CHIMIE pour Biologie 2 1. Structures et formules des molécules organiques 2. Effets électroniques 3. Mécanismes réactionnels 4. Les fonctions et leur réactivité Mécanismes en chimie organique : introduction 1. Les règles d’écriture des mécanismes L’étude des mécanismes réactionnels en chimie organique est fondamentale. Nous verrons par la suite la signification des symboles utilisés pour la représentation des mécanismes. a. Les différentes flèches L’écriture des mécanismes réactionnels fait intervenir différentes flèches qui ont des significations bien précises. Ces flèches se dirigent toujours du (–) vers le (+). Elles partent d’un doublet ou d’une liaison, mais, en principe, pas des charges figurées sur les atomes. Symbole Dénomination Signification/usage Utilisation Flèche courbe pointe normale Déplacement de deux électrons Mésomérie Mécanisme de réaction Flèche simple Relie deux molécules ou intermédiaires réactionnels Réaction Double flèche Relie deux molécules ou intermédiaires réactionnels Réaction réversible Flèche courbe pointe hameçon Déplacement d’un électron Mésomérie Mécanisme de réaction Flèche à double pointe Relie deux formes mésomères limites Mésomérie ou 2 b. exemples O H2C O CH3 H2C O Me Me • • • • N CH3 • Deux formes mésomères limites • Aucune rupture de liaison • Seulement un déplacement d’électrons + H Me O O Me CH3 Me N H + O Me CH3 Réaction équilibrée, réversible, symbolisée par une double flèche Réaction acido-basique Formellement, l’atome d’azote “prête” un électron à un proton dépourvu d’électron En établissant la liaison N–H, la liaison O–H se rompt (rupture hétérolytique), les deux électrons de la liaison sont récupérés par l’atome d’oxygène N NC N CN N N + 2 CN AIBN • AIBN (initiateur radicalaire) : double rupture homolytique • Réaction irréversible symbolisée par une simple flèche • Les deux électrons récupérés par chacun des deux atomes d’azote permettent d’établir une 3 liaison π entre les deux atomes, formant du diazote particulièrement stable Rupture des liaisons Deux modes de rupture d’une liaison covalente: Déplacement d’un seul électron (demie-flèche) Homolytique Hétérolytique Hétérolytique (liaison polarisée) H H H H H H+ + Y- + δ+ A δB + H H- Y A + B- Déplacement d’une paire d’électrons Différents types de réaction • substitution: un groupe en remplace un autre • addition: les éléments des réactifs se trouvent dans le produit Différents types de réaction • élimination: un composé perd les éléments d’une petite molécule • réarrangement: une molécule subit une réorganisation de ses groupements Différents types de réaction Réactions acide-base (Bronsted et Lewis) H O H O CH3 CH3 H CH3 BH3 + O H CH3 B H CH3 O CH3 Carbocations et carbanions • générés lors de la rupture hétérolytique des liaisons incluant le carbone : − δ+ δ C X C+ X- Carbocation 6 électrons : charge positive + δ− δ C Y C - Y+ Carbanion 8 électrons : charge négative Carbocations et carbanions • carbocations: acides de Lewis; réactifs électrophiles • carbanions : bases de Lewis; réactifs nucléophiles C + δ+ δ C X C C + X- Carbocations et carbanions Flèches incurvées: • indiquent la direction du mouvement des électrons dans une réaction • partent d’une paire d’électrons • aboutissent à un site déficient en électron • la flèche indique la formation ou la rupture d’une liaison • n’indiquent pas le déplacement des atomes !! Carbocations et carbanions Carbocation : Espèce dont un carbone porte une lacune électronique. Ne vérifie pas la règle de l’octet, donc espèces peu stables et très réactives. La présence de la lacune électronique leur confère un fort caractère électrophile. La géométrie peut être prédite par la théorie VSEPR Trois liaisons issues du carbone central, AX3, sont coplanaires Le carbocation présente une structure trigonal plane: C Carbocations et carbanions Stabilité du Carbocation: Stabilisé par tout groupe exerçant un effet électronique donneur (+I, +M). Les effets électroniques attracteurs augmentent encore plus le déficit électronique du carbone lacunaire et déstabilisent fortement l’espèce. Carbocations et carbanions Carbocation et stabilité la stabilité d’un carbocation augmente avec le degré de substitution du