commentaire

publicité
COMMENTAIRE
Services économiques TD
24 février 2012
UN DOLLAR CANADIEN FORT, MAIS PAS IMMUABLE
Faits saillants
• La fermeté des prix des produits de base, la situation budgétaire relativement saine du Canada et
un écart grandissant entre les taux d’intérêt canadiens et américains devraient maintenir le huard
au-dessus de la parité avec le billet vert à moyen terme.
• Toutefois, la volatilité des dernières années devrait se poursuivre, le dollar canadien demeurant
vulnérable à toute détérioration possible de la confiance des marchés au cours des prochains mois.
• Notre scénario de base prévoit que le dollar canadien fluctuera entre 0,94 $ US et 1,05 $ US au
cours des deux ou trois prochaines années.
La montée soutenue du dollar canadien depuis la dernière récession a mis au rancart l’hypothèse
d’un retour à un taux de change de 0,65 $ US à 0,75 $ US. En effet, les investisseurs en devises ont tenu
compte de la force relative des données fondamentales de l’économie canadienne sur lesquelles repose
le huard. En 2011, en dépit de la volatilité importante des marchés, la valeur moyenne du dollar canadien
a été supérieure à celle du dollar américain pour la première fois depuis 1976. Au cours des prochains
mois, nous croyons que le huard risque de reculer légèrement pour se situer aux alentours de 0,94 $ US.
Toutefois, cette période de faiblesse relative ne devrait pas durer.
Les Services économiques TD s’attendent à ce que les données macroéconomiques fondamentales
appuient la vigueur continue du dollar canadien au cours des deux ou trois prochaines années. La fermeté
des prix des produits de base, l’écart croissant entre les
taux d’intérêt canadiens et américains ainsi que la situa- TABLEAU 1 - PERPECTIVES POUR LE DOLLAR CANADIEN
tion budgétaire relativement saine du Canada devraient FACTEURS
INCIDENCE PRÉVUE
porter le huard à 1,05 $ US d’ici la fin de 2013. Il s’agit MACROÉCONOMIQUES
C. TERME*
L. TERME
d’une valeur inférieure au sommet d’avant la crise Prix des produits de base**
+
financière, mais tout près de la limite supérieure de la Ratiodettepublique/PIB**
+
+
fourchette d’après-crise.
Croissance et productivité
-
-
Les produits de base : rois de la croissance
canadienne
Déficit du compte courant
-
+
Flux de capitaux à c. terme
+
À déterminer
De nombreux facteurs macroéconomiques influencent les taux de change (le tableau 1 les résume),
mais dans le cas du dollar canadien, certains sont plus
importants que d’autres. Les prix des produits de base
continuent de dicter le comportement du dollar canadien. En termes simples, les prix des produits de base
sont importants, car le secteur des ressources est une
source majeure de revenus et d’investissements étrang-
Écarts de taux d'intérêt
+
++
neutre
neutre
+
+
Leslie Preston, économiste, 416-983-7053
Inflation
Incertitudepolitiqueintérieure
Source:adaptédudocumentd'information«Letauxdechange»,Banquedu
Canada,mai2010
* 3 à 6 mois
**LaBanqueduCanadaétablitquecesdeuxfacteursexpliquentlamajoritédes
variationsbilatéralesdutauxdechangeparrapportau$US.
Services économiques TD | www.td.com/economics
INDICES DES PRIX DES PRODUITS DE BASE
150
Juin2008=100
Australie
125
Canada
100
75
50
25
2008
2009
2010
2011
Sources:RoyalBankofAustraliaetBanque du Canada
ers qui font augmenter le flux monétaire vers le Canada et,
par le fait même, le cours du huard. Selon une étude de la
Banque du Canada1, les prix des produits de base ont gagné
en importance pour le Canada depuis 19932. Et de nos
jours, ce sont les prix de l’énergie qui dominent, comptant
pour 60 % de l’indice des prix des produits de base de la
Banque du Canada. Le panier de produits de base à saveur
énergétique du Canada explique en bonne partie le rendement inférieur de l’indice des prix des produits de base du
pays par rapport à celui de l’Australie, une autre économie
basée sur les ressources naturelles (voir le graphique). La
forte pondération du pétrole brut dans le panier de produits
de base du Canada (le tiers de l’indice) explique également
la corrélation étroite que le dollar canadien continue d’avoir
avec le prix du pétrole.
