8 Chirurgie Thoracique Cardio-Vasculaire - 2006 ; 10 : 4-17
l’expérience de la Cleveland Clinic, rapportant 72 cas de
médiastinites sur plus de 6500 sternotomies. 29 critères
avaient été étudiés avec analyses multi- et univariées. Les
4 critères signifi cativement incriminés étaient l’obésité,
le diabète avec prélèvements mammaires bilatéraux,
une intervention longue et les besoins transfusionnels
répétés en période post opératoires immédiates. Cette
étude avant-gardiste a, depuis, été confi rmée par d’autres
[22,23,24]. Matsa [24] rapportait dans sa série que le
risque de médiastinite chez une jeune femme diabétique
et obèse était de 1,4 % avec mammaire simple versus
15,5 % avec mammaire double. L’insuffi sance rénale et
l’age de plus de 70 ans, bien qu’identifi és dans certaines
séries comme co-facteurs de risques, restent controversés
[25,26].
Tout le problème du double prélèvement mammaire
réside dans le fait que c’est justement cette population
diabétique qui mériterait de profi ter au maximum
des bénéfi ces de la double revascularisation mammaire
interne [26,27]. Il existe un véritable dilemme
stratégique chez ces patients, contrebalançant d’un côté
une nette amélioration de la survie et de l’évolution
post opératoire et de l’autre un risque signifi cativement
accru de médiastinites [26,29,30]. Des alternatives ont
donc été décrites pour ces patients. La première mesure,
médicale, consiste en un contrôle strict de la glycémie
péri opératoire (préopératoire jusqu’à la sortie) [31,32].
La seconde, chirurgicale, consiste à squeletiser les greffons
artériels. La squelettisation mammaire interne a, en
effet, été présentée comme un moyen sûr de diminuer
la dévascularisation sternale en ayant, de plus, l’avantage
d’augmenter signifi cativement la longueur du greffon.
Une autre alternative proposée a été de ne squelettiser
que partiellement et proximalement l’AMI droite sur 3
à 5 cm et d’anastomoser en « y » ou en « t » ce fragment
droit sur le greffon gauche [33]. Il semble toutefois
que le double prélèvement mammaire squelettisé soit
déconseillé en cas de BPCO sévère, de revascularisation
urgente ou de chirurgie coronarienne redux [34,35,36].
Fort de ces alternatives médico-chirurgicales, il apparaît
clair que les premiers pas vers la prévention de la
médiastinite post-opératoire passent par l’identifi cation
des patients prédisposés et la reconnaissance des facteurs
aggravants.
8. Diagnostic Clinique
Les signes d’appels les plus classiques sont un écoulement
de plaie (80 %), une fi èvre (40 %), une instabilité sternale
(30 %), une collection ou une cicatrice infl ammatoire.
D’autres signes moins évocateurs peuvent être retrouvés
avec notamment un état léthargique (sujets âgés), ou
une altération de l’état général. La douleur sternale est
totalement aspécifi que sauf si de novo ou produite à la
palpation bi manuelle. Ces signes cliniques peuvent
être retardés d’un intervalle libre de 9 à 10 jours. Cela
n’affecte en rien l’intérêt et le bien fondé d’une évaluation
clinique quotidienne de la cicatrice. Notons qu’il existe
une infection concomitante (veinite, érésipèle, broncho-
pneumopathie, infection urinaire) dans plus de 20 % des
cas (jusqu’à 42 % pour Grossi).
9. Diagnostic Paraclinique
L’hyperleucocytose et le syndrome infl ammatoire
(Protéine C Réactive), bien qu’aspécifi ques sont quasi-
constants. En termes de cultures, ce sont les prélèvements
locaux (sérosités ou tissus) qui sont les plus indicatifs,
avec un taux de positivités de plus de 60 %. La ponction
à l’aiguille des berges de l’os sternal retrouve des taux de
positivités similaires [37]. Par contre, la sensibilité des
hémocultures n’est que de 50%. En fait, lorsqu’elles sont
positives, elles ne le sont que très tardivement. Maroto, en
1997, proposait la mise en cultures systématiques des fi ls
de pace makers épicardiques. Il retrouvait une sensibilité
de 75 % pour une spécifi té de 84 % [38]. L’imagerie
des médiastinites post-opératoires est, quant à elle, très
décevante. La radiographie pulmonaire n’apporte aucune
information directe. La tomodensitométrie, offrant une
bonne sensibilité a, par contre une mauvaise spécifi cité.
La seule image réellement évocatrice serait celle d’une
collection rétrosternale avec bulles. Les techniques
scintigraphiques et notamment les scintigraphies, à
l’Indium 111 et au Technétium 99, présentent l’avantage
d’avoir à la fois une excellente spécifi cité (95%) et
une bonne sensibilité (86%). Nécessitant un plateau
technique important, rarement faits en urgence, ces
examens restent intéressants surtout pour évaluer
l’atteinte sternochondrale [39]. Comme nous le verrons,
l’imagerie est, la plupart du temps, supplantée par
l’exploration chirurgicale et n’offre que peu d’intérêt dans
la démarche de la stratégie thérapeutique.
10. Complications
Les principales complications sont énumérées dans le
Tableau 3.
La médiastinite chronique constitue une forme
torpide de révélations tardives (quelquefois plusieurs
années). Le risque d’acutisation est toujours possible.
Cette forme clinique est l’apanage des infections
polybactériennes. Son traitement est souvent diffi cile
et très mutilant (sternectomie). Le cas particulier de la
rupture ventriculaire droite mérite d’être souligné. Cette
Médiastinites
Nicolas Durrleman et coll.
Article de Revue