Cinq leçons sur l’Analyse Fonctionnelle François Berteloot 2 Table des matières 1 Un survol des principaux espaces fonctionnels 1.1 Espace des fonctions bornées sur un ensemble . . . . . . . 1.2 Espaces de fonctions sur un espace topologique . . . . . . . 1.2.1 Espaces de fonctions continues . . . . . . . . . . . . 1.2.2 Espaces de fonctions définies sur une partie de IRk . 1.3 Espaces de fonctions mesurées . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.1 Les espaces Lp . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.2 L’espace de Hilbert L2 . . . . . . . . . . . . . . . . 1.4 Espaces duals . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.4.1 Dual topologique d’un espace vectoriel normé . . . 1.4.2 Le théorème de Hahn-Banach dans le cas séparable 1.4.3 Dual des espaces C(K) et Lp . . . . . . . . . . . . 2 L’espace C(K) 2.1 Questions de compacité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.1 Un concept : l’équicontinuité, un outil : le procédé 2.1.2 Le théorème d’Ascoli . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.3 Le théorème de Banach-Alaoglu . . . . . . . . . 2.2 Questions d’approximation et de densité . . . . . . . . . 2.2.1 Le théorème de Weierstrass . . . . . . . . . . . . 2.2.2 Le théorème de Stone-Weierstrass . . . . . . . . . 2.3 L’universalité de C(K) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1 Plongements d’espaces de Banach dans C(K) . . 2.3.2 Vers le théorème de Gelfand-Naimark . . . . . . . 3 Méthodes hilbertiennes 3.1 Structure hermitienne . . . . . . . . . . . . . 3.1.1 Formes sesquilinéaires et hermitiennes 3.1.2 Espaces de Hilbert . . . . . . . . . . . 3.1.3 Orthogonalité . . . . . . . . . . . . . . 3.2 Le Théorème de projection . . . . . . . . . . . 3.2.1 Projection de meilleure approximation 3.2.2 Supplémentaire orthogonal . . . . . . . 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 5 7 7 9 11 11 13 14 14 16 18 . . . . . diagonal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 23 23 26 30 32 32 34 37 38 41 . . . . . . . 45 45 45 47 47 48 48 49 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.3 Propriétés essentielles des espaces de Hilbert . . . . 3.3.1 Isométrie avec le dual topologique, opérateur 3.3.2 Un critère de densité . . . . . . . . . . . . . 3.3.3 Compacité faible . . . . . . . . . . . . . . . 3.3.4 Bases hilbertiennes . . . . . . . . . . . . . . 4 Méthodes banachiques 4.1 Propriétés essentielles des espaces métriques 4.1.1 Le théorème de Baire . . . . . . . . . 4.1.2 Quelques outils . . . . . . . . . . . . 4.2 Linéarité et continuité . . . . . . . . . . . . 4.2.1 Le théorème de Banach-Steinhaus . . 4.2.2 Le théorème de l’application ouverte 4.2.3 Le théorème du graphe fermé . . . . 4.3 Bases dans les espaces de Banach . . . . . . 4.3.1 Bases de Hamel . . . . . . . . . . . . 4.3.2 Bases de Schauder . . . . . . . . . . 4.4 Prolongement des formes linéaires . . . . . . 4.4.1 Le théorème de Hahn-Banach . . . . 4.4.2 Un critère de densité . . . . . . . . . . . . . . adjoint . . . . . . . . . . . . . . . complets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Méthodes géométriques 5.1 Les convexes dans un espace normé . . . . . . . . . . . . . . 5.1.1 Formes linéaires, jauges et semi-normes . . . . . . . . 5.1.2 Le théorème de séparation de Hahn-Banach . . . . . 5.1.3 Le théorème de Krein-Milman . . . . . . . . . . . . . 5.2 Espaces localement convexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5.2.1 Topologie induite par une famille de semi-normes . . 5.2.2 Topologies faibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5.2.3 Bornés faibles et bornés forts, fermés faibles et fermés 5.2.4 Compacité faible dans un espace dual . . . . . . . . . 5.3 Espaces réflexifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5.3.1 Critères de réflexivité et exemples . . . . . . . . . . . 5.3.2 Réflexivité et compacité séquentielle faible . . . . . . 6 Solutions des exercices 6.1 Exercices de la première leçon . 6.2 Exercices de la deuxième leçon . 6.3 Exercices de la troisième leçon . 6.4 Exercices sur la quatrième leçon . . . . 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 51 54 54 58 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 60 60 62 64 65 68 74 75 75 78 80 80 85 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 89 89 93 95 97 97 100 103 106 106 106 109 . . . . 115 . 115 . 120 . 130 . 140 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . forts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Leçon 1 Un survol des principaux espaces fonctionnels Ce n’est là que le début de l’invasion spectaculaire de l’analyse par la topologie que l’on ne peut guère comparer qu’à la marche triomphale de l’idée de groupe à travers toutes les mathématiques. De même que dans ce dernier cas, il faut bien se persuader que cette introduction de nouvelles ”structures” mathématiques n’a pas eu pour motif un vain désir de généralisation gratuite, mais bien la constatation que ces nouvelles idées conduisaient naturellement à des méthodes d’attaque plus simples, plus souples et plus puissantes pour de nombreux problèmes classiques. J. Dieudonné. Il est à peu près imposible de faire quoi que ce soit de sérieux sur des espaces qui ne sont pas complets car il y est impossible de prouver la convergence d’une suite sans en connaitre la limite. C’est pourquoi, dans les quelques pages qui suivent, nous nous attacherons à justifier précisément la complétude des espaces considérés. 1.1 Espace des fonctions bornées sur un ensemble Etant donné un ensemble X quelconque nous noterons F(X,C) I l’ensemble des fonctions définies sur X et à valeurs dans C. I L’ensemble F(X,C) I est clairement 5 muni d’une structure de C-espace I vectoriel F(X,C), I +, · où les lois + et · sont définies par ∀f ∈ F(X,C), I ∀g ∈ F(X,C) I : (f + g)(x) := f (x) + g(x), ∀x ∈ X ∀f ∈ F(X,C), I ∀λ ∈ C I : (λ · f )(x) := λf (x), ∀x ∈ X. Le premier sous-espace vectoriel de F(X,C) I sur lequel il est agréable de travailler est celui des fonctions bornées qui est noté L∞ (X,C) I : L∞ (X,C) I := {f ∈ F(X,C) I tel que supx∈X |f (x)| < +∞}. Il peut être muni d’une norme k k∞ définie par kf k∞ := supx∈X |f (x)| et appelée norme de la convergence uniforme sur X car il est clair que kf −fn k∞ → 0 si et seulement si la suite de fonctions (fn )n converge uniformément vers f sur X. C’est un fait remarquable que cette norme soit complète : Théorème 1.1.1 L∞ (X,C), I k k∞ est un espace de Banach. t u Soit (fn )n une suite de Cauchy dans L∞ (X,C), I k k∞ . Pour tout > 0 il existe un entier n0 tel que kfm − fn k∞ < pour m ≥ n ≥ n0 . Autrement dit : ∀ > 0, ∃n0 ∈ IN tel que m ≥ n ≥ n0 ⇒ |fm (x) − fn (x)| < , ∀x ∈ X. (1.1.1) On voit donc que (fn (x))n est une suite de Cauchy dans C I pour tout x ∈ X ce qui permet de poser f (x) := limn fn (x). En faisant tendre m vers l’infini dans (1.1.1) on voit simultanément que f est bornée sur X et que kf − fn k∞ ≤ pour n ≥ n0 . t u Notons que lorsque X = IN (ou X = ZZ) l’espace L∞ (X,C) I est celui des suites bornées de nombres complexes qui, muni de k k∞ , est donc un espace de Banach. Cet espace est habituellement noté l∞ : l∞ := {(xn )n ∈ C I IN tel que supn∈IN |xn | < +∞}. On peut également considérer l’espace des suites de limite nulle, c’est un sous-espace de l∞ que l’on note c0 : c0 := {(xn )n ∈ C I IN tel que limn |xn | = 0}. Le principe d’inversion des limites pour les suites de fonctions qui convergent uniformément montre que c0 est fermé dans l∞ , k k∞ . Théorème 1.1.2 l∞ , k k∞ et c0 , k k∞ sont des espaces de Banach. Exercice 1.1.3 Soit c le sous-espace de l∞ , k k∞ constitué des suites conver gentes. Montrer que c, k k∞ est un espace de Banach. La plupart des espaces fonctionnels sont obtenus en spécialisant X, soit en le munissant d’une topologie, soit en le munissant d’une mesure. Nous allons explorer ces possibilités. 6 1.2 1.2.1 Espaces de fonctions sur un espace topologique Espaces de fonctions continues Lorsque X est muni d’une topologie, le concept de continuité pour les fonctions définies sur X prend sens et l’on peut considérer deux nouveaux sous-espaces de F(X,C) I : C(X) := {f ∈ F(X,C) I tel que f est continue sur X} Cb (X) := {f ∈ L∞ (X,C) I tel que f est continue sur X}. On sait que la continuité est préservée par convergence uniforme ou, autrement dit, que Cb (X) est fermé dans L∞ (X,C), I k k∞ . Compte tenu du théorème 1.1.1 on a donc : Théorème 1.2.1 Cb (X), k k∞ est un espace de Banach. On peut considérer d’autres sous-espaces de C(X), précisons pour cela un peu de vocabulaire. Définition 1.2.2 On dit que f ∈ F(X,C) I tend vers 0 à l’infini si et seulement si pour tout > 0 il existe un compact K ⊂ X tel que |f | < sur X \ K. Le support d’une fonction f ∈ F(X,C) I est l’adhérence du sous-ensemble de X où cette fonction est non-nulle. On définit alors les espaces C0 (X) et Cc (X) par : C0 (X) := {f ∈ C(X) tel que f tend vers 0 à l’infini} Cc (X) := {f ∈ C(X) tel que le support de f est compact dans X}. Les inclusions suivantes sont évidentes et deviennent des égalités lorsque X est compact : Cc (X) ⊂ C0 (X) ⊂ Cb (X) ⊂ C(X). En général ces sous-espaces ne sont pas fermés dans Cb (X), k k∞ . Il n’est pas évident du tout de construire des fonctions continues sur un espace topologique quelconque. Le lemme d’Urysohn permet de surmonter cette difficulté dans les espaces topologiques normaux, c’est à dire dans les espaces satisfaisant l’une des deux propriétés dont le lemme 1.2.3 stipule l’équivalence. Rappelons qu’il est facile de montrer que les espaces compacts sont normaux. Lemme 1.2.3 (Urysohn) Dans un espace topologique X les deux propriétés suivantes sont équivalentes. 7 1) Quels que soient les sous-ensembles fermés disjoints F1 et F2 il existe des ouverts disjoints U1 et U2 tels que F1 ⊂ U1 et F2 ⊂ U2 . 2) Quels que soient les sous ensembles fermés disjoints F1 et F2 il existe une fonction continue f : X → [0, 1] nulle sur F1 et constante égale à 1 sur F2 . La fonction distance étant continue, il est beaucoup plus facile de construire des fonctions continues aux propriétés variées sur un espace métrique (X, d) que sur un espace topologique arbitraire. Par exemple, si χ̃ est une fonction plateau supportée par [−2, 2] et contante égale à 1 sur [−, ], alors la fonction χ(x) := χ̃ d(x, x0 ) est continue sur X, identiquement égale à 1 sur B(x0 , ) et nulle en dehors de B(x0 , 2). Ces possibilités permettent d’établir l’important résultat suivant (voir l’exercice 1.2.5 pour la démonstration). Théorème 1.2.4 Si (K, d) est un espace métrique compact alors l’espace de Banach C(K), k k∞ est séparable. Exercice 1.2.5 Soit K, d) un espace métrique compact. 1) Pour tout f ∈ C(K) et tout η > 0 on pose O(f, η) := supd(x,y)≤η |f (x)−f (y)|. Montrer que limη→0 O(f, η) = 0. 2) Pour tout n ∈ IN, justifier l’existence d’une collection finie de points {an,1 , · · ·, an,Nn } telle que 1 n K = ∪N i=1 B an,i , 2n puis celle de fonctions χn,i ∈ C(K) telles que 1 0 ≤ χn,i ≤ 1, χn,i = 1 sur B an,i , 2n et Supp χn,i ⊂ B an,i , n1 . 3) Pour tout n ∈ IN et tout 1 ≤ i ≤ Nn on pose χ σn,i := PNnn,iχ i=1 et, pour tout f ∈ C(K) : n,i P n fn := N i=1 f (an,i ) σn,i . Montrer que fn ∈ C(K) puis que kf − fn k∞ ≤ O(f, n1 ). 4) Montrer que l’espace vectoriel engendré par ∪n∈IN {σn,i , 1 ≤ i ≤ Nn } est dense dans C(K), k k∞ puis en déduire que cet espace est séparable. Il n’est pas possible de définir une norme sur C(X) qui rende compte de la convergence uniforme locale. On peut cependant, lorsque X possède une suite exhaustive de compacts, munir C(X) d’une structure d’espace métrique complet au sein duquel la convergence est exactement la convergence uniforme locale. De plus les opérations d’espace vectoriel sont continues pour cette distance. Ces espaces peuvent être considérés comme le prototype d’espace plus généraux appellés espaces de Fréchet. Ceci fait l’objet de l’exercice 1.2.7. Posons d’abord quelques définitions. Définition 1.2.6 Une suite exhaustive de compacts d’un espace topologique X est une suite de compacts (Kn )n telle que Kn ⊂ int Kn+1 et ∪n∈IN Kn = X. On rappelle qu’un espace métrique X localement compact et séparable possède une suite exhaustive de compacts. 8 Exercice 1.2.7 Soit X un espace topologique muni d’une suite exhaustive de compacts (Kk )k . Pour tout k ∈ IN et tout f, g ∈ C(X) on pose pk (f ) := kf 1Kk k∞ et ∞ X d(f, g) := 2−k min 1, pk (f − g) . k=0 1) Soient fn , f ∈ C(X). Montrer que les assertions suivantes sont équivalentes i. fn converge uniformément vers f sur tout compact ii. fn converge uniformément vers f sur Kk pour tout k iii. fn converge uniformément localement vers f . 2) Montrer que d est une distance. 3) Montrer que d(fn , f ) → 0 si et seulement si fn converge uniformément localement vers f . 4) Montrer que C(X), d est un espace métrique complet. Nous détaillons ici un point de la solution de l’exercice 1.2.7 car l’argument utilisé est d’emploi fréquent. t u Montrons que : si limn pk (fn ) = 0 pour tout k alors limn d(fn , 0) = 0. Pour tout N ∈ IN on a : d(fn , 0) = N X X −k 2 min 1, pk (f ) ≤ 2−k min 1, pk (f ) + k>N k=0 N X 2−k min 1, pk (f ) + 2−N . k=0 Il s’ensuit que 0 ≤ lim supn d(fn , 0) ≤ 2−N pour tout N ∈ IN, d’où limn d(fn , 0) = 0. t u 1.2.2 Espaces de fonctions définies sur une partie de IRk Lorsque X est contenu dans IRk (ou bien C I k ) on peut prendre en compte des propriétés de régularité des fonctions plus forte que la seule continuité et définir des sous-espaces de C(X). Nous allons voir dans quelle mesure ceux-ci peuvent être munis de structures algébrico-topologiques utiles. Les fonctions Hölder-continues constituent un premier espace de fonctions qui est strictement contenu dans celui des fonctions continues. 9 Pour 0 < α on dit qu’une fonction f est α-Hölderienne sur un ouvert Ω de IRk si et seulement si et si il existe une constante C telle que |f (x) − f (y)| ≤ Ckx − ykα pour tout x, y ∈ Ω et si f est bornée sur Ω (lorsque Ωest borné cette dernière condition est automatiquement satisfaite). On note Lipα Ω l’ensemble des fonctions α-Hölderiennes sur Ω. Lipα Ω := {f ∈ F(Ω,C) I tel que supx6=y∈Ω |f (x)−f (y)| kx−ykα + supx∈Ω |f (x)| < +∞}. Cet espace n’a d’intérêt que lorsque 0 < α ≤ 1 car il est réduit aux seules constantes lorsque α > 1(les fonctions sont alors différentiables et de différentielle nulle). On munit Lipα Ω de la norme (x)−f (y)| kf kα := kf k∞ + Supx6=y∈Ω |f kx−yk α . Théorème 1.2.8 Lipα Ω , kf kα est un espace de Banach. L’exercice suivant fournit la preuve de ce théorème ainsi que quelques propriétés des fonctions Hölderiennes. k Exercice 1.2.9 Soit Ω un ouvert de IR . 1) Montrer que Lipα Ω , kf kα est un espace de Banach. 2) Montrer que tout f ∈ Lipα Ω est uniformément continue sur Ω et se prolonge continuement à Ω. 3) On suppose que Ω est borné et on pose : (x)−f (y)| I tel que supx6=y∈Ω |f kx−yk < +∞}. Lipα Ω := {f ∈ F(Ω,C) α Montrer que Lipα Ω = Lipα Ω . Les fonctions de classe C m sur un ouvert Ω de IRk forment un sous-espace de C(Ω) noté C m (Ω). À l’instar de ce que l’on a fait sur C(X) pour décrire la convergence uniforme locale (voir l’exercice 1.2.7), on peut munir C ∞ (Ω) d’une distance complète induisant la topologie de la convergence uniforme locale des fonctions et de toutes leurs dérivées. P Rappelons que pour tout multi-indice α := (α1 , ···, αk ) tel que |α| := kj=1 |αj | ≤ m, la dérivée partielle Dα f de f ∈ C m (Ω) est définie par Dα f := ∂ α1 ∂ αk ··· f. ∂x1 ∂xk Exercice 1.2.10 Soit Ω un ouvert de IRk et (Kn )n une suite exhaustive de compacts de Ω. Pour tout n ∈ IN et tout f, g ∈ C ∞ (Ω) on pose pn (f ) := sup|α|≤n k1Kn Dα f k∞ et P −n d(f, g) = ∞ 2 min 1, p (f − g) . n n=0 10 1) Montrer que C ∞ (Ω), d est un espace métrique complet. 2) Montrer que d(fn , g) → 0 si et seulement si Dα fn converge uniformément localement vers Dα g pour tout α ∈ INk . Le sous-espace C m (Ω) de C m (Ω) est constitué des fonctions f ∈ C m (Ω) dont toutes les dérivées partielles d’ordre inférieur ou égal à m se prolongent continuement à Ω. On peut aussi considérer le sous-espace C m, (Ω) de C m (Ω) obtenu en exigeant que Dα f ∈ Lip (Ω) pour |α| = m. C m (Ω) := {f ∈ C m (Ω) tel que Dα f ∈ C(Ω), ∀|α| ≤ m} C (Ω) := {f ∈ C m (Ω) tel que Dα f ∈ Lip (Ω), ∀|α| = m}. m, Lorsque Ω est borné, on peut munir ces espaces des normes P kf km := 0≤|α|≤m kDα f k∞ P P kf km, := 0≤|α|<m kDα f k∞ + |α|=m kDα f k Théorème 1.2.11 Les espaces C m (Ω), k km et C m, (Ω), k km, sont des espaces de Banach. Lorsque Ω est un ouvert du plan complexe, on peut considérer l’espace O(Ω) des fonctions holomorphes sur Ω. C’est un sous-espace de C ∞ (Ω). L’espace H ∞ (Ω) des fonctions holomorphes bornées sur Ω est défini par H ∞ (Ω) := L∞ (Ω) ∩ O(Ω). On sait que l’holomorphie est préservée par convergence uniforme ou, autrement dit, que H ∞ (Ω) est fermé dans L∞ (Ω,C), I k k∞ . Compte tenu du théorème 1.1.1 on a donc : Théorème 1.2.12 H ∞ (Ω), k k∞ est un espace de Banach. 1.3 1.3.1 Espaces de fonctions mesurées Les espaces Lp On considère maintenant un espace mesuré (X, A, µ). Une fonction f à valeurs complexes sur X est µ-mesurable si et seulement si ses parties réelle et imaginaire le sont, la fonction positive |f | est alors également µ-mesurable et pour 1 ≤ p < +∞, on peut poser : Z 1 kf kp := |f |p dµ p . X p On désigne par L (X, µ) l’ensemble des fonctions complexes µ-mesurables sur X telles que |f |p soit µ-intégrable (on dit que f est de puissance p-ième intégrable). 11 On note Lp (X, µ) le quotient de Lp (X, µ) par la relation d’équivalence induite par l’égalité µ-presque partout. Il s’avère que Lp (X, µ), k kp est un espace vectoriel normé, ceci n’est pas évident et repose sur l’importante inégalité de Hölder. Rappelons au passage la définition suivante. Définition 1.3.1 On dit que 1 ≤ p, q ≤ +∞ sont conjugués si et seulement si 1 + 1q = 1. p Proposition conjugués alors R R1.3.2 (inégalité de Hölder) Si 1 < p, q < +∞ sont 1 | X f g dµ| ≤ X |f g| dµ ≤ kf kp × kgkq et en particulier f g ∈ L dès que f ∈ Lp et g ∈ Lq . Le théorème de Fischer-Riesz précise que la norme k kp est complète. Théorème 1.3.3 (Fischer-Riesz) Pour 1 ≤ p < +∞, Lp (X, µ), k kp est un espace de Banach. Esquissons la preuve de ce théorème. t u Soit (fn )n une suite de Cauchy. Choisissons une suite strictement R croissantep d’enp −(p+1)k tiers n telle que m ≥ n ≥ n ⇒ kf − f k ≤ 2 . Comme |fm − fn | dµ ≥ k k m n p X R p −k p −k |f − fn | dµ ≥ (2 ) µ{|fm − fn | ≥ 2 }, on a : {|fm −fn |≥2−k } m µ{|fnk+1 − fnk | ≥ 2−k } ≤ 2kp 2−(p+1)k = 2−k . P Il résulte alors du lemme de Borel-Cantelli que k |fnk+1 − fnk | < +∞ µ-pp et donc une fonction f en µ-presque tout point. Le lemme de Fatou que fnk converge vers R R donne finalement X |f − fnk |p dµ ≤ lim inf i X |fni − fnk |p dµ ≤ 2−k . t u Il faut noter que lorsque X = IN (ou bien ZZ) et µ est la mesure de comptage, on obtient les espaces lp de suites complexes de puissance p-ième sommable : lp := {(xn )n ∈ C I IN tel que X |xn |p < +∞} n qui sont donc des espaces de Banach pour la norme kxkp := X |xn |p p1 . n Il faut souligner que les espaces lp pour 1 ≤ p < ∞ ont des propriétés bien plus sympathiques que l’espace l∞ . Il sont par exemple séparables alors que l∞ ne l’est pas. 12 Théorème 1.3.4 Soit 1 ≤ p ≤ ∞. L’espace lp , k kp est un espace de Banach. Cet espace est séparable si et seulement si p 6= ∞. L’espace c0 est séparable. L’exercice qui suit explique comment justifier les propriétés de séparabilité. Exercice 1.3.5 On suppose que 1 ≤ p ≤ ∞. 1) Montrer que si p 6= ∞ alors les suites nulles à partir d’un certain rang sont denses dans lp . En déduire qu’alors lp est séparable. Utiliser le même argument pour montrer que c0 est séparable. 2) Soit D le sous-ensemble de l∞ constitué ds suites à coefficients dans {0, 1, · · ·, 9}. i) En exhibant une injection de [0, 1] dans D, justifier la non-dénombrabilité de D. ii) Montrer que si x et y sont deux éléments distincts de D alors kx−yk∞ ≥ 1. En déduire que si l∞ était séparable alors D serait dénombrable. Les espaces vectoriels normés séparables sont beaucoup plus ”maniables” que les espaces non-séparables ; on s’en rendra compte dès la sous-section 1.4.2. À contrario, lorsque l’on cherche un exemple d’espace vectoriel normé ne vérifiant pas une propriété standard, il est judicieux de tester l’espace l∞ . 1.3.2 L’espace de Hilbert L2 Lorsque p = 2, l’espace Lp devient un espace de Hilbert. Autrement dit, l’espace L2 (X, µ), k k2 est de Banach et sa norme est induite par un produit R hermitien défini positif. Le produit hermitien en question est donné par f |g := X f ḡ µ Le fait que L2 possède une structure d’espace de Hilbert est d’une importance considérable car il hérite ainsi de propriétés géométriques très proches de celles des espaces de dimension finie. La leçon 3 sera consacrée à l’étude générale de ces espaces. R Que le produit hermitien f |g := X f ḡ µ soit bien défini résulte de l’inégalité de Hölder pour p = q = 2. On peut aussi procéder directement en montrant d’abord que L2 est bien un espace vectoriel puis que f g est µ-intégrable lorsque 2 f, g ∈ L (X, µ), k k2 . Ceci fait l’objet de l’exercice qui suit. Cette approche est un R peu plus simple que celle vue pour p quelconque, l’inégalité de Hölder | X f g µ| ≤ kf k2 kgk2 est alors une conséquence immédiate de l’inégalité de Cauchy-Schwarz qui est satisfaite par tout produit hermitien. Exercice 1.3.6 Soit (X, µ) un espace mesuré. Montrer que L2 (X, µ) est un C-espace I x+y 2 1 2 1 2 ≤ 2x + 2y . vectoriel ; on utilisera l’inégalité de convexité 2 Montrer ensuite, en utilisant l’identité 2Ref ḡ = |f + g|2 − (|f |2 + |g|2 ), que f ḡ R est µ-intégrable dès que f, g ∈ L2 (X, µ). Vérifier que (f |g) = X f ḡdµ définit un produit hermitien sur L2 (X, µ). 13 Il se trouve que de nombreux sous-espaces de L2 définis par des conditions de régularité supplémentaires sont eux-aussi des espaces de Hilbert. Tel est le cas des espaces de Sobolev qui sont très importants en théorie des distributions. Citons aussi les espaces de Bergman qui sont beaucoup utilisés en géométrie complexe. Pour un ouvert Ω du plan complexe, l’espace de Bergman B(Ω) est l’espace des fonctions holomorphes de module de carré Lebesgue-intégrable sur Ω. B(Ω) := L2 (Ω) ∩ O(Ω). Théorème 1.3.7 Si Ω est un ouvert borné du plan complexe alors B(Ω), k k2 est un espace de Hilbert. Pour établir ce résultat, il suffit de montrer que B(Ω) est fermé dans L2 (Ω), k k2 . Ceci n’est cependant pas trivial et même un peu subtil, nous y consacrons l’exercice qui suit. Exercice 1.3.8 (Espace de Bergman) Soit B(Ω) l’espace de Bergman d’un ouvert borné du plan complexe Ω. On munit B(Ω) de la norme k kL2 . On notera dλ la mesure de Lebesgue sur le plan complexe identifié à IR2 . 1) Pour tout f ∈ B(Ω) et tout z ∈ Ω tel Rque 0 < r < d(z, bΩ), établir l’inégalité |f (z)|2 ≤ πr1 2 D(z,r) |f |2 dλ. En déduire que pour tout compact K contenu dans Ω, l’application de restriction (B(Ω), k kL2 ) → (C(K), k k∞ ) f 7→ f |K est une application linéaire continue. 2) Montrer que toute suite de Cauchy dans B(Ω) converge uniformément localement, puis que (B(Ω), k kL2 ) est un espace de Hilbert en montrant que B(Ω) est fermé dans L2 (Ω), k k2 ). 1.4 1.4.1 Espaces duals Dual topologique d’un espace vectoriel normé Définition 1.4.1 Soit E, k k un espace vectoriel normé sur IK où IK désigne IR ou C. I Le dual algébrique de E, noté E ∗ , est l’espace vectoriel des formes linéaires sur E E ∗ := {λ : E → IK / λ est IK-linéaire sur E}. Le dual topologique de E, noté E 0 , est celui des formes linéaires continues sur E E 0 := {λ : E → IK / λ est IK-linéaire et continue sur E}. 