1
Méthode de Newton
Théorème 1. Soit IRintervalle de Ret f:IRde classe C2. On suppose que fs’annule
en un point a
Iet que f0(a)6= 0. Alors, la suite (xn)nNdéfinie par xn+1 =xnf(xn)
f0(xn)
converge quadratiquement vers apour x0assez proche de a.
Démonstration. :
Etape 1 : montrons l’existence d’un segment J= [ah, a +h]sur lequel f0ne s’annule pas.
Quitte à changer fen fon peut supposer que f0(a)>0. Comme a
Iet que f0est continue
en a(fétant C2), il vient :
ε > 0,h > 0,xI, |xa| ≤ h, |f0(a)f0(x)| ≤ ε
et en particulier pour 0< ε < f0(a), on a :
x[ah, a +h], f0(x)> f0(a)ε > 0
On pose ainsi J= [ah, a +h]et on a bien f0>0sur J.
Etape 2 : Pour xJ, posons F(x) = xf(x)
f0(x), bien définie cf étape 1.
Objectif : montrons qu’il existe C > 0tel que |F(x)a| ≤ C|xa|2et que quitte à diminiuer
J= [ah, a +h]en prenant hplus petit, Jest stable par F i.e |F(x)a| ≤ hpour xJ.
Remarquons pour commencer que F(a) = aet que sur J:
F0(x)=1f0(x)2f(x)f00(x)
f0(x)2=f(x)f00(x)
f0(x)2=F0(a)=0.
Evaluons donc la quantité F(x)apour xJ. On a :
F(x)a= (xa)f(x)
f0(x)=f0(x)(xa)f(x)
f0(x)=f(a)f(x)(ax)f0(x)
f0(x)
où l’on a rajouté f(a)=0au numérateur afin de pouvoir appliquer la formule de Taylor Lagrange.
Il existe c]a, x[(avec x>aou x<a) tel que :
F(x)a=f00(c)(xa)2
2f0(x)
Alors, Jétant compact et fde classe C2,f0et f00 y sont bornées et :
|F(x)a| ≤ maxxJ|f00(x)|(xa)2
2 minxJ|f0(x)|C(xa)2C=maxxJ|f00(x)|
2 minxJ|f0(x)|.
Ainsi, |F(x)a| ≤ Ch2et quitte à réduire hen prenant h < 1
C, on peut supposer Ch2< h et
donc |F(x)a| ≤ hce qui établit la stabilité de Jpar F.
Etape 3 : montrons que pour x0J,(xn)converge quadratiquement vers a. La stabilité de J
par F, nous assure que pour x0J,(xn)nNest bien définie. De plus, pour nN, on a :
|xn+1 a|=|F(xn)F(a)| ≤ C(xna)2.
En multipliant à gauche par C > 0, on a alors C|xn+1 a| ≤ (C|xna|)2et par une récurrence
immédiate :
C|xna| ≤ (C|x0a|)2n(Ch)2n.
Comme Ch < 1, on a bien la convergence quadratique de (xn)nNvers a, pour x0pris assez
proche de a.
Proposition 1. Sous les hypothèses du théorème précédent, avec toujours f0(a)>0et en sup-
posant de plus fconvexe sur Iet f00 ne s’annulant pas sur I, la convergence de la suite (xn)
vers aest assuré pour x0> a et de plus (xn+1 a)
(xna)2
+
f00(a)
2f0(a)
| {z }
>0
2
Démonstration. :
Etape 1 : montrons que I∩ {xa}=I[a, +[est stable par F. La fonction fétant convexe
sur Iet fde classe C2, on a en particulier f00 0et f0est croissante sur I, ce qui nous assure :
f0(x)f0(a)>0pour xa=Fest bien définie pour xa.
