soit Eun espace topologique r´egulier et soit Aet Bdeux ferm´es
disjoints d´enombrables de E. Il existe alors deux ouverts disjoints Uet Vtels que
AUet BV.
D´
emonstration :
Si l’un des deux ensembles est vide, le r´esultat est trivial. Consid´erons une
surjection ude Ndans Aet une surjection vde Ndans B.
Construisons par r´ecurrence des ouverts Unet Vntels que
nN,{uk|k6n} ⊂ Unet {vk|k6n} ⊂ Vn
nN,(AUn)(BVn) =
L’espace Eest r´egulier et u0/Bdonc il existe un ouvert U0dont l’adh´erence
est disjointe avec B. De l’autre cot´e v0/(AU0) donc il existe un ouvert V0
dont l’adh´erence est disjointe avec AU0. On a bien (AU0)(BV0) =
Supposons que l’on ai construit Unet Vn. En appliquant le mˆeme raisonnement
`a (AUn) et (BVn), on trouve deux ouverts Ret Scontenant respectivement
un+1 et vn+1 tels que (AUn)¯
R(BVn)¯
S=. On peut alors prendre
4
Un+1 =UnRet Vn+1 =VnS, l’adh´erence d’une union ´etant ´egale `a l’union
des adh´erence.
Les ouverts U=nUnet V=nVns´eparent les ferm´es Aet B.cqfd
En cons´equence, tout espace topologique r´egulier d´enombrable est normal.
Une alternative savante `a la proposition pr´ec´edente aurait ´et´e de constater qu’un
espace d´enombrable est de Lindel¨
of, qu’un espace de Lindel¨
of r´egulier est para-
compact et qu’un espace paracompact est normal. D’une fa¸con ou d’une autre,
on arrive `a la conclusion suivante :
Th´eor`eme 4 Il existe un espace normal d´enombrable de dimension z´ero non
r´esoluble.
4 Sous-espaces
Le but de cette partie est de montrer que tout sous-espace non vide sans point
isol´e d’un MB-espace est lui-mˆeme un MB-espace.
Lemme 1 Soit Eun ensemble infini et Bune I-alg`ebre maximale. Soit Aune
partie de E. Notons B=E\A. Si les deux propri´et´es suivantes sont v´erifi´ees
XB, X A=ou XAest infinie
XB, X B=ou XBest infinie
alors AB. R´eciproquement, une I-alg`ebre non-maximale contient une telle
partie Ahors de B.
D´
emonstration :
On consid`ere C={(AX)Y|(X, Y )(B)2}∪{BX)Y|(X, Y )(B)2}.
C’est une I-alg`ebre contenant Aet B. La maximalit´e de cette derni`ere permet de
conclure.
Pour la r´eciproque, toute partie Ad’une I-alg`ebre contenant Berifie les
propri´et´es indiqu´ees. cqfd
D´efinition 3 Soit Eun espace topologique sans point isol´e. On dit que Eest ul-
tradiscontinu (voir [4Vdo]) ssi, pour toute partition (A, B)de Een deux parties
sans points isol´ees, les deux parties Aet Bsont ouvertes et ferm´ees.
La propri´et´e d’ultradiscontinuit´e ne doit pas ˆetre affaiblie. En effet, on peut
remarquer qu’un espace topologique T1dans lequel deux parties disjointes ont
des adh´erences disjointes est un espace discret.
Th´eor`eme 5 Soit (E, B,T)un espace topologique s´epar´e de dimension z´ero sans
point isol´e. Eest un MB-espace ssi Eest ultradiscontinu.
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