Une étude de la Banque du Canada qui s’est penchée sur
les facteurs d’influence des taux de change par rapport au
dollar américain3 depuis 1980 a conclu que l’endettement
relatif des États-Unis explique en grande partie les mouvements à long terme des devises étudiées, plus que les
différences de productivité. Les prix des produits de base
ont joué un rôle important pour le Canada, l’Australie et la
Nouvelle-Zélande, mais les écarts de taux ont également
eu une incidence à court terme. Les résultats empiriques
révèlent que c’est la détérioration relative de la situation
budgétaire des États-Unis qui explique le mieux la dépréciation du dollar américain de 2002 à 2007, mais que les
prix des produits de base ont joué un rôle prédominant dans
le rendement des économies basées sur les ressources. Au
Canada, la situation budgétaire relative et le prix des produits
de base ont compté pour 60 % de l’appréciation du huard
de 2002 à 2007.
24 février 2012
Perspectives pour le dollar canadien
En ce qui a trait au contexte macroéconomique général
du huard, nos perspectives pour les deux ou trois prochaines
années comportent deux phases. À court terme, les risques de
contagion financière ont diminué depuis que la Banque centrale européenne a massivement injecté des liquidités dans le
système financier et qu’un deuxième plan d’aide a été signé
pour la Grèce, mais l’Europe a encore beaucoup d’épreuves
à franchir pour régler ses problèmes d’endettement. Nous
sommes moins pessimistes qu’à la fin de 2011, mais des
accès d’aversion au risque sur les marchés financiers sont encore probables. Toutefois, quand les difficultés de l’Europe
seront passées, nous croyons que l’incertitude diminuera,
ce qui stimulera l’économie mondiale et la confiance des
marchés au deuxième semestre de 2012 ainsi qu’en 2013.
Alors, qu’est-ce que cela signifie pour le dollar canadien?
La petite taille relative du marché de la devise canadienne
n’est pas un abri pour les investisseurs internationaux en
période de remous. Ainsi, quand la peur s’empare des
marchés, les mouvements vers les titres plus sûrs nuisent
au huard. Par conséquent, une corrélation étroite a été observée entre le cours du dollar canadien et la tendance des
marchés boursiers ces derniers mois. Nous croyons que le
potentiel de volatilité sur les marchés financiers au cours
des prochains mois et le possible recul du prix du pétrole,
qui avait augmenté en raison des tensions relatives à l’Iran,
pourraient faire baisser le cours du dollar canadien à environ
0,94 $ US en milieu d’année. Il s’agirait d’une valeur légèrement inférieure à son cours le plus bas enregistré en 2011.
Un autre risque connexe à court terme est la possibilité
que l’économie chinoise ralentisse davantage, ce qui aurait
LES PRIX DES PRODUITS DE BASE
SOUTIENDRONT LE HUARD
400
1.2
Prévisions
350
300
1.1
1.0
250
0.9
200
0.8
150
0.7
100
IndiceTD–prod.debase
50
0.6
Huard
0
2002
0.5
2004
2006
2008
2010
2012
Sources:BanqueduCanadaetServiceséconomiquesTD
Prévisionsdedécembre2011
2
Services économiques TD | www.td.com/economics
300
LES ÉCARTS DE TAUX SOUTIENDRONT
ÉGALEMENT LE HUARD
Points de base
$US/$CA
1.10
1.00
200
0.90
100
0.80
0
0.70
-100
0.60
BonsduTrésorà3mois(CA/US)
$CA
-200
00
02
0.50
04
06
08
10
12
14
Sources:BanqueduCanada,RéservefédéraleetServiceséconomiques
une incidence sur le prix de nombreux produits de base
canadiens et pourrait faire diminuer le cours du huard.