De plus comme f0>0pour xa, la fonction fest strictement croissante sur [a, +[et donc
f(x)> f(a) = 0 pour x>apuis
F(x) = xf(x)
f0(x)
|{z}
>0
< x pour x>a(1)
En appliquant, le théorème de Taylor-Lagrange sur [a, x]x>a, on a de nouveau l’existence
de c]a, x[tel que :
F(x)a=f00(c)(xa)2
2f0(x)0car f0>0et f00 >0 (2)
On déduit de (1) et (2) que pour xI∩ {xa}, on a :
F(x)[a, x[a, x I=F(x)I∩ {xa}
Alors, la suite (xn)est bien définie pour tout x0I∩ {xa}. Si x0=a, la suite (xn)est
stationnaire, égale à a, sinon comme F(x)< x pour x > a, elle est strictement décroissante et
est minorée par a. Donc elle converge vers une limite laqui est par continuité de F, un point
fixe de F. Pour xa, un point fixe de Fcorrespond à un zéro de fet le seul cas possible est
donc l=acar f(x)> f(a) = 0 pour x>a.
Etape 2 : montrons que (xn+1 a)
(xna)2
+
f00(a)
f0(a). Pour x0> a,xn> a pour tout nNd’après
(2) et comme précédemment, on a l’existence de cn]a, xn[tel que :
F(xn)F(a) = xn+1 a=f00(cn)(xna)2
2f0(xn)
Puisque (xn)converge vers a, par encadrement, (cn)converge également vers a. Comme fest
C2,f00 et f0sont continues et (f00(cn)) converge vers f00(a)et (f0(xn)) vers f0(a)ce qui donne
finalement :
(xn+1 a)
(xna)2
+
f00(a)
2f0(a)
| {z }
>0
Référence : Rouvière.
Origine de la méthode
Pour résoudre f(x)=0, on cherche à transformer cette équation, en un problème équivalent de
point fixe. On peut par exemple considérer une fonction λqui ne s’annule pas et on pose :
F(x) = x+λ(x)f(x)
D’après Rouvière (premier exercice du chapitre sur les points fixes), on sait que la convergence
de la suite itérée xn+1 =F(xn)vers le point fixe asera d’autant plus rapide que le point est
super-attractif ie F0(a) = 0. Or, on a F0(a) = 1 + λ0(a)f(a) + λ(a)f0(a) = 1 + λ(a)f0(a). On est
donc incité à prendre λ(x) = 1
f0(x)et à considérer xn+1 =xnf(xn)
f0(xn)
Méthode de Newton pour les polynômes.
Proposition 2. Soit P=Xn+an1Xn1+. . . +a1X+a0R[X]unitaire, dont toutes les
racines sont réelles P(X) = (Xα1)m1. . . (Xαr)mravec αr> αr1> . . . > α1. Alors, pour
x0> αr, la suite itérée xn+1 =xnP(xn)
P0(xn)converge vers αren décroissant.
3
Démonstration. :
Etape 1 : remarquons que P, P 0et P00 ne s’annulent pas sur ]αr,+[. D’après le théorème de
Gauss-Lucas, les zéros de P0sont dans l’enveloppe convexe des zéros de Pie dans [α1, αr]et donc
de même pour les zéros de P00. On en déduit ainsi, que pour x > αr,P, P 0et P00 ne s’annulent
pas et ont donc un signe constant. Puisque :
P0(X) = m1(Xα1)m11. . . (Xαr)mr+. . . +mr(Xα1)m1. . . (Xαr)mr1
on a P0(x)>0pour x>αr. De même, le calcul explicite de P00 donne P00(x)>0pour x>αr.
Etape 2 : montrons que f:x7−xP(x)
P0(x)admet une limite à droite en αrfest bien
définie sur ]αr,+[, puisque P0ne s’y annule pas. On a alors :
P0(X) = m1
P(X)
(Xα1)+. . . +mr
P(X)
(Xαr)
ce qui nous donne :
P0(X)
P(X)=
r
P
i=1
mi
(Xαi)et P(X)
P0(X)=r
P
i=1
mi
Xαi1
.
Ainsi,
lim
xαr
x>αr
xP(x)
P0(x)=αr+ lim
xαr
x>αr
1
m1
(xα1)+. . . +mr
(xαr)
=αr
On prolonge ainsi par continuité la définition de fà[αr,+[en posant f(αr) = lim
xαr
x>αr
f(x) = αr.