carbone, c’est-à-dire avec le nombre de groupe alkyle qu’il porte. Carbocations et carbanions Carbanion Espèce dont un carbone porte un doublet non liant. La présence de ce doublet leur confère un fort caractère nucléophile. La géométrie peut être prédite par la théorie VSEPR : Trois liaisons issues du carbone central + 1 doublet libre, AX3E, tétraèdrique. C Carbocations et carbanions Carbanion : stabilité Stabilisé par tout groupe exerçant un effet électronique attracteur. Par contre, les effets électroniques donneurs augmentent encore plus l’excès d’électrons et déstabilisent fortement l’espèce. Carbocations et carbanions Carbanion : stabilité La présence du doublet non liant, volumineux, sur l’atome de carbone rend difficile la formation d’un carbanion fortement substitué. De façon générale, la stabilité diminue avec le degré de substitution du carbone. Radical libre Radical libre: Entité neutre dont un carbone porte un électron célibataire. Très réactif, il intervient dans les mécanismes radicalaires (combustion, polymérisation radicalaire du styrène, …). Les radicaux libres sont quasi-plans. C Radical libre Radical libre et stabilité La stabilité relative des radicaux libres est semblable à celle des carbocations: - ils sont stabilisés par tout effet électronique qui tend à délocaliser l’électron célibataire - par l’augmentation du degré de substitution du carbone Mécanismes Réactions de substitutions Substitutions Nucléophiles ( SN ) X A + Nu A Nu + X Mécanismes Réactions de substitutions NUCLEOPHILE NUCLEOFUGE Substitutions Nucléophiles ( SN ) X A + Nu A Nu + X Mécanismes Réactions de substitutions Substitutions Nucléophiles ( SN ) X A + δ− δ+ Cl CH3 Nu + Na+OH- A H3C Nu + X OH + Na+Cl- Mécanismes Réactions de substitutions Substitutions Nucléophiles ( SN ) X A + δ− δ+ Cl CH3 Nu + Na+OH- A H3C Nu + X OH + Na+Cl- Mécanismes Réactions de substitutions Substitutions Electrophiles ( SE ) ELECTROFUGE ELECTROPHILE Mécanismes Réactions de substitutions Substitutions Radicalaires ( SR) X A + Y A Y + X Mécanismes Réactions d’additions Additions Nucléophiles ( AN ) Mécanismes Réactions d’additions Additions Electrophiles ( AE ) R CH CH2 + E E R CH CH2 - Nu Nu E R CH CH2 Réactions des halogénures d’alkyles: substitution nucléophiles et éliminations • Les halogénures d’alkyles sont polarisés au niveau de la liaison carbone-halogène; le carbone est électrophile • Un Nucléophile va remplacer l’halogène de la liaison C-X (réaction avec une base de Lewis) Réactions des halogénures d’alkyles • Si le Nucléophile est une base, il y a une élimination Réactions des halogénures d’alkyles Substitution vs Elimination Réaction d’élimination • L’élimination est une alternative à la substitution • Formellement, l’élimination est l’opposé de l’addition et génère un alcène • Une compétition est possible avec la SN Elimination Règles de Zaïtsev Lors de l’élimination de HX à partir d’un halogénure d’alkyle, l’alcène le plus substitué est formé. A. M. Zaitsev (1841-1910) Elimination Classification des réactions - Bilan global- Différentes manières de couper ou former une liaison Coupure homolytique Coupure hétérolytique Réaction Radicalaire (demi-flèches !!) Réaction Polaire ionique (flèches entières!!) Ecrire un mécanisme de réaction - Une flèche indique le ‘mouvement’ de deux électrons - La queue de la flèche indique la source de la paire d’électrons (charge négative, doublet non liant, double liaison) - La tête de la flèche indique la destination de la paire d’électrons - Une flèche est une liaison que l’on crée (ou casse) - Le nombre de charge total est inchangé! Nucléophiles et électrophiles Un nucléophile concède des électrons Identifier un Nu-: - Charge négative - Doublet non liant - Double liaison Un électrophile accepte des électrons Identifier un E+: - Charge positive - Orbitale vide - Double liaison polarisée ( par ex. C=O) La substitution nucléophile unimoléculaire SN1 Rappel: Substitution nucléophile = Un nucléophile riche en électrons (Nu) réagit avec une molécule électrophile, possédant un atome de carbone tétragonal appauvri en électrons, du fait de la présence d’un groupe partant (GP). Nu constitue le “groupe entrant” qui se lie au carbone électrophile