Le voyage à Madagascar sera complété par l’inauguration
d’un service hospitalier rénové sous la coordination de
Rive OI, grâce au financement d’une fondation privée. Et
Catherine Gaud de préciser : « Nous avons l’intention de
restaurer un service des maladies infectieuses ou de
médecine interne par an dans chaque région. Le pro-
chain sera celui de Tuléar [Madagascar]. »
Ambiance privilégiée au centre hospitalier. Retour à Saint-
Denis, dans les locaux de Rive, où Sylvia et Hanta, deux
médecins malgaches, sont hébergées. Depuis que les ARV
sont disponibles dans leur pays et que des médecins réfé-
rents y sont formés, les patients étrangers pris en charge
par Rive sont désormais moins nombreux dans la maison
de vie. Ce qui permet aux candidats au diplôme universi-
taire qui effectuent leur stage clinique d’immersion obligatoire
de s’y installer. Chaque matin, le bus les mène au centre
hospitalier Félix Guyon. « Après les deux semaines théo-
riques validées récemment, nous apprenons maintenant un
“savoir-être” face aux malades ou encore comment formu-
Transversal n° 32 septembre-octobre terrain
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«C’est lors de mon hospitalisation à la Réunion que m’est
venue l’idée d’une association mauricienne de lutte contre
le sida, explique Nicolas Ritter, fondateur de Pils (Prévention
information lutte contre le sida). J’ai découvert le fonction-
nement de Rive et je me suis dit qu’il nous fallait la même
chose. » Le jeune franco-mauricien a passé près d’un an à
Saint-Denis de la Réunion, juste après que sa séropositi-
vité a été diagnostiquée. À l’époque, en 1995, aucun méde-
cin mauricien n’était formé à la prise en charge de l’infection
par le VIH, et Nicolas craignait de devoir s’installer définiti-
vement sur l’île française afin de bénéficier d’un traitement.
À la Réunion, il trouve donc une nouvelle activité profes-
sionnelle, s’investit dans les actions de Rive et devient
membre de son conseil d’administration. Il se forme égale-
ment comme écoutant sur la ligne Sida Info Réunion.
Première action. Et lorsque l’amélioration de son état de
santé et l’arrivée des trithérapies lui permettent enfin d’en-
visager un retour à Maurice, le jeune homme se lance tout
naturellement dans la création d’une association jumelle.
«Voir le travail d’une association de personnes vivant avec
le VIH a été une expérience extraordinaire, qui m’a permis
d’avancer très vite », poursuit Nicolas. À Port Louis, il struc-
ture donc rapidement Pils, avec des statuts calqués sur
ceux de Rive. Quelques proches appuient son initiative et
constituent le bureau. À l’époque, le virus est encore très
largement tabou sur l’île. Le nombre de séropositifs est
faible. Une quinzaine de nouveaux cas sont diagnostiqués
chaque année. Et aucune prévention n’est instaurée. «Mon
premier objectif a donc été de “secouer le cocotier”, cari-
cature-t-il. Il fallait communiquer et alerter les autorités. »
La première action de Pils sera la mise en place d’un
numéro vert, Info Sida, toujours en service. « Les gens
m’appelaient DrRitter. Je ne suis pas médecin, mais j’ai
rencontré des malades et des situations dramatiques,
comme cette femme enceinte de 7 mois qui pesait 40
kilos. Alors, avec l’association, j’ai littéralement emmené
les patients à Saint-Denis où Rive et sa présidente
PILS, une initiative mauricienne
À l’île Maurice, une association jumelle de Rive a été créée
par un ancien patient du service d’immunologie de Saint-Denis. Avec, en toile de fond,
une épidémie galopante parmi les usagers de drogue.
terrain par Sandra Mignot
ler une annonce difficile, comme celle des résultats »,
explique Sylvia, gynécologue obstétricienne à Tananarive.
Médecins et infirmières nouvellement arrivés sont toujours
frappés par l’ambiance qui règne dans le service d’immu-
nologie de Saint-Denis. «Il est vrai qu’on se tutoie, médecins
comme patients, explique Béatrice Payet, infirmière du ser-
vice. On s’appelle par nos prénoms, on se fait la bise le
matin. C’est un climat particulièrement convivial. » Le petit
nombre de patients par soignant, la présence de secrétaires
médicales pour gérer les questions administratives, l’appui de
diététiciennes et de psychologues font également la diffé-
rence. « Ce qui m’a frappé c’est la façon dont on accueille
les patients, l’atmosphère qui règne dans le service, se sou-
vient Tameebye Ponnoosamy, une infirmière mauricienne
en stage d’observation en 2004, pendant que son mari,
Renganaden Ponnoosamy, effectuait son stage clinique. Pour
une infirmière, c’est une belle motivation d’observer le travail
réalisé à la Réunion. On voit comment les patients peuvent
être traités. Au retour, on essaye de mettre en pratique ce
qu’on a vu, même si les moyens sont différents. »