Etape 3 : montrons par un raisonnement par récurrence que :
x0> αr=(xn)nNest bien définie et vérifie xn> αr,nN.
Par hypothèse, x0> αr. Soit n1tel que xn> αr. Alors,
xn> αr=P
P0(xn)>0et xn+1 =xnP
P0(xn)
| {z }
>0
< xn.
Il nous reste à montrer que xn+1 > αr, pour ce faire, on va montrer que fest strictement
croissante sur ]αr,+[. Puisque fest dérivable sur ]αr,+[, on a sur cet intervalle :
f0(x) = 1 P0(x)2P(x)P00(x)
P0(x)2=P(x)P00(x)
P0(x)2>0
Alors, f0(x)>0pour x>αret donc xn+1 =f(xn)> f (αr) = αr.
Conclusion : pour x0> αr,(xn)nNest décroissante, minorée par αrdonc convergente. Par
continuité de f, elle converge vers un point fixe de fsur [αr,+[ie vers un zéro de P
P0sur
[αr,+[. Comme P
P0(x)6= 0 si x>αrnécessairement lim
n→∞ xn=αr
Proposition 3. Pour x0> αr, on a lim
xαr
x>αr
f0(x)=11
mr
. De plus,
si mr= 1, la convergence est quadratique.
si mr>1,C > 0,(xnαr)
C11
mrn
Démonstration. :
Etape 1 : montrons que lim
xαr
x>αr
f0(x)=11
mr
. Pour x>αr, on a P0(x)
P(x)=
r
P
i=1
mi
(xαi), ce qui
nous donne en dérivant cette dernière égalité :
P(x)P00(x)P0(x)2
P(x)2=
r
P
i=1
mi
(xαi)2P(x)P00(x) = P0(x)2P(x)2r
P
i=1
mi
(xαi)2
4
soit encore :
P(x)P00(x)
P0(x)2= 1 P(x)
P0(x)2r
P
i=1
mi
(xαi)2f0(x) = 1
r
P
i=1
mi
(xαi)2
r
P
i=1
mi
(xαi)2
En multipliant, numérateur et dénominateur par (xαr)2, il vient :
lim
xαr
x>αr
f0(x) = lim
xαr
x>αr
1
r
P
i=1
mi(xαr)2
(xαi)2
r
P
i=1
mi(xαr)
(xαi)2= 1 mr
m2
r
= 1 1
mr
.
Ainsi, f0admet une limite à droite en αret fest C1sur [αr,[avec f0(αr) = 1 1
mr
.
Cas 1 : Supposons mr= 1. Alors, P(X)=(Xα1)m1. . . (Xαr1)mr1(Xαr)et par
définition même de la multiplicité d’une racine, P0(αr)6= 0. De plus P0est clairement C2sur un
voisinage de αr, ce qui donne cf le théorème 1, une convergence quadratique de (xn)nNvers αr.
Cas 2 : on suppose ici que mr>1et donc f0(αr)=11
mr
]0,1[.
Méthode : montrons que ln(xnαr)nln(f0(αr)) converge vers un certain λR. On aura
lim
n→∞ ln(xnαr)nln(f0(αr)) = λ=eln(xnαr)nln(f0(αr))
eλet donc :
(xnαr)
eλf0(αr)n=C11
mrn
pour C=eλ>0.
Par la formule de Taylor-Lagrange, il existe zn]αr, xn[tel que :
(xn+1 αr) = f(xn)f(αr) = f0(αr)(xnαr) + f00(zn)(xnαr)2
2.
Soit :
xn+1 αr
f0(αr)(xnαr)= 1 + f00(zn)
f0(αr)
(xnαr)
2
On pose alors εn=xn+1 αr
f0(αr)(xnαr)1, d’où l’on déduit immédiatement εn=O(xnαr).
Montrons que :
(xnαr) = O(dn)pour un dtel que 0<d<1.