14 Tout espace vectoriel sur C I est aussi un espace vectoriel sur IR et l’on peut donc considérer des formes IR-linéaires sur un C-espace I vectoriel. Par exemple, si λ est une forme C-linéaire I sur E alors u := Re λ est une forme IR-linéaire sur E, de plus ∀x ∈ E : λ(x) = Re λ(x) + iIm λ(x) = Re λ(x) − iRe iλ(x) = = Re λ(x) − iRe λ(ix) = u(x) − iu(ix). Ce petit calcul montre que toute forme C-linéaire I est complètement déterminée par sa partie réelle. Inversement, si u est une forme IR-linéaire sur E alors, comme on le vérifie facilement, la formule λ(x) := u(x) − iu(ix) définit une forme C-linéaire I sur E. Lorsque nous manipulerons des formes linéaires sur un C-espace I vectoriel, nous utiliserons parfois ces remarques pour nous ramener au cas réel. Il est bien connu qu’une forme linéaire ϕ est continue sur E si et seulement si elle est bornée sur la boule unité fermée BE de E. Utilisons ce fait pour examiner les liens entre le dual topologique d’un espace vectoriel normé E et l’espace Cb (BE ) des fonctions continues et bornées sur BE . L’application de restriction RBE : E 0 → Cb BE ϕ 7→ ϕ|BE est une application linéaire injective. Cette observation permet de munir E 0 de la norme de la convergence uniforme sur BE : k|ϕk| := kRBE ϕ k∞ = sup |ϕ(x)| x∈BE c’est à dire d’une norme k| k|, pour laquelle converger signifie converger uniformément sur la boule unité BE . x ), on voit que toute suite (ϕn )n qui converge (uniEn écrivant ϕn (x) = kxkϕn ( kxk formément) sur la boule unité BE converge aussi simplement sur E vers une forme linéaire ϕ. D’après le théorème 1.2.1, toute suite de Cauchy (ϕn )n dans E 0 , k| k| converge uniformément sur BE et, compte tenu de ce que nous venons de remarquer, la limite est la restriction à BE d’une forme linéaire ϕ. Puisque |ϕ(x)| = limn |ϕn (x)| ≤ kxk lim supn k|ϕn k| et que toute suite de Cauchy est bornée on voit que ϕ ∈ E 0 . Nous avons déduit du théorème 1.2.1 que E 0 est complet pour k| |k. Théorème 1.4.2 Le dual topologique E 0 d’un espace vectoriel normé E, k k est un espace de Banach pour la norme k|ϕk| := supx∈BE |ϕ(x)|. 15 1.4.2 Le théorème de Hahn-Banach dans le cas séparable Nous allons établir un théorème de prolongement des formes linéaires continues définies sur un sous-espace d’un espace vectoriel normé. Avec le théorème de Banach-Steinhaus et celui de l’application ouverte, qui seront au cœur de la leçon 4, ce théorème est l’un des trois pilliers de l’analyse fonctionnelle. Nous n’en établirons pas, dans cette leçon, la forme la plus générale car nous utiliserons une preuve ”constructive” qui ne fonctionne que dans les espaces séparables. Cette version est néanmoins suffisante pour de nombreuses applications et nous permettra, dès la leçon 2, d’obtenir des résultats de portée générale sur la structure des espaces de Banach. Théorème 1.4.3 Soit E, k k un espace vectoriel normé séparable. Toute forme linéaire f définie et continue sur un sous-espace M de E se prolonge à une forme linéaire λ ∈ E 0 telle que k|λk| = k|f k|. Le premier pas de la démonstration consiste à traiter la situation la plus simple c’est à dire celle où M est de co-dimension un dans E. Ceci fait l’objet du lemme 1.4.6. Comme cela n’entraine pas de complication supplémentaire, nous allons établir un résultat valable dans le cadre plus général d’un espace vectoriel muni d’une jauge. Ceci nous sera utile dans les leçons 4 et 5 lorsque nous généraliserons le théorème de Hahn-Banach. Définition 1.4.4 On dit qu’une fonction µ : E → IR définie sur un espace vectoriel E est une pseudo-jauge si et seulement si 1) ∀x ∈ E, ∀y ∈ E : µ(x + y) ≤ µ(x) + µ(y) 2) ∀x ∈ E, ∀t ≥ 0 : µ(tx) = tµ(x). Une jauge est une pseudo-jauge à valeurs positives. Exercice 1.4.5 Vérifier que p(x) := lim supn xn définit une pseudo-jauge sur l∞ . Lemme 1.4.6 Soit E un IR-espace vectoriel et M un sous-espace vectoriel de E. Soit µ une pseudo-jauge sur E et f une forme linéaire sur M telle que f (x) ≤ µ(x), ∀x ∈ M. Alors, pour tout x0 ∈ / M , il existe une forme linéaire f0 sur M ⊕ IR · x0 prolongeant f et vérifiant f0 (x) ≤ µ(x), ∀x ∈ M ⊕ IR · x0 . t u Puisque f0 doit prolonger f , elle est donnée par f0 (x + tx0 ) = f (x) + tf0 (x0 ) pour tout x ∈ M et tout t ∈ IR. Il s’agit donc de choisir f0 (x0 ) =: a0 de façon à ce que f0 soit majorée par µ ou, autrement dit, que : f (x) + a0 t ≤ µ(x + tx0 ), ∀x ∈ M, ∀t > 0 f (x) − a0 t ≤ µ(x − tx0 ), ∀x ∈ M, ∀t > 0. 16 (1.4.1) (1.4.2) Écrivons l’inégalité 1.4.1 sous la forme a0 ≤ f ( xt ), cela donne la condition 1 t µ(x + tx0 ) − f (x) = µ(x0 + xt ) − a0 ≤ µ(x0 + y) − f (y), ∀y ∈ M. De même, l’inégalité 1.4.2 donne la condition a0 ≥ −µ(z − x0 ) + f (z), ∀z ∈ M. On voit donc que ce choix de a0 est possible pourvu que −µ(z − x0 ) + f (z) ≤ µ(x0 + y) − f (y), ∀y ∈ M, ∀z ∈ M. Or cette dernière inégalité équivaut à µ(z − x0 ) + µ(x0 + y) ≥ f (z) + f (y) et découle de µ(z −x0 )+µ(x0 +y) ≥ µ (z −x0 )+(x0 +y) = µ(y +z) ≥ f (y +z) = f (y)+f (z).u t Remarque 1.4.7 Si µ est une pseudo-jauge et λ une forme linéaire sur un espace vectoriel E alors la double inégalité −µ(−x) ≤ λ(x) ≤ µ(x) découle immédiatement de la majoration λ(x) ≤ µ(x) appliquée à (−x). Nous sommes maintenant en mesure d’établir le théorème de prolongement 1.4.3. Ceci fait l’objet de l’exercice suivant. On y traite le cas d’un IR-espace vectoriel. Pour un C-espace I vectoriel, on considère u := Re f pour la structure d’espace vectoriel réel sous-jacente puis on pose λ(x) := U (x)−iU (ix) où U est le prolongement obtenu pour u. Exercice 1.4.8 Soit E, k k un IR-espace vectoriel normé séparable et f une forme linéaire définie et continue sur un sous-espace M . 1) Justifier l’existence d’une famile libre dénombrable (ej )j telle que E = V ect(ej , j ∈ IN). 2) Montrer par récurrence sur n que f se prolonge à une forme linéaire continue λn de même norme que f sur M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n) et telle que λn+1 coincide avec λn sur M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n). (utiliser le lemme 1.4.6 avec µ := k|f k| · k k). 3) En déduire que f se prolonge à une forme linéaire λ ∈ E 0 telle que k|λk| = k|f k|. Toujours dans le cadre d’espaces séparables, nous allons voir comment le théorème de Hahn-Banach permet de plonger isométriquement tout espace normé dans son bidual. Il s’agit là d’un fait extrêmement important. Tout x ∈ E induit une forme linéaire continue sur E 0 . Cette forme, notée x̂, est tout simplement l’application d’évaluation en x : E 0 , k| k| → (E, k k λ 7→ λ(x). 17 La continuité de x̂ résulte automatiquement de celle des formes λ car en effet |x̂(λ)| = |λ(x)| ≤ k|λk| kxk. Ceci montre en outre que k|x̂k| ≤ kxk. Définition 1.4.9 Soit E, k k un espace vectoriel normé. On note J : E → E 00 l’application définie par J(x) = x̂. L’application J est clairement linéaire. Elle est aussi continue puisque, comme nous l’avons observé, k|J(x)|k ≤ kxk. Il n’est pas du tout clair que cette application soit injective. Il résulte en fait du théorème de Hahn-Banach que J est une injection isométrique car, pour tout x ∈ E, il existe λ ∈ E 0 telle que x̂(λ) = kxk et k|λk| = 1. Nous reviendrons bien entendu sur tout ceci lorsque nous étudierons ces questions dans un cadre général, pour l’instant nous nous contenterons du résultat partiel suivant. Théorème 1.4.10 Soit E, k k un espace vectoriel normé séparable. L’applica tion linéaire J : E, k k → E 00 , k| k| définie par J(x) = x̂ est une injection isométrique. 1.4.3 Dual des espaces C(K) et Lp Considérons un espace topologique compact K. Toute mesure borélienne µ, posi- tive et de masse finie sur K, induit une forme linéaire continue Λµ sur C(K), k k∞ obtenue en posant : Z Λµ (f ) := f dµ , ∀f ∈ C(K). K R On voit facilement que k|Λµ k| = K 1K dµ et que Λµ est une forme linéaire positive ce qui signifie que si f ≥ 0 alors Λµ (f ) ≥ 0. Le théorème de Radon-Riesz, que nous ne démontrerons pas ici, montre que toutes les formes linéaires continues positives sur C(K) sont de cette forme et décrit le dual topologique de C(K). NOTE : DONNER REF. Théorème 1.4.11 (Radon-Riesz) Soit K un espace topologique compact. Pour toute forme linéaire continue λ sur C(K), k k∞ il existe un unique couple de mesures boréliennes µ+ , µ− , positives et de masses finies sur K, telles que R R λ = Λµ+ − Λµ− et k|Λk| = K 1K dµ+ + K 1K dµ− . On identifiera souvent une mesure borélienne µ, positive et de masse finie sur K, à un élément du dual topologique de C(K). En particulier on notera λ = µ+ − µ− la décomposition de λ ∈ C(K)0 donnée par le théorème de Radon-Riesz. 18 Considérons maintenant les espaces Lp (X, µ), on supposera que µ est une mesure positive σ-finie sur X. Dans ce qui suit on suppose que 1 ≤ p < ∞ et on note q le conjugué de p. Toute fonction g ∈ Lq (X, µ) induit une forme linéaire continue Λg sur Lp (X, µ) obtenue en posant : Z f g dµ , ∀f ∈ Lp (X, µ). Λg (f ) := X Proposition 1.4.12 Soit 1 < q ≤ ∞. Pour toute fonction g ∈ Lq (X, µ), la forme linéaire Λg est continue sur Lp (X, µ) et k|Λg k| = kgkq . t u Justifions l’inégalité suivante et précisons un choix de f pour lequel elle devient une égalité. Z |f | |g| dµ ≤ kf kp kgkq . |Λg (f )| ≤ X Pour p = 1, q = ∞ elle est évidente et devient une égalité pour f := u de module 1 telle que ug = |g|. Pour p > 1 il s’agit de l’inégalité de Hölder et on obtient une égalité en prenant f := u|g|q−1 où u est choisie de module 1 de façon à ce que f g = |g|q . t u Il se trouve que pour 1 ≤ p < ∞, toutes les formes linéaires continues sur Lp (X, µ) sont de la forme Λg pour une unique fonction g ∈ Lq (X, µ) ce qui, compte tenu de la proposition 1.4.12, signifie que le dual topologique de Lp (X, µ) est isomorphe (isométriquement) à Lq (X, µ). Théorème 1.4.13 Pour tout 1 ≤ p < ∞, l’application 0 Λ : Lq (X, µ), k kq → Lp (X, µ) , k| k| g 7→ Λg où Λg : f 7→ R X f g dµ , ∀f ∈ Lp (X, µ) est un isomorphisme isométrique. Notons que ce résultat est en général faux pour p = ∞ : bien que la proposition 1.4.12 montre que le dual de L∞ contient L1 (ou plus exactement les formes du type Λg pour g ∈ L1 ) il existe d’autres formes linéaires continues sur L∞ . La démonstration classique du théorème 1.4.13 repose sur des arguments de théorie de la mesure, nous en donnerons une preuve entièrement basée sur des méthodes d’analyse fonctionnelle dans la dernière leçon. En attendant, nous traitons le cas beaucoup plus simple des espaces lp pour lequel le résultat s’énonce comme ceci : 19 Théorème 1.4.14 Pour tout 1 ≤ p < ∞, l’application 0 Λ : lq , k kq → lp , k| k| y 7→ Λy où Λy : x 7→ P∞ 1 xn yn , ∀x ∈ lp est un isomorphisme isométrique. t u Si p ≥ 1 alors tout élément y de lq (pour forme linéaire continue Λy sur lp par : Λy (x) := ∞ X 1 p + 1 q = 1) permet de définir une yn xn . 1 De plus, d’après la proposition 1.4.12, k|Λy k| = kykq . Montrons que toutes forme linéaire continue λ sur lp est de la forme Λy pour un certain y ∈ lq . Notons en la suite dont tous les termes sont nuls sauf le nème qui est pris égal 1, autrement dit en = δkn k . Le point clef est que, pour p ≥ 1, la famille {en ; n ∈ IN} est une base de lp en ce sens que x = lim N N X xn en pour tout x := (xn )n ∈ lp . 1 1 P P p p . On |x | x e k = Cela tient simplement à l’égalité suivante : kx − N n n n p n>N 1 notera que cet argument tombe pour p = ∞ ! Posons yn := λ(en ) et y := yn )n . Pour tout x := (xn )n ∈ lp , la continuité de λ permet décrire λ(x) sous la forme λ(x) = lim λ N X N xn en = lim N 1 N X y n xn . 1 Il nous reste donc à voir que y ∈ lq . Pour cela on note, pour a ∈ lp ou a ∈ lq , P πN (a) = N 1 ai ei = (a1 , a2 , · · ·, aN , 0, 0, 0, · · ·) et l’on observe que : ΛπN (y) (x) = N X yi xi = λ πN (x) 1 et donc que k|ΛπN (y) k| ≤ k|λk|Supkxkp ≤1 kπN (x)kp = k|λk|. 20 Alors, compte tenu de la proposition 1.4.12, il vient N X |yi |q 1q = kπN (y)kq = k|ΛπN (y) k| ≤ k|λk| 1 si bien que supN PN 1 |yi |q ≤ k|λk|q < +∞ et y ∈ lq . t u Comme précédemment, le dual de l∞ ”contient” strictement l1 . Plus exacement, 0 Λ est une injection linéaire et isométrique de l1 dans l∞ mais n’est pas surjective. Cependant, l1 s’identifie au dual de c0 . Ceci fait l’objet de l’exercice suivant. Exercice 1.4.15 En mimant la démonstration du théorème 1.4.14, montrer que la transformation y 7→ Λy est un isomorphisme isométrique de (l1 , k k1 ) sur le dual topologique de (c0 , k k∞ ). 21 22 Leçon 2 L’espace C(K) Il est clair qu’on sera conduit à opérer sur la fonction comme on a opéré sur le nombre, c’est à dire : 1) à regarder la fonction elle même non plus comme choisie une fois pour toutes mais comme arbitrairement et continûment variable 2) à lui faire subir les opérations les plus variées et les plus générales. J. Hadamard 2.1 Questions de compacité Dans cette partie, on se demande sous quelles conditions une suite de fonctions continues sur un espace topologique compact K possède une sous-suite qui converge uniformément. Puisque dans tout espace métrique la compacité est caractérisée par le critère séquentiel de Bolzano-Weierstrass, ceci revient à déterminer les parties de C(K), k k∞ qui sont relativement compactes. 2.1.1 Un concept : l’équicontinuité, un outil : le procédé diagonal Considérons un exemple permettant de découvrir l’un des ressorts de la question qui nous occupe. La suite de fonctions 1 fn (x) = x n , n ∈ IN 23 est une suite de fonctions continues sur le segment [0, 1] qui converge simplement vers la fonction discontinue ϕ(x) = 1 si 0 < x ≤ 1 et ϕ(0) = 0. Puisqu’une limite uniforme de fonctions continues reste continue, la suite (fn )n ne possède aucune sous-suite qui converge uniformément. Le phénomène en jeu est assez clair : pour tout 0 < < 1, il existe ηn = n → 0 tel que Sup0≤x≤ηn |fn (x) − fn (0)| ≥ . Ce qui fait donc défaut à cette suite pour admettre une sous-suite qui converge uniformément, c’est un contrôle de la continuité de fn en 0 qui ne dépende pas de n. Le concept exact est celui d’équicontinuité, il joue un rôle crucial dans cette question et nous allons commencer par le préciser. Dans la définition ci-dessous, on considère un espace métrique (Y, d) qui en pratique sera souvent IR ou C I muni de la distance usuelle d(z, z 0 ) := |z − z 0 |. Définition 2.1.1 Soit X un espace topologique et (Y, d) un espace métrique. Soit F une famille d’applications de X dans Y . 1) F est dite équicontinue en un point a ∈ X si et ssi : ∀ > 0, ∃ Ua voisinage de a tel que : x ∈ Ua ⇒ d f (x), f (a) < ; ∀f ∈ F. 2) On dit de F qu’elle est équicontinue sur X si et seulement si elle l’est en tout point de X. Soulignons ce qui est essentiel dans cette définition. Le voisinage Ua est indépendant du choix de la fonction f dans la famille F et ne dépend donc que de et a. Exercice 2.1.2 Montrer que la famille de fonctions de la variable réelle {|x|α ; α ∈ [0, 1]} n’est pas équicontinue en 0. Exercice 2.1.3 Soit K un espace topologique compact et F ⊂ C(K) une famille équicontinue sur K. Montrer que l’adhérence de F dans C(K), k k∞ est également équicontinue. Exercice 2.1.4 Soit K un espace topologique compact et F ⊂ C(K). 1) On suppose ici que K est un espace métrique. Montrer que si F n’est pas équicontinue en a ∈ K alors on peut trouver > 0, une suite de fonctions fn ∈ F et une suite xn ∈ K tendant vers a telles que |fn (xn ) − fn (a)| > . Montrer qu’aucune sous-suite de (fn )n ne converge uniformément sur K. 2) Montrer que si F est équicontinue sur K et Supf ∈F |f (x)| < +∞ pour tout x ∈ K alors la famille F est uniformément bornée sur K (i.e Supf ∈F kf k∞ < +∞). 24 3) Montrer que si F est relativement compacte dans C(K) alors F est équicontinue et uniformément bornée sur K. Indication : on recouvrira F par un nombre fini de boules de C(K), k k∞ . L’ outil que nous utiliserons est le procédé diagonal de Cantor ; rappelons de quoi il s’agit. Proposition 2.1.5 Soit une famille dénombrable de propriétés notées P1 , P2 , P3 · · · Pk · ·· susceptibles d’être satisfaites par toute suite (an )n ∈ AIN où A est un ensemble fixé. On suppose que, pour tout k ∈ IN : • toute suite (an )n ∈ AIN admet une sous-suite satisfaisant Pk • lorsqu’une suite (an )n ∈ AIN satisfait une propriété Pk alors toutes ses soussuites la satisfont également • pour qu’une suite (an )n ∈ AIN satisfasse la propriété Pk il suffit qu’une suite tronquée (an )n≥p le fasse. Alors tout (an )n ∈ AIN possède une sous-suite (aψ(n) )n satisfaisant toutes les propriétés Pk . Expliquons comment cela est possible. t u Il existe une suite extraite (aϕ1 (n) )n qui vérifie P1 . On peut extraire de cette suite une sous-suite qui satisfait P2 . Étant extraite de (aϕ1 (n) )n , cette sous-suite satisfait encore P1 , on la note (aϕ2 (n) )n . On peut extraire de (aϕ2 (n) )n une sous-suite notée (aϕ3 (n) )n qui satisfait P3 , cette sous-suite satisfait donc P1 ,P2 et P3 . En continuant ces extractions successives, on obtient une famille de suites (aϕk (n) )n telles que (aϕk+1 (n) )n est extraite de(aϕk (n) )n et (aϕk (n) )n satisfait P1 , P2 , P3 · · · Pk . Posons alors ψ(n) := ϕn (n). Il est facile de voir que (aψ(n) )n est une sous-suite de (an )n et que, pour tout k ∈ IN, les suites tronquées (aψ(n) )n≥k sont extraites de (aϕk (n) )n . La suite (aψ(n) )n satisfait donc chacune des propriétés Pk . t u Voici une application directe du procédé diagonal de Cantor, il s’agit du théorème de Tychonov sur la compacité d’un produit dénombrable d’espaces métriques compacts. Le cas de produits non-dénombrables sera abordé plus tard au moyen de l’axiome du choix. Définition 2.1.6 Soit (Xp , dp )p∈IN une collection dénombrable d’espaces métriques. Le produit de ces espaces est l’espace Πp∈IN Xp := {(xp )p tel que xp ∈ Xp , ∀p ∈ IN}. 25 On munit Πp∈IN Xp d’une distance dpr définie par P −p dpr (x, y) := +∞ min 1, dp (xp , yp ) . p=0 2 On dit que dpr est la distance produit. Le théorème de Tychonov peut s’énoncer de la façon suivante : Théorème 2.1.7 Le produit d’une collection dénombrable d’espaces métriques compacts est compact pour la métrique produit. Exercice 2.1.8 Soit (Xp , dp )p∈IN une collection dénombrable d’espaces métriques. Soit X := Πp∈IN Xp le produit de ces espaces muni de la distance produit dpr . 1) Montrer qu’une suite (xn )n converge vers x dans (X, dpr ) si et seulement si (xnp )n converge vers xp dans (Xp , dp ) pour tout p ∈ IN. 2) Démontrer le théorème de Tychonov. 2.1.2 Le théorème d’Ascoli Le théorème d’Ascoli répond à la question posée au début de cette section. Théorème 2.1.9 (Ascoli) Soit K un espace topologique compact. Les parties relativement compactes de C(K), k k∞ sont les parties bornées et équicontinues. Comme dans un espace métrique la compacité est caractérisée par le critère séquentiel de Bolzano-Weierstrass, on a l’énoncé équivalent suivant : Théorème 2.1.10 Toute suite de fonctions uniformément bornée et équicontinue sur un espace topologique compact K admet une sous-suite qui converge uniformément. En couplant le théorème 2.1.10 à un procédé diagonal on obtient l’énoncé ”local” suivant : Théorème 2.1.11 Soit X un espace topologique possédant une suite exhaustive de compacts X = ∪p Kp . Toute suite de fonctions uniformément bornée et équicontinue sur chaque Kp possède une sous-suite qui converge uniformément sur tout compact de X. Démontrons le théorème 2.1.10. t u Il est facile de voir que pour une partie de C(K), k k∞ , le fait d’être bornée et l’équicontinuité sont des conditions nécessaires de compacité (voir exercice 2.1.4), on se concentrera donc sur la réciproque. Soit (fn )n une suite de fonctions équicontinue et bornée sur K. En tant que suite bornée de nombres complexes, chaque suite fn (x) admet une sous-suite convergente. 26 Soit S une partie dénombrable de K, en utilisant le procédé diagonal de Cantor on voit que (fn )n possède une sous-suite qui converge simplement sur S. Supposons K séparable et choisissons une partie S dense dans K et dénombrable. Comme nous venons de le voir, on peut supposer que (fn )n converge simplement sur S. La fin de la preuve consiste à voir comment l’équicontinuité et la compacité de K entrainent que cette convergence a en fait lieu sur S = K et est uniforme. On va montrer que la suite (fn )n est de Cauchy dans C(K), k k∞ . Soit > 0. L’équicontinuité de la famille (fn )n signifie que tout point a ∈ K possède un voisinage Ua tel que x ∈ Ua ⇒ |fk (x) − fk (a)| < ; 2 ∀k et donc aussi que : x, y ∈ Ua ⇒ |fk (x) − fk (y)| ≤ |fk (x) − fk (a)| + |fk (a) − fk (y)| < ; ∀k. La compacité permet de recouvrir K par un nombre fini d’ouverts du type Ua : K ⊂ ∪N i=1 Uai . Par densité de S on peut choisir un point si de S dans chaque ouvert Uai . Puisque (fn )n converge simplement sur S il existe n0 tel que m ≥ n ≥ n0 ⇒ |fm (si ) − fn (si )| ≤ , ∀1 ≤ i ≤ N. Soit maintenant x un point arbitraire de K et i0 tel que x ∈ Ui0 . Il vient alors : |fm (x) − fn (x)| ≤ |fm (x) − fm (si0 )| + |fm (si0 ) − fn (si0 )| + |fn (si0 ) − fn (x)| ≤ ≤ 2 + |fm (si0 ) − fn (si0 )| d’où, pour m ≥ n ≥ n0 , |fm (x) − fn (x)| ≤ 3. L’exercice suivant explique comment généraliser le résultat au cas où K n’est pas séparable. t u Exercice 2.1.12 Soit K un espace topologique compact et (fn )n une suite de fonctions à valeurs complexes, uniformément bornée et équicontinue sur K. On considère l’application h : K → l∞ , k k∞ x 7→ fn (x) n . Pour tout n ∈ IN et tout u ∈ l∞ on pose ϕn (u) = un . 1) Montrer que h est bien définie et continue. 2) Montrer que h(K) est compact et (donc) séparable dans l∞ , k k∞ . 