Rev Med Brux - 2012
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La surface valvulaire aortique normale est de
3,0 à 4,0 cm2. Le gradient valvulaire reste minime tant
que la surface valvulaire n’a pas diminué de moitié.
L’évolution naturelle de la sténose aortique présente
donc une longue phase asymptomatique.
Une sclérose aortique devient sténose lorsque la
vitesse du jet dépasse 2,5 m/s, ce qui correspond à un
gradient maximum de 25 mmHg. Le degré d’obstruction
augmente progressivement. Le ventricule s’adapte en
développant une hypertrophie concentrique.
La plupart des patients conservent longtemps
une fonction systolique normale et les symptômes
n’apparaissent en général pas au-dessus de 1 cm2,
voire moins.
Nous nous intéresserons ici spécifiquement à la
sténose aortique valvulaire calcifiée du sujet âgé,
qu’elle soit la conséquence de la dégénérescence d’une
valve normale, tricuspide ou d’une valve congénitale-
ment bicuspide, ou plus rarement unicuspide.
DIAGNOSTIC
L’interrogatoire et l’examen physique sont à la
base du diagnostic.
La triade symptomatique classique comporte la
défaillance cardiaque, la syncope et l’angine de
poitrine, en relation avec l’effort. L’intolérance à l’effort
et la dyspnée d’effor t sont les symptômes qui
apparaissent le plus précocement.
Ces symptômes sont aspécifiques, et il est tout
aussi important de bien reconnaître ceux qui sont
attribuables à la sténose que d’éviter d’attribuer à la
maladie des symptômes liés à une autre pathologie.
L’examen physique est souvent peu contributif.
On retiendra bien sûr le souffle systolique (parfois peu
intense) et la disparition du second bruit (signe
spécifique de la sténose sévère, mais peu sensible8).
L’échocardiographie-Doppler est l’examen
diagnostique clé. Il confirme le diagnostic, analyse la
morphologie valvulaire, les calcifications, la fonction
ventriculaire gauche, l’épaisseur pariétale. Il apporte
des informations pronostiques9. L’examen permet de
préciser la sévérité de la sténose10. Le gradient
transvalvulaire étant dépendant du flux, la mesure de
la surface est à préférer. Cette mesure de surface est
cependant, plus que les mesures de gradient, entachée
d’imprécisions en clinique courante. La prise de
décision doit donc intégrer, outre la mesure de surface,
une évaluation du débit, du gradient de pression, de la
fonction ventriculaire, mais aussi de la capacité
fonctionnelle du patient. Une surface de moins de
1,0 cm2 est considérée comme sévère (chez les
patients de surface corporelle inhabituelle, utilisation
de la surface indexée à 0,6 cm2/m2). En présence d’un
débit normal, une sténose sévère est peu probable si
le gradient moyen est < 50 mmHg. Même en cas de
bas débit, un gradient < 40 mmHg doit mettre en
question le diagnostic. L’échocardiographie sous
dobutamine permettra de distinguer la sténose aortique
sévère (augmentation de la surface de moins de
0,2 cm2 sous dobutamine, avec augmentation du
gradient à plus de 50 mmHg) de la pseudo-sténose
aortique sévère (augmentation significative de la
surface sous dobutamine, avec peu de modification du
gradient). L’échocardiographie sous dobutamine
détecte aussi la présence d’une réserve contractile
(augmentation du volume systolique de plus de 20 %
sous faible dose de dobutamine), ce qui a une
implication pronostique11-13.
L’électrocardiogramme peut montrer des signes
nets d’hypertrophie ventriculaire gauche et d’ischémie
sous-endocardique. Ces anomalies sont aspécifiques
et un électrocardiogramme normal ne permet pas
d’exclure une sténose aortique sévère.
L’épreuve d’effort est contre-indiquée chez le
patient symptomatique. Chez le patient asymptoma-
tique, elle permet de démasquer des sténoses pseudo-
asymptomatiques et de stratifier le risque14,15.
La mesure du Brain Natriuretic Peptide (BNP)
est en relation avec la survie sans symptôme16. Son
rôle dans la détermination du moment opportun du
remplacement aortique n’est pas établi. Son dosage
permet d’aider à confirmer l’origine cardiologique d’une
dyspnée.
Le cathétérisme n’est plus que rarement utile. Il
peut comporter des risques, notamment emboliques17.
HISTOIRE NATURELLE
La sténose aortique est une maladie chronique,
qui demeure longtemps asymptomatique18-20.
La mort subite, décrite chez le patient
symptomatique, est rare chez le patient asymptoma-
tique (< 1 %/an). Le risque augmente de façon
significative chez le patient symptomatique. Le
mécanisme n’est pas établi. On évoque des anomalies
au niveau des baro réflexes, avec hypotension et
bradycardie ou des arythmies ventriculaires malignes.
Le risque est amélioré par le remplacement valvulaire21.
Les arythmies telles la fibrillation atriale (FA) et
les tachycardies ventriculaires sont liées à l’évolution
vers la défaillance cardiaque. La perte de la contraction
atriale liée à la FA peut être particulièrement délétère.
Le risque d’endocardite semble moins important
chez le patient âgé présentant une sténose sévèrement
calcifiée. Il n’est plus recommandé de prescrire une
prophylaxie antibiotique.
Lors de l’apparition de symptômes, le pronostic
se dégrade rapidement22,23.
Les facteurs de mauvais pronostic chez le patient