De l`observance à l`adhésion thérapeutique…

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A propos du patient
De l’observance à
l’adhésion thérapeutique…
La prise en charge des maladies chroniques
ne permet pas d’annoncer au malade une
guérison, d’où la difficulté pour le patient à
accepter sa maladie et, donc, à accepter un
traitement au long cours.
L’adhésion
thérapeutique ne
peut être
obtenue que si le
malade a
accepté sa
maladie et
compris l’intérêt
des traitements
proposés
Expressions : Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est l’observance ?
PR D. VERVLOET : Plusieurs notions méritent d’être
définies :
• La compliance est un terme qui traduit une obéissance passive : c’est-à-dire que le malade
« accepte » l’ordonnance du médecin.
• L’observance thérapeutique correspond plus à un
comportement objectif et dynamique de la part
du patient.
• L’adhésion thérapeutique signifie que le malade
collabore à la proposition thérapeutique que le médecin a élaborée en fonction de ses préoccupations.
Cette adhésion entre dans un cadre de projet thérapeutique et dans le contexte d’une motivation du
patient vis-à-vis des recommandations médicales.
• la peur des effets secondaires des médicaments,
notamment la corticophobie dans l’asthme ;
• les régimes complexes ;
• la routine du traitement (lassitude) ;
• les prises multiples journalières.
Les facteurs liés au médecin :
L’adhésion thérapeutique ne peut être obtenue que
si le malade a accepté sa maladie et compris l’intérêt des traitements proposés [1].
Dans les maladies chroniques, il existe des facteurs
connus de non-observance. Ils sont liés à la fois au
patient, à la maladie, au traitement et au médecin.
Les facteurs liés au patient [2] :
• l’âge : par exemple l’adolescence est une période
difficile ;
• la non-acceptation de sa maladie : résistance ;
• la mauvaise compréhension de la nécessité du
traitement : pourquoi faut-il prendre un traitement
même en dehors des crises ?
• le manque de confiance en son médecin qui induit
le plus souvent un nomadisme médical ;
• les croyances et représentations de la maladie :
fatalité, injustice…
Les facteurs liés à la maladie :
• l’observance diminue avec le temps ;
• en dehors des crises, le malade va bien, ce qui
l’amène à ne pas prendre son traitement ;
4
Les facteurs liés au traitement :
• la mauvaise relation médecin/patient ;
• le manque d’écoute et d’empathie de la part du
médecin ;
• la trop courte durée de la consultation (manque de
temps).
Les études sur la non-observance, spécifiquement
dans l’asthme [3], indiquent que 58 à 85 % des
patients sont non-observants. Les facteurs les plus
souvent cités sont :
• la corticophobie ;
• la mauvaise utilisation des inhalateurs ;
• l’amélioration de l’état clinique entraînant l’arrêt du
traitement ;
• les oublis ;
• la lassitude ;
• l’intolérance au traitement.
Cette non-observance aboutit à une augmentation de
la morbidité, avec une diminution de l’efficacité des
traitements et une augmentation des arrêts de travail ou des absences scolaires. De plus, 75 % des
hospitalisations en urgence sont dues à une mauvaise
observance.
L’étude ASUR [4] a bien montré, que pour la grande
majorité des patients arrivant dans les centres
d’urgences pour asthme aigu grave, les signes
avaient débuté 6 à 7 jours avant. Ainsi, il est
important de faire comprendre aux malades le
traitement de la maladie chronique, mais aussi
de développer des plans d’action personnalisée
écrits.
Dans le cas de la rhinite, la non-observance est
également importante. L’étude Prigent [5] l’estime à environ 50 %. Pour beaucoup de malades,
la rhinite n’est pas une maladie, mais se réduit à
une gêne. On observe une très forte automédication avec des consultations irrégulières et un
nomadisme médical très important.
Expressions : Observe-t-on une différence en termes d’observance entre
l’ITS injectable et l’ITSL ? Quelles en
sont les causes ?