27 3) Montrer qu’il existe une sous-suite ϕnk qui converge uniformément sur h(K), en déduire qu’il existe une sous-suite fnk qui converge uniformément sur K. Les deux exercices qui suivent sont des applications classiques du théorème d’Ascoli. Rappelons la définition suivante. Définition 2.1.13 Soit T un opérateur linéaire continu de E, k kE dans F, k kF . On dit que T est un opérateur compact si l’image par T de la boule unité fermée de E est relativement compacte dans F Exercice 2.1.14 On note Lipα [0, 1] l’ensemble des fonctions α-Hölderiennes sur (y)| . On [0, 1]. Pour tout f ∈ Lipα [0, 1] on note kf kα := kf k∞ + Supx6=y |f (x)−f |x−y|α rappelle que que Lipα [0, 1] muni de k kα est un espace de Banach (voir l’exercice 1.2.9). Montrer que la boule unité fermée de Lipα [0, 1] , k kα est une partie compacte dans C [0, 1] , k k∞ . On peut interpreter l’exercice ci-dessus identité est en disant que l’application un opérateur compact de Lipα [0, 1] , k kα dans C [0, 1] , k k∞ . Les opérateurs intégraux forment une large classe d’opérateurs compacts, la situation la plus simple est décrite par l’exercice qui suit. Exercice 2.1.15 Soit K(x, y) une fonction continue sur [0, 1] × [0, 1]. On munit C [0, 1] de la norme de la convergence uniforme kf k∞ := Sup0≤x≤1 |f (x)|. Pour R1 tout f ∈ C [0, 1] on pose T f (x) := 0 K(x, y)f (y)dy. Montrer que T est une application linéaire continue de C [0, 1] , k k∞ dans lui-même. Montrer que T est un opérateur compact. Le théorème d’Ascoli joue un rôle central dans la théorie des familles normales, il permet en particulier d’établir le théorème de Montel qui est la première pierre de cette théorie. Théorème 2.1.16 (Montel) Toute suite de fonctions holomorphes uniformément bornée sur un ouvert du plan complexe possède une sous-suite qui converge uniformément sur tout compact. t u Soit Ω un ouvert du plan complexe et (fn )n une suite de fonctions holomorphes sur Ω telle que Supn kfn k∞ =: M < +∞. D’ après le théorème 2.1.11, il suffit de montrer que (fn )n est équicontinue sur Ω. Soit z0 ∈ Ω et r < dist(z0 , Ω) . D’après la formule de Cauchy, pour tout u tel que |u| < r on a : Z 2π fn (z0 + reiθ ) iθ 1 re dθ fn (z0 + u) = 2π 0 reiθ − u 28 il s’ensuit que 1 fn (z0 + u) − fn (z0 + u ) = 2π 0 puis, lorsque max(|u|, |u0 |) < r 2 2π 0 fn (z0 + reiθ )(u − u0 ) iθ re dθ (reiθ − u)(reiθ − u0 ) : 1 |fn (z0 + u) − fn (z0 + u )| ≤ 2π 0 Z Z 2π |fn (z0 + reiθ )| 0 Cela prouve l’équicontinuité de (fn )n en z0 . |u − u0 | 4M |u − u0 |. r 2 rdθ ≤ (2) r t u Exercice 2.1.17 Montrer que toute suite bornée dans H ∞ (Ω) qui converge simplement converge aussi uniformément sur tout compact de Ω. Donner un exemple où la convergence est simple mais pas uniforme sur Ω. Exercice 2.1.18 Soit Ω un ouvert borné du plan complexe et z0 ∈ Ω. Soit B la boule unité fermé de H ∞ (Ω). Montrer qu’il existe f0 ∈ B telle que |f00 (z0 )| = supf ∈B |f 0 (z0 )|. Dans la preuve du théorème d’Ascoli, on voit en filigrane que l’équicontinuité permet de propager la convergence simple d’une partie S à son adhérence et que cette convergence est uniforme si S est compacte. On peut, dans cet esprit, établir la proposition suivante : Proposition 2.1.19 Soit X un espace topologique et S une partie dense dans X. Soit (Y, d) un espace métrique complet et (fn )n une suite d’applications de X dans Y qui converge simplement sur S et est équicontinue sur X. Alors (fn )n converge uniformément sur tout compact de X et donc simplement sur X. Exercice 2.1.20 En s’inspirant de la preuve du théorème d’Ascoli, démontrer la proposition 2.1.19. Voici une situation où la convergence uniforme se déduit immédiatement de la convergence simple grâce à l’équicontinuité. Il s’agit d’etablir une propriété utile de permutation d’une forme linéaire et d’une intégrale. Ce résultat est une simple application du théorème de Fubini lorsque l’on sait que la forme linéaire est induite par une mesure. A l’inverse, il fournit une preuve du théorème de Fubini pour les fonctions continues, disons sur [0, 1] × [0, 1], et l’intégrale de Riemann. Exercice 2.1.21 Soit (K, d) un espace métrique compact et f (t, x) une fonction continue sur [0, 1] × K. Soit λ une forme linéaire continue sur C(K), k k∞ . Pour tout N ∈ IN on pose N −1 1 X k f ( , x). SN (x) := N k=0 N 29 R1 1) Montrer que les fonctions t 7→ hλ, f (t, x)i et x 7→ 0 f (t, x)dt sont respectivement continues sur [0, 1] et K. R1 2) Montrer que la suite de fonctions SN converge uniformément vers 0 f (t, x)dt sur K. R1 R1 3) Montrer que hλ, 0 f (t, ·)dti = 0 hλ, f (t, ·)idt. 2.1.3 Le théorème de Banach-Alaoglu On peut utiliser la proposition 2.1.19 pour établir une propriété de compacité du dual topologique connue sous le nom de théorème de Banach-Alaoglu. Commençons par expliquer la problématique. Considérons un espace vectoriel normé E, k k et son dual topologique E 0 , k| k| muni de la norme de la convergence uniforme (voir la sous-section 1.4.1). Soit (ϕn )n une suite de formes linéaires appartenant à la boule unité fermée BE 0 de E 0 . On peut considérer (ϕn )n comme une suite de fonctions sur BE . Cette suite est uniformément bornée puisque sup |ϕn (x)| = k|ϕn k| ≤ 1 x∈BE elle est également équicontinue car |ϕn (x) − ϕn (y)| ≤ k|ϕn k| kx − yk ≤ kx − yk. On ne peut cependant pas appliquer le théorème d’Ascoli pour en déduire que (ϕn )n possède une sous-suite qui converge uniformément sur BE (c’est à dire pour k| k|) car la boule BE n’est compacte que lorsque E est de dimension finie. Néanmoins, nous allons voir que lorsque E est séparable, les méthodes utilisées dans la preuve du théorème d’Ascoli permettent de montrer que (ϕn )n possède une sous-suite qui converge simplement. Plus précisément, nous allons établir le résultat suivant : Théorème 2.1.22 (Banach-Alaoglu) Soit E, k k un espace vectoriel normé séparable. Toute suite bornée de formes linéaires continues sur E possède une soussuite qui converge simplement vers une forme linéaire continue sur E. La démonstration est détaillée dans l’exercice qui suit. Exercice 2.1.23 Soit (E, k k) un espace normé séparable et (ϕn )n une suite bornée de formes linéaires continues sur E. 1) Montrer que (ϕn )n est équicontinue sur E. 2) Soit (xk )k une suite dense dans E. Montrer qu’après extraction, ϕn (xk ) n converge pour tout k (utiliser le procédé diagonal). 3) Montrer que (ϕn )n possède une sous-suite (ϕni )i telle que ϕni (x) i converge pour tout x ∈ E (on utilisera la proposition 2.1.19). Montrer que ϕ(x) := limi ϕni (x) est une forme linéaire continue sur E. 30 En fait, on peut montrer que sous les hypothèses du théorème 2.1.22, il existe une distance d sur BE 0 pour laquelle la convergence équivaut à la convergence simple et (BE 0 , d) est compact. Ceci est exposé dans l’exercice suivant. Exercice 2.1.24 Soit (E, k k) un espace normé séparable et (ek )k une suite dense dans BE . Pour λ, µ ∈ BE 0 on pose d(λ, µ) := ∞ X 2−k |λ(ek ) − µ(ek )|. k=1 1) Montrer que d est une distance sur BE 0 puis que d(λn , λ) tend vers 0 si et seulement si (λn )n converge simplement vers λ sur E. 2) Montrer que (BE 0 , d) est compact. Il faut souligner que le théorème 2.1.22 est en général faux dans les espaces non séparables. Voici un exemple très simple : Exercice 2.1.25 Montrer que la suite de formes linéaires ϕn définie par ϕn (x) := xn sur l∞ ne possède aucune sous-suite qui converge simplement. On verra dans la leçon 3 comment le théorème de Banach-Alaoglu permet de montrer que toute suite bornée d’un espace de Hilbert -même non séparable- possède une sous-suite faiblement convergente. L’une des applications importantes du théorème de Banach-Alaoglu concerne les suites de mesures de probabilité. Nous allons détailler cet aspect et voir comment en déduire l’existence de mesures invariantes. Le théorème de Radon-Riesz (voir l’énoncé 1.4.11) stipule que toute forme linéaire continue positive sur C(K) est de la forme Λµ pour une unique mesure borélienne finie sur K. Lorsque C(K) est séparable (par exemple si K est un espace métrique), on peut coupler les théorèmes de Radon-Riesz et de Banach-Alaoglu pour voir que toute suite de mesures de probabilité possède une sous-suite qui converge faiblement. Théorème 2.1.26 Soit (µn )n une suite de mesures boréliennes sur un compact K de IRd . Si µn (K) = 1 pour tout n ∈ IN alors (µn )n admet une sous-suite R (µnk )k qui converge faiblement vers une mesure de probabilité µ ; c’est à dire lim k K f dµnk = R f dµ pour tout f ∈ C(K). K Si τ : K → K est une transformation continue et µ une mesure borélienne finie sur K on définit la mesure image τ∗ µ de µ par τ en posant : R R f d(τ µ) := f ◦ τ dµ. ∗ K K On dit qu’une mesure µ est invariante par τ lorsque τ∗ µ = µ. L’exercice suivant montre comment obtenir de telles mesures. 31 Exercice 2.1.27 Soit K un compact de IRd et τ : K → K une transformation continue. Soit m une mesure borélienne de probabilité sur K. Pour tout n ∈ IN on 1 n n pose µn := n+1 m+τ∗ m+···τ∗ m (ici τ désigne l’itérée n- ième de τ ). Montrer qu’il existe une sous-suite de µn qui converge faiblement vers une mesure de probablité invariante par τ . 2.2 Questions d’approximation et de densité Un théorème célèbre et très utile de Weierstrass nous apprend que toute fonction continue sur un segment de IR peut être uniformément approchée par des polynômes. Le but de cette partie est d’étendre ce résultat de densité à des fonctions continues définies sur des espaces plus généraux. On établira plusieurs critères de densité dont le plus connu est le suivant. Théorème 2.2.1 (Stone-Weierstrass) Soit K un espace topologique compact et H une sous-algèbre de CIR (K). Si H est séparante et contient les constantes alors H est dense dans CIR (K), k k∞ . On dit que H est séparante si, pour toute paire de points distincts x1 , x2 de K il existe une fonction f ∈ H telle que f (x1 ) 6= f (x2 ). Nous distinguons ici les fonctions à valeurs réelles de celles à valeurs complexes ; ainsi CIR (K) (resp. CCI (K)) désigne l’algèbre des fonctions continues à valeurs réelles (resp. complexes) sur K. 2.2.1 Le théorème de Weierstrass Il existe plusieurs démonstrations du théorème de Weierstrass, on peut même expliciter une suite de polynômes qui converge vers une fonction continue sur [0, 1] donnée : Théorème 2.2.2 (Bernstein) Pour tout f ∈ CIR ([0, 1]), la suite Bn (f ) définie par Bn (f )(x) := Pn k=0 Cnk f ( nk )xk (1 − x)n−k est une suite de polynômes qui converge uniformément vers f sur [0, 1]. L’exercice suivant a pour objet de démontrer le théorème de Bernstein. La preuve qu’il développe est de nature probabiliste ; le polynôme de Bernstein Bn (f )(x) y apparait comme l’espérance mathématique d’une variable aléatoire f ◦ Sn prenant ses valeurs dans {f nk , 0 ≤ k ≤ n}. On peut aussi l’écrire dans un langage non probabiliste. 32 P Exercice 2.2.3 Soit f ∈ CIR ([0, 1]) et Bn (f )(x) := nk=0 Cnk f ( nk )xk (1 − x)n−k . Soit X1 , · · ·, Xn · ·· une suite de variables aléatoires indépendantes suivant une loi de Bernoulli de paramètre x ∈ [0, 1]P ; c’est à dire à valeurs dans {0, 1} et telles que 1 P (Xk = 1) = x. On pose Sn := n nk=1 Xk . 1) Montrer que l’espérance de Sn est égale à x et, en utilisant l’indépendance des Xk , que sa variance vaut x(1−x) . En déduire l’inégalité de Bienaymén Tchebychev suivante : P {|Sn − x| ≥ } ≤ 1 , pour tout > 0. 4n2 2) Montrer que l’espérance de f ◦ Sn est égale à Bn (f )(x). 3) En utilisant la continuité uniforme de f sur [0, 1], montrer que pour tout η > 0 il existe (η) > 0 tel que : |f (x) − Bn (f )(x)| ≤ η + X k −x|>(η) k:| n k |f (x) − f ( )|Cnk xk (1 − x)n−k , ∀x ∈ [0, 1]. n 4) Montrer que kf − Bn (f )(x)k∞ ≤ η + kf k∞ 2n(η)2 pour tout η > 0 et conclure. Dans notre démonstration du théorème de Stone-Weierstrass nous aurons besoin d’approcher uniformément la fonction |x| par une suite de polynômes sur [−1, 1]. On peut pour cela utiliser le théorème de Weierstrass, il existe aussi un argument ad-hoc qui exploite un lemme connu sous le nom de Lemme de Dini. Cet argument est détaillé dans l’exercice 2.2.5. Lemme 2.2.4 (Lemme de Dini) Soit K un espace topologique compact. Toute suite (fn )n de CIR (K) qui converge en croissant vers f ∈ CIR (K) converge uniformément. On notera que dans ce lemme, la limite simple f est supposée continue. C’est une hypothèse très forte. Exercice 2.2.5 1) Établir le Lemme de Dini. On observera que, pour tout > 0 fixé, K coı̈ncide avec la réunion d’ouverts ∪n {x ∈ K / f (x) − fn (x) < }. 2) On définit une suite de polynômes (Pn )n par P0 = 0 et la relation de récurrence 1 2 2 Pn+1 = Pn + 2 X −(Pn ) . Vérifier par récurrence que 0 ≤ Pn (x) ≤ Pn+1 (x) ≤ |x| pour tout n et tout x ∈ [−1, 1]. Montrer que la suite Pn (x) converge en croissant vers |x|. Justifier l’uniformité de la convergence. 33 2.2.2 Le théorème de Stone-Weierstrass Nous allons tout dabord établir le résultat général de densité suivant puis nous en déduirons le théorème de Stone-Weierstrass. Théorème 2.2.6 Soit K espace topologique compact et H une partie de CIR (K) telle que : i) ∀u, v ∈ H, M ax(u, v) ∈ H et M in(u, v) ∈ H ii) ∀x1 6= x2 ∈ K, ∀α1 , α2 ∈ IR, ∃u ∈ H tel que u(x1 ) = α1 et u(x2 ) = α2 . Alors H est dense dans CIR (K), k k∞ . La démonstration, qui est détaillée ci-dessous, met bien en lumière le mécanisme permettant d’approcher une fonction continue par des fonctions de la classe H. t u Soit f ∈ CIR (K) et > 0 on cherche h ∈ H telle que kh − f k∞ < . Fixons x dans K. Par hypothèse, pour tout y ∈ K il existe une fonction uy ∈ H telle que uy (x) = f (x) et uy (y) = f (y). Considérons alors les ouverts Oy définis par : Oy := {x0 ∈ K/ uy (x0 ) > f (x0 ) − }. Comme uy (y) = f (y) on a K ⊂ ∪y6=x Oy et donc, par compacité de K, on trouve y1 , y2 , · · ·, yr distincts de x tels que K ⊂ ∪ri=1 Oyi . On pose alors vx := M ax(uy1 , · · ·, uyr ). On vérifie immédiatement que vx ∈ H, vx (x) = f (x) et vx > f − sur K. Nous faisons maintenant varier x dans K et considérons la collection de fonctions vx et les ouverts Ωx définis par : Ωx := {x0 ∈ K/ vx (x0 ) < f (x0 ) + }. Puisque vx (x) = f (x) on a K ⊂ ∪x Ox et donc, par compacité de K, on trouve x1 , x2 , · · ·, xr tels que K ⊂ ∪ri=1 Oxi . On pose alors h = M in(vx1 , · · ·, vxr ). On vérifie immédiatement que h ∈ H et que f − < h < f + sur K. t u Voici une application directe du théorème 2.2.6. Définition 2.2.7 Soit (K, d) un espace métrique. L’espace Lip(K) des fonctions Lipschitziennes à valeurs réelles sur K est défini comme étant l’espace des fonctions f : K → IR pour lesquelles il existe une constante Cf > 0 telle que |f (x) − f (y)| ≤ Cf d(x, y) pour tout x et tout y de K. Exercice 2.2.8 Soit (K, d) un espace métrique compact. Vérifier que pour tout x0 fixé dans K la fonction x 7→ d(x0 , x) est dans Lip(K). Montrer que Lip(K) est dense dans CIR (K), k k∞ . 34 Expliquons maintenant comment le théorème de Stone-Weierstrass se déduit du théorème 2.2.6. t u On va montrer que H satisfait les hypothèses du théorème 2.2.6. i) Comme M ax(u, v) = 12 u+v+|u−v| et M in(u, v) = 21 u+v−|u−v| , il suffit de montrer que si h ∈ H alors |h| ∈ H. Utilisons à cet effet une suite de polynômes Pn qui converge uniformément sur [−1, 1] vers la fonction |x| (voir l’exercice 2.2.5). On peut supposer h non identiquement nulle puis, en remplaçant h par khkh∞ , que −1 ≤ h ≤ 1. Alors Pn (h) converge vers |h| dans CIR (K), k k∞ et, puisque H est une algèbre tout comme H, cela montre que |h| ∈ H. ii) Si x1 6= x2 ∈ X alors il existe h ∈ H telle h(x1 ) 6= h(x2 ). En résolvant le système linéaire λh(x1 ) + µ = α1 , λh(x2 ) + µ = α2 , on trouve une fonction h0 := λh + µ1X qui est dans H et vérifie h0 (xi ) = αi pour i = 1, 2. t u Dire qu’une algèbre de fonctions contient les constantes est bien sûr équivalent à dire qu’elle contient la fonction constante égale à 1. Il peut être utile de remplacer cette hypothèse par celle de l’existence d’une fonction ne s’annulant pas. C’est ce que détaille l’exercice suivant. Exercice 2.2.9 Soit K un espace topologique compact et H une sous-algèbre de CIR (K) qui est séparante. Si x0 ∈ K on note Nx0 := {f ∈ CIR (K) tel que f (x0 ) = 0}. 1) Montrer que Nx0 est une sous-algèbre fermée stricte de CIR (K). 2) Montrer que si H contient une fonction ne s’annulant pas sur K alors H est dense dans CIR (K), k k∞ . 3) Montrer que si H n’est pas dense dans CIR (K), k k∞ alors il existe un unique x0 ∈ K tel que H soit contenue dans Nx0 . 4) Montrer que si H n’est pas dense dans CIR (K), k k∞ alors il existe un unique x0 ∈ K tel que H soit dense dans Nx0 . On a ainsi un énoncé alternatif du théorème de Stone-Weierstrass. Théorème 2.2.10 (Stone-Weierstrass) Soit K un espace topologique compact et H une sous-algèbre de CIR (K) qui est séparante. On a alors l’alternative suivante : 1) H est dense dans CIR (K), k k∞ ou bien 2) il existe x0 ∈ K tel que H soit dense dans {f ∈ CIR (K) tel que f (x0 ) = 0}. Le point x0 est unique. Pour finir cette partie, passons en revue quelques applications concrètes du théorème de Stone-Weierstrass. 35 Observons tout d’abord que la généralisation du théorème de Weierstrass aux fonctions de plusieurs variables découle immédiatement du théorème de StoneWeierstrass : Théorème 2.2.11 Soit K un compact de IRd . Toute fonction f ∈ CIR (K) est limite uniforme d’une suite (Pn )n de polynômes de d variables (Pn ∈ IR[X1 , · · ·, Xd ]). L’exercice suivant illustre la puissance du théorème de Stone-Weierstrass dans le cadre des espaces de fonctions continues sur un compact métrique. On y voit comment retrouver facilement le théorème 1.2.4 sur la séparabilité de ces espaces (voir aussi l’exercice 1.2.5) ou encore comment établir le théorème de prolongement de Tietze. Exercice 2.2.12 Soit (K, d) un espace métrique compact. 1) Soit A une partie dénombrable et dense dans (K, d). Montrer que l’algèbre en- gendré par les fonctions ϕa (x) := d(a,x) où a ∈ A est dense dans C(K), k k∞ . En déduire que l’espace C(K), k k∞ est séparable. 2) Soit F une partie fermée de K. Montrer que toute fonction continue sur F peut être uniformément approchée sur F par des fonctions continues sur K et de même norme que la fonction initiale. 3) Soit f une fonction continue sur K. Construire par récurrence une suite de P 1 fonctions fn ∈ C(K) telle que kfn k∞,K ≤ 2n−1 et kf − 1≤i≤n fi k∞,F ≤ 21n . En déduire qu’il existe une fonction continue sur K dont la restriction à F est égale à f . Exercice Soit m la mesure de Lebesgue dans IRd et f ∈ L1 (m). Montrer R 2.2.13 α que si f t1α1 · · · td d 1K dm = 0 pour tout monôme tα1 1 · · · tαd d et tout compact K alors f = 0. Il existe une version complexe du théorème de Stone-Weierstrass : Théorème 2.2.14 (Stone-Weierstrass complexe) Soit K un espace topologique compact et H une sous-algèbre de CCI (K). Si H est séparante, contient les constantes et est auto-conjuguée alors H est dense dans CCI (K), k k∞ . On dit que H est auto-conjuguée si f ∈ H ⇔ f¯ ∈ H. Les exercices qui suivent concernent la preuve du théorème de Stone-Weierstrass complexe ainsi que quelques-unes de ses applications. Exercice 2.2.15 On reprend les notations du théorème 2.2.14. Vérifier que HIR := {h ∈ H t.q. f (x) ∈ IR ∀x ∈ K} satisfait les hypothèse du théorème 2.2.1. En déduire que H est dense dans CCI (K), k k∞ . 36 Exercice 2.2.16 Soient K1 et K2 deux espaces métriques compacts. On note C(K1 )tensorC(K2 ) le sous-espace vectoriel de C(K1 × K2 ) engendré par les fonctions de la forme f (x)g(y) où f ∈ C(K1 ) et g ∈ C(K2 ). Montrer que C(K1 )tensorC(K2 ) est dense dans C(K1 × K2 ), k k∞ (on traitera les cas réel et complexe). Exercice 2.2.17 Soit (Kp , dp )p∈IN une collection dénombrable d’espaces métriques compacts et (K, dpr ) l’espace produit (voir le théorème 2.1.7). Montrer que toute fonction continue sur K est limite uniforme d’une suite de fonctions continues ne dépendant que d’un nombre fini de variables. On peut utiliser le théorème de Stone-Weierstrass complexe pour montrer que les polynômes trigonométriques, c’est à dire les combinaisons linéaires à coefficients complexes des monômes {e2iπkt , k ∈ ZZ} sont denses dans l’espace CCI (T ) des fonctions continues sur le cercle unité T identifié à IR/ZZ. Ceci est important dans la théorie hilbertienne des séries de Fourier. Exercice 2.2.18 Montrer que toute fonction continue sur le cercle unité IR/ZZ est limite uniforme d’une suite de polynômes trigonométriques. Voici une application du théorème de Stone-Weierstrass qui nous sera utile pour caractériser une classe d’algèbres de Banach commutatives. Exercice 2.2.19 Soit (A, k k) une C-algèbre I de Banach commutative unitaire munie d’une involution ? : A → A. Soit ∆ un espace topologique compact et G : A 3 x 7→ x̂ ∈ C(∆) un morphisme d’algèbre isométrique (i.e kx̂k∞ = kxk, ∀x ∈ A) vérifiant les deux conditions suivantes : ∀h1 6= h2 ∈ ∆, ∃ x ∈ A tel que x̂(h1 ) 6= x̂(h2 ) x̂¯ = xb? pour tout x ∈ A. 1) Montrer que G(A) est dense dans C(∆), k k∞ . 2) En déduire que G est surjectif. 2.3 L’universalité de C(K) Dans cette partie nous allons principalement utiliser l’injection isométrique J d’un espace de Banach dans son bidual et le théorème de Banach-Alaoglu pour réaliser certains espaces de Banach comme des sous-espaces de l’espace C(K). 37 2.3.1 Plongements d’espaces de Banach dans C(K) Considérons un espace normé séparable (E, k kE ) et E 0 , k| k| son dual topologique. Notons BE (resp. BE 0 ) la boule unité fermée de E (resp. E 0 ). Nous avons vu (théorème 2.1.22 et exercice 2.1.24) que la séparabilité de E et le théorème de Banach-Alaoglu permettent de munir BE 0 d’une distance d telle que (BE 0 , d) soit un espace métrique compact et telle que d(λn , λ) tende vers 0 si et seulement si (λn )n converge simplement vers λ sur E. Rappelons que cette distance est donnée par d(λ, µ) := ∞ X 2−k |λ(ek ) − µ(ek )| k=1 où (ek )k est une suite dense dans BE . Adoptons la notation plus parlante (K, d) pour l’espace métrique compact (BE 0 , d) et munissons l’espace C(K) des fonctions continues sur (K, d) de la norme de la convergence uniforme k k∞ . Nous allons construire un plongement isométrique de (E, k k) dans C(K), k k∞ . t u Pour tout x ∈ E, notons x̂ la fonction d’évaluation définie sur K par x̂(λ) := λ(x), ∀λ ∈ K. Il se trouve que x̂ ∈ C(K) pour tout x ∈ E. En effet, si λn converge vers λ dans (K, d) alors λn converge simplement vers λ et en particulier x̂(λn ) = λn (x) → λ(x) = x̂(λ). Nous disposons donc d’une application naturelle G : E 3 x 7→ x̂ ∈ C(K). Il est facile de voir que G est linéaire, cela tient précisément au fait que les évaluations x̂ opèrent sur des formes linéaires : (αx\ b1 + xb2 (λ). 1 + x2 )(λ) = λ(αx1 + x2 ) = αλ(x1 ) + λ(x2 ) = αx Vérifions que G est continue de (E, k kE ) dans C(K), k k∞ : kG(x)k∞ = kx̂k∞ = sup |x̂(λ)| = sup |x̂(λ)| = sup |λ(x)| ≤ kxkE . λ∈K λ∈BE 0 λ∈BE 0 Le théorème de Hahn-Banach (1.4.3) montre qu’en fait l’inégalité ci-dessus est une égalité (d’après ce théorème il existe λ ∈ BE 0 telle que λ(x) = kxkE ). Autrement dit, l’application G est une isométrie linéaire. Un argument classique permet de voir que l’image de l’isométrie G est fermée 38 dans C(K), k k∞ lorsque (E, k kE ) est un espace de Banach. En effet, si f ∈ C(K) ∩ G(E) alors il existe xn ∈ E telle que x cn converge vers f dans C(K). Puisque G est isométrique, la suite (xn )n est de Cauchy dans E. Il existe donc x ∈ E tel que kxn −xkE → 0 et, par continuité de G, cela entraine que f = limn x cn = limn G(xn ) = G(x). t u Cette approche n’utilise la séparabilité de E qu’à deux reprises, la première pour munir BE 0 d’une structure d’espace métrique compact et la seconde pour utiliser le théorème de Hahn-Banach 1.4.3. Nous verrons plus tard que le théorème de HahnBanach est vrai pour tout espace normé, nous verrons également que l’on peut toujours munir BE 0 d’une topologie en faisant un espace compact et pour laquelle les évaluations x̂ sont continues. Ainsi, l’analyse que nous venons de faire s’adapte aux espaces de Banach non séparables et permet d’établir qu’ils sont isométriquement isomorphe à un sous-espace fermé de C(K), k k∞ pour un espace topologique compact K. Théorème 2.3.1 Tout espace de Banach (E, k kE ) est isométriquement isomorphe à un sous-espace fermé de C(K), k k∞ où K est un certain espace topologique compact convexe dépendant de E. En fait, l’hypothèse de séparabilité permet d’obtenir un résultat beaucoup plus frappant en ce sens que l’on peut prendre comme compact K le segment [0, 1]. Nous allons exposer en détail comment cela est possible et établirons donc le Théorème 2.3.2 (Banach-Mazur) Tout espace de Banach séparable (E, k kE ) est isométriquement isomorphe à un sous-espace fermé de C([0, 1]), k k∞ . On sait que C([0, 1]), k k∞ est séparable (le théorème de Weierstrass permet de voir que Q[X] I est une partie dense), le théorème 2.3.2 montre qu’il est en quelque sorte l’espace de Banach séparable universel puisqu’il contient tous les autres. Ce théorème illustre aussi l’extrême ”richesse” de l’espace C [0, 1] . Nous allons exploiter la structure de l’espace métrique compact K (c’est à dire BE 0 ) pour plonger isométriquement E dans C([0, 1]). Commençons par observer que (K, d) ainsi que toutes ses boules sont convexes, cela est du au fait que K est contenu 39 dans l’espace vectoriel E 0 et que la fonction µ 7→ d(λ0 , µ) est convexe : d (λ0 , tµ1 + (1 − t)µ2 = ∞ X 2−k |λ0 (ek ) − tµ1 (ek ) − (1 − t)µ2 (ek )| = k=1 ∞ X 2−k |t λ0 (ek ) − µ1 (ek ) + (1 − t) λ0 (ek ) − µ2 (ek ) | ≤ k=1 t ∞ X −k 2 |λ0 (ek ) − µ1 (ek )| + (1 − t) k=1 ∞ X 2−k |λ0 (ek ) − µ2 (ek )| = k=1 td(λ0 , µ1 ) + (1 − t)d(λ0 , µ2 ). Grâce à cette propriété géométrique de (K, d), nous pouvons construire une courbe de Peano γ sur K (cette construction est expliquée à l’exercice 2.3.4) : Proposition 2.3.3 Si (K, d) est un espace métrique compact convexe dont toutes les boules sont convexes alors il existe une application γ : [0, 1] → K qui est continue et surjective. Voyons comment réaliser le plongement de E dans C [0, 1] au moyen d’une courbe de Peano γ : [0, 1] → K. t u Pour tout x ∈ E, la fonction [0, 1] 3 t 7→ (x̂ ◦ γ)(t) est continue comme composée d’applications continues. On dispose donc d’une application linéaire P : (E, k k) → C [0, 1] , k k∞ x 7→ x̂ ◦ γ. Que cette aplication soit isométrique résulte du fait que γ est surjective et G isométrique : kP(x)k∞ = Supt∈[0,1] |x̂ γ(t) | = Supλ∈K |x̂ λ | = kG(x)k∞ = kxkE . À nouveau, l’image P(E) est fermée dans C [0, 1] car E est un espace de Banach et P une isométrie. t u Exercice 2.3.4 Soit (K, d) un espace métrique compact convexe dont toutes les boules sont convexes. 