
Forum Med Suisse 2012;12(18):369–373 369
cabinet
La douleur vertébrale aiguë: un signe de fracture?
Franco Tanzia, Piero Pancaldib, Sergio Tornatorec
a Centro Osteoporosi Lugano, Clinica Luganese Moncucco
b Centro Osteoporosi Locarno, Muralto
c Osteoclub Ticino
Introduction
Avec l’âge, nos os perdent leurs propriétés structurales.
La masse osseuse diminue, augmentant la fragilité de
l’os et créant un risque accru de fracture, notamment
suite à des traumatismes mineurs: c’est l’ostéoporose,
maladie caractéristique de la vieillesse, qui touche une
femme sur trois et un homme sur sept.
La colonne vertébrale subit, avec le poids corporel, une
force de compression qui s’exerce des disques interver
tébraux aux plateaux vertébraux et du tissu osseux tra
béculaire à l’enveloppe corticale. La majeure partie de
cette force est supportée par l’os trabéculaire [1].
Le vieillissement s’accompagne d’une réduction de la
densité minérale osseuse et d’une détérioration de l’ar
chitecture trabéculaire, qui inuencent la quantité et la
qualité de la masse osseuse. Pour prévenir le risque de
fracture, en particulier de fracture vertébrale, il est essen
tiel d’agir sur ces deux facteurs [1–2]. La diminution du
nombre et de l’épaisseur des travées osseuses, ainsi que
des connexions qui les relient, entraîne une perte de
masse trabéculaire qui peut atteindre 50%. Ceci diminue
de trois quarts la charge de rupture normalement sup
portée par les vertèbres par rapport à la charge initiale
[2]. Ce phénomène bien connu de fragilité osseuse pré
dispose aux fractures de basse énergie.
Epidémiologie
Selon l’étude EPOS [3], l’extrapolation de données, ob
tenues à partir d’un échantillon de 14 011 hommes et
femmes de 50 ans et plus provenant de 29 pays, permet
de pronostiquer qu’en Europe, 1,4 million de personnes
sur une population totale de 155 millions d’individus de
50 à 79 ans subiront chaque année une fracture ver
tébrale [3–4]. En Suisse, 50% des femmes et 20% des
hommes subiront une fracture de fragilité [5].
La prévalence des fractures vertébrales diagnostiquées
par radiologie varie de 10 à 25% après l’âge de 50 ans
(g. 1 x) [4]; une autre étude montre qu’entre 50 et
85 ans, le taux de fractures vertébrales chez la femme
passe de 5 à 50% [6]. De plus, une fracture vertébrale
multiplie par cinq le risque de fracture ultérieure et
triple le risque de fracture fémorale [6–8]. En Suisse, une
patiente est hospitalisée toutes les 22 minutes pour une
facture ostéoporotique [9].
Présentation clinique
des fractures vertébrales
Les fractures de fragilité vertébrales sont généralement
causées par des traumatismes mineurs ou des efforts
légers, parfois même de simples mouvements, même il
n’est pas rare non plus qu’elles se produisent spontané
ment chez des patients encore relativement jeunes,
dans ce cas elles sont associées à un risque important
de nouvelle fracture vertébrale ou non vertébrale. Assez
souvent, les fractures vertébrales sont diagnostiquées
par hasard sur des radiographies effectuées pour d’autres
motifs. Dans tous les cas, on considère qu’une grande
partie (jusqu’à 2/3) de ces fractures passent inaperçues
ou, du moins, sont diagnostiquées tardivement. Cette
situation est bien sûr favorisée par une symptomatologie
souvent atypique ou incomplète.
La douleur n’est pas un phénomène constant; parfois
aiguë et lancinante, elle peut être modérée ou absente.
La douleur peut être accentuée par un accès de toux, un
mouvement respiratoire ou d’autres mouvements même
minimes, la mise en position assise ou débout, une per
cussion des apophyses épineuses ou une compression
axiale du rachis, mais elle peut aussi n’impliquer aucun
de ces éléments. De même, l’atténuation de la douleur
au repos ou en décubitus est variable. Les fractures des
vertèbres dorsales inférieures ou de la jonction dorso
lombaire se manifestent souvent par des douleurs loca
lisées plus bas, au niveau de la charnière lombosacrée:
en conséquence, les douleurs peuvent être mal inter
prétées et les fractures de la colonne dorsale inférieure
échapper à un examen radiologique qui serait limité à
la colonne lombaire. Les fractures vertébrales peuvent en
outre être accompagnées d’une irradiation de la douleur
Quintessence
P Chez les patients qui développent une ostéoporose, seule une fracture
vertébrale sur trois est diagnostiquée.
P La douleur qu’elle occasionne est généralement modérée à aiguë et
peut devenir chronique, comme elle peut disparaître spontanément au
bout de quelques semaines.
P En Europe, 1,4 million de personnes sont victimes chaque année d’une
fracture vertébrale.
P Chez les patients qui consultent pour des douleurs rachidiennes aiguës,
il est important que le médecin de famille puisse diagnostiquer l’ostéo
porose dès la première fracture et éviter ainsi des complications majeures.
P Un arbre décisionnel simple peut aider le médecin dans cette tâche.
Franco Ta nzi
Les auteurs ne
déclarent aucun
soutien nancier ni
d’autre conit
d’intérêt en
relation avec cet
article.