en formant une nouvelle liaison C–Nu, entrainent ainsi le départ du GP (également appelé nucléofuge). – Nu Nucléophile + δ+ C GP Nu C – + GP Groupe partant = nucléofuge Electrophile a. Faits expérimentaux Ø Aspect cinétique Le 2-bromo-2-méthylpropane réagit avec l’eau pour conduire au 2-méthylpropan-2-ol : CH3 H OH + H3C C Br CH3 CH3 H3C C OH CH3 SN1 + HBr Substitution C’est une réaction de SN où l’eau est le nucléophile et l’ion bromure, le groupe partant. La vitesse observée ne dépend que de la concentration initiale en bromoalcane. Cette réaction est appelée substitution nucléophile monomoléculaire Monomoléculaire Nucleophile 37 Ø Aspect stéréochimique La réaction du (S)-1-iodo-1-phényléthane, énantiomériquement pur, avec le méthanol (CH3OH) conduit à la formation d’un mélange racémique. Ph + H3CO H H H3C Ph H H3C I (S)-1-iodo-1-phényléthane Ph OCH3 + H3CO 50% (S) H CH3 + HI 50% (R) racémique b. Mécanisme Un mécanisme en deux étapes, mettant en jeu la formation d’un carbocation intermédiaire, permet d’expliquer les faits expérimentaux décrits précédemment : δ+ δ− R GP 1ère étape : formation d'un carbocation, étape déterminant la vitesse globale (étape cinétiquement déterminante) C GP lent C + étape cinétiquement déterminante (Ea la plus grande) – GP R 2ème étape : réaction du nucléophile C + – Nu rapide C Nu R–GP + Nu R–Nu + GP Avancement de la réaction • Le carbocation intermédiaire est plan • Le nucléophile peut ainsi arriver indifféremment sur l’une ou l’autre face • Ainsi, la SN1 s'accompagne d’une racémisation de l’atome de carbone stéréogène du substrat Nu R1 R2 R1 – Nu R3 R3 R3 R1 R2 énantiomères R2 Nu La substitution nucléophile bimoléculaire SN2 a. Faits expérimentaux Ø Aspect cinétique Le chlorométhane réagit avec l’hydroxyde de sodium pour conduire au méthanol : SN2 Na OH + H3C Cl H3C OH + Na Cl Substitution bimoléculaire Nucleophile La vitesse observée dépend des concentrations de CH3Cl et HO– L’étape cinétiquement déterminante met donc en jeu les deux composés et sera appelée SN2 ou substitution nucléophile bimoléculaire. Ø Aspect stéréochimique H Na I + H Br + I Me Et (S)-2-bromobutane NaBr inversion de configuration EtMe (R)-2-iodobutane • La nouvelle liaison est créée de façon opposée à celle qui est rompue • Il y a inversion de configuration de l’atome de carbone asymétrique du substrat • La SN2 est qualifiée de stéréospécifique b. Mécanisme • Une seule étape • L’approche du nucléophile se fait à l’opposé du groupement partant (raisons stériques et orbitalaires) • Conduit à l’inversion de configuration observée expérimentalement dans le cas ci dessous – Nu + R1 E GP une étape R2 R3 H Nu + – GP [ET] étape cinétiquement déterminante EtMe R1 Etat de transition Nu GP [ET] R2 R3 la liaison se forme la liaison se rompt R–GP + Nu R–Nu + GP Avancement de la réaction L’élimination E1 Rappel: Elimination = une molécule perd certains de ces atomes sous forme d’entités stables, et il en résulte la création d’une liaison supplémentaire. L’élimination E1 présente une réelle analogie avec la réaction SN1 : • Réaction unimoléculaire, composée de deux étapes élémentaires • La première étape est lente (cinétiquement déterminante). Elle conduit à l’expulsion d’un groupe partant (GP) pour former un carbocation stabilisé • La deuxième étape est rapide : perte de proton sur le carbone adjacent au carbocation pour former une double liaison GP étape 1 C C lente H étape 2 C C H – + GP + H rapide δ− GP étape cinétiquement déterminante δ+ C C H E C δ+ C δ+ H Ea GP C C H C C H carbocation stabilisé – + GP + H Avancement de la réaction 41 L’élimination E2 Par bien des aspects l’élimination E2 est comparable à la substitution SN2, seuls les produits sont différents. Ces deux réactions sont souvent concurrentes. • Réaction bimoléculaire, composée de d’une seule étape élémentaire • L’expulsion du GP est simultanée avec la déprotonation par la base selon un processus concerté • La base arrive à proximité d’un proton porté par le carbone adjacent disposé de manière antiparallèle à la liaison du GP GP – GP Base B – + GP + B–H C C H C C H – B δ– GP C E H C Bδ – étape cinétiquement déterminante Ea GP C C H – + GP + B–H Avancement de la réaction 42