1) Construire une suite dense dans K de la forme xi1 ,i2 ,···,ip p où ij ∈ {1, 2, · · ·, nj }, dont les points sont deux à deux distincts et telle que : 1 , ∀1 ≤ j ≤ np . d xi1 ,i2 ,···,ip−1 , xi1 ,i2 ,···,ip−1 ,ij ≤ 2p−1 2) Construire une suite d’applications continues γp : [0, 1] → K telles que : 40 γp (ti1 ,i2 ,···,ip ) = xi1 ,i2 ,···,ip où les ti1 ,i2 ,···,ip sont deux à deux distincts γp est constante au voisinage des points ti1 ,i2 ,···,ip 1 d γp (t), γp−1 (t) ≤ 2p−1 , ∀t ∈ [0, 1]. Indication : construire ces applications par récurrence. La courbe γp+1 est obtenue en ne modifiant la courbe γp qu’au voisinage des points où celle-ci est constante. 3) Montrer que γ(t) := limp γp (t) définit une application continue et surjective de [0, 1] dans K. 2.3.2 Vers le théorème de Gelfand-Naimark On se propose ici d’expliquer comment les idées exposées dans la partie précédente peuvent être adaptées pour obtenir des plongements d’algèbres. Toutes les algèbres que nous considèrerons seront complexes. Définition 2.3.5 On dit d’une algèbre A qu’elle est de Banach lorsqu’elle est munie d’une norme k k vérifiant l’inégalité kxyk ≤ kxk kyk, ∀x, y ∈ A et pour laquelle l’espace vectoriel sous-jacent A, k k est un espace de Banach. L’algèbre des fonctions continues sur un compact C(K), k k∞ est le prototype d’algèbre de Banach commutative et unitaire ; le produit étant le produit usuel des fonctions et l’élément neutre la fonction constante 1K . Observons que cette algèbre est muni d’une involution ? : C(K) 3 f 7→ f¯ ∈ C(K). L’algèbre des applications linéaires continues Lc (E), k| k| d’un espace de Banach E, k k dans lui même est le prototype d’algèbre de Banach non commutative et unitaire ; le produit étant la composition ◦ des applications et l’élément neutre l’application identité IdE . Les espaces L1 , munis du produit de convolution, sont des algèbres de Banach commutatives non-unitaires. Pour obtenir un plongement d’une algèbre A dans une algèbre du type C(K) on peut, comme nous l’avons fait pour les espaces vectoriels, utiliser la transformation x 7→ x̂. Cependant, pour que cette transformation soit un morphisme d’algèbres, il n’est plus suffisant de faire opérer les évaluations x̂ sur des formes linéaires. En effet, pour que xd b1 et xb2 il faut que celles-ci soient 1 x2 soit le produit des fonctions x évaluées sur des h tels que : h(x1 x2 ) = xd b1 (h) xb2 (h) = h(x1 )h(x2 ). 1 x2 (h) = x 41 Autrement dit, nous devons faire opérer les évaluations sur les morphismes d’algèbres h : A → C. I Ceci motive la définition et la proposition qui suivent. Définition 2.3.6 Les caractères d’une algèbre commutative et unitaire A sont les morphismes d’algèbres surjectifs de A sur C I c’est à dire les formes linéaires non identiquement nulles h sur A telles que h(xy) = h(x)h(y) pour tout x, y ∈ A. On note ∆ l’ensemble des caractères d’une telle algèbre. Proposition 2.3.7 Soit A, k k une algèbre de Banach commutative et unitaire. Alors ∆ est contenu dans la boule unité fermée BA0 du dual topologique de A. t u Soit h ∈ ∆. Supposons qu’il existe x0 ∈ A tel que h(x0 ) > kx0 k. Posons P∞x :=k alors h(x) = 1 et kxk < 1. Puisque l’espace A est de Banach, y := − k=1 x est bien défini et xy = x + y. On a donc h(y) = h(y)h(x) = h(y) + h(x) = h(y) + 1 ce qui est impossible. Ainsi h(a) ≤ kak pour tout a ∈ A, comme h ∈ A0 ceci montre simultanément que h est continue sur A et k|hk| ≤ 1. t u x0 , h(x0 ) Considérons une algèbre de Banach commutative et unitaire A, k k . Il s’avère que BA0 peut être muni d’une topologie d’espace compact pour laquelle les évaluations sont continues (nous avons détaillé cela dans le cas séparable). De la continuité des évaluations on déduit facilement que ∆ est fermé dans BA0 et donc que ∆ est lui aussi un espace topologique compact. On peut donc reprendre la méthode de plongement par les évaluations en remplacant BA0 par ∆ et définir la transformation de Gelfand G : A 3 x 7→ x̂ ∈ C(∆) par x̂(h) = h(x) pour tout caractère h ∈ ∆. Cette fois, la transformation G est clairement un morphisme d’algèbres. Cependant, il n’est pas clair qu’elle soit isométrique ni même injective (on ne peut plus utiliser le théorème de Hahn-Banach). Le théorème de Gelfand-Naimark montre que, pour les algèbres de Banach commutatives possèdant une involution ? similaire à l’involution f 7→ f¯ de C(K), la transformation de Gelfand est un isomorphisme isométrique. Nous étudierons ces questions lorsque nous serons en mesure de mieux étudier G et de munir C(∆) de la topologie voulue. En attendant, la proposition suivante constitue un premier pas dans cette direction. On y montre comment établir la surjectivité de la transformation de Gelfand sachant que celle-ci est isométrique. Soulignons que cette proposition a été démontrée à l’exercice 2.2.19 et que ses hypothèses sont nécessaires à la conclusion du théorème de Gelfand-Naimark. 42 Proposition 2.3.8 Soit (A, k k) une C-algèbre I de Banach commutative unitaire munie d’une involution ? : A → A et ∆ un espace topologique compact. Soit G : A 3 x 7→ x̂ ∈ C(∆) un morphisme d’algèbre isométrique (i.e kx̂k∞ = kxk, ∀x ∈ A). Si Gvérifie les deux conditions suivantes ∀h1 6= h2 ∈ ∆, ∃ x ∈ A tel que x̂(h1 ) 6= x̂(h2 ) x̂¯ = xb? pour tout x ∈ A. alors G est un isomorphisme d’algèbre (isométrique). 43 44 Leçon 3 Méthodes hilbertiennes Les idées de la physique du XIXe siècle, dominée mathématiquement par les équations différentielles et intégrales et la théorie des fonctions analytiques, étaient devenues insuffisantes. La nouvelle théorie quantique avait besoin d’un point de vue théorique plus général, les notions primitives elle-mêmes incluant déjà des distributions probabilistes et des espaces fonctionnels de dimension infinie [....]. S. Ulam 3.1 3.1.1 Structure hermitienne Formes sesquilinéaires et hermitiennes Nous revoyons ici en détail les propriétés des formes sesquilinéaires sur un espace vectoriel complexe. Définition 3.1.1 Soit E un C-espace I vectoriel et B : E × E → C I une application. On dit que B est une forme sesquilinéaire si I pour tout x0 , y0 ∈ E. x 7→ B(x, y0 ) et y 7→ B(x0 , y) sont des formes C-linéaires Une telle forme est dite hermitienne si, de plus, elle vérifie B(x, y) = B(y, x) pour tout x, y ∈ E. 45 Il est important de mentionner deux identités algébriques satisfaites par toute forme sesquilinéaire. La première jouera un rôle fondamental dans la preuve du théorème de projection 3.2.1, la seconde montre qu’une forme sesquilinéaire est entièrement déterminée par sa valeur sur la diagonale de E × E. Ces identités s’obtiennent par un simple calcul. Proposition 3.1.2 Toute forme esquilinéaire B sur un C-espace I vectoriel vérifie l’identité du parallélogramme : B x+y x+y , 2 2 +B x−y x−y , 2 2 = 1 2 B(x, x) + B(y, y) et l’identité de polarisation : B(x, y) = 1 4 B(x + y, x + y) − B(x − y, x − y) + iB(x + iy, x + iy) − iB(x − iy, x − iy) . Notons que toute forme hermitienne prend des valeurs réelles sur la diagonale de E × E, on a alors la précision suivante : Définition 3.1.3 Une forme hermitienne B est dite positive si B(x, x) ≥ 0 pour tout x ∈ E. Elle est dite définie positive si, de plus, B(x, x) = 0 ⇒ x = 0. Un produit hermitien sur E est une forme hermitienne définie positive, on note alors souvent (x|y) pour B(x, y). En observant que, pour tout produit hermitien (·|·), le trinôme en t ∈ IR défini par (x + teiθ y|x + teiθ y) où θ est choisi pour que e−iθ (x|y) soit réel, est toujours positif, on obtient l’importante inégalité de Cauchy-Schwarz : Proposition 3.1.4 Tout produit hermitien satisfait l’inégalité de Cauchy-Schwarz : |(x|y)| ≤ p p (x|x) (y|y) et l’égalité n’a lieu que lorsque x et y sont colinéaires. On déduit immédiatement de l’inégalité de Cauchy-Schwarz que kxk := p (x|x) satisfait l’inégalité triangulaire et définit donc une norme sur l’espace vectoriel où le produit hermitien est donné. Une telle norme est dite norme hermitienne. 46 3.1.2 Espaces de Hilbert Définition 3.1.5 Soit H un C-espace I vectoriel et k k une norme sur H. On dit que (H, k k) est un espace de Hilbert si et seulement si la norme k k est hermitienne et (H, k k) est complet. Parmi les espaces de Banach, les espaces de Hilbert sont ceux dont les propriétés sont les plus proches de celles des espaces de dimension finie. Voyons quelques exemples d’espaces de Hilbert. • L’espace I n = {x = (x1 , · · ·, xn ) ; xj ∈ C} I muni du produit hermitien standard Pn C (x|y) := i=1 xi yi . P complexes de • L’espace l2 := {x = (xj )j ; xj ∈ C I et j |xj |2 < +∞} des suites P∞ modules au carré sommables muni du produit hermitien (x|y)l2 := j=1 xi yi . P Exercice 3.1.6 Montrer que sur l2 les quantités (x|y)l2 := ∞ j=1 xi yi ont un sens, définissent un produit hermitien et que, muni de la norme hermitienne associée, l2 est un espace de Hilbert. • L’espace L2 (X, µ) muni du produit hermitien (f |g) = R X f ḡdµ. • L’espace de Bergman B(Ω) des fonctions holomorphes de module au carré Lebesgue-intégrable sur un ouvert Ω du plan complexe. C’est un sous espace de L2 (Ω, m) où m désigne la mesure de Lebesgue sur le plan complexe. Les espaces L2 (X, µ) et B(Ω) ont été introduits dans la sous-section 1.3.2. Nous y avons vu qu’ils sont effectivement des espaces de Hilbert. 3.1.3 Orthogonalité On considère ici un espace de Hilbert H, k k . Le produit hermitien permet de définir une notion d’angle entre deux vecteurs x et y non nuls. Rappelons ce qui (x|y) se passe dans IR2 . Comme, d’après l’inégalité de Cauchy-Schwarz, la quantité kxkkyk prend ses valeurs dans [−1, 1], on peut prendre pour mesure de cet angle le réel (x|y) = cos θ. θ ∈] − π, π] vérifiant kxkkyk Nous allons discuter ici du cas où ces vecteurs sont orthogonaux, c’est à dire vérifient (x|y) = 0. Définition 3.1.7 Soit H, k k un espace de Hilbert. L’orthogonal A⊥ d’une partie A de H est défini par A⊥ := {x ∈ H / (x|a) = 0, ∀a ∈ A}. 47 En particulier deux vecteurs x, y ∈ H sont dits orthogonaux si (x|y) = 0. Les propriétés suivantes sont faciles, voire évidentes : Proposition 3.1.8 Soit H, k k un espace de Hilbert et A une partie de H. Alors : 1) A⊥ un un sous-espace vectoriel fermé de H 2) A ⊂ B ⇒ B ⊥ ⊂ A⊥ ⊥ 3) A⊥ = V ect A 4) H ⊥ = {0}. Il est utile d’observer qu’à tout a ∈ H on peut associer une forme linéaire continue a sur H en posant ∗ a∗ (x) := (x|a) si bien que A⊥ = ∩a∈A Ker a∗ . La continuité de a∗ résulte de l’inégalité de Cauchy-Schwarz puisqu’en effet |a∗ (x)| ≤ kakkxk. On a même, comme on le vérifiera facilement, k|a∗ k| = kak. 3.2 Le Théorème de projection Le théorème de projection, qui est d’une grande utilité en optimisation, est aussi le point nodal de toute la théorie des espaces de Hilbert. 3.2.1 Projection de meilleure approximation Si C est une partie convexe fermée d’un espace de Hilbert (H, k k) et a un point fixé de H, on cherche un point p tel que : p ∈ C et ka − pk = d(a, C) := Infy∈C ky − ak. Le théorème ci-dessous montre que ce problème a une solution unique et (surtout !) la caractérise. Cette solution est appelée projection de meilleure approximation de a sur C. Théorème 3.2.1 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et C une partie convexe fermée de H. Alors : ∀x ∈ H, ∃!PC (x) ∈ C tel que : kx − PC (x)k = d(x, C). 48 De plus, PC (x) est caractérisé par : y = PC (x) ⇔ y ∈ C et Re(x − y|z − y) ≤ 0, ∀z ∈ C et l’application PC est contractante : kPC (x1 ) − PC (x2 )k ≤ kx1 − x2 k, ∀x1 , x2 ∈ H. t u Existence. Soit (xn )n une suite de points de C telle que kx − xn k2 ≤ d(x, C)2 + n1 . En appliquant l’identité du parallélogramme à (x − xn ) et (x − xp ) et en tenant p 2 p compte du fait que kx − xn +x k ≥ d(x, C)2 (noter que xn +x ∈ C par convexité 2 2 xn −xp 2 1 1 1 de C) on trouve : k 2 k ≤ 2 ( n + p ). La suite (xn )n est donc de Cauchy et converge vers un point de C puisque C est fermé dans un espace complet. On pose PC (x) := limn xn . Unicité. Si a1 et a2 sont deux solutions alors, d’après l’argument précédent, la suite a1 , a2 , a1 , a2 , a1 , · · · converge et donc a1 = a2 . Caractérisation. On a y = PC (x) ⇔ ∀z ∈ C, ∀t ∈ [0, 1] : kx − (1 − t)y − tzk2 ≥ kx − yk2 . L’implication directe utilise la convexité de C, l’autre s’obtient en faisant t = 1. En développant et simplifiant par t on trouve 2 Re (x−y|y −z)+tky −zk2 ≥ 0 d’où, en faisant t = 0, la condition nécessaire et suffisante annoncée. Contraction. Posons y1 := PC (x1 ) et y2 := PC (x2 ). On a ky1 − y2 k2 ≤ ky1 − y2 k2 + Re(x1 − y1 |y1 − y2 ) + Re(x2 − y2 |y2 − y1 ) = Re(x1 − x2 |y1 − y2 ) ≤ kx1 − x2 k × ky1 − y2 k où la première inégalité découle des caractérisations de y1 et y2 et la seconde de Cauchy-Schwarz. t u Exercice 3.2.2 Soit (H, || ||) un espace de Hilbert. 1) Soient C1 et C2 deux parties convexes et fermées de H et PC1 , PC2 les projections orthogonales associées. On suppose que C1 ⊂ C2 . Montrer que : ||PC1 (x) − PC2 (x)||2 ≤ 2 d(x, C1 )2 − d(x, C2 )2 On appliquera l’identité du parallélogramme à x − PC1 (x) et x − PC2 (x). 2) Soit (Cn )n une suite croissante de parties convexes fermées non vides de H et C l’adhérence de la réunion de ces parties. Justifier que C est convexe (fermée). Montrer que d(x, Cn ) converge vers d(x, C) et en déduire que PCn (x) converge vers PC (x). 3.2.2 Supplémentaire orthogonal Le théorème de projection 3.2.1 appliqué à un sous-espace vectoriel fermé de H montre que ce sous-espace possède un supplémentaire orthogonal. C’est un résultat crucial. Soulignons que dans un espace normé de dimension infinie, les sous-espaces (même fermés) n’admettent pas nécessairement de supplémentaire. 49 Théorème 3.2.3 Soit (H, k k) un espace de Hilbert. Pour tout sous-espace vectoriel fermé F de H on a : H = F ⊕ F ⊥. De plus, PF coı̈ncide avec le projecteur associé à cette décomposition en somme directe. t u Comme le produit hermitien est défini positif on a F ∩ F ⊥ = {0}. Ecrivons x = PF (x) + (x − PF (x)). En utilisant la caractérisation de PF (x) et le fait que F est un espace vectoriel, on obtient Re (x − PF (x)|z) ≤ 0 pour tout z ∈ F d’où l’on déduit que (x − PF (x) ∈ F ⊥ . Nous avons montré que H = F + F ⊥ . t u Puisque PF (x) ⊥ (x − PF (x)), on ”retrouve” le théorème de Pythagore : kxk2 = kPF (x)k2 + kx − PF (x)k2 . Corollaire 3.2.4 Pour tout A ⊂ H on a A⊥⊥ = V ectA ⊥ t u Pour le voir il suffit d’écrire d’une part H = V ectA ⊕ V ectA = V ectA ⊕ A⊥ et, d’autre part, H = A⊥ ⊕ A⊥⊥ . t u On sait que toute application linéaire continue T : X → F , où X est un sousespace d’un espace vectoriel normé E et F un espace de Banach, se prolonge de façon unique en une application linéaire continue définie sur l’adhérence de X et à valeurs dans F . Il n’est en général pas possible de prolonger T à l’espace E même si ce dernier est un espace de Banach. Cependant, lorsque E est un espace de Hilbert, ce prolongement existe toujours et ceci est une conséquence du théorème 3.2.3. Théorème 3.2.5 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et (F, k kF ) un espace de Banach. Soit X un sous-espace vectoriel de H et T : X → F une application linéaire continue. Il existe une application linéaire continue T̃ : H → F prolongeant T et telle que |kT |k = |kT̃ |k. La démonstration de ce théorème fait l’objet de l’exercice suivant. Exercice 3.2.6 On reprend les notations et hypothèses du théorème 3.2.5. 1) Montrer que si X 3 xn → x ∈ X alors T (xn ) est une suite de Cauchy dans F . Montrer que si, de plus, X 3 x0n → x ∈ X alors T (xn ) − T (x0n ) → 0. 2) Pour tout x ∈ X et toute suite X 3 xn → x ∈ X on pose T̂ (x) := limn T (xn ). Montrer que T̂ est bien définie, linéaire continue et prolonge T . Montrer que k|T k| = k|T̂ k|. 50 3) Soit p le projecteur orthogonal de H sur X. Montrer que T̃ := T̂ ◦ p satisfait les conclusions du théorème 3.2.5. Le projecteur orthogonal sur un sous-espace de dimension finie est facile à expliciter en utilisant une base orthonormale de ce sous-espace (une telle base existe d’après le procédé de Hilbert-Schmidt). Proposition 3.2.7 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et (ei )i∈I une famille orthonormale finie. Soit FI le sous-espace de H engendré par le famille (ei )i∈I et PI le projecteur orthogonal sur FI . Alors, pour tout x ∈ H on a : P 1) PI (x) = i∈I (x|ei )ei P 2) kxk2 = kx − PI (x)k2 + i∈I |(x|ei )|2 . t u 1) On écrit PI (x) = dans (FI )⊥ on a P i∈I αi ei , la famille étant orthonormale et (PI (x) − x) étant αi = PI (x)|ei = (x|ei ) + (PI (x) − x) |ei = (x|ei ). 2 2 2) Comme PI (x) et (x − PP I (x)) sont orthogonaux on a kxk = kx − PI (x)k + kPI (x)k2 = kx − PI (x)k2 + i∈I |(x|ei )|2 . t u L’inégalité de Parseval-Bessel découle immédiatement de la proposition 3.2.7. Proposition 3.2.8 (Inégalité de Parseval-Bessel) P Pour toute famille orthonormale (ei )i∈I et tout x ∈ H on a : kxk2 ≥ i∈I |(x|ei )|2 . L’exercice suivant a pour objet de montrer, dans le cadre des espaces de Hilbert, que le noyau de toute forme linéaire continue (non nulle) est de codimension un. Exercice 3.2.9 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et ϕ une forme linéaire non nulle ⊥ ⊥ et continue sur H. Observer que Kerϕ 6= {0}. Soit b ∈ Kerϕ \ {0}. Vérifier ⊥ b + ϕ(x) b que Kerϕ = que ϕ(b) 6= 0 puis déduire de l’identité x = x − ϕ(x) ϕ(b) ϕ(b) V ect(b). 3.3 Propriétés essentielles des espaces de Hilbert 3.3.1 Isométrie avec le dual topologique, opérateur adjoint Tout espace de Hilbert H s’identifie à son dual topologique H 0 ; c’est là l’une des propriétés les plus typiques de ces espaces. Rappelons les faits élémentaires suivants. Définition-Proposition 3.3.1 Pour tout a ∈ H, la forme linéaire a∗ définie par a∗ (x) := (x|a), ∀x ∈ H 51 est continue et vérifie k|a∗ k| = kak. Exercice 3.3.2 Montrer que k|a∗ k| = kak. Le théorème suivant montre comment l’identification de H et H 0 est possible. Théorème 3.3.3 (Riesz) Soit (H, k k) un espace de Hilbert. Pour tout ϕ ∈ H 0 il existe un unique a ∈ H tel que ϕ = a∗ . De plus, kak = k|ϕk|. Ce résultat signifie que l’application ∗ : H → H 0 définie par a 7→ a∗ est un isomorphisme anti-linéaire et isométrique. ⊥ t u On peut supposer ϕ non nulle. On sait d’après l’exercice 3.2.9 que Ker ϕ = ⊥ V ect(b) où ϕ(b) = 1 (en fait il suffit d’observer que Ker ϕ 6= {0} car sinon on aurait Ker ϕ = Ker ϕ⊥⊥ = H, d’y choisir b et de le normaliser). Pour tout x ∈ H on peut écrire (x|b) = (x − ϕ(x)b|b) + ϕ(x)(b|b) et, puisque x − ϕ(x)b ∈ Ker ϕ, on b . L’unicité est immédiate car, si a∗1 = a∗2 , alors en déduit que ϕ(x) = x|a où a = b|b a1 − a2 ∈ H ⊥ = {0}. L’égalité k|ϕk| = kak résulte de l’exercice précédent. t u Appliqué aux évaluations f 7→ f (z) dans l’espace de Bergman B(Ω), le théorème de Riesz révèle l’existence d’un noyau (dit de Bergman) qui est auto-reproduisant pour les fonctions holomorphes de module au carré intégrable sur Ω. L’exercice suivant, qui prolonge l’exercice 1.3.8, est consacré à cette question. Exercice 3.3.4 (Noyau de Bergman) 1) Montrer que pour tout z ∈ Ω, l’application d’évaluation f 7→ f (z) est continue sur (B(Ω), k kL2 ). 2) Montrer qu’il existe une fonction KΩ (z, w) définie sur Ω × Ω telle que Z f (z) = f (w)KΩ (z, w)dλ(w) Ω et KΩ (z, ·) ∈ B(Ω) pour tout f ∈ B(Ω) et tout z ∈ Ω. KΩ s’appelle le noyau de Bergman de Ω. 3) Montrer que KΩ (z, w) = KΩ (w, z). 4) On considère maintenant deux domaines Ω1 et Ω2 et F : Ω1 → Ω2 un biholomorphisme. Montrer que l’application TF : f 7→ (f ◦ F )F 0 est une isométrie de B(Ω2 ) sur B(Ω1 ). En déduire que KΩ1 (w, z) = F 0 (w)KΩ2 (w, z)F 0 (z). (On utilisera le fait que TF conserve le produit hermitien) Le théorème de Riesz 3.3.3 permet d’établir l’existence de l’opérateur adjoint. 52 Théorème 3.3.5 Tout opérateur linéaire continu d’un espace de Hilbert dans luimême admet un unique opérateur adjoint T ∗ vérifiant T (x)|y = x|T ∗ y pour tout x, y ∈ H. De plus (T ∗ )∗ = T et k|T ∗ k| = k|T k|. La démonstration de ce résultat fait l’objet de l’exercice qui suit. Exercice 3.3.6 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et T un opérateur linéaire continu de H dans lui même. 1) Montrer que : ∀y ∈ H ∃!a ∈ H tel que y ∗ ◦ T = a∗ . ∗ On pose y ∗ ◦ T = T ∗ y de sorte que ∀x, y ∈ H : T (x)|y = x|T ∗ y. 2) Vérifier que l’application H 3 y 7→ T ∗ y ∈ H définie ci-dessus est linéaire. 3) Montrer que (T ∗ )∗ = T puis que k|T ∗ k| = k|T k|. On peut aussi remarquer que l’opération d’adjonction T 7→ T ∗ est un isomorphisme anti-linéaire, involutif et isométrique de Lc (H). ∗ Exercice 3.3.7 Vérifier que S ◦ T = T ∗ ◦ S ∗ et Id∗ = Id. En déduire que si T ∗ −1 = T −1 . est inversible alors T ∗ l’est également et T ∗ Les propriétés suivantes sont faciles à obtenir mais importantes. Proposition 3.3.8 Pour tout opérateur linéaire continu T d’un espace de Hilbert dans lui-même ⊥on a : 1) Im T = Ker T ∗ ⊥ 2) Im T = Ker T ∗ t u La seconde se déduit de la première en utilisant le corollaire 3.2.4, la première ⊥ est facile à vérifier : x ∈ Im T si et seulement si T ∗ x|y = x|T y = 0 pour tout y ∈ H, c’est à dire si et seulement si T ∗ x = 0. t u Voici un exemple remarquable d’utilisation des propriétés liées à l’adjonction. On observera que le résultat final concerne l’opérateur T et que l’adjonction n’est qu’un outil. Exercice 3.3.9 (Théorème ergodique de Von Neuman) Soit (H, k k) un espace de Hilbert et T une application linéaire de H dans H telle que k|T |k ≤ 1. Pour tout n ∈ IN on pose Id + T + T 2 + · · · + T n Wn := . n+1 53 1) Soit a ∈ H un point fixe de T -i.e T (a) = a-. Montrer que a|a ≤ kT ∗ ak kak et en déduire que T ∗ a = a. Montrer que Ker(T − Id) = Ker(T ∗ − Id). 2) Montrer que H est la somme directe orthogonale de Ker(T − Id) et de Im(T − Id). 