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UE Système Neurosensoriel Pharmacologie 25/03/2014
Cours dispensé par le Dr LEMAITRE Florian
BERKANE Yanis & GROUSSARD Geoffrey
PHARMACOLOGIE DES ANTIDEPRESSEURS,
ANTIPSYCHOTIQUES ET TROUBLES DE
LHUMEUR
Partie 1 : Les antidépresseurs
I. Définitions
Les antidépresseurs sont indiqués pour des troubles dits purs, c’est-à-dire sans pathologie sous-jacente
impliquant des troubles de types schizo-affectifs, délires ou autres troubles psychotiques. Leur principale
indication est l’épisode dépressif majeur (classification DSM-V), dont la durée moyenne s’étend entre 6 à 12
mois. Par ailleurs, les antidépresseurs sont aussi prescrits pour des :
- Troubles anxieux (phobies sociales, TOC, anxiété généralisé)
- Troubles du comportement alimentaire
- Troubles neurologiques (comme certaines douleurs chroniques sans étiologie distincte)
Dépression et biologie
La dépression n’est pas une pathologie très bien définie. Il existe plusieurs hypothèses à ce sujet, avec peu
de certitudes. Certaines personnes s’accordent à dire que la cause principale est une baisse de la
neurotransmission monoaminergique : Noradrénergique, Sérotonergique et Dopaminergique. Toutefois, il
est observé chez certains sujets sains, des carences en monoamines sans dépression associée. L’hypothèse
selon laquelle le taux de naissance de nouveaux neurones (ou neurogenèse) dans l’hippocampe pourrait
avoir un lien avec la dépression est encore jeune. Il demeure toutefois difficile d’ignorer certains faits qui
s’accumulent et convergent vers un rôle pour la neurogenèse dans la dépression :
- Le stress, souvent à l’origine d’une dépression, diminue la neurogenèse dans l’hippocampe.
- Les antidépresseurs qui améliorent l’humeur des patients ont pour effet, pour leur part, d’augmenter
le taux de naissance de nouveaux neurones hippocampiques.
Historique des traitements :
- Années 30 : Les électrochocs via électrodes (sismographie) permettaient une libération de
monoamines. Aujourd’hui, cette technique est toujours utilisée pour traiter les formes
pharmacorésistantes.
- 1951 : Mise au point de lIproniazide, antituberculeux améliorant l’humeur de manière fortuite, lié à un
effet IMAO.
- 1957 : Arrivée de lmipramine, dérivé de la Chlorpromazine, premier antipsychotique mais qui connait
un franc succès contre la mélancolie.
II. Classes thérapeutiques
A. Les inhibiteurs de recapture
Les antidépresseurs tricycliques
Aussi appelés imipraminiques, ce sont des inhibiteurs non-spécifiques de la recapture de la noradrénaline et
de la sérotonine : Imipranine (Tofranil®), Clomipranine (Anafranil®). N’étant pas spécifiques, ils entrainent des
effets pharmacologiques latéraux (effets secondaires) de type antagonisme histaminergique (H1),
cholinergique (M1) et adrénergique (α1). Ils sont indiqués pour lapression, certains TOCs et dans des cas
d’énurésie (miction nocturne).
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Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (IRSS)
Aujourd’hui, c’est la classe de traitement de 1ère intention en ambulatoire (les plus prescrits). Les IRSS sont
un peu moins efficaces que les imipraminiques mais en général beaucoup mieux tolérés par les patients. Leur
rôle est d’empêcher la recapture de la sérotonine par inhibition de certains transporteurs spécifiques. Les
molécules les plus connues étant la Fluoxétine (Prozac®) et le Citalopram (Séropram®) dont l’action est la
seule vraiment sélective des récepteurs à la sérotonine. A forte dose, la Sertraline (Zoloft®) a tendance à
bloquer les récepteurs à la dopamine, ce qui constitue un des principaux effets indésirables. De manière
générale la plupart de ces molécules entrainent des effets latéraux : effets indésirables extrapyramidaux et
anticholinergiques.
Les antidépresseurs à effet dual (IRSN)
Ils sont spécifiques des récepteurs de la rotonine et de la noradrénaline : Duloxetine (Cymbalta®), ils sont
donc plus efficaces que les IRSS. Les IRSN ne possèdent aucune affinité pour les récepteurs cholinergiques,
histaminergiques, dopaminergiques et adrénergiques. Ils n’ont pas d’action post-synaptique directe.
B. Autres mécanismes d’action
Les inhibiteurs de la Monoamine oxydase
- Les irréversibles et non sélectifs (IMAO A-B) : Ils sont dit irréversibles car leur effet ne s’estompe
qu’après la resynthétisation de la protéine cible. Ils ne sont plus beaucoup utilisés, un peulicats à
manier et possédant beaucoup d’effets indésirables liés à l’inhibition de la Monoamine B (non
sélectifs), bloquant le métabolisme de la Tyramine et pouvant engendre une hypertension fulminante.
- Les réversibles et sélectifs (IMAO A) : Ils sont sélectifs de la Monoamine-oxydase A (Moclobémide)
mais nécessitent souvent un ajustement à la hausse de leurs doses, entrainant une perte de leur
sélectivité.