PR D. VERVLOET : A ma connaissance il n’y a pas
d’étude comparative sur ce sujet entre le mode
injectable et sublingual. En revanche, des études
ont porté sur la non-observance avec chaque
mode d’administration.
Il existe quelques études avec l’ITS sous-cutanée.
Parmi les causes de non-observance dans l’immunothérapie injectable, on relève les inconvénients suivants :
• le fait de rester au cabinet médical après
l’injection pendant 1/2 heure ;
• la nécessité de consulter régulièrement (tous
les mois) ;
• la douleur liée aux piqûres ;
• l’apparition de réactions locales.
De plus, une étude publiée en 1995 [6] montre que
l’observance est moins bonne lorsque l’ITS injectable est conduite par un non-allergologue.
Parmi les personnes qui ne font pas leurs injections
chez l’allergologue, les abandons de traitement
sont plus fréquents chez les patients jeunes, âgés
de 16 et 25 ans.
En ce qui concerne l’ITSL, deux études récentes
[7, 8] indiquent une très bonne observance, sur un
et trois ans respectivement. Un autre travail [9]
retrouve une observance de 92 %, mais la période
de l’étude (18 semaines) est trop courte pour
conclure.
Cependant, l’ITSL pouvant être réalisée à domicile,
l’absence de piqûre et d’effets secondaires, la
possibilité d’augmenter les doses très vite (ultrarush), expliquent que l’observance soit meilleure
par voie sublinguale. Ainsi la maniabilité du traitement pourrait être un facteur de meilleure
observance.
Toutefois, cet avantage de la voie sublinguale
pourrait également être un facteur de non-observance
•••
NON-OBSERVANCE ET MODALITÉS DE
PRISE EN CHARGE DE L’ITS
Tinkelman D et al. [6]
Etude rétrospective sur 1 an / 1991-1992
13 157 patients
CARACTÉRISTIQUES
DES PATIENTS
ITS faites par :
n
Asthme
Rhinite
Autres
9 808
22 %
75 %
3%
Non-allergologue 3 349
26 %
71 %
3%
Allergologue
RÉSULTATS
Patients non-observants
ITS faite par :
n
%
Allergologue
1 056
10,7
Non-allergologue
1 166
34,8 %
p < 0,01
ITS SUBLINGUALE AUX ACARIENS
ET OBSERVANCE
Malet A et al. [7]
Etude ouverte : 63 patients traités par ITSL pendant 1 an
Evaluation de l’observance par questionnaire
Résultats
Degré d’observance (%)
Adultes
Enfants
Global
Opinion des
Investigateurs
Très bon
63
66
64
Moyen
37
19
27
Mauvais
0
15
9
72
23
5
Marogna M et al. [8]
Etude ouverte contrôlée ITSL pendant 3 ans
319 patients : 166 ITSL acariens / 153 ITSL pollens
Mesure de l’observance :
Vol. solution sublinguale consommée
Volume théorique à consommer
Résultats
Observance > 80 % chez 72 % des patients
entre 60 % et 80 % chez 18 % des patients
< 60 % chez 10 % des patients
5
A propos du patient
De l’observance à l’adhésion thérapeutique…
car le patient, consultant moins,
a un risque d’oubli.
Expressions : Comment
peut-on améliorer l’observance et l’adhésion
thérapeutique ?
PR D. VERVLOET : Il est indispensable de prendre en compte la
maladie et le malade. Il est
nécessaire de proposer au
malade une thérapeutique personnalisée en intégrant ses souhaits. Pour mener à bien cette
prise en charge, il est impératif de
se donner le temps d’écouter le
malade.
Au cours de la Journée mondiale
de l’asthme organisée en Mai
2006, le thème proposé aux
patients sera « Osez parler ». En
effet, pour que le médecin puisse
prendre en charge correctement
son patient, il est nécessaire que
ce dernier s’exprime sur sa maladie, son traitement…
Les écoles de l’asthme présentent, entre autres, l’intérêt de
permettre des bilans éducatifs, en
groupe et individuellement, pour
arriver à mesurer la motivation
des patients.