3) Soit π la projection orthogonale sur Ker(T − Id). Montrer que limn Wn (x) = π(x) pour tout x ∈ H. 4) Application. Soit (Ω, µ) un espace probabilisé et τ une application mesurable de Ω dans lui-même. On suppose que µ est invariante par τ , ce qui signifie que µ coı̈ncide avec la mesure image τ∗ (µ). On suppose la transformation τ ergodique , c’est à dire telle que toute fonction mesurable f vérifiant f ◦ τ = f est f +f ◦τ +···+f ◦τ n constante. Montrer que pour toute fonction f ∈ L2 (Ω, n+1 R µ) la suite converge en moyenne quadratique vers la constante Ω f dµ. 3.3.2 Un critère de densité On dispose, dans les espaces de Hilbert, d’un critère de densité particulièrement efficace. Théorème 3.3.10 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et A ⊂ H. Alors V ect(A) est dense dans H si et seulement si A⊥ = {0}. ⊥ t u Si V ect(A) = H alors A⊥ = V ect(A) = H ⊥ = {0}. Inversement, si A⊥ = {0} alors, en vertu du corollaire 3.2.4, V ect(A) = A⊥⊥ = {0}⊥ = H. t u Compte tenu du theorème de Riesz 3.3.3, on peut reformuler le critère de densité en disant qu’un sous-espace vectoriel de H est dense si et seulement si toute forme linéaire continue s’annulant sur ce sous-espace est en fait identiquement nulle. Ce point de vue sera généralisé dans la leçon suivante (voir le théorème 4.4.15). Exercice 3.3.11 Soit ∆ le disque unité du plan complexe et B(∆) l’espace de Bergman associé (voir l’exercice 1.3.8). Montrer que les polynômes holomorphes (c’est à dire de la forme a0 + a1 z + · · ·z n ) sont denses dans B(∆). On utilisera le fait que toute fonction holomorphe sur ∆ est somme d’une série entière et que cette série converge uniformément localement. 3.3.3 Compacité faible Il est bien connu que la boule unité d’un espace normé n’est relativement compacte que lorsque cet espace est de dimension finie. Il n’est donc pas vrai, dans un espace de dimension infinie, que toute suite bornée possède une sous-suite convergente. Dans les espaces de Hilbert, il existe cependant une notion de convergence faible pour laquelle ceci est vrai. Lorsque l’espace est séparable, cette propriété de compacité provient du dual topologique (theorème de Banach-Alaoglu), elle est transportée sur l’espace de Hilbert 54 au moyen de l’isomorphisme de Riesz. On étend facilement la propriété obtenue aux espaces de Hilbert non-séparables. Définition 3.3.12 Soit (H, k k) un espace de Hilbert. On dit qu’une suite (xn )n de H converge faiblement vers x (on note xn →w x) si et seulement si x∗n (a) converge vers x∗ (a) pour tout a ∈ H. Autrement dit : xn →w x ⇔ limn (a|xn ) = (a|x), ∀a ∈ H. L’exercice suivant traite de quelques propriétés élémentaires de la convergence faible, on y montre en particulier que Proposition 3.3.13 Toute suite qui converge faiblement est bornée. On verra dans la leçon suivante (exercice 4.2.4) comment obtenir cela très facilement à partir du théorème de Banach-Steinhaus. Exercice 3.3.14 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et (xn )n une suite dans H. 1) Montrer que si limn kxn k = 0 alors xn →w 0. Donner un exemple montrant que la réciproque est fausse (choisir une suite dans l2 ). 2) Montrer qu’il y a unicité de la limite faible. Montrer que si (xn )n converge faiblement vers x alors toute sous-suite de (xn )n converge également vers x 3) On suppose que limn ||xn || = ∞. Pour tout entier k on définit Fk par Fk := {x ∈ H : ∀n ∈ N , |(xn |x)| ≤ k}. i) Montrer que les Fk sont fermés. / Fk pour n assez grand et ii) Montrer que si v ∈ Fk et > 0 alors v + ||xxnn || ∈ en déduire que les Fk sont d’intérieur vide. iii) Montrer que (xn )n n’est pas faiblement convergente. Théorème 3.3.15 Toute suite bornée d’un espace de Hilbert possède une sous-suite qui converge faiblement. La démonstration fait l’objet de l’exercice suivant ; on observera que celle-ci utilise les théorèmes de Banach-Alaoglu et de Riesz ainsi que le théorème de projection. Exercice 3.3.16 Soit (H, k k) un espace de Hilbert. 1) Montrer que si H est séparable alors le théorème 3.3.15 est vrai. On utilisera le théorème de Banach-Alaoglu (voir théorème 2.1.22). 2) Soit (xn )n une suite bornée dans H. i) Soit F := V ect{xn }, montrer que (F, k k) un espace de Hilbert séparable. En déduire l’existence de x ∈ F tel que, modulo extraction, limn (xn |a) = (x|a) pour tout a ∈ F . 55 ii) En utilisant l’existence d’un supplémentaire orthogonal pour F (théorème de projection), vérifier que limn (xn |a) = (x|a) pour tout a ∈ H. Toute suite d’un espace métrique compact ne possèdant qu’une seule valeur d’adhérence converge. Cette remarque, souvent utile pour établir la convergence d’une suite, est connue sous le nom de ”principe de seule valeur d’adhérence”. Il existe un principe analogue pour la convergence faible : Proposition 3.3.17 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et (xn )n une suite bornée dans H. Si toute sous-suite de (xn )n qui converge faiblement converge vers la même limite alors (xn )n converge faiblement. Exercice 3.3.18 Établir la proposition ci-dessus (si a est la seule valeur d’adhérence faible de (xn )n et si (xn )n ne converge pas vers a on trouve une sous-suite de (xn )n qui converge faiblement vers b 6= a). On sait qu’une suite décroissante de compacts non vides possède une intersection non vide. Grâce à la compacité faible, on peut établir une propriété analogue pour les suites de convexes fermés dans un espace de Hilbert. C’est ce dont traite l’exercice suivant. Exercice 3.3.19 Soit (H, || ||) un espace de Hilbert. Soit (xn )n une suite de points d’une partie convexe fermée C qui converge faiblement vers x. Montrer que x ∈ C. Soit (Cn )n une suite décroissante de parties convexes fermées non vides de H et C l’intersection de ces parties. Montrer que si C1 est bornée alors C n’est pas vide. Voici quelques exercices élémentaires qui exploitent la compacité faible. Exercice 3.3.20 Soit (H, || ||) un espace de Hilbert. Soit A un endomorphisme linéaire de H tel que A(x)|y = x|A(y) pour tout x, y ∈ H. 1) Montrer que si xn converge faiblement alors A(xn ) converge faiblement. 2) Montrer que A est continu (on utilisera le fait qu’une suite faiblement convergente est bornée). Exercice 3.3.21 Soit (H, || ||) un espace de Hilbert. Soit (xn )n une suite bornée dans H telle que xn |y converge pour tout y de H. Montrer que (xn )n converge faiblement (on utilisera la proposition 3.3.17). Dans l’exercice qui suit, la compacité faible est utilisée pour établir un théorème de point fixe. Théorème 3.3.22 Toute application 1-lipschitzienne de la boule unité fermée d’un espace de Hilbert dans elle-même possède un point fixe 56 Exercice 3.3.23 Soit H un espace de Hilbert et B sa boule unité fermée. Soit A : B → B telle que kA(x) − A(y)k ≤ kx − yk pour tout x et tout y dans B. À toute suite (xj )j dans B on associe : n n 1X 1X ϕn (z) := kz − xj k2 et sn := xj . n j=1 n j=1 1) Vérifier que ϕn (z) − ϕn (sn ) = kz − sn k2 . 2) Montrer que pour tout couple de points a et y dans B on a : Re (A(a) − a + y − A(y)|a − y) ≤ 0. 3) Soit (σn )n une suite de points de B qui converge faiblement vers σ et telle que A(σn ) − σn converge fortement vers 0. 3.a) Montrer que Re (y − A(y)|σ − y) ≤ 0 pour tout y ∈ B. 3.b) Soit z ∈ B. En considérant y = tz + (1 − t)σ où 0 < t < 1, montrer que Re (σ − A(σ)|σ − z) ≤ 0. 3.c) Montrer que σ est un point fixe de A. 4) Montrer que A possède un point fixe. Nous terminons cette partie par le théorème de Banach-Saks, la démonstration est fournie par l’exercice 3.3.25 Théorème 3.3.24 (Banach-Saks) Soit (H, k k) un espace de Hilbert et (un )n une suite dans H qui converge faiblement vers u. Alors il existe une suite (vn )n extraite n converge en norme vers u. de (un ) telle que v1 +···+v n Exercice 3.3.25 Soit (H, k k) un espace de Hilbert. 1) Soit (un )n une suite dans H qui converge faiblement vers 0. a) Construire par récurrence une suite (vn )n extraite de (un ) telle que |(vj |vk )| ≤ 1 pour 1 ≤ j < k et k ≥ 2. k b) Montrer que n n X k−1 X 1 X v1 + · · · + vn 2 2 kvq k + 2 |(vj |vk )| k k ≤ 2 n n q=1 k=2 j=1 n En déduire que k v1 +···+v k tend vers 0 (on utilisera le fait que (un )n est n bornée). 2) Montrer que si (un )n converge faiblement vers u alors il existe une suite (vn )n n extraite de (un ) telle que v1 +···+v converge vers u n Voici une application intéressante du théorème 3.3.24 Corollaire 3.3.26 Soit (H, k k) un espace de Hilbert. 1) Toute suite faiblement convergente à valeurs dans une partie convexe fermée C de H converge vers un point de C. 57 2) Toute fonction ϕ : C → IR convexe et continue sur une partie convexe, fermée et bornée C de H atteint sa borne inférieure. Exercice 3.3.27 Démontrer le corollaire 6.3.1. Indication : pour la seconde assertion, on adaptera une démonstration du fait que toute fonction continue sur un compact métrique atteint ses bornes. 3.3.4 Bases hilbertiennes Une base hilbertienne d’un espace de Hilbert H est une famille orthonormale (ei )i∈I telle que H P= V ect{ei ; i ∈ I}. Nous allons montrer qu’étant donnée une telle base alors x = iıI (x|ei )ei pour tout x ∈ H. Ceci a un sens dans le cadre des familles sommables (l’ensemble d’indices I est alors quelconque), nous exposerons ici le cas des familles dénombrables. Exercice 3.3.28 Montrer que tout espace de Hilbert séparable possède une base hilbertienne dénombrable. Le théorème suivant caractérise les bases hilbertiennes parmi les familles orthonormales. On notera que l’inégalité de Parseval-Bessel (voir l’exercice ??) devient une égalité lorsque la famille est une base. Théorème 3.3.29 Soit H, k k un espace de Hilbert et (ei )i∈I une famille orthonormale. Les conditions suivantes sont équivalentes. 1) (ei )i∈I est une base P hilbertienne 2) ∀x ∈ H, kxk2 = i∈I |(x|ei )|2 (égalité de Parseval-Bessel) P 3) ∀x, y ∈ H, (x|y) = i∈I (x|ei )(y|ei ). Dans l’exercice qui suit on utilise les bases hilbertiennes pour calculer le noyau de Bergman du disque unité. Exercice 3.3.30 Cet exercice prolonge les exercices 1.3.8 et 3.3.4. P 1) Soit (σn )n une base hilbertienne de B(Ω). Montrer que KΩ (w, z) = n σn (z)σn (w). 8) Calculer le noyau de Bergman du disque unité. 58 Leçon 4 Méthodes banachiques Entouré de collègues et de disciples, Banach ne rappelait en rien ce type de professeur pédant qui craint de perdre le nimbe de sa dignité. Il a créé un nouveau mode de travail scientifique : conversations et discussions à la table d’un café, menées sans austérité de la part du maı̂tre, sans crainte de blâme pour l’élève et agrémentées par les prémisses écrites au crayon sur le marbre de la table ou sur les serviettes en papier [...]. [...]. La liberté de conversation qu’on a au café permettait de sauter d’un problème à l’autre, de rectifier les erreurs et d’effacer sans gêne les propos conduisant à des impasses. H. Steinhaus. Cette leçon est consacrée aux trois pilliers de l’analyse fonctionnelle que sont le théorème de Banach-Steinhaus, le théorème dit de l’application ouverte et celui de Hahn-Banach. Les deux premiers sont intimement liés aux propriétés des espaces métriques complets, aussi commencerons nous par passer en revue celles d’entre elles que nous aurons à utiliser. 59 4.1 4.1.1 Propriétés essentielles des espaces métriques complets Le théorème de Baire Le théorème de Baire permet de dégager une notion topologique d’ensemble négligeable dans les espaces métriques complets. Ces ensembles sont dits maigres et jouent un rôle analogue à celui des ensembles de mesure nulle dans les espaces mesurés. On prendra garde, cependant, à ne pas confondre ces deux notions car elles correspondent à des points de vue qui sont étrangers l’un à l’autre. Définition 4.1.1 Soit (X, d) un espace métrique. 1) On dit qu’une partie E ⊂ X est nulle part dense dans X si et seulement si E est d’intérieur vide. 2) Un sous-ensemble de X est dite maigre si et seulement si il est la réunion d’une famille dénombrable de parties nulle part dense. 3) Un sous-ensemble de X est dite gras si et seulement si il n’est pas maigre. Les notions de négligeabilité mesurable et topologique sont tout à fait distinctes. On peut, par exemple, fabriquer des parties compactes de [0, 1] qui sont d’intérieur vide pour la topologie usuelle de IR mais de mesure de Lebesgue arbitrairement proche de 1. Exercice 4.1.2 Soit (rn )n la suite des nombres rationnels comprisSentre 0 et 1. Soit In l’intervalle ouvert centré en rn et de longueur 2n et K := [0, 1]\ n∈IN In . Montrer que K est un compact d’intérieur vide dont la mesure de Lebesgue est supérieure à 1 − . Il est intuitivement clair que pour être satisfaisante d’un point de vue topologique, une notion d’ensemble négligeable doit remplir les deux conditions qui suivent. 1) Une réunion dénombrable d’ensembles négligeables doit être négligeable. 2) Un ensemble négligeable doit être d’intérieur vide. Si il est évident que les parties maigres satisfont la première de ces conditions, il n’est pas vrai qu’elles satisfassent la seconde. Néanmoins, le théorème de Baire révèle que tel est le cas dans les espaces métriques complets, si bien que les ensembles maigres peuvent y être considérés comme des ensembles négligeables. Théorème 4.1.3 (Baire) Soit (X, d) un espace métrique complet. Alors : 1) Si (On )n∈IN est une collection dénombrable d’ouverts denses dans X alors ∩n∈IN On est dense dans X. 60 2) Si (Fn )n∈IN est une collection dénombrable de fermés d’intérieur vide dans X alors ∪n∈IN Fn est d’intérieur vide dans X. t u Établissons la première assertion. Étant donnée Bo (x0 , 0 ), il faut produire x0 dans Bo (x0 , 0 ) ∩ ∩n On . Comme O1 est ouvert et dense, on trouve x1 ∈ X et 1 ≤ 1 tels que Bf (x1 , 1 ) ⊂ O1 ∩ Bo (x0 , 0 ). Comme O2 est ouvert et dense, on trouve x2 ∈ X et 2 ≤ 21 tels queBf (x2 , 2 ) ⊂ O2 ∩ Bo (x1 , 1 ). En continuant de cette façon, on construit une suite de points xn ∈ X et une suite de réels n ≤ n1 tels que Bf (xn , n ) ⊂ On ∩ Bo (xn−1 , n−1 ). On vérifie facilement que la limite x0 de cette suite de Cauchy remplit les conditions annoncées. La seconde assertion se déduit de la première en passant au complémentaire car le complémentaire de l’intérieur d’une partie de X coı̈ncide avec l’adhérence de son complémentaire. t u Puisqu’en vertu du théorème de Baire les parties maigres d’un espace métrique complet sont d’intérieur vide, l’espace lui-même ne peut être maigre. Bien que cet énoncé puisse sembler banal, c’est souvent sous cette forme que l’on utilise le théorème de Baire. Théorème 4.1.4 Un espace métrique complet est gras dans lui-même. À titre d’exemple d’application, signalons le fait que les espaces de Banach de dimension infinie ne peuvent admettre de base algébrique dénombrable (on dit que B est une base algébrique d’un espace vectoriel E si tout x ∈ E peut s’écrire de façon unique comme combinaison linéaire finie d’éléments de B). Exercice 4.1.5 Soit B := {e1 , e2 , · · ·} une base algébrique dénombrable d’un espace vectoriel normé (E, k k). 1) Montrer que si E est de dimension infinie alors Fn := V ect{e1 , · · ·, en } est un fermé d’intérieur vide. En déduire que si (E, k k) est un espace de Banach alors E est de dimension finie. 2) Montrer qu’il n’existe pas de norme qui fasse de IR[X] un espace de Banach. Voici un exemple montrant que l’hypothèse de complétude est nécessaire dans le théorème 4.1.4. Exercice 4.1.6 Montrer que l’espace C([0, 1]), k k1 est maigre dans lui-même. On pourra utiliser le lemme de Slutsky (sikf − fn k1 → 0 alors fn possède une sous-suite qui converge presque partout vers f ) pour montrer que {f ∈ C([0, 1])/ kf k∞ ≤ n} est fermé dans C([0, 1]), k k1 . Le lemme suivant jouera un rôle clef dans la preuve du théorème de l’application ouverte, il repose sur le théorème de Baire. 61 Définition 4.1.7 On dit qu’une partie W d’un espace vectoriel E est absorbante si pour tout x ∈ E il existe t(x) > 0 tel que 1t x ∈ W pour IR 3 t > t(x). Lemme 4.1.8 Soit E, k k un espace de Banach. Toute partie convexe, symétrique, absorbante et fermée de E est un voisinage de l’origine. t u La partie W étant absorbante, on a E = ∪n nW . Par ailleurs, E est gras dans lui-même (théorème 4.1.4). Il s’ensuit que W = W est d’intérieur non vide. Soit donc B(a, r) ⊂ W . Comme W est symétrique, on a aussi −B(a, r) = B(−a, r) ⊂ W et, puisque W est convexe, on a B(0, r) ⊂ 21 B(a, r) + 21 B(−a, r) ⊂ W . Nous avons montré que l’origine appartient à l’intérieur de W . 4.1.2 t u Quelques outils Dans un espace de Banach, toute sériePnormalement convergente est convergente car la suite des sommes partielles Sn := ∞ k=n+1 xk est de Cauchy P Pm Pm kSm − Sn k = k k=n+1 xk k ≤ k=n+1 kxk k ≤ ∞ k=n+1 kxk k. Il peut être utile de voir que cette propriété caractérise les espaces de Banach. Proposition 4.1.9 Un espace vectoriel normé est complet si et seulement si toute série normalement convergente est convergente. t u Soit (xn )n une suite de Cauchy, il suffit de montrer que (xn )n possède une soussuite qui converge. Comme (xn )n est de Cauchy, on peut trouver une suite stric1 tement croissante P d’entiers (nk )k telle que kxn − xnk k ≤ 2k pour n ≥ nk . La série télescopique k xnk+1 − xnk converge car elle converge normalement, il s’ensuit que la suite (xnk )k converge. t u Ce critère est très utile pour montrer que le quotient d’un espace de Banach par un sous-espace vectoriel fermé hérite d’une structure d’espace normé complet. Rappelons que le quotient E/F d’un espace vectoriel E par un sous-espace F est défini comme l’ensemble des classes d’équivalence pour la relation x ≡ y ⇔ x − y ∈ F. On note ẋ := x + F la classe d’un élément x ∈ E. On vérifie immédiatement que les classes de x + y et λx ne dépendent pas du choix des représentants dans les classes de x ou y, c’est ce qui permet de munir E/F d’une structure d’espace vectoriel en posant ˙ y) et λẋ := (λx). ˙ ẋ + ẏ := (x + 62 Lorsque E est muni d’une norme k k et F fermé dans E, on définit une norme N sur E/F par N (ẋ) := inf kx − yk. y∈F Lorsque E, k k est complet, E/F, N l’est aussi. C’est ce que montre l’exercice suivant. Exercice 4.1.10 Soit E, k k un espace de Banach, F un sous-espace fermé et E/F l’espace quotient associé. Soit π : E → E/F la projection définie par π(x) := ẋ.On pose N (ẋ) := inf y∈F kx − yk. 1) Vérifier que N est une norme. 2) Vérifier que π est continue. P 3) Soit (ẋn )n une suite telle que N (ẋn ) < +∞. Justifier l’existence d’une suite (yn )n dans P F telle que kxn + yn k ≤ N (ẋn ) + 21n , en déduire que les séries P n (xn + yn ) et n ẋn convergent. 4) En utilisant la proposition 4.1.9, montrer que E/F, N est un espace de Banach. La proposition ci-dessous résume ce qui vient d’être vu. Proposition 4.1.11 Soit E, k k un espace de Banach et F un sous-espace fermé. On définit une norme sur l’espace quotient E/F en posant N (ẋ) := inf y∈F kx − yk. L’espace E/F, N est un espace de Banach. Les séries normalement convergentes constituent un outil remarquable pour établir que les opérateurs inversibles forment un ouvert de Lc (E). Ceci est exposé dans l’exercice 4.1.12 et l’on peut utiliser la même méthode dans le cadre plus général des algèbres de Banach unitaires pour obtenir l’énoncé 4.1.13. Exercice 4.1.12 Soit (E, k k) un espace de Banach et Lc (E) l’espace des applications linéaires continues de E dans lui même muni de la norme |k k|. On rappelle que U ∈ Lc (E) est dit inversible si U est bijectif et son inverse U −1 est continu. 1) Montrer que Lc (E), |k k| est un espace de Banach. 2) Montrer que si |kAk|P< 1 alors A est inversible. On observera que I −P N N n n (I − A) ◦ = ◦ (I − A) = I − AN +1 n=0 A n=0 A n puis on utilisera la série de terme général A . 3) Montrer que les éléments inversibles de Lc (E) forment un ouvert. Plus précisément, montrer que si U0 est inversible alors tous les éléments de la boule ouverte centrée en U0 et de rayon k|U0−1 k|−1 dans Lc (E), |k k| sont inversibles. Théorème 4.1.13 Les éléments inversibles d’une algèbre de Banach unitaire A, k k forment un ouvert de cette algèbre. Si e désigne l’élément neutre et kek = 1, alors la boule ouverte centrée en e et de rayon 1 est constituée d’éléments inversibles. 63 Nous terminons cette sous-section par un résultat technique qui sera très utile dans la preuve du théorème de l’application ouverte (voir sous-section 4.2.2). Plus précisément, nous montrerons comment une certaine propriété topologique portant sur la structure de l’image d’une application entre espaces métriques entraine que l’application est ouverte. Commençons par une définition. Définition 4.1.14 (E1 , d1 ) et (E2 , d2 ) deux espaces métriques et m > 0. On dit qu’une application u : E1 → E2 satisfait la condition P(m) (resp.P(m)) si et seulement si : ∀a ∈ E1 , ∀r > 0 : Bf (u(a), mr) ⊂ u[Bf (a, r)] (resp. Bf (u(a), mr) ⊂ u[Bf (a, r)]). On dit qu’une application u : E1 → E2 est ouverte si et seulement si l’image de tout ouvert de E1 par u est un ouvert de E2 . Exercice 4.1.15 Soient (E1 , d1 ) et (E2 , d2 ) deux espaces métriques dont le premier est complet et m > 0. Soit u : E1 → E2 . 1) On suppose que u satisfait la condition P(m). Montrer que pour tout a ∈ E1 , tout r > 0et tout y ∈ Bf (u(a), mr), il existe une suite (an )n dans E1 telle que r et d2 (u(ak ), y) ≤ mr (on construira la suite par a0 = a, d1 (ak−1 , ak ) ≤ 2k−1 2k récurrence). 2) Montrer que si u est continue et satisfait la condition P(m) alors u satisfait la condition P( m2 ). 3) Montrer que si u satisfait la condition P(m) alors u est ouverte 4) Montrer que si u est une application linéaire alors u satisfait la condition P(m) (resp.P(m)) si et seulement si : ∃r0 > 0 tel que Bf (0, mr0 ) ⊂ u[Bf (0, r0 )] (resp. Bf (0, mr0 ) ⊂ u[Bf (0, r0 )]) Synthétisons l’essentiel de ce que nous avons obtenu par une proposition. Proposition 4.1.16 Soient (E1 , d1 ) et (E2 , d2 ) deux espaces métriques et u une application continue entre ces espaces. Si (E1 , d1 ) est complet et u satisfait la condition P(m) pour un certain m > 0 alors u est ouverte. 4.2 Linéarité et continuité On s’intéresse ici à deux questions naturelles sur la continuité des applications linéaires. 1) La limite simple d’une suite d’applications linéaires continues estelle encore continue ? 2)L’inverse d’une application linéaire continue bijective est-elle continue ? 64 Nous verrons que, sous des hypothèses de complétude, ces deux questions admettent des réponses positives et, de surcroit, obtiendrons des renseignements très précis sur les situations pathologiques où la réponse n’est pas positive. Nous montrerons, sur des exemples tirés de divers secteurs de l’analyse, comment ces informations permettent d’exhiber des fonctions présentant des propriétés singulières. 4.2.1 Le théorème de Banach-Steinhaus La notion d’équicontinuité pour une famille d’applications entre espaces topologiques a été définie au tout début de la leçon 2. La proposition qui suit précise ce que signifie l’équicontinuité dans le cadre linéaire ; elle est facile à établir. Proposition 4.2.1 Soient E, k kE et F, k kF deux espaces vectoriels normés et A une famille d’applications linéaires de E dans F . Les conditions suivantes sont équivalentes : 1) A est équicontinue 2) A est équicontinue en 0 3) tous les éléments de A sont continus et Supu∈A k|u|k < +∞. Exercice 4.2.2 Démontrer la proposition 4.2.1. On remarquera que lorsque A est un singleton alors la proposition exprime la caractérisation bien connue de la continuité pour une application linéaire entre espaces normés. On voit donc en particulier que si une famille d’applications linéaires A est équicontinue alors les ”orbites” ΓA (x) := {u(x) ; u ∈ A} sont bornées dans F pour tout x ∈ E. Le théorème de Banach-Steinhaus concerne la réciproque. Théorème 4.2.3 Soient E, k kE et F, k kF deux espaces vectoriels normés et A une famille d’applications linéaires continues de E dans F . Pour tout x ∈ E on pose ΓA (x) := {u(x) ; u ∈ A}. Alors : 1) {x ∈ E tel que ΓA (x) borné} gras dans E ⇒ A équicontinue 2) {x ∈ E tel que ΓA (x) borné} = E et E, k kE Banach ⇒ A équicontinue. t u 1) Notons Ob := {x ∈ E tel que ΓA (x) borné} et W := ∩u∈A u−1 (Bf (0, )) où > 0. Observons que W est fermé car les u sont continues et que Ob ⊂ ∪n∈IN nW . Puisque Ob est gras, il s’ensuit que W est d’intérieur non vide. Soit donc η > 0 et x0 ∈ E tels que Bo (x0 , η) ⊂ W . Pour tout u ∈ A on a u(x0 ) + u Bo (0, η) = u Bo (x0 , η) ⊂ u(W ) ⊂ Bf (0, ) et donc u Bo (0, η) ⊂ Bf (0, ) − u(x0 ) ⊂ Bf (0, 2). Cela montre que A est équicontinue en 0. 