Les atypiques
Ils agissent directement sur des récepteurs : antagonisme des récepteurs α2 pré-synaptique, 5-HT2A, 5-HT2C,
5-HT3 et H1 (effet sédatif). Les molécules concernées sont la Miansérine (Athymil®), la Tianeptine (Stablon®)
et la Mirtazapine (Norset®). La conséquence principale étant l’augmentation de la concentration synaptique
en sérotonine et en noradrénaline. L’Agomélatine (Valdoxan®) possède une action sur les récepteurs à la
mélatonine (MT) et de ce fait, elle est régulatrice des rythmes biologiques (effets sur les troubles de l’humeur).
III. Mécanismes d’action
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Pour ces classes, le traitement aboutit à une augmentation de la concentration de la sérotonine et de la
noradrénaline dans la fente synaptique.
La Mirtazapine (antidépresseur
atypique) quant à elle, bloque les
récepteurs (feedback) ayant un
effet inhibiteur (dont 5HT2) sur la
libération de monoamine et
active les récepteurs ayant un
effet activateur.
IV. Délai d’action des antidépresseurs
Quelle que soit la classe, les antidépresseurs n’ont pas d’action immédiate. Un délai de deux semaines est
généralement nécessaire pour voir apparaitre les premiers effets des traitements. Cette observation est
réalisée sur le fait que la désensibilisation des autorécepteurs présynaptiques (feedback inhibiteurs) nécessite
un certain temps.
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V. Les effets indésirables
A. Prévisibles : liés aux effets pharmacologiques principaux ou
latéraux
Les effets latéraux liés au résultat thérapeutique recherché, soit une augmentation de la noradrénaline et de
la sérotonine, sont :
- Réactivations anxieuses ou délirantes
- Inversion de l’humeur, voire un état maniaque
- Majoration du risque suicidaire par levée de l’inhibition : l’antidépresseur améliore d’abord les
fonctions motrices avant d’agir au niveau psychique pour contrer la dépression, d’où la levée
d’inhibition. Ce décalage peut engendrer un risque de passage à l’autolyse, les idées suicidaires étant
toujours présentes après le retour à la normal des capacités motrices pour le faire.
- Syndrome sérotoninergique (d’où une association pour les IRSS).
- Paroxysmes hypertensifs : le « cheese effect », pour les IMAO non sélectifs.
- Abaissement du seuil épileptogène.
- Prise de poids et dysfonctionnements sexuels : attention à l’observance chez certains patients qui
arrêteraient leur traitement pour ce type d’effets.
Certains effets indésirables sont liés à la stimulation de récepteurs sérotoninergiques :
- 5HT3 : ils peuvent entrainer des troubles gastro-intestinaux, nausées et vomissements (pharmacologie
des antiémétiques).
- 5HT2 : ils entraient une agitation et une akathisie (agitation physique importante).
Les autres effets latéraux résultent d’interactions présentant des propriétés
- Anticholinergiques :
Les syndromes confusionnels
Sècheresse buccale
Constipation
Mydriase
Rétention urinaire
Effets cardiovasculaires (arythmies, troubles de la conduction, tachycardie) : risque létal chez les
personnes âgées, surtout avec les tricycliques.
- Antihistaminiques (anti-H1) : sédation.
- α1 adrénolytique :
Hypotension orthostatique
Sédation
Tachycardie réflexe
Tous ces effets indésirables en font certains critères de choix pour la classe d’antidépresseurs à utiliser.
B. Imprévisibles
L’Iproniazide (IMAO A-B) peut entrainer des risques d’hépatites cytolytiques graves (immunoallergie), dont
l’effet dépendra de chaque type de patient, soit non-prévisible.
VI. Contre-indications :
En vue de tous ces effets latéraux de l’utilisation des antidépresseurs, certains seront donc à proscrire. C’est
le cas d’un Imipraminique, contre indiqué en cas de :
- Glaucome par fermeture d’angle
- Hypertrophie prostatique
- Insuffisance cardiaque
- Antécédents cardiovasculaires.
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Par ailleurs, l’association IRS-IMAO est formellement contre-indiquée (syndrome sérotoninergique), ainsi que
l’utilisation d’un IMAO avec des tricycliques et certains anesthésiques.
Précautions d’emploi
L’emploi d’anxiolytiques permet d’éviter la levée de l’inhibition et les troubles suicidaires liés à l’utilisation
d’antidépresseurs. De plus, une attention particulière est à porter dans le cas de virage maniaque ou de
patient épileptique (baisse seuil épileptogène).
VII. L’intoxication aigue
La dépression est une pathologie potentiellement mortelle (15% de suicides réussis…). Le surdosage en
tricycliques est irréversible et provoque des troubles :
- Neurologiques : troubles de la conscience, coma, convulsions…
- Cardiaques : troubles du rythme, troubles de la repolarisation, troubles de la conduction.
VIII. Choix d’un antidépresseur
En première intention, le choix se porte sur les molécules les mieux tolérées, soit les inhibiteurs sélectifs
(sérotonine et noradrénaline) ou atypiques. Les IMAO n’interviendront qu’en deuxième ou troisième intention.
Les épisodes avec caractéristiques psychotiques (mélancolie délirante…) pourront être traités par
l’association antidépresseur et antipsychotique (éviter la levée de l’inhibition).
Le délai d’apparition de l’amélioration des symptômes :
- Quelques jours pour l’anxiété et le sommeil.
- 1 à 2 semaines pour les troubles moteurs.
- 2 à 4 semaines pour l’humeur proprement dite.
L’efficacité d’un traitement se mesure sur une durée de 3 à 6mois minimum. Le changement de classe peut
être efficace en cas de résistance, mais l’association d’antidépresseurs est à proscrire.
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