Comme mr2, on a f0(αr)]0,1[ et comme précédemment, par le théorème des accroissements
finis :
yn]αr, xn[,(xn+1 αr) = f(xn)f(αr) = f0(yn)(xnαr)
et lim
n→∞ f0(yn) = f0(αr). En particulier pour ε > 0tel que 0< d =ε+f0(αr)<1on a :
NN,nN, |f0(yn)f0(αr)| ≤ ε
soit :
NN,nN, f 0(yn)d
Ainsi, pour nNon a : (xn+1 αr) = f0(yn)(xnαr)d(xnαr). Par une récurrence
immédiate, on a donc pour nN:
(xnαr)dnN(xNαr) =(xnαr)
dn1
dN(xNαr) =(xnαr) = O(dn)
d < 1. Ainsi, lim
n→∞ εn= 0 et ln(1 + εn) =
εn+o(εn) = o(dn). Introduisons alors la série :
P
n0
ln(xn+1 αr)ln(xnαr)ln(f0(αr))
| {z }
=ln(1+εn)=o(dn)
5
qui est donc convergente puisque 0<d<1. Ses sommes partielles convergent donc vers un réel
que l’on note µ:
lim
n→∞
n1
P
k=0
ln(xk+1 αr)ln(xkαr)ln(f0(αr)) = µ
soit lim
n→∞ ln(xnαr)nln(f0(αr)) = µ+ ln(x0αr) = λ.
Conclusion : on a alors (xnαr)
eλ(f0(αr))n=eλ11
mrn
soit le résultat souhaité
avec C=eλ>0.
Remarque 1. La connaissance des racines n’est pas nécessaire pour choisir x0> αr. On s’assure
en effet que x0> αren prenant x0>max(1,
n1
P
i=0
|ai|). Pour trouver, les autres racines on applique
la méthode de Newton précédente successivement à P1=P(X)
(Xαr)m, P2=P1
(Xαr1)mr1, . . ..
Démonstration. Soit P=Xn+an1Xn1+. . . +a1X+a0et αracine de P. On a :
|αn|=|
n1
P
i=0
aiαi| ≤
n1
P
i=0
|ai|.|α|i
Si |α| ≥ 1, en divisant par |α|n1des deux côtés, on a : |α| ≤
n1
P
i=0
|ai|.|α|i(n1). Comme in1,
et |α| ≥ 1, on a |α|i(n1) 1et donc si |α| ≥ 1, on a |α| ≤
n1
P
i=0
|ai|. Pour toute racine αde P,
on a donc |α| ≤ max(1,
n1
P
i=0
|ai|). Ainsi, en prenant x0>max(1,
n1
P
i=0
|ai|)on a x0>|α| ≥ α.
On peut également démontrer le résultat suivant mais qui est moins fort que le résultat précédem-
ment invoqué, la convergence géométrique étant moins rapide que la convergence quadratique.
Cependant il est important de savoir que la convergence de la méthode de Newton pour les
polynômes est meilleure, dans le cas où le polynôme est à racines simples. On a en effet :
Remarque 2. Si mr= 1,c > 0, xnαr=o(cn)
Démonstration. On suppose mr= 1, montrons que c > 0, xnαr=o(cn). Comme mr= 1, on
af0(αr)=0. Soit nN,fétant continue sur [αr, xn], dérivable sur ]αr, xn[, par le théorème
des accroissements finis :
yn]αr, xn[,(xn+1 αr) = f(xn)f(αr) = f0(yn)(xnαr)
Comme lim
n→∞ xn=αr, par encadrement, on a aussi lim
n→∞ yn=αret f0admettant une limite à
droite en αr, on a :
lim
n→∞ f0(yn) = f0(αr)=11
mr
= 0
En particulier :
c > 0,NN,nN, |f0(yn)|=f0(yn)c
Ainsi, pour cfixé et nNon a : (xn+1 αr) = f0(yn)(xnαr)c(xnαr). Par une récurrence
immédiate, on a donc pour nN:
(xnαr)cnN(xNαr) =(xnαr)
cn1
cN(xNαr)
et (xnαr) = O(cn)et ceci pour tout c > 0. Ainsi, quitte à prendre d<c, on a :
(xnαr) = O(dn)dn=o(cn) =(xnαr) = o(cn)pour tout c > 0.
Référence : Chambert-Loir.
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