2) Puisque E, k kE est complet il est gras dans lui même (voir le théorème 4.1.4).u t Nous avons vu, en utilisant le théorème de Baire, qu’une suite faiblement convergente d’un espace de Hilbert est nécessairement bornée (voir l’exercice 3.3.14). On peut procéder plus rapidement en utilisant le théorème de Banach-Steinhaus. 65 Exercice 4.2.4 Soit (H, k k) un espace de Hilbert et (xn )n une suite de H qui converge faiblement vers a. En utilisant le fait que kxn k = k|x∗n k|, montrer que (xn )n est bornée. Voici un exercice d’application directe du théorème de Banach-Steinhaus. Il apporte une simplification (assez illusoire sur le fond) dans la démonstration de l’identification du dual de lp à lq (théorème 1.4.14) et du dual de c0 à l1 (exercice 1.4.15). Exercice si P4.2.5 Soit x = (xn )n une suite de nombresp complexes. Montrer que q la série n≥0 xn yn converge pour tout y := (yn )n ∈ l où 1 ≤ p alors x ∈ l où 1 + 1q = 1. p P Montrer que si la série n≥0 xn yn converge pour tout y := (yn )n ∈ c0 alors x ∈ l1 . P Indication : on commencera par calculer les normes des formes linéaires x 7→ N 1 y i xi . La seconde assertion du théorème de Banach-Steinhaus fournit immédiatement une réponse à l’une des questions posées au début de cette section. Corollaire 4.2.6 Soit E, k kE un espace de Banach et F, k kF un espace vectoriel normé. Soit un une suite d’applications linéaires continues de E dans F . Si (un (x))n converge pour tout x ∈ E alors u(x) := limn un (x) définit une application linéaire continue et k|u|k ≤ lim inf n k|un |k. Exercice 4.2.7 Soit L∞ [0, 1] l’espace des fonctions réelles et bornées sur le segment [0, 1] muni de la norme kf k∞ := Supx∈[0,1] |f (x)|. Soit F un sous-espace fermé de L∞ [0, 1] dont tous les éléments sont de classe C 1 sur [0, 1]. 1) Pour tout f ∈ L∞ [0, 1] et tout entier n ≥ 2 on définit Dn (f ) par 1 1 ) − f (x) si 0 ≤ x ≤ n 2 1 1 Dn (f )(x) := n f (x − ) − f (x) si 1 ≥ x > . n 2 ∞ Montrer que Dn est linéaire continue de L [0, 1] , k k∞ dans lui-même. 2) Montrer que la dérivation D : f 7→ f 0 est continue de F dans L∞ [0, 1] pour la norme k k∞ . 3) Montrer que F est de dimension finie (on pourra utiliser le théorème d’Ascoli). Dn (f )(x) := n f (x + Dans l’exercice suivant, on utilise le corollaire 4.2.6 afin de dégager des conditions nécessaires à la mise au point de méthodes de sommation généralisée. Exercice 4.2.8 Soit A = αi≥1,j≥1 Pune matrice infinie. On dit P qu’une suite a ∈ ∞ l est sommée par A si les séries k αn,k ak convergent et limn k αn,k ak existe. Concrètement, cela signifie que la suite obtenue en faisant le produit de P la matrice A par le vecteur colonne a converge. Si tel est le cas on note LA(a) = limn k αn,k ak . 66 1) Quelle est la matrice A correspondant au procédé de sommation de Césarò ? 2) Montrer que LA(a) = lim a pour toute suite convergente a si et seulement si A satisfait les conditions suivantes (on pensera à utiliser l’exercice 4.2.5) : i) limn αP n,k = 0 pour tout entier k ii) limn k αn,k = 1 P iii) il existe une constante M telle que k |αn,k | ≤ M pour tout n ∈ IN. En contraposant la première assertion du théorème 4.2.3 on obtient le Théorème 4.2.9 (Principe de condensation des singularités) Soient E, k kE et F, k kF deux espaces vectoriels normé et (un )n une suite d’applications linéaires continues de E dans F . Si lim supn k|un |k = +∞ alors l’ensemble {x ∈ E tel que (un (x))n est borné} est maigre dans E. Voici une application de ce principe à l’existence de fonctions continues dont la série de Fourier diverge en un point. Exercice 4.2.10 On considère l’espace de Banach C(T ) des fonctions continues sur T := [−π, π] muni de la norme de la convergence uniforme k k∞ . Pour tout n ∈ ZZ on note cn (f ) le n-ième coefficient de Fourier de f ∈ C(T ) 1 cn (f ) := 2π Z π f (t)e−int dt. −π Pour tout N ∈ IN, on définit une application linéaire ΛN : C(T ) → C(T ) par ΛN (f ) := N X cn (f )einx . −N 1) Montrer que ΛN (f ) = 1 2π Rπ −π f (t)DN (x − t)dt où DN (u) := sin(N + 12 )u . sin u2 2) On note Λ0N la forme linéaire définie sur C(T ) par Λ0N (f ) := Λ(f )(0). Montrer R π 1 que k|Λ0N k| = 2π |DN (u)|du. −π 3) Montrer que l’ensemble des fonctions f ∈ C(T ) dont la série de Fourier converge simplement est maigre dans C(T ), k k∞ . Justifier l’existence de fonctions continues sur T dont la série de Fourier ne converge pas en tout point. 67 4.2.2 Le théorème de l’application ouverte Le théorème de l’application ouverte concerne la seconde question posée au début de cette section. Il apporte bien plus qu’une simple réponse puisqu’il donne des conditions suffisantes pour qu’une application linéaire continue soit ouverte. Comme pour le théorème de Banach-Steinhaus, les énoncés contraposés s’avèreront particulièrement féconds. Théorème 4.2.11 (Application ouverte) Soient E1 , k k1 et E2 , k k2 deux espaces de Banach et u : E1 → E2 une application linéaire continue. Alors : 1) si u est surjective alors u est ouverte 2) si u est bijective alors u−1 est continue. Si une application ouverte u : X → Y est bijective alors son application réciproque u−1 : Y → X est continue car l’image réciproque par u−1 d’un ouvert O de X coı̈ncide avec l’image directe de O par u. On voit donc que la seconde assertion du théorème 4.2.11 découle de la première. L’exercice qui suit fournit une preuve de cette assertion. Exercice 4.2.12 Soient E1 , k k1 et E2 , k k2 deux espaces de Banach et u : E1 → E2 une application linéaire continue. Soit B la boule unité fermée de E1 et W := u(B). 1) Montrer que W est convexe et symétrique. Montrer que si u est surjective alors W est absorbante. 2) En utilisant le lemme 4.1.8, montrer que si u est surjective alors W contient une boule fermée Bf (0, m) où m > 0. 3) En utilisant la proposition 4.1.16, montrer que si u est surjective alors u est ouverte. Voyons sur un exemple que l’on ne peut se passer des hypothèses de complétude. Exercice 4.2.13 On considère C(T ) l’espace des fonctions continues sur le segment T := [−π, π] muni de la norme de la convergence uniforme k k∞ . L’espace des suites de limites nulles C0 est également muni de la norme de la convergence uniforme k k∞ . Pour tout f ∈ C(T ) et tout n ∈ ZZ on note cn (f ) le coefficient de Fourier : Z π 1 f (t)e−int dt. cn (f ) := 2π −π On définit une application linéaire A de C(T ) dans l∞ par A.f := cn (f ) n∈ZZ . On P rappelle que n∈ZZ |cn (f )|2 < +∞ pour tout f ∈ C(T ) 1) Montrer que A n’est pas surjective et que Im(A) est dense dans C0 . 2) Montrer que A est injective, continue mais que A−1 n’est pas continue sur Im(A) (on exhibera fk ∈ C(T ) bornée en moyenne mais non bornée uniformément). 68 Le résultat suivant est une application fort utile du théorème de l’application ouverte. On en retiendra surtout le principe de démonstration qui consiste à établir que l’application identité Id : E, k k1 → E, k k2 est bi-continue. Ce principe, plutôt que le théorème 4.2.14 lui-même, est utilisé dans l’exercice 4.2.16 (voir aussi l’exercice 4.2.35). Théorème 4.2.14 Soient k k1 et k k2 deux normes définies sur un même espace vectoriel E. On suppose que E, k k1 et E, k k2 sont deux espaces de Banach. Alors, pour que les normes k k1 et k k2 soient équivalentes, il suffit qu’il existe une constante C > 0 telle que k k2 ≤ Ck k1 . t u Considérons l’application identité Id : E, k k1 → E, k k2 c’est une bijection linéaire qui, par hypothèse est continue car kxk2 = kId(x)k2 ≤ Ckxk1 pour tout x ∈ E. Comme les espaces de départ et d’arrivée sont des espaces de Banach, le théorème 4.2.11 montre que son inverse Id : E, k k2 → E, k k1 est elle aussi continue. Cela se traduit par kxk1 = kId(x)k1 ≤ C 0 kxk2 pour tout x ∈ E. t u Exercice 4.2.15 Soit C(K), k k∞ l’espace des fonctions continues sur un espace topologique compact K muni de la norme de la convergence uniforme. Soit N une norme sur C(K) pour laquelle C(K), N est un espace de Banach et vérifiant la propriété suivante : |f | ≤ |g| ⇒ N (f ) ≤ N (g); ∀f ∈ C(K), ∀g ∈ C(K). Montrer que les normes N et k k∞ sont équivalentes. On montre dans l’exercice qui suit comment munir certaines algèbres de Banach unitaires d’une norme d’algèbre équivalente à la norme initiale. Exercice 4.2.16 Soit A une algèbre commutative unitaire munie d’une norme || || telle que : (A, || ||) est un espace de Banach les multiplications Ma : A → A, Ma (x) = a.x sont continues. On note B(A) l’espace des endomorphismes linéaires continus de A muni de la norme usuelle |||u||| = Supkxk=1 ||u(x)||. 1) Montrer que (B(A), ||| |||) est une algèbre de Banach, la loi multiplicative ◦ étant la composition des applications. 2) Montrer que M := {Ma ; a ∈ A} est une sous-algèbre fermée de B(A). 3) Montrer que (M, ||| |||) est une sous-algèbre de (B(A), ||| |||) et en déduire que (M, ||| |||) est un espace de Banach. 4) Montrer que l’application I : A → M définie par I(a) = Ma est un isomorphisme d’algèbre bicontinu. 69 5) Montrer que N (a) := |||Ma ||| définit une norme sur A qui est équivalente à || || et vérifie l’inégalité N (a.b) ≤ N(a)N (b) ∀a, b ∈ A. 6) On considère ici l’algèbre C [0, 1] des fonctions continues sur [0, 1] que l’on R1 munit de la norme kf k1 := 0 |f (t)| dt. On suppose qu’ il existe une norme 1 N ≤ k k1 ≤ d’algèbre N sur C [0, 1] équivalente à k k1 (∃C > 1 telle que C 1 CN ). Montrer que kf n k1 ≤ C n−1 kf kn1 pour tout f ∈ C [0, 1] et que kn+1 ≤ C n−1 pour tout entier k. Que montre cet exemple ? (k+1)n L’exercice 4.2.7 reposait sur le théorème de Banach-Steinhaus et déterminait tous les sous-espaces fermés de C([0, 1]), k k∞ contenus dans C 1 ([0, 1]). Dans l’exercice qui suit on établit le même résultat en utilisant le théorème 4.2.14, on pourra comparer les deux méthodes. Exercice 4.2.17 On considère l’espace E := C([0, 1]) muni de la norme de la convergence uniforme k k∞ ainsi qu’un sous-espace fermé F de E dont tous les éléments sont de classe C 1 sur [0, 1]. Pour tout f ∈ F on pose N (f ) := |f (0)|+kf 0 k∞ . 1) Montrer que kf k∞ ≤ N (f ) pour tout f ∈ F . 2) Montrer que (F, N ) est un espace de Banach. En déduire qu’il existe une constante C > 0 telle que kf 0 k∞ ≤ Ckf k∞ pour tout f ∈ F . 3) En déduire que F est de dimension finie. Nous savons (voir l’exercice 4.1.12) que l’inversibilité est une condition ouverte dans l’algèbre des opérateurs d’un espace de Banach E dans lui même. Cela signifie que l’ensemble des opérateurs inversibles de E dans E est un ouvert de Lc (E, E) ou encore qu’une petite perturbation d’un opérateur inversible de Lc (E, E) reste inversible. On dit que la condition d’inversibilité est ouverte ou stable. Nous nous proposons d’utiliser le théorème de l’application ouverte pour traiter de cette question pour les opérateurs d’un espace de Banach dans un autre ; nous étudierons en fait la stabilité de la surjectivité et de l’injectivité. L’injectivité n’est pas une condition stable, voici un exemple simple permettant de s’en convaincre. Exercice 4.2.18 Pour tout λ ∈ l∞ on définit une application linéaire Λ de l2 dans lui-même en posant Λ.x := λn xn n . Montrer que Λ est continue et calculer sa 1 alors Λ est à la fois injective et limite d’applinorme. Montrer que si λ0 = n+1 n cations linéaires continues non injectives. Cependant l’injectivité à image fermée est une condition ouverte. Plus précisément on a le résultat suivant. Théorème 4.2.19 Soient E, k kE et F, k kF deux espaces de Banach. 70 1) Une application linéaire continue de E dans F est injective et d’image fermée si et seulement si il existe une constante C > 0 telle que ku(x)kF ≥ CkxkE , ∀x ∈ E. 2) L’ensemble des opérateurs continus de E dans F , injectifs et dont l’image est fermée forment un ouvert Lc (E, F ). L’exercice qui suit est consacré à la preuve de ce résultat. Exercice 4.2.20 Soient E, k kE et F, k kF deux espaces de Banach et u ∈ Lc (E, F ). 1) On suppose qu’il existe une constante C > 0 telle que ku.xkF ≥ CkxkE pour tout x ∈ E. Montrer que u est injective. Montrer que Im(u) est fermée dans F (on observera que si u(xn ) converge dans F alors xn est de Cauchy dans E). 2) Montrer que si u est injective et d’image fermée alors il existe une constante C > 0 telle que ku.xkF ≥ CkxkE pour tout x ∈ E. On appliquera le théorème de l’application ouverte à u : E → Im(u). 3) Déduire de cette caractérisation que l’ensemble des applications linéaires continues, injectives et d’image fermée est un ouvert de Lc (E, F ). Exercice 4.2.21 Soit H, k k un espace de Hilbert. Un opérateur linéaire continu T de H dans lui-même est dit coercif si il existe C > O telle que |(T x|x)| ≥ Ckxk2 pour tout x ∈ H. Montrer qu’un tel opérateur est inversible. Nous allons maintenant montrer que la surjectivité est une condition ouverte. Théorème 4.2.22 Soient E, k kE et F, k kF deux espaces de Banach. Le sousensemble de Lc (E, F ) constitué des applications surjectives est ouvert dans Lc (E, F ). t u Soit λ ∈ Lc (E, F ) une application surjective. Nous allons montrer qu’il existe > 0 tel que si k|ϕ − λk| < alors ϕ est elle-même surjective. D’après le théorème de l’application ouverte (4.2.11), l’image par λ de la boule unité ouverte est un voisinage de l’origine dans F : il existe donc > 0 tel que ∀y ∈ F, kykF < ⇒ ∃x ∈ E tel que kxkE < 1 et λ(x) = y par homogenéité ceci devient ∀y ∈ F, kykF < r ⇒ ∃x ∈ E tel que kxkE < r et λ(x) = y. (4.2.1) Soit 0 < r < 1 et ϕ ∈ Lc (E, F ) telle que k|ϕ − λk| ≤ r, soit aussi y1 ∈ F tel que ky1 kF < 1. 71 Par 4.2.1, il existe x1 ∈ E tel que kx1 kE < 1 et λ(x1 ) = y1 . Posons y2 := λ(x1 ) − ϕ(x1 ), on a ky2 kF < (r) 1 = r. Par 4.2.1, il existe x2 ∈ E tel que kx2 kE < 1 r et λ(x2 ) = y2 . Posons y3 := λ(x2 ) − ϕ(x2 ), on a ky3 kF < (r)( 1 r) = r2 . En continuant ce procédé, on construit des suites (xn )n et (yn )n telles que : 1 λ(xn ) = yn = λ(xn−1 ) − ϕ(xn−1 ), kxn kE < rn−1 et kyn kF < rn−1 . P∞ Posons x := 1 xn (cette série converge normalement P P∞ dans l’espace de Banach E), par continuité de ϕ on a ϕ(x) = ∞ ϕ(x ) = n 1 1 λ(xn ) − λ(xn+1 ) = λ(x1 ) = y1 . On a montré que la boule unité ouverte de F est contenue dans l’image de ϕ et donc que ϕ est surjective. t u En combinant les théorèmes 4.2.19 et 4.2.22 on obtient la généralisation suivante du résultat établi à l’exercice 4.1.12. Théorème 4.2.23 Soient E, k kE et F, k kF deux espaces de Banach. Le sousensemble de Lc (E, F ) constitué des applications inversibles est ouvert dans Lc (E, F ). Exercice 4.2.24 En inspectant soigneusement les preuves des théorèmes 4.2.19 et 4.2.22, estimer le rayon d’une boule ouverte centrée en λ ∈ Lc (E, F ) et constituée d’éléments inversibles. Nous nous proposons maintenant d’établir une version plus sophistiquée du théorème de l’application ouverte. Théorème 4.2.25 Soient E1 , k k1 un espace de Banach, E2 , k k2 un espace normé et u : E1 → E2 une application linéaire continue. Si l’image de u est un sous-ensemble gras dans E2 alors u est surjective et ouverte. De plus, E2 , k k2 est un espace de Banach. La démonstration de ce résultat reprend le principe de celle du théorème 4.2.11, les détails sont fournis par l’exercice qui suit. Exercice 4.2.26 Soient E1 , k k1 un espace de Banach, E2 , k k2 un espace normé et u : E1 → E2 une application linéaire continue dont l’image est un sousensemble gras dans E2 . 1) En inspectant la preuve du théorème de l’application ouverte (exercice 4.2.12) montrer que u est ouverte et en déduire que Im u = E2 . Indication : on observera que Im u := ∪n∈IN nV où V est l’image de la boule unité fermée de E1 par u. À partir de cette observation on établira que u satisfait la propriété P(m) pour un certain m > 0. 72 2) Montrer, à l’aide de l’exercice 4.1.10, que E1 /Ker u peut être muni d’une norme N pour laquelle E1 /Ker u, N est un espace de Banach. Montrer que l’application induite u̇ : E1 /Ker u → E2 ẋ 7→ u(x) est continue et ouverte. 3) Montrer que E2 , k k2 est un espace de Banach. L’énoncé contraposé du théorème 4.2.25 a des applications très fructueuses. Corollaire 4.2.27 Soient E1 , k k1 un espace de Banach, E2 , k k2 un espace normé et u : E1 → E2 une application linéaire continue. Si u n’est pas surjective alors son image est maigre dans E2 , k k2 . Passons à quelques applications de cette version du théorème de l’application ouverte. Exercice 4.2.28 Montrer que L2 [0, 1] est maigre dans L1 [0, 1]. Exercice 4.2.29 On reprend les hypothèses et notations de l’exercice 4.2.13. Montrer que Im(A) est maigre dans C0 . Dans l’exercice qui suit on utilise l’énoncé contraposé 4.2.27 pour montrer que tout ouvert du plan complexe dont la frontière est assez régulière est le domaine d’existence d’une fonction holomorphe bornée. On pourrait de la même façon travailler dans tout autre espace de Banach de fonctions holomorphes. Cet exemple illustre à nouveau la puissance de ces méthodes pour justifier l’existence de fonctions singulières. Exercice 4.2.30 Soit Ω un ouvert connexe et borné du plan complexe. On suppose que : c (∗) ∀a ∈ bΩ, ∀r > 0 : D(a, r) ∩ Ω̄ 6= ∅ ce qui signifie que, pour tout point a du bord de Ω et tout r > 0 le disque ouvert D(a, r) centré en a et de rayon r intersecte l’extérieur de Ω. On suppose en outre que pour tout 0 < r < r0 , l’ouvert ωa,r := Ω ∩ D(a, r) est connexe. On note H ∞ (Ω) l’espace des fonctions holomorphes bornées sur Ω, on le munit de la norme de la convergence uniforme k k∞ . On rappelle que H ∞ (Ω), k k∞ est un espace de Banach (voir le théorème 1.2.12). 1) Soit D(a, r) un disque ouvert du plan complexe où a ∈ bΩ et 0 < r < r0 . Soit Fa,r := {(f, g) ∈ H ∞ (Ω) × H ∞ (D(a, r)) tel que f = g sur ωa,r }. Montrer que Fa,r est un espace de Banach pour la norme k(f, g)k := kf k∞ + kgk∞ . 73 2) Soit πa,r la projection canonique de Fa,r sur H ∞ (Ω). Montrer que que πa,r est d’image maigre dans H ∞ (Ω). 3) a) Montrer qu’il existe une suite (ak )k∈IN dense dans bΩ. b) Montrer qu’il existe f ∈ H ∞ (Ω) telle que f ∈ / Imπak ,r pour tout entier k et tout rationnel strictement positif r. c) Montrer que l’ensemble des fonctions holomorphes bornées sur Ω qui admettent un prolongement holomorphe à un ouvert connexe contenant strictement Ω est maigre dans H ∞ (Ω). En déduire qu’il existe une fonction holomorphe bornée sur Ω qui ne se prolonge pas holomorphiquement à un ouvert connexe contenant strictement Ω. D’après un résultat bien connu d’analyse complexe, toute fonction holomorphe bornée sur le disque unité épointé ∆ \ {0} se prolonge holomorphiquement au disque ∆. Ceci montre que, dans l’exercice ci-dessus, l’hypothèse (*) ne peut être supprimée. Comme le lecteur pourra facilement s’en convaincre, l’hypothèse de connexité des intersections ωa,r n’est par contre pas nécessaire à la conclusion. On peut construire des fonctions holomorphes sur le disque unité ∆, ne se prolongeant pas au delà de ∆ et dont la croissance est contrôlée, par des méthodes plus explicites, par exemple au moyen de séries lacunaires. L’avantage de l’approche fonctionnelle exposée à l’exercice 4.2.30 est de pouvoir s’adapter à d’autres espaces complets de fonctions holomorphes et surtout de montrer que l’ensemble des fonctions qui se prolongent est négligeable. 4.2.3 Le théorème du graphe fermé Le graphe d’une application linéaire u : E → F est le sous-espace vectoriel Γu de E × F défini par Γu := {(x, u(x)), x ∈ E}. On voit facilement que le graphe d’une application linéaire continue d’un espace normé E dans un espace normé F est fermé dans E × F . Il s’avère que lorsque les espaces E et F sont complets la fermeture du graphe est aussi une condition suffisante de continuité. Rappelons que E × F est muni de la norme k k := k kE + k kF . Ceci constitue un un critère particulièrement puissant de continuité pour les applications linéaires. Il s’agit d’un corollaire du théorème de l’application ouverte dont la démonstration est fournie par l’exercice 4.2.33. Théorème 4.2.31 (Graphe fermé) Soient E, k kE et F, k kF deux espaces de Banach. Soit u : E → F une application linéaire. Alors u est continue si et seulement si son graphe est fermé. Exercice 4.2.32 Soit E un sous-espace fermé de l’espace de Hilbert L2 ([0, 1]), k k2 tel que E ⊂ C([0, 1]). 74 1) Montrer qu’il existe A > 0 tel que kf k∞ ≤ Akf k2 pour tout fR∈ E. 1 2) Montrer que ∀x ∈ [0, 1], ∃gx ∈ E tel que ∀f ∈ E : f (x) = 0 f (t)gx (t) dt. Montrer que kgx k2 ≤ A. 3) Montrer que E est dimension inférieure ou égale à A2 . Exercice 4.2.33 On reprend les notations du théorème 4.2.31. On munit E × F de la norme k k := k kE + k kF et l’on note πE : Γu → E et πF : E × F → F les projections canoniques. 1) Montrer que si u est continue alors Γu est fermé. 2) Vérifier que πE est bijective puis montrer que si Γu est fermé, alors (πE )−1 est continue. 3) Vérifier que u = πF ◦ (πE )−1 puis en déduire que u est continue si Gu est fermé. Comme le montre l’exercice suivant, l’hypothèse de complétude ne peut être supprimée dans l’énoncé du théorème 4.2.31. Exercice 4.2.34 On munit IR[X] de la norme kP k := Sup0≤x≤1 |P (x)| (vérifier qu’il s’agit bien d’une norme). Soit D : IR[X] → IR[X] l’application linéaire définie par D(P ) := P 0 . Montrer que R xD 0 n’est pas continue mais que son graphe est fermé (on remarquera que P (x) = 0 P (t)dt + P (0)). Exercice 4.2.35 Soit k k une norme sur C([0, 1]) telle que (fn )n converge simplement vers 0 dès que kfn k tend vers 0 et C([0, 1]), k k soit un espace de Banach. Montrer que k k et k k∞ sont équivalentes. Exercice 4.2.36 Utiliser le théorème du graphe fermé pour montrer que tout opérateur symétrique d’un espace de Hilbert dans lui-même est continu. Exercice 4.2.37 On reprend les hypothèses et notations de l’exercice 4.2.13. On considère b ∈ l∞ tel que bA(f ) ∈ ImA pour tout f ∈ C(T ). 1) Montrer que l’on peut définir une application linéaire B de C(T ) dans lui même par B(f ) := A−1 bA(f ) . 2) Montrer que B est continue. 3) Montrer que si b ∈ l1 alors bA(f ) ∈ ImA pour tout f ∈ C(T ). 