L’amélioration
de l’observance
passe
également
par une
simplification
des protocoles
6
Pour que chaque patient « réussisse » sa prise en
charge, il est nécessaire :
• qu’il comprenne réellement l’information sur son
traitement et sa pathologie ;
• qu’il adhère à ces informations et décide de
« changer » de statut, c’est-à-dire accepte sa
maladie chronique ;
• qu’il initie sa prise en charge et la maintienne
dans le temps.
L’éducation thérapeutique est efficace à condition
qu’on y intègre le plan d’action personnalisée écrit
où sont expliqués les signes d’aggravation et les
premiers gestes à réaliser. Des outils éducatifs
adaptés à l’âge du patient sont à la disposition du
corps médical.
Il faudrait supprimer le mot « ordonnance » et le
remplacer par une proposition thérapeutique qui
permettrait d’améliorer l’adhésion thérapeutique
dans un projet partagé entre le médecin et son
malade (le contrat médecin-malade).
L’amélioration de l’observance passe également par
une simplification des protocoles.
• Pour l’ITS injectable : proposer des protocoles
« cluster » afin de réduire la durée de la phase
de montée des doses.
• Pour l’ITS sublinguale : proposer une cure en
ultra-rush (montée des doses en 2 heures), des
traitements pré-saisonniers courts pour les pollens (3 à 4 mois) et, enfin, proposer un traitement
d’entretien séquentiel pour les acariens (étude
actuellement en cours) pour réduire la lassitude.
Les nouveaux produits à notre disposition vont
très certainement contribuer à une meilleure
observance, en particulier les comprimés sublinguaux dans l’ITS sublinguale.
Propos recueillis par le Dr C. Mura
1 - Lamouroux A, Magnan A, Vervloet D. Compliance,
therapeutic observance and therapeutic adherence :
« What do we speak about ? »
Rev Mal Respir 2005 ; 22 : 31-4.
2 - Boutry L, Matheron I, Bidat E. Quand les prescriptions ne
sont pas suivies... Penser aux croyances et représentations
de santé. L'exemple du patient asthmatique.
Rev Fr Allergol Immunol Clin 2001 ; 41 : 470-62.
3 - Megas F, Benmedjahed K, Lefrançois G. Enquête
« Compli'Asthme » : observance thérapeutique et bonne
utilisation des médicaments inhalés dans l'asthme perçues
par les médecins praticiens.
Revue de Pneumologie Clinique 2004 ; 60 : 158-60.
4 - Salmeron S, Liard R, Elkharrat D et al. Asthma severity and
adequacy of management in accident and emergency
departments in France: a prospective study.
Lancet 2001 ; 358 : 629-35.
5 - Prigent A-L. Impact Médecin Hebdo, n° 535 –
18 mai 2001 - supplément.
6 - Tinkelman D, Smith F, Cole WQ 3rd et al. Compliance with
an allergen immunotherapy regime.
Ann Allergy Asthma Immunol 1995 ; 74 : 241-6.
7 - Malet A, Valero A, Lluch-Perez M et al. Sublingual
immunotherapy with a Dermatophagoides pteronyssinus
extract in mass units: assessment of efficacy, safety and
degree of compliance.
Alergol Immunol Clin 2000 ; 15 : 145-150.
8 - Marogna M, Spadolini I, Massolo A et al. Randomized
controlled open study of sublingual immunotherapy for
respiratory allergy in real-life: clinical efficacy and more.
Allergy 2004 ; 59 : 1205-10.
9 - Lombardi C, Gani F, Landi M et al. Quantitative assessment
of the adherence to sublingual immunotherapy.
J Allergy Clin Immunol 2004 ; 113 : 1219-20.
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