Cette situation ne fait pas partie de notre scénario de base,
mais si les difficultés en Europe entraînaient une contagion
mondiale plus importante que prévu, la Chine pourrait être
touchée.
À moyen terme, nous croyons que la forte croissance
des marchés émergents dans leur ensemble favorisera la
fermeté des prix des produits de base au cours des deux
ou trois prochaines années, prix qui soutiendront le dollar
canadien (voir le graphique). Les écarts de taux avec les
États-Unis ont aussi un effet de soutien et nous croyons
qu’ils deviendront encore plus importants au deuxième
semestre, au moment où la Banque du Canada devancera
la Réserve fédérale américaine et augmentera ses taux (voir
1.6
SITUATION BUDGÉTAIRE
RELATIVE DU CANADA
graphique). Cela dit, la banque centrale sait très bien qu’un
huard trop élevé réduirait davantage la compétitivité des
exportations canadiennes. Cette circularité impose des limites tant sur l’ampleur des écarts entre les taux d’intérêt au
Canada et aux États-Unis que sur l’appréciation de la devise
canadienne; nous croyons donc que le cours du huard, d’ici
la fin de 2013, ne dépassera pas 1,05 $ US.
Les perspectives sont bonnes pour les prochaines années en ce qui a trait à la situation budgétaire relative (et
le ratio dette/PIB) du Canada par rapport aux États-Unis.
Les deux pays gèrent des déficits, et celui de nombreuses
provinces est élevé, mais le Canada dispose d’un plan
crédible pour retrouver l’équilibre budgétaire. Les ÉtatsUnis sont coincés dans une impasse politique, au moins
jusqu’à la prochaine élection présidentielle, ce qui retarde
leur retour à l’équilibre budgétaire. La situation budgétaire
du Canada est relativement plus enviable, mais on est loin
de l’amélioration qui a contribué à l’envolée du huard de
2002 à 2007. En ce qui a trait au contexte politique, la souveraineté du Québec devrait rester en retrait de l’actualité
dans un avenir prévisible.
Le compte courant du Canada, comme celui des ÉtatsUnis, est déficitaire, la demande intérieure s’étant relativement amplifiée. Toutefois, nous croyons que le déficit du
compte courant diminuera au Canada, ce qui est positif pour
le huard. En soi, un compte courant déficitaire ne veut pas
nécessairement dire qu’une devise s’affaiblira à court ou
même à moyen terme, mais d’importants afflux de capitaux
sont alors nécessaires pour éviter une dépréciation (il faut
noter que l’Australie enregistre un compte courant déficitaire depuis 35 ans et que sa devise s’est tout de même apÉCART DES DEVISES AVEC LA PPA
Ratiodette*/PIBduCanadaetdesÉtats-Unis
Australie
Norvège
1.4
Suisse
1.2
Japon
1.0
Danemark
0.8
Canada
NZD
Euro
0.6
R.-U.
0.4
Corée
Chine
0.2
0.0
1994
AfriqueduSud
1997
2000
2003
2006
2009
2012
*Passiffinanciernettotal(comprendtouslespaliersdegouvernement)
Source:OCDE
24 février 2012
Différenceentrelecoursenjanvier2012
etlaPPAestiméeparl'OCDE(%)
Mexique
-60
-40
-20
0
20
40
60
80
Sources:OCDE,Réservefédérale
3
Services économiques TD | www.td.com/economics
préciée considérablement depuis 2002). Soit dit en passant,
le Canada a tiré profit d’excellents afflux de capitaux nets
depuis la crise financière, les investisseurs s’étant tournés
vers le huard pour diversifier leur portefeuille étant donné
la solidité relative de l’économie canadienne.