4.3 4.3.1 Bases dans les espaces de Banach Bases de Hamel Pour la première fois dans ce texte, nous allons utiliser l’axiome du choix 1 . Il s’agit d’un axiome important et non anodin de la théorie des ensembles. En voici 1. C’est au tout début du 20 ième siècle que l’édifice de la théorie des ensembles, dont Cantor avait lancé la construction vers 1880, sembla vaciller suite à la découverte de plusieurs antinomies 75 deux énoncés équivalents. Énoncé 1 Soit (Xi )i∈I une famille d’ensembles avec I 6= ∅ et Xi 6= ∅ pour tout i ∈ I. Alors Πi∈I Xi 6= ∅. Énoncé 2 Soit X un ensemble et P l’ensemble des parties non vides de X. Alors il existe une application f : P → X telle que f (A) ∈ A pour tout A ∈ P. Le premier énoncé signifie que l’on peut choisir simultanément un élément dans chacun des Xi , cela ne pose bien sur pas de problème si I est fini ou dénombrable. Le second énoncé a un contenu plus intuitif, l’application f s’appelle ”fonction de choix”. On utilise souvent l’axiome du choix en analyse ou, plus exactement, l’une des deux conséquences suivantes : Théorème 4.3.1 (de maximalité de Hausdorff ) Tout ensemble non-vide partiellement ordonné possède un sous-ensemble totalement ordonné et maximal pour la propriété d’être totalement ordonné. Lemme 4.3.2 (Zorn) Soit X un ensemble dont toutes les parties totalement ordonnée non-vides possèdent un élément majorant. Alors X possède un élément maximal. Rappelons qu’un ensemble X est partiellement ordonné si il existe une relation ≤ telle que pour tous x, y, z ∈ X : x≤x x ≤ y et y ≤ x ⇒ x = y x ≤ y et y ≤ z ⇒ x ≤ z. On dit que X est totalement ordonné lorsque, de plus, deux éléments quelconques de X sont comparables c’est à dire : pour tout x ∈ X et tout y ∈ X on a x ≤ y ou y ≤ x. Si Y est un sous-ensemble de X, on dit que x est un majorant de Y si et seulement si y ≤ x pour tout y ∈ Y . On dit que m ∈ X est maximal dans X si et seulement (la plus connue est celle de Russel concernant l’ensemble des ensembles qui sont éléments d’euxmêmes). C’est dans ce climat que Zermelo batit une axiomatique de la théorie des ensembles et introduisit, en 1904, l’axiome du choix. Son caractère insolite le fit prendre en suspicion par de nombreux mathématiciens, bien qu’il se soit rapidement révélé comme un outil puissant et indispensable. La question fut tranchée en 1940 lorsque Gödel prouva que l’axiome du choix ne pouvait apporter aucun risque nouveau de contradiction aux mathématiques ; autrement dit si l’on découvre un jour une conséquence contradictoire de l’axiome du choix, c’est que les mathématiques sans l’axiome du choix sont déjà contradictoires. Dans les années 60, Cohen démontra l’indépendance de l’axiome du choix ; celui-ci ne peut être déduit des autres axiomes par le seul secours du raisonnement logique. 76 si x ∈ X et m ≤ x ⇒ x = m. Comme Hamel le découvrit en 1908, tout espace vectoriel possède une base algébrique, ce qui est une conséquence assez surprenante de l’axiome du choix. Définition 4.3.3 On dit que B est une base algébrique (ou base de Hamel) d’un espace vectoriel X si et seulement si : 1) B est libre (i.e. toute combinaison linéaire d’un nombre fini d’éléments de B n’est nulle que si les coefficients de cette combinaison sont tous nuls) 2) tout élément de X peut être écrit comme combinaison linéaire d’un nombre fini d’éléments de B (i.e. X = V ect B). Théorème 4.3.4 (Hamel) Tout espace vectoriel possède une base algébrique. t u Soit X un espace vectoriel sur un corps K. Soit L := {F ⊂ X tel que F libre}. L est partiellement ordonné par l’inclusion ⊂. Par le théorème 4.3.1, il existe B ⊂ L totalement ordonné et maximal. Posons B := ∪F ∈B F . Montrons comment l’ordre totalP sur B entraine que B est libre. Soient x1 , · · ·, xq ∈ B et α1 , · · ·, αq ∈ K tels que qj=1 αj xj = 0. Il existe F1 , · · ·, Fq ∈ B tels que xj ∈ Fj pour tout 1 ≤ j ≤ q. Puisque B est totalement ordonné par ⊂, l’un des Fj contient les q − 1 autres, on peut supposer que Fj ⊂ Fq pour tout 1 ≤ j ≤ q. Alors x1 , · · ·, xq ∈ Fq et, comme Fq est libre, α1 = · · · = αq = 0. La maximalité de B entraine que X = V ect B. Supposons que X 6= V ect B, alors il existe x0 ∈ X \ V ect B et en particulier B0 := B ∪ {x0 } est une famille libre, c’est à dire B0 ∈ L. Mais alors Be := B ∪ {B0 } est totalement ordonnée, contenue dans L et contient strictement B ce qui contredit la maximalité de B. t u Remarquons qu’en vertu du théorème 4.3.4, IR possède une base algébrique sur le corps Q, I c’est d’ailleurs cela qu’avait démontré Hamel. Remarquons aussi que les bases de Hamel d’un espace de Banach de dimension infinie ne sont jamais dénombrables (voir l’exercice 4.1.5). En utilisant des bases de Hamel, il est très facile de construire des applications linéaires aux propriétés, ou plutôt pathologies, variées. Voyons par exemple comment faire pour la non-continuité. Soient E et F des espaces vectoriels normés de dimension infinie. Choisissons BE et BF des bases de Hamel respectives de E et F dont on supposera les éléments de norme 1. Puisque E et F ne sont pas de dimension finie il existe des familles dénombrables infinies {ej / j ∈ IN} ⊂ BE et {fj / j ∈ IN} ⊂ BF . On définit une application linéaire A : E → F par sa donnée sur la base BE , si l’on prend : A(ej ) = jfj , ∀j ∈ IN A(x) = 0, ∀x ∈ BE \ {ej j ∈ IN} 77 alors A n’est pas continue. Les théorèmes de Banach-Steinhaus et du graphe fermé suggèrent que les applications linéaires entre espaces de Banach sont presque automatiquement continues. Solovay a montré dans les années 70, qu’il n’est pas possible de définir une application linéaire non-continue entre espaces de Banach sans utiliser l’axiome du choix. 4.3.2 Bases de Schauder On a vu qu’un espace de Banach admet toujours une base algébrique qui est finie si l’espace est de dimension finie ou sinon n’est pas dénombrable (voir le théorème 4.3.4 et l’exercice 4.1.5). Nous avons également vu que les espaces de Hilbert admettent des bases. Il ne faut cependant pas confondre les bases hilbertiennes avec les bases algébriques car, dans un espace de Hilbert H de dimension infinie muni d’une base hilbertienne (en )n∈IN , l’ensemble des vecteurs s’écrivant comme combinaison linéaire finie des en est maigre dans H (c’est à nouveau l’exercice 4.1.5). Ce type de base est clairement bien plus adapté à la géométrie et la topologie d’un espace de Hilbert que ne peut l’être une base de Hamel dont l’existence même repose sur un argument abstrait. Certains espaces de Banach peuvent être munis de bases analogues aux bases hilbertiennes, ce sont les bases de Schauder. Au travers des exercices qui suivent, nous allons examiner quelques aspects relatifs à ces espaces. Définition 4.3.5 On dit que (en )n∈IN est une base de Schauder normalisée d’un espace de Banach (E, k k) si (en )n∈IN est une suite de vecteurs normés de E et si tout élément x ∈ E s’écrit de façon unique sous la forme x = lim n n X xk ek k=0 avec xk ∈ IR. On notera alorsêk la forme linéaire définie par êk : E → IR x 7→ xk et l’on dira que ek (x) = xk est la k ième coordonnée de x et que les ek sont les formes linéaires coordonnées. Signalons à titre d’exemple que nous avons utilisé (sans le spécifier) des bases de Schauder pour les espaces lp (1 ≤ p < ∞) lors de l’étude de la dualité lp /lq (voir le théorème 1.4.14) . Précisément, si en := δkn k désigne la suite dont tous les termes 78 ème sont nuls qui est pris égal à 1, alors (en )n est une base de Schauder de sauf le n p l , k kp pour 1 ≤ p < ∞. Il n’est pas du tout clair que les formes linéaires coordonnées êk soient continues. Cette importante propriété fait l’objet du Théorème 4.3.6 Soit (E, k k) un espace de Banach et (en )n est une base de Schauder normalisée de E. Les formes linéaires coordonnées ên sont continues. La norme k k1 définie par n X kxk1 := sup k êk (x)ek k n 1 est équivalente à la norme k k. En fait la continuité des ên et l’équivalence des normes k k et k k1 sont intimement liées, ceci est détaillé dans l’exercice qui suit. Exercice 4.3.7 Soit (E, k k) un espace de Banach et (en )n est une base de Schauder normalisée de E. On pose n X êk (x)ek . Pn .x := k=0 1) Montrer que les applications Pn sont linéaires puis que k k1 est une norme. 2) Montrer que si les formes êk sont continues alors les applications Pn sont continues et (E, k k1 ) est complet. 3) Montrer que si (E, k k1 ) est complet alors les normes k k et k k1 sont équivalentes. En déduire que la famile (Pn )n est équicontinue et que les formes linéaires ên sont continues. 4) Montrer que (E, k k1 ) est complet. Exercice 4.3.8 Soit E, k k un espace de Banach muni de deux bases de Schauder 0 normalisées P P(en )n 0et (en )n . On suppose que pour toute suite réelle (ak )k les séries k ak ek et k ak ek sont simultanément convergentes ou simultanément divergentes. Soit J l’application linéaire définie par J : E → EP ∞ 0 x 7→ k=0 êk (x) ek . 1) Montrer que ê0n ◦ J = ên pour tout n ∈ IN. 2) Montrer que J est continue. En déduire l’existence de constantes C1 , C2 > 0 telles que N N N X X X 0 C1 k ak ek k ≤ k ak ek k ≤ C2 k ak ek k k=0 k=0 pour toute suite réelle (ak )k et tout N ∈ IN. 79 k=0 Définition 4.3.9 Soit E, k k un espace de Banach muni d’une base de Schauder normalisée (en )n . 1) Pour toute partie finie A de IN on définit une application linéaire PA par PA : E → E P x 7→ k∈A êk (x) ek . 2) On dit que la base (en ) est inconditionnelle si pour tout > 0 il existe une partie finie A0 ⊂ IN telle que pour tout x ∈ E et toute partie finie A vérifiant A0 ⊂ A ⊂ IN on ait : kx − PA (x)k < . Exercice 4.3.10 Soit E, k k un espace de Banach muni d’une base de Schauder normalisée inconditionnelle (en )n . 1) Montrer que la famille {PA } où A décrit l’ensemble des parties finies de IN est équicontinue. 2) Montrer qu’il existe une constante C > 0 telle que k N X k ak ek k ≤ Ck N X ak e k k k=M k=M pour toute suite réelle (ak )k , toute suite (k )k à valeurs dans {−1, 1} et tout N ≥ M ∈ IN 3) Montrer que pour tout x ∈ EP et toute suite d’entiers nk la série nk k (−1) êk (x) ek converge. Nous allons voir quelques exemples concrets d’espaces de Banach munis de bases de Schauder. Exercice 4.3.11 Soit c0 l’espace des suites réelles de limite nulle normé par k k∞ . On pose en = δkn k et sn := e1 + · · · + en . 1) Montrer que bases de Schauder de c0 . n )n et (sn )n sont P(e Pdes N N k 2) Calculer k 0 (−1) sk k∞ et k 0 sk k∞ pour tout N ∈ IN. 3) Montrer que la base (sn )n n’est pas inconditionnelle (on utilisera l’exercice 4.3.10). 4.4 Prolongement des formes linéaires Nous étendons aux espaces non séparables le théorème de prolongement vu à la section 1.4.2 et en étudions quelques conséquences. 4.4.1 Le théorème de Hahn-Banach Reproduisons l’énoncé du théorème 1.4.3 en supprimant l’hypothèse de séparabilité de l’espace X. 80 Théorème 4.4.1 Soit X un IR-espace vectoriel et M un sous-espace vectoriel de X. Soit µ une pseudo-jauge sur X. Alors, pour toute forme linéaire f sur M telle que f (x) ≤ µ(x), ∀x ∈ M il existe une forme linéaire λ ∈ X ∗ vérifiant −µ(−x) ≤ λ(x) ≤ µ(x), ∀x ∈ X et prolongeant f (c’est à dire telle que λ|M = f ). Nous n’aurons besoin dans cette partie (à l’exercice 4.4.4 près) que d’une version correspondant au cas où µ est une norme, le cas général sera utilisé dans la cinquième leçon pour établir des formes plus géométriques du théorème de HahnBanach. Cependant, comme la démonstration n’est pas plus compliquée dans le cas d’une jauge, nous nous plaçons d’emblée dans cette situation. Le premier pas de la démonstration consiste à traiter la situation la plus simple c’est à dire celle où M est de co-dimension un dans X. Ceci faisait l’objet du lemme 1.4.6 dont nous reproduisons l’énoncé ici. Lemme 4.4.2 Soit X un IR-espace vectoriel et M un sous-espace vectoriel de X. Soit µ une pseudo-jauge sur X et f une forme linéaire sur M telle que f (x) ≤ µ(x), ∀x ∈ M. Alors, pour tout x0 ∈ / M , il existe une forme linéaire f0 sur M ⊕ IRx0 prolongeant f et vérifiant f0 (x) ≤ µ(x) pour tout x ∈ M ⊕ IRx0 . Comme nous l’avons vu dans la première leçon, ce lemme permet dors et déjà d’établir un théorème de prolongement des formes linéaires continues dans le cas où X est un espace normé séparable. Voyons maintenant comment traiter le cas général et établir le théorème 4.4.1. Voici le principe de la démonstration. L’ensemble de tous les prolongements possibles est muni d’un ordre partiel. En utilisant l’axiome du choix, ou plus exactement le théorème de maximalité de Hausdorff (4.3.1), on construit un prolongement ”maximal”. Si ce prolongement n’était pas défini sur l’espace total, alors le lemme 1.4.6 fournirait un nouveau prolongement qui en contredirait la maximalité. Ce prolongement ”maximal” est alors le prolongement cherché. Tout ceci est détaillé dans l’exercice ci-dessous. Exercice 4.4.3 Soit X un IR-espace vectoriel, µ une pseudo-jauge sur X et f une forme linéaire définie sur un sous-espace vectoriel M de X telle que f (x) ≤ µ(x) pour tout x ∈ M . Soit Ω l’ensemble des prolongements de f c’est à dire l’ensemble des couples (M̃ , f˜) où M̃ est un sous espace vectoriel de X contenant M et f˜ une forme linéaire sur M̃ prolongeant f et majorée par µ : 81 Ω := {(M̃ , f˜) tel que M ⊂ M̃ , f˜ ≤ µ et f˜|M = f }. On munit Ω de la relation d’ordre partiel ≤ définie par (M̃1 , f˜1 ) ≤ (M̃2 , f˜2 ) ⇔ M̃1 ⊂ M̃2 et f˜2 |M̃1 = f˜1 . 1) Justifier l’existence d’un sous-ensemble ω de Ω totalement ordonné par ≤ et maximal pour cette propriété. Soient alors M := {M̃ / ∃f˜ ∈ M̃ ∗ tel que (M̃ , f˜) ∈ ω} et E := ∪M̃ ∈M M̃ . 2) Vérifier que E est un sous espace vectoriel de X (on commencera par observer que M est totalement ordonné par ⊂) puis montrer que l’on peut définir une application f0 : E → IR en posant f0 (x) = f˜(x) pour tout (M̃ , f˜) ∈ ω tel que x ∈ M̃ . (on utilisera le fait que ω est totalement ordonné). Vérifier que f0 ∈ E ∗ et que f0 ≤ µ. 3) Montrer que E = X (en utilisant le lemme 1.4.6, on montrera que si cela n’est pas le cas alors Ω n’est pas maximal) et conclure. Comme première application du théorème 4.4.1 nous allons établir l’existence d’une forme linéaire continue sur l’espace des suites bornées (l∞ , k k∞ ) qui coı̈ncide avec la limite sur le sous-espace des suites convergentes, est invariante par décalage et prend ses valeurs entre la limite supérieure et la limite inférieure. Une telle forme linéaire, dont l’existence est assez surprenante, s’appelle limite généralisée de Banach. Ceci illustre le caractère subtil du théorème de prolongement de Hahn-Banach et de l’axiome du choix qui le sous-tend. Exercice 4.4.4 On considère l’espace (l∞ , k k∞ ) des suites réelles bornées. On note S l’opérateur de sommation de Césarò S · x := 1 (x1 + · · · + xn ) n n et on définit p par p(x) := lim sup(S.x). On note τ l’opérateur de décalage τ · x := xn+1 n . 1) Montrer que S et τ sont des opérateurs linéaires continus et calculer leur norme. Montrer que p est une pseudo-jauge sur l∞ . 2) On note M l’ensemble des éléments x de l∞ tels que S.x converge. Pour tout x ∈ M on pose L(x) := lim S.x. Montrer que M est un sous-espace vectoriel de l∞ et que L est une forme linéaire sur M . 3) Montrer qu’il existe une forme linéaire continue L sur l∞ telle que : (i) Pour toute suite convergente x, L(x) = lim x. (ii) L ◦ τ = L (iii) lim inf x ≤ L(x) ≤ lim sup x pour tout x ∈ l∞ . On observera que τ · x − x ∈ M pour tout x ∈ l∞ . 82 Remarque 4.4.5 On a vu dans la première leçon que le dual topologique de l∞ ”contient” l1 . Laforme linéaire L exhibée dans l’exercice ci-dessus est un exemple 0 d’élément de l∞ qui ”n’est pas dans” l1 . Dans le cadre des espaces normés, le théorème 4.4.1 admet le corollaire suivant : Théorème 4.4.6 Soit (X, k k) un espace vectoriel normé et M un sous-espace vectoriel de X. Alors toute forme linéaire continue f sur M se prolonge en une forme linéaire continue λ sur X telle que k|f k| = |kλk|. En particulier, pour tout x0 ∈ X il existe λ0 ∈ E 0 telle que k|λ0 |k = 1 et λ0 (x0 ) = kx0 k. t u Lorsque IK = IR il suffit d’appliquer le théorème 4.4.1 à f avec µ = k|f k| · k k. Lorsque IK = C, I on l’applique à u := Re f pour la structure d’espace vectoriel réel sous-jacente puis on pose λ(x) := U (x) − iU (ix) où U est le prolongement obtenu pour u. t u Le théorème 4.4.6 montre que X 0 sépare les points de X et, en particulier, entraine le Corollaire 4.4.7 Soit (X, k k) un espace vectoriel normé et x ∈ X. Si λ(x) = 0 pour toute forme λ ∈ X 0 alors x = 0. Ce fait est souvent employé mais il ne faut pas perdre de vue qu’il résulte du théorème de prolongement de Hahn-Banach. Voici un exemple d’utilisation : Exercice 4.4.8 Montrer qu’une application linéaire f : E → F entre deux espaces de Banach est continue si et seulement si λ ◦ f est une forme linéaire continue sur E pour toute forme linéaire continue λ sur F . Indication : utiliser le théorème du graphe fermé. L’une des conséquences importantes du théorème de prolongement de HahnBanach est l’existence d’un plongement isométrique de tout espace normé dans son bidual. Nous en avions justifié l’existence pour les espaces séparables dans la section 1.4.2, nous sommes maintenant en mesure d’étendre ceci au cas général. Rappelons les définitions suivantes. Définition 4.4.9 Soit X, k k un espace vectoriel normé. Pour tout x ∈ X, l’application x̂ : X 0 → IK λ 7→ λ(x) est appelée application d’évaluation en x. On a alors le 83 Théorème 4.4.10 Soit X, k k un espace vectoriel normé. L’application J : X → X 00 x 7→ x̂ est une injection linéaire isométrique. t u L’application J est clairement linéaire. Elle est aussi continue et k|J(x)k| ≤ kxk car |x̂(λ)| = |λ(x)| ≤ k|λk| kxk pour tout λ ∈ X 0 . Puisque pour tout x ∈ X, il existe λ ∈ X 0 telle que x̂(λ) = kxk et k|λk| = 1, on a en fait k|J(x)k| = kxk. t u Soulignons l’importance de ce plongement par la définition suivante. Définition 4.4.11 Pour tout espace vectoriel normé X, k k L’application J : X → X 00 définie par J(x) = x̂ est appelée injection canonique de X dans X 00 . Dans l’exercice qui suit on utilise les résultats obtenus pour développer une théorie de l’orthogonalité et de l’adjonction dans un espace de Banach. Il faut bien entendu comparer le contenu de cet exercice à ce que nous avions fait dans les espaces de Hilbert. On notera le rôle joué ici par le théorème de Hahn-Banach. Commençons par préciser quelques notions. Définition 4.4.12 Soit (X, k k) un espace normé. Pour tout x ∈ X et tout λ ∈ X 0 on note hλ, xi := λ(x). Pour tout A ⊂ X on pose 0 A⊥(X,X ) := {λ ∈ X 0 tel que hλ, xi = 0, ∀x ∈ A}. 0 On dit que A⊥(X,X ) est l’orthogonal de A, on peut aussi le noter plus simplement A⊥ . Pour tout B ⊂ X 0 on pose 0 B ⊥(X ,X) := {x ∈ X tel que hλ, xi = 0, ∀λ ∈ B}. 0 On dit que B ⊥(X ,X) est l’orthogonal de B, on peut aussi le noter plus simplement B⊥. 0 On observera que si B ⊂ X 0 alors on peut aussi considérer B ⊥(X ,X 00 ) À tout U ∈ Lc X, X on associe son opérateur adjoint U ∗ ∈ Lc X 0 , X 0 défini par U ∗ (λ) := λ ◦ U pour tout λ ∈ X 0 . On notera que hU ∗ (λ), xi = hλ, U (x)i, ∀λ ∈ X 0 , ∀x ∈ X. 84 Exercice 4.4.13 Soit (X, k k) un espace normé. 0 0 1) Montrer que A⊥(X,X ) (resp. B ⊥(X ,X) ) est un sous-espace vectoriel fermé de X 0 (resp. X) pour tout A ⊂ X (resp. B ⊂ X 0 ). 0 ⊥(X 0 ,X) 2) Soit M un sous-espace vectoriel de X. Montrer que M ⊂ M ⊥(X,X ) 0 ⊥(X 0 ,X) . puis, en utilisant le théorème de Hahn-Banach, montrer que M = M ⊥(X,X ) 0 0 ⊥(X ,X) 3) Justifier l’égalité X = {0}. 4) Soit U ∈ Lc X, X . En utilisant la dernière assertion du théorème 4.4.6), ⊥(X,X 0 ) montrer que |||U ∗ ||| = |||U |||. Vérifier que Ker U ∗ = Im U et 0 ∗ ⊥(X ,X) Im U = Ker U . 5) On suppose que l’injection canonique J : X → X 00 est surjective. ⊥(X 00 ,X 0 ) 0 00 0 0 = A⊥(X,X ) et J B ⊥(X ,X) = B ⊥(X ,X ) pour tout ⊥(X,X 0 ) 0 A ⊂ X et tout B ⊂ X 0 puis montrer que N = N ⊥(X ,X) pour tout ⊥(X,X 0 ) sous-espace vectoriel N de X 0 . En déduire que Im U ∗ = Ker U pour tout U ∈ Lc X, X . Vérifier que J(A) Résumons les principaux résultats obtenus. Proposition 4.4.14 Soit (X, k k) un espace normé. 0 ⊥(X,X 0 ) ⊥(X ,X) M = M . 1) Pour tout sous-espace vectoriel M ⊂ X on a 2) Pour tout U ∈ Lc X, X on a i) |||U ∗ ||| = |||U |||. ⊥(X 0 ,X) ⊥(X,X 0 ) = Ker U . ii) Ker U ∗ = Im U et Im U ∗ ⊥(X,X 0 ) iii) Si J : X → X 00 est surjective alors Im U ∗ = Ker U . 4.4.2 Un critère de densité Nous allons utiliser le théorème 4.4.1 pour généraliser aux espaces normés ce que nous avons vu dans le cadre des espaces de Hilbert et établirons l’exact analogue du théorème 3.3.10, il s’agit d’un puissant critère de densité. Théorème 4.4.15 Soit M un sous-espace vectoriel d’un espace vectoriel normé X. Alors M = X ⇔ M ⊥ = {0}. t u Si M = X et λ ∈ M ⊥ alors, par continuité, λ = 0. Réciproquement, nous allons voir que si M 6= X alors il existe λ ∈ X 0 \ {0} telle que λ|M = 0. Choisissons pour cela x0 ∈ X et 0 > 0 tels que B(x0 , 0 ) ∩ M = ∅ et définissons une forme linéaire f sur M ⊕ IKx0 par f (x + tx0 ) = t pour tout x ∈ M et tout t ∈ IK. En écrivant 85 0k |f (x + tx0 )| = kx+tx on voit que |f (x + tx0 )| ≤ 10 kx + tx0 k et donc que f est kx0 + xt k continue. La forme λ s’obtient alors en prolongeant f à X au moyen du théorème 4.4.6. t u Dans les deux exercices qui suivent on couple le critère de densité avec un argument d’annulation de fonction analytique. Le second de ces exercices établit une généralisation du théorème d’approximation de Weierstrass connue sous le nom de théorème de Műnz (question 5), on notera cependant que le théorème de Weierstrass est utilisé dans la démonstration. Exercice 4.4.16 Soit (E, k k) un espace de Banach et (en )n une suite de vecteurs normés telle que V ect{en } soit dense dans E. Soit (αp )p une suite de nombres complexes telle que |αp | < 1 et lim αp = 0. P 1) Justifier l’existence d’une suite (ap )p définie par ap := n αpn en . Vérifier que, pour toute forme linéaire continue λ sur P E, la fonction Φλ (z) := n hλ, en iz n est analytique dans le disque unité. 2) Montrer que V ect{ap } est dense dans E. Exercice 4.4.17 On considère l’espace C([0, 1]) des fonctions continues à valeurs complexes sur [0, 1] muni de la norme de la convergence uniforme k k∞ . Le demi plan droit du plan complexe {z ∈ C I / Re z > 0} ; est noté H. 1) Vérifier que les fonctions t 7→ tz et t 7→ tz ln t sont dans C([0, 1]) pour tout z ∈ H et que la fonction (t, z) 7→ tz ln t est continue sur [0, 1]× K pour tout compact K ⊂ H. 2) Pour toute forme linéaire continue λ sur C([0, 1]), k k∞ , on définit une fonction Φλ sur H par Φλ (z) := hλ, tz i. Rz Montrer que Φλ (z) = 1 λ(tu ln t) du + Φλ (1) (on pourra utiliser le théorème de Radon-Riesz 1.4.11 ou le résultat de l’exercice 2.1.21). Vérifier que u 7→ λ(tu ln t) est continue sur H et en déduire que Φλ est analytique sur H. 3) Montrer que Φλ = 0 si et seulement si λ(f ) = f (0)λ(t0 ) pour tout f ∈ C([0, 1]). 4) Soit αn une suite réelle strictement croissante et majorée telle que α0 = 0. Montrer queP toute fonction continue sur [0, 1] est limite uniforme de fonctions αn de la forme n=N n=0 an t . 5) Montrer P que la conclusion de la question précédente reste vraie si l’on suppose que n≥1 α1n = +∞. On considèrera la fonction Ψλ définie sur le disque unité 1+u ∆ de C I par Ψλ (u) := Φλ 1−u , et on se servira du fait que toute fonction holomorphe bornée P h sur ∆ est identiquement nulle dès lors que h(un ) = 0 où limn un = 1 et (1 − |un |) = +∞. Nous allons maintenant utiliser le critère de densité 4.4.15 et un mécanisme analogue à celui mis en place dans les exercices 4.4.16, 4.4.17, pour établir un important résultat concernant l’approximation polynomiale dans le plan complexe. Ce 86 théorème (dit de Runge) stipule que toute fonction holomorphe au voisinage d’un compact simplement connexe est limite uniforme sur ce compact d’une suite de polynômes holomorphes. Exercice 4.4.18 Soit K un compact du plan complexe C I dont le complémentaire est connexe . On considère C(K) l’espace des fonctions continues à valeurs complexes sur K muni de la norme kf k∞ := SupK |f |. On désigne par O(K) le sous-espace de C(K) constitué des fonctions possédant un prolongement holomorphe à un voisinage 1 . À toute forme de K. Pour tout η ∈ / K on définit χη ∈ O(K) par χη (z) := η−z linéaire continue λ sur O(K), k k∞ on associe une fonction Φλ définie sur K c par Φλ (η) := hλ, χη i. 1) Montrer que Φλ (η) est une fonction holomorphe sur K c (on pourra vérifier qu’elle est C-dérivable). I Montrer que P 1 k Φλ := ∞ k=0 η k+1 hλ, z i pour |η| > SupK |z|. 