30 Chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire 2015 ; 19(1) : 27-31
S. Guinard et al. | Chirurgie des cancers pulmonaires : lobectomie mini-invasive versus lobectomie par thoracotomie
nécessité d’instauration d’une anticoagulation et de la cardio-
version pharmacologique. La survenue moins importante de
trouble du rythme pourrait être liée à une diminution du re-
largage des cytokines et d’autres médiateurs de l’inflammation
après lobectomie par VATS en comparaison à la thoracotomie
[15,16].
Nous n’avons par ailleurs pas noté de supériorité de la VATS pour
ce qui était des autres complications respiratoires et cardio-
vasculaires étudiées. Cependant, Chen et al. [8] dans leur méta-
analyse portant sur 20 études concluaient à un taux significa-
tivement plus faible de pneumopathies dans le groupe VATS.
Ces résultats sont concordants avec ceux de Cao et al. [6] qui
trouvaient aussi, dans leur méta-analyse portant sur 7 études,
un taux plus faible de pneumopathies, ainsi qu’un taux signifi-
cativement moins important d’arythmie cardiaque par fibrilla-
tion auriculaire dans le groupe VATS. Par ailleurs, aucune des
méta-analyses ne concluaient à un eet positif de la lobecto-
mie par VATS sur les autres complications cardiovasculaires ou
respiratoires.
Nous avons noté un taux significativement plus important de
sampling ganglionnaire dans le groupe VATS. Ceci pourrait s’ex-
pliquer partiellement par le caractère récent de l’utilisation de la
VATS en France et de la courbe d’apprentissage nécessaire à la
réalisation d’un curage complet par cette voie. Cependant, cela
ne préjuge en rien de la qualité du curage réalisée par VATS. En
eet, la base de données Epithor® ne permet pas de connaître
le nombre de ganglions prélevés et ne permet donc pas de
comparaison sur ce point entre VATS et thoracotomie. Cepen-
dant, de nombreuses études ont montré qu’un curage com-
plet pouvait être aussi bien réalisé par VATS. Ainsi, Sagawa et al.
[17] évaluaient le nombre de ganglions restant après curage par
VATS en réalisant immédiatement après la lobectomie VATS une
thoracotomie, et ne trouvaient que 2 à 3% de ganglions restant.
De la même façon, pour Scott et al. [18], le nombre moyen de
ganglions prélevés dans les deux techniques était identique.
Nous avons également mis en évidence une durée d’hospitalisa-
tion significativement réduite après VATS lobectomie : 9,53 jours
versus 11,59 jours dans le groupe thoracotomie (p <0,001). En
2008, la méta-analyse de Whitson et al. [3] montrait également
une durée d’hospitalisation réduite dans le groupe VATS à 8,3
jours versus 13,3 jours pour la thoracotomie (p=0,016), en ac-
cord avec la méta-analyse très récente de Chen et al. [8]. Ceci est
concordant avec de nombreuses autres études et semble être
étroitement lié à la réduction de la durée de drainage et la sur-
venue moins fréquente de troubles du rythme cardiaque [5,6,8].
Dans ce travail nous n’avons pas observé de diérence signi-
ficative en terme de mortalité postopératoire entre les deux
groupes (1,1 % pour le groupe VATS versus 1,6 % pour le groupe
thoracotomie, p=0,39). Ces résultats sont concordants avec
ceux de Paul et al. [5], qui objectivent dans leur étude une
mortalité de 1,01 % dans le groupe VATS versus 0,94 % dans
le groupe thoracotomie (p = 1). En revanche, ces données
n’étant pas exhaustives, nous n’avons pas pu étudier la survie
à long terme. Cependant, selon plusieurs études récentes, la
lobectomie VATS serait supérieure en terme de survie à long
terme [3,7-9,12,13]. En eet, dans une revue systématique de
39 études comparant VATS et thoracotomie, Whitson et al. [3]
rapportaient une survie à 4 ans supérieure pour le groupe VATS
(88,4% versus 71%, p=0,003). Les méta-analyses de Yan et al.
[7] et Chen et al. [8] concluaient quant à elles à une survie à 5
ans significativement plus importante pour le groupe VATS.
Notre étude présente plusieurs limites qu’il convient de noter.
Les patients du groupe VATS étaient globalement en meilleure
santé et présentaient une pathologie à un stade moins avancé,
pouvant ainsi biaiser l’interprétation de la morbimortalité post-
opératoire. De plus, l’intégration à la base de données Epithor®
reposant sur le volontariat, tous les centres de chirurgie thora-
cique français n’y participent pas et ne contribuent pas avec la
même proportion à l’implémentation de la base de données, ce
qui expose notre étude à un eet centre. Par ailleurs, il est im-
portant de noter qu’il est impossible de dire à partir de la base de
données Epithor® quel est le pourcentage de VATS convertie en
thoracotomie. De plus jusqu’au début de l’année 2014, il n’était
pas possible lors de la saisie des données dans Epithor® d’indi-
vidualiser les lobectomies réalisées par VATS de celles réalisées
par thoracotomie vidéo-assistée. La nuance peut paraître subtile
mais est bien réelle. En eet la lobectomie par thoracotomie vi-
déo-assistée nécessite la réalisation d’une minithoracotomie as-
sociée à l’utilisation d’un écarteur en plus des orifices de trocarts.
5. CONCLUSION
Entre 2003 et 2012, la pratique de la lobectomie par VATS pour
les CBNPC de stade I ou II a augmenté de façon importante en
France, passant de 0,7 % à 15 % des pratiques chirurgicales. En
accord avec la littérature, la VATS semble associée à une réduc-
tion de la survenue de complications postopératoires ainsi qu’une
diminution de la durée d’hospitalisation, sans augmentation de la
mortalité. Ainsi, du fait de ces avantages et des résultats carcino-
logiques identiques à ceux de la chirurgie ouverte, la lobectomie
par VATS semble s’inscrire comme la stratégie la plus adaptée
pour les patients présentant un CBNPC de stade précoce.
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