Toutefois, comme la croissance économique du
Canada devrait être inférieure à celle des États-Unis
au cours des prochaines années, le pays attirera moins
d’investissements. D’ailleurs, les afflux de capitaux en
provenance d’investisseurs en devises montrent déjà des
signes d’affaiblissement. Néanmoins, dans un contexte
de réduction du déficit du compte courant, des afflux de
capitaux moindres pourraient tout de même empêcher une
dépréciation de la devise.
Bref, selon nos perspectives, le cours du dollar canadien
devrait demeurer entre 0,94 $ US et 1,05 $ US, une valeur
bien à l’intérieur de la fourchette récente, mais au-dessus de
celles qui prévalaient avant 2002. Depuis la crise financière,
la volatilité des marchés continue de dépasser les normes
historiques, tout comme le cours du dollar canadien. Nous
ne croyons pas que cette situation changera au cours des
prochaines années.
Le huard est-il surévalué?
Les Canadiens, peu habitués de voir le huard à la parité
avec le billet vert, peuvent se demander si leur dollar est
surévalué. La valeur à long terme d’un taux de change est
un concept nébuleux mais, si on se penche sur la notion de
la parité des pouvoirs d’achat (PPA), c’est-à-dire le taux de
change qui égaliserait les prix entre deux pays, le huard se
situe environ 20 % au-dessus de la PPA de 0,83 $ US établie
par le FMI (voir le graphique à la page précédente). Toutefois, comme l’indique le graphique, le dollar canadien est
loin d’être le seul dans cette situation et, comparativement
à d’autres, semble bien peu surévalué.
Par ailleurs, comme nous le rappelle la faiblesse du
huard dans les années 1990, une devise peut dévier de sa
supposée « valeur fondamentale à long terme » sur une
longue période. Cependant, à la lumière de nos perspectives macroéconomiques, le scénario d’un dollar canadien
se situant à plus ou moins 0,05 $ de la parité avec le dollar
américain est hautement probable à moyen terme.
Leslie Preston
Économiste
416-983-7053
Notes
1. Cayen et al. « What drives exchange rates? New evidence from a panel of U.S Dollar Bilateral exchange rates », document de travail 2010-5, Banque
du Canada, 2010.
2 Dans les années 1990, l’accord de libre-échange et la libéralisation de la politique énergétique (y compris la déréglementation du marché du gaz
naturel) ont altéré la relation entre le dollar canadien et les prix des produits de base.
3 Les devises incluses dans l’étude sont le dollar canadien, la livre sterling, l’euro (une version synthétique utilisée avant 1999), le yen japonais ainsi
que les dollars australien et néo-zélandais, pour la période de 1980 à 2007.
Le présent rapport est fourni par les Services économiques TD. Il est produit à titre informatif seulement et peut ne pas convenir à d’autres
fins. Il ne vise pas à communiquer de renseignements importants sur les affaires du Groupe Banque TD, et les membres des Services
économiques TD ne sont pas des porte-parole du Groupe Banque TD en ce qui concerne les affaires de celui-ci. L’information contenue
dans le rapport provient de sources jugées fiables, mais son exactitude et son exhaustivité ne sont pas garanties. De plus, le rapport
contient des analyses et des opinions portant sur l’économie, notamment au sujet du rendement économique et financier à venir. Par
ailleurs, ces analyses et opinions reposent sur certaines hypothèses et d’autres facteurs et sont sujettes à des risques inhérents et à une
incertitude. Les résultats réels pourraient être très différents. La Banque Toronto-Dominion ainsi que ses sociétés affiliées et divisions apparentées qui constituent le Groupe Banque TD ne peuvent être tenues responsables des erreurs ou omissions que pourraient contenir
l’information, les analyses ou les opinons comprises dans ce rapport, ni des pertes ou dommages subis.
24 février 2012
4
Téléchargement