2) Soit f ∈ O(K) et V un voisinage ouvert de K sur lequel f est holomorphe. Montrer qu’il existe un ouvert Ω bordé par une union Γ1 ∪ · · · ∪ ΓN de chemins affines par morceaux tel que K ⊂ Ω ⊂ V (utiliser un pavage du plan par des carrés assez petits et ne retenirPque ceux R qui rencontrent K). N 1 Montrer que < λ, f >= 2iπ k=1 k Γk f (η)Φλ (η)dη où k ∈ {−1, 1} (on R pourra utiliser le résultat de l’exercice 2.1.21 pour permuter Γk et λ). En déduire que Φλ = 0 si et seulement si λ = 0. 3) Montrer que toute fonction f ∈ O(K) est limite uniforme sur K d’une suite de polynômes. Montrer par un exemple que l’hypothèse de connexité sur K c est nécessaire à cette conclusion. 87 88 Leçon 5 Méthodes géométriques C’est plutôt dans le sens d’un élargissement et d’une analyse axiomatique plus poussée des conceptions relatives aux espaces normés que se sont produits les développements les plus féconds. Bien que les espaces fonctionnels rencontrés depuis le début du XXe siècle se fussent présentés pour la plupart munis d’une norme ”naturelle”, on n’avait pas été sans remarquer quelques exceptions. [...]. Mais la théorie de ces espaces plus généraux ne devait se developper de façon fructueuse qu’en liaison avec la notion de convexité. N. Bourbaki 5.1 Les convexes dans un espace normé Nous allons exploiter les résultats obtenus jusqu’ici, et plus particulièrement le théorème de prolongement de Hahn-Banach, pour obtenir des renseignements de nature géométrique sur les convexes d’un espace vectoriel normé. Signalons dors et déjà que les résultats obtenus s’adapteront sans difficulté dans le cadre plus général des espaces vectoriels localement convexes. 5.1.1 Formes linéaires, jauges et semi-normes Rappelons qu’une forme linéaire λ sur un espace vectoriel normé X, k k est continue si et seulement si elle est bornée sur la boule (ou la sphère) unité de X et 89 que l’on définit une norme k| k| sur le dual topologique X 0 par : k|λk| := supkxk≤1 |λ(x)| = supkxk=1 |λ(x)|. Rappelons aussi que X 0 , k| k| est toujours un espace de Banach. Nous renvoyons à la section 1.4.1 pour plus de détails sur le dual topologique d’un espace normé. Les hyperplans sont les objets géométriques attachés aux formes linéaires. Définition 5.1.1 On dit qu’un sous-espace H d’un IK-espace vectoriel X est un hyperplan si il existe x0 ∈ X tel que X = H ⊕ IKx0 . Cela revient à dire que H est un sous-espace vectoriel de co-dimension un dans X. À tout hyperplan H est associée une forme linéaire λH définie par la décompostion X = H ⊕ IKx0 : x = h + λH (x)x0 où h ∈ H et λH (x) ∈ IK. Comme KerλH = H, l’hyperplan H est fermé si λH est continue. Inversement, si H est fermé alors λH est continue (on voit facilement que si λH n’est pas continue à l’origine alors x0 ∈ H). En fait, comme nous le verrons au lemme 5.1.2 toute forme linéaire (continue) est du type λH pour un hyperplan (fermé) H. Les ensembles de niveau {λ = c0 } d’une forme linéaire continue λ sont des hyperplans affines fermés car {λ = c0 } = x0 +Ker λ pour tout x0 tel que λ(x0 ) = c0 . Lemme 5.1.2 Le noyau d’une forme linéaire (continue) non nulle sur un espace vectoriel normé X, k k est un sous-espace (fermé) de co-dimension un, c’est à dire un hyperplan (fermé) de X. Plus généralement, si λ1 , · · ·, λr sont des formes linéaires (continues) indépendantes alors ∩ri=1 Kerλi est un sous-espace (fermé) de co-dimension r. t u Le noyau Ker λ d’une forme linéaire (continue) λ ∈ X 0 est un sous-espace vectoriel (fermé) de X et λ induit une forme λ̇ sur l’espace quotient X/Ker λ. Cela signifie que λ̇ ◦ π = λ où π désigne la projection canonique de X sur X/Ker λ. Par construction, λ̇ est injective et, si λ 6= 0, la forme λ̇ est également surjective. Ceci montre que si Ker λ 6= X alors X/Ker λ est un IK-espace vectoriel de dimension un, il est alors facile de vérifier que X = Ker λ⊕V ect(x1 ) dès lors que X/Ker λ = IKx˙1 . Le cas d’une intersection de noyaux se traite de façon analogue (voir l’exercice 5.1.3). t u 90 Exercice 5.1.3 Soit X un espace vectoriel normé et λ1 , · · ·, λr ∈ X 0 . Soit ϕ : X → IRr l’application linéaire définie par ϕ(x) := (λ1 (x), · · ·, λr (x)). 1) Montrer que si ϕ n’est pas surjective alors les formes λ1 , · · ·, λr sont liées. 2) Montrer que si les formes λ1 , · · ·, λr sont linéairement indépendantes alors ϕ induit un isomorphisme ϕ̇ : X/Ker ϕ → IRr . En déduire qu’alors ∩ri=1 Ker λi est un sous-espace fermé de co-dimension r de X. 3) On suppose que les formes λ1 , · · ·, λr sont linéairement indépendantes et qu’il existe λ ∈ X 0P telle que ∩ri=1 Ker λi ⊂ Ker λ. Montrer qu’il existe a1 , ···, ar ∈ IK tels que λ = ri=1 ai λi . Une partie A d’un espace vectoriel X est dite convexe si tx + (1 − t)y appartient à A dès lors que x et y sont dans A et 0 ≤ t ≤ 1. Géométriquement cela signifie que tout segment joignant deux points quelconque de A reste contenu dans A. DESSIN Toute partie convexe et absorbante (voir la définition 4.1.7) permet de définir naturellement une fonction convexe et positivement homogène que l’on appelle sa jauge. Proposition 5.1.4 À toute partie convexe et absorbante A d’un espace vectoriel X est associëe une fonction µA définie sur X par : µA (x) := inf{t > 0 / x t ∈ A}. La fonction µA vérifie les propriétés suivantes : 1) ∀x ∈ X, ∀t > µA (x) : xt ∈ A 2) ∀x ∈ X, ∀y ∈ X : µA (x + y) ≤ µA (x) + µA (y) 3) ∀x ∈ X, ∀t ≥ 0 : µA (tx) = tµA (x) 4) Si B := {x ∈ X / µA (x) < 1} et C := {x ∈ X / µA (x) ≤ 1} alors B et C sont convexes absorbantes, B ⊂ A ⊂ C et µB = µA = µC . t u Puisque A est absorbante, l’origine 0 est dans A (appliquer la définition à x = 0) et donc, par convexité, xt ∈ A lorsque t > t0 et tx0 ∈ A. Cela justifie 1). y s x t Supposons que s > µA (x) et t > µA (y), en écrivant que x+y = + , on s+t s+t s s+t t x+y déduit de la convexité et de 1) que s+t ∈ A. Cela ce traduit par µA (x + y) ≤ s + t d’où, en faisant s → µA (x) et t → µA (y), l’assertion 2). L’assertion 3) est évidente. Il découle des propriétés 2) et 3) que B et C sont convexes et absorbantes. On a alors x ∈ B ⇒ µA (x) < 1 ⇒ x = x 1 ∈ A ⇒ µA (x) ≤ 1 ⇒ x ∈ C c’est à dire B ⊂ A ⊂ C et donc µC ≤ µA ≤ µB . Par ailleurs, en utilisant 3) et les définitions, il vient : 91 s > t > µC (x) ⇒ x s x t ∈ C ⇒ µA ( xt ) ≤ 1 ⇒ µA ( xs ) = ( st )µA ( xt ) < 1 ⇒ ∈ B ⇒ µB ( xs ) ≤ 1 ⇒ µB (x) ≤ s d’où, en faisant s → µC (x), l’inégalité µB (x) ≤ µC (x). t u On peut montrer de la même façon (voir l’exercice 5.1.6) que si µ est une fonction positive définie sur X et satisfaisant les propriétés 2) et 3) alors les parties B := {x ∈ X / µ(x) < 1} et C := {x ∈ X / µ(x) ≤ 1} sont convexes absorbantes et µ = µA = µB . Ceci motive la définition suivante. Définition 5.1.5 On dit qu’une fonction µ : X → IR définie sur un espace vectoriel X est une pseudo-jauge si et seulement si 1) ∀x ∈ X, ∀y ∈ X : µ(x + y) ≤ µ(x) + µ(y) 2) ∀x ∈ X, ∀t ≥ 0 : µ(tx) = tµ(x). Une jauge est une pseudo-jauge à valeurs positives. En particulier, lorsque A est une partie convexe absorbante de X, la fonction µA (x) := inf{t > 0 / x t ∈ A} est appelée jauge de A. Exercice 5.1.6 Soit µ une jauge définie sur sur un espace vectoriel X. Soient B et C les parties de X définies par B := {x ∈ X / µ(x) < 1} et C := {x ∈ X / µ(x) ≤ 1}. 1) Vérifier que B et C sont convexes absorbantes et que µC ≤ µB . 2) Montrer que si s > µ(x) alors µB (x) ≤ s, en déduire que µB ≤ µ. 3) Montrer que si s > µC (x) alors µ(x) ≤ s, en déduire que µ = µB = µC . Exercice 5.1.7 Soit X un espace vectoriel muni d’une topologie (τ ) pour laquelle les applications IK 3 t 7→ tx sont continues pour tout x ∈ X. Soit C une partie ouverte et convexe de X qui contient l’origine 0. Montrer que C est absorbante et C = {µC < 1} (on utilisera le fait que si x ∈ C alors (1 + n1 )x ∈ C pour n assez grand). Les semi-normes forment une classe de fonctions sur X intermédiaire à celles des jauges et des normes. Définition 5.1.8 On dit qu’une fonction p : X → IR+ définie sur un espace vectoriel X est une semi-norme si et seulement si 1) ∀x ∈ X, ∀y ∈ X : p(x + y) ≤ p(x) + p(y) 2) ∀x ∈ X, ∀t ∈ IK : p(tx) = |t|p(x). 92 On voit que pour qu’une semi-norme p soit une norme il faut et il suffit que {p = 0} soit réduit à {0}. On voit aussi que pour qu’une jauge µ soit une semi-norme il faut et il suffit que {µ < 1} soit symétrique, c’est à dire que µ(x) < 1 ⇔ µ(tx) < 1, pour tout t tel que |t| = 1. Ainsi les semi-normes sont les jauges associées à des parties convexes absorbantes et symétriques, elles vérifient en outre les propriétés suivantes. Proposition 5.1.9 Si p est une semi-norme sur un espace vectoriel X alors 1) ∀x ∈ X, ∀y ∈ X : |p(x) − p(y)| ≤ p(x − y) 2) {p = 0} est un sous-espace vectoriel de X 3) B := {p < 1} est convexe absorbante et symétrique, de plus p = µB . Exercice 5.1.10 Établir les propriétés des semi-normes énoncées à la proposition 5.1.9. 5.1.2 Le théorème de séparation de Hahn-Banach Il est intuitivement clair que deux convexes disjoints peuvent être séparés par un hyperplan, ce qui revient à dire qu’ils sont contenus dans deux demi-espaces différents. Ceci nécessite pourtant une démonstration, même en dimension finie, et fait l’objet du théorème dit de séparation de Hahn-Banach. Ce résultat est, come nous le verrons, une conséquence du théorème de prolongement de Hahn-Banach. Théorème 5.1.11 (Hahn-Banach) Soient A et B deux parties convexes disjointes d’un C-espace I vectoriel normé X. 1) Si A est ouvert alors il existe γ ∈ IR ainsi que λ ∈ X 0 tels que : Re λ(a) < γ ≤ Re λ(b), ∀a ∈ A, ∀b ∈ B. 2) Si A est compact et B fermé alors il existe γ1 ∈ IR, γ2 ∈ IR ainsi que λ ∈ X 0 tels que : Re λ(a) < γ1 < γ2 ≤ Re λ(b), ∀a ∈ A, ∀b ∈ B. L’une des conséquences géométriques de la seconde assertion de ce théorème est que tout convexe fermé est l’intersection des demi-espaces qui le contiennent. Pour la démonstration, on se ramène au cas d’un IR-espace vectoriel en considérant l’espace réel sous-jacent. L’essentiel consiste à considérer la situation modèle où C est un convexe ouvert contenant l’origine et x0 est un point n’appartenant pas à C. On notera que dans le cas le plus ”défavorable” x0 est sur le bord de C. Le lemme suivant est consacré à cette étude. Lemme 5.1.12 Soit C un convexe ouvert d’un IR-espace vectoriel normé X tel que 0 ∈ C. Pour tout x0 ∈ / C, il existe λ ∈ X 0 telle que λ < 1 sur C et λ(x0 ) = 1. 93 t u Soit µC la jauge de C. On sait que C ⊂ {µC < 1} (voir l’exercice 5.1.7) et donc que µC (x0 ) ≥ 1 car x0 ∈ / C. Comme x0 6= 0, on peut considérer la droite vectorielle M := IRx0 et définir une forme linéaire f sur M vérifiant f (x0 ) = 1 en posant : f (tx0 ) = t, ∀t ∈ IR. Par construction, f est dominée par µC . En effet, f (tx0 ) = t ≤ tµC (x0 ) = µC (tx0 ), ∀t > 0 f (tx0 ) = t ≤ 0 ≤ µC (tx0 ), ∀t ≤ 0. D’après le théorème de prolongement de Hahn-Banach (4.4.1), il existe une forme linéaire λ sur X prolongeant f et vérifiant λ ≤ µC . En particulier, λ < 1 sur C et λ(x0 ) = 1. Il reste à montrer que λ est continue. Comme nous venons de le voir, λ < 1 sur C et donc λ > −1 sur −C. Puisque C est un ouvert contenant 0, il existe une boule B centrée à l’origine contenue dans C. On a alors |λ| < 1 sur B ; c’est la continuité de λ. t u On voit bien dans la démonstration ci-dessus que la ”tangence” de {λ = 1} est assurée par le contrôle λ ≤ µC . C’est là qu’est pleinement utilisée la notion de jauge. Nous allons maintenant voir comment déduire le théorème 5.1.11 du lemme 5.1.12. t u 1) Fixons a0 ∈ A et b0 ∈ B puis posons x0 := b0 − a0 et C := A − B + x0 . Il est facile de vérifier que C et x0 satisfont les hypothèses du lemme 5.1.12, il existe donc λ ∈ X 0 telle que λ < 1 sur C et λ(x0 ) = 1. On a donc en particulier λ(a) − λ(b) + 1 = λ(a − b + x0 ) < 1 et donc λ(a) < λ(b) pour tout a ∈ A et tout b ∈ B. Comme λ(A) et λ(B) sont des parties convexes de IR et que, de surcroit, λ(A) est ouverte (le vérifier !), il suffit de prendre γ := supa∈A λ(a). 2) Notons A := A + B(0, ) où B(0, ) est la boule ouverte centrée à l’origine et de rayon > 0. Par construction A est un ouvert convexe et de plus, comme A est compact et B fermé, A ∩ B = ∅ pour assez petit. On peut donc appliquer l’assertion 1) à A et B, la conclusion s’ensuit facilement. t u Exercice 5.1.13 Soit X un IR-espace vectoriel normé et λ1 , ···, λr ∈ X 0 , on suppose les formes λ1 , · · ·, λr linéairement indépendantes. Soient c1 , · · ·, cr ∈ IR non tous nuls et F := ∩ri=1 {λi = ci }. On pose α := inf x∈F kxk. Montrer, en utilisant le théorème de séparation de Hahn-Banach 5.1.11, qu’il existe λ ∈ X 0 et c > 0 tels que λ ≡ c sur F et |λ| < c sur la boule ouverte B(0, α). 94 5.1.3 Le théorème de Krein-Milman Ce théorème est l’un des résultats les plus remarquables sur les parties convexes et compactes d’un espace vectoriel. Il concerne l’existence et les propriétés de base de leurs points extrémaux. Bien qu’il soit déjà très pertinent pour les topologies induites par une norme, il est très utile d’en disposer pour des topologies plus générales. La seule contrainte est que les formes linéaires continues pour les topologies considérées séparent les points. Commençons par préciser la notion de point extrémal. Définition 5.1.14 Soit X un IR-espace vectoriel. 1) Pour tout a, b ∈ X tels que a 6= b, on note ]a, b[ le segment de la droite vectorielle réelle dirigée par (b − a) ”strictement compris entre” a et b : ]a, b[:= {ta + (1 − t)b ; 0 < t < 1}. 2) Pour tout K ⊂ X on dit qu’une partie non vide S de K est une partie extrémale de K si et seulement si : ∀a 6= b ∈ K : ]a, b[∩S 6= ∅ ⇒ a, b ∈ S. 3) On dit que p ∈ K est un point extrémal de K si et seulement si {p} est une partie extrémale de K. Autrement dit, p est extrémal si et seulement si ∀a, b ∈ K : p = ta + (1 − t)b ; 0 < t < 1 ⇒ a = b = p. La notion de point extrémal est très utile pour voir que deux espaces normés ne sont pas isométriquement isomorphes. Les exercices ci-dessous illustrent cette méthode sur quelques exemples, lorsque nous disposerons des théorèmes d’existence de points extrémaux voulus, elle s’avèrera particulièmement efficace pour établir que certains espaces de Banach ne peuvent être isométriques à un dual. Exercice 5.1.15 Soit A : X → Y un isomorphisme d’espaces vectoriels et K une partie de X. Montrer que A échange les points extrémaux de K et ceux de A(K). Exercice 5.1.16 Trouver les points extrémaux de la boule unité fermée de l∞ , k k∞ , montrer que celle de c0 , k k∞ n’en possède pas. En déduire, au moyen de l’exercice 5.1.15, que c0 et l∞ ne sont pas isométriquement isomorphes. Exercice 5.1.17 Soit c le sous-espace de l∞ des suites convergentes. 1) Montrer que l’application A : c → c0 définie par A(x) := − lim x, x1 − lim x, x2 − lim x, · · ·, xn − lim x, · · est un isomorphisme bicontinu. 2) Montrer qu’il n’existe pas d’isomorphisme isométrique entre c, k k∞ et c0 , k k∞ (on utilisera les exercices 5.1.15 et 5.1.16). Nous nous intéressons maintenant au problème de l’existence des points extrémaux. 95 Lemme 5.1.18 Soit X un IR-espace vectoriel muni d’une topologie (τ ) et K une partie compacte de X. On note E l’ensemble des parties extrémales fermées de K. Alors : 1) K ∈ E 2) si Si ∈ E, ∀i ∈ I et ∩i∈I Si 6= ∅ alors ∩i∈I Si ∈ E 3) si S ∈ E et ϕ : S → IR est une fonction convexe continue alors l’ensemble des points où ϕ atteint sa borne supérieure est lui-même une partie extrémale non vide de K. Autrement dit : Sϕ := {x ∈ S/ϕ(x) = supS ϕ} ∈ E. t u Seul le troisième point n’est pas évident. Supposons que a 6= b ∈ K et ]a, b[∩Sϕ 6= ∅. Puisqu’en particulier ]a, b[∩S 6= ∅ et S ∈ E il vient {a, b} ⊂ S. Par ailleurs, si 0 < t0 < 1 et t0 a + (1 − t0 )b ∈ Sϕ on a supS ϕ = ϕ t0 a + (1 − t0 )b ≤ t0 ϕ(a) + (1 − t0 )ϕ(b) où l’inégalité traduit la convexité de ϕ. Comme ϕ(a), ϕ(b) ≤ supS ϕ, on obtient ϕ(a) = ϕ(b) = supS ϕ c’est à dire a, b ∈ Sϕ . t u La troisième assertion du lemme 5.1.18 laisse entrevoir l’intérêt de déterminer les parties extrémales les plus petites. Ceci fait l’objet du théorème suivant qui, en outre, justifie l’existence de points extrémaux d’un compact convexe. Théorème 5.1.19 (Krein-Milman) Soit X un IR-espace vectoriel muni d’une topologie (τ ) pour laquelle les formes linéaires continues séparent les points. Soit K une partie compacte de X et E l’ensemble des points extrémaux de K. Alors : 1) Toute partie extrémale et fermée de K contient un point extrémal. En particulier E 6= ∅. 2) Si ϕ : K → IR est une fonction convexe continue alors ϕ atteint sa borne supérieure sur E (i.e supK ϕ = supE ϕ). t u 1) Notons E l’ensemble des parties extrémales fermées de K et, pour S ∈ E fixée, notons ES :={A ∈ E/ A ⊂ S}. L’ensemble ES est partiellement ordonné par l’inclusion. En utilisant la compacité de K, on voit que l’intersection de toute famille totalement ordonnée de ES est un élément de ES . Le lemme de Zorn 4.3.2 stipule alors l’existence d’un élément minimal Se de ES . Nous allons montrer que Se est réduit à un point. Comme, par hypothèse, les formes linéaires sur X continues pour la topologie (τ ) séparent les points de X, il suffit de montrer qu’une telle forme λ est constante sur e D’après l’assertion 3) du lemme 5.1.18 on a Seλ ∈ ES puis, par minimalité de S, e il S. e e e vient S = Sλ ce qui signifie que λ est constante et égale à supSe λ sur S. 2) Il suffit d’appliquer l’assertion 1) à Kϕ := {x ∈ S/ϕ(x) = supK ϕ} qui, d’après l’assertion 3) du lemme 5.1.18, appartient à E. t u Voyons pour finir comment reconstituer un compact convexe à partir de ses points extrémaux. Définition 5.1.20 Soit X un IR-espace vectoriel et Q une partie de X. 96 1) L’enveloppe convexe de Q est le plus petit convexe de X contenant Q, on la note Conv (Q). 2) L’enveloppe convexe fermée de Q est le plus petit convexe fermé de X conteb nant Q, on la note Q. Rappelons que l’enveloppe convexe de Q est l’ensemble des barycentres de points pris dans Q, c’est à dire : Conv (Q) = { PN i=1 ti pi ; tel que N ∈ IN, ti ≥ 0 et PN i=1 ti = 1}. Nous allons maintenant démontrer une version plus précise du théorème de KreinMilman. Bien qu’il existe également une version de ce nouvel énoncé valable pour d’autres topologies que celles induites par une norme, nous nous restreindrons, pour l’instant, au seul cas des espace normés. Théorème 5.1.21 (Krein-Milman) Soit X, k k un IR-espace vectoriel normé. Soit K une partie compacte de X et E l’ensemble des points extrémaux de K. Alors b et K = E b si K est convexe. K⊂E La démonstration fait l’objet de l’exercice suivant. Exercice 5.1.22 Soit X un IR-espace vectoriel normé, K une partie compacte de X et E l’ensemble des points extrémaux de K. b En appliquant le théorème de séparation de Hahn-Banach 1) Soit a ∈ K \ E. b montrer qu’il existe λ ∈ X 0 et σ1 , σ2 ∈ IR tels que λ(a) > 5.1.11 à {a} et E, b En utilisant la seconde assertion du théorème σ1 > σ2 > λ(x) pour tout x ∈ E. b 5.1.19, montrer que λ(a) > supK λ. En déduire que K ⊂ E. b lorsque K est convexe. 2) Justifier que K = E 5.2 Espaces localement convexes Nous abordons ici l’étude de topologies d’espaces vectoriels qui généralisent les topologies d’espaces normés. Ces topologies sont construites au moyen de familles de semi-normes et munissent chaque point d’une base de voisinages convexes. 5.2.1 Topologie induite par une famille de semi-normes Voyons comment utiliser certaines familles de semi-normes pour munir un espace vectoriel d’une bonne topologie. Précisons tout d’abord un point de vocabulaire. Définition 5.2.1 Soit X un IK-espace vectoriel. Pour toute semi-norme p sur X on dit que Bp (x0 , r) := {x ∈ X/ p(x − x0 ) < r} est une p-boule de centre x0 et de rayon r. 97 Proposition 5.2.2 Soit X un IK-espace vectoriel. Soit F une famille de seminormes sur X stable par enveloppe supérieure finie et telle que pour tout x ∈ X il existe p ∈ F vérifiant p(x) 6= 0. Alors la famille F induit une topologie séparée σ(X, F) sur X telle que : 1) les ouverts de σ(X, F) sont les ensembles ω vérifiant : ∀x ∈ ω, ∃p ∈ F tel que Bp (x, r) ⊂ ω 2) les opérations X × X 3 (x, y) 7→ x + y et IK × X 3 (u, x) 7→ ux sont continues pour la topologie σ(X, F). Muni d’une telle topologie, X est localement convexe car les p-boules Bp (x, r) forment une base de voisinages convexes de x. Ceci justifie la définition suivante. Définition 5.2.3 On dit qu’un espace vectoriel X muni d’une topologie du type σ(X, F) est un espace vectoriel (topologique) localement convexe ou, en abrégé, un e.l.c. t u Nous ne vérifierons pas in extenso que σ(X, F) est une topologie ; c’ est facile mais fastidieux. Notons simplement que la stabilité de l’ouverture par intersection finie découle de la stabilité de F par enveloppe supérieure finie et la séparation du fait que ∩p∈F {p = 0} = {0}. La continuité des opérations s’établit en utilisant les propriétés de sous-additivité et d’homogénéité des semi-normes car en effet : Bp (x1 , r1 ) + Bp (x1 , r2 ) ⊂ Bp (x1 + x2 , r1 + r2 ) et {|u − u0 | < } · Bp (x0 , r) ⊂ Bp (u0 x0 , (|u0 | + )r). t u À titre d’exemple, nous allons de nouveau considérer l’espace C ∞ (Ω) des fonctions indéfiniement différentiables sur un ouvert Ω de IRk . Étant donnée (Kn )n une suite exhaustive de compacts de Ω, on définit une suite croissante de semi-normes pn sur C ∞ (Ω) par : pn (f ) := sup k1Kn Dα f k∞ , ∀f ∈ C ∞ (Ω). |α|≤n La topologie d’e.l.c induite par cette famille de semi-normes sur C ∞ (Ω) est celle de la convergence uniforme locale des fonctions et de toutes leurs dérivées. Cette topologie est en outre métrisable. Tout ceci a été étudié à l’exercice 1.2.10. En pratique, la convergence des suites et la continuité des applications linéaires sont très faciles à caractériser pour les topologies d’e.l.c. Proposition 5.2.4 Soit X un e.l.c dont la topologie σ(X, F) est induite par une famille de semi-normes F. Alors : 98 1) X 3 xn → x ⇔ limn p(x − xn ) = 0, ∀p ∈ F. 2) Si Y un IK-espace vectoriel muni d’une topologie d’e.l.c σ(Y, G) alors une application linéaire A de X dans Y est continue si et seulement si : ∀q ∈ G, ∃p ∈ F, ∃C ≥ 0 tel que q ◦ A(x) ≤ Cp(x), ∀x ∈ X. Exercice 5.2.5 Établir soigneusement les assertions de la proposition 5.2.4. Exercice 5.2.6 Soit X un e.l.c et C un voisinage convexe ouvert de l’origine dans X. Montrer que la jauge µC de C est une fonction continue sur C. L’exercice suivant reprend, dans un cadre général, une idée que nous avons rencontrée à plusieurs reprises dans des cas particuliers (voir les exercices 1.2.10 ou 2.1.24). Exercice 5.2.7 Soit X un IK-espace vectoriel et (pn )n une suite croissante de seminormes sur X telle que ∩n {pn = 0} = {0}. Pour tout (x, y) ∈ X × X on pose d(x, y) := X 1 pn (x − y) . n 1 + p (x − y) 2 n n Montrer que d est une distance sur X qui induit la topologie (X, {pn }). Il est primordial de savoir si les e.l.c possèdent suffisamment de formes linéaires continues ou, en d’autres termes, si celles-ci séparent les points. Dans les espaces normés, cette information recquérait l’emploi du théorème de Hahn-Banach et il en ira donc de même dans les e.l.c. Or, la démonstration du théorème de séparation de Hahn-Banach s’adapte, mutatis mutandis, aux e.l.c. Nous avons donc le Théorème 5.2.8 Soient A et B deux parties convexes disjointes d’un C-espace I vectoriel X muni d’une topologie d’ e.l.c. 1) Si A est ouvert alors il existe γ ∈ IR ainsi qu’une forme linéaire continue λ tels que Re λ(a) < γ ≤ Re λ(b), ∀a ∈ A, ∀b ∈ B. 2) Si A est compact et B fermé alors il existe γ1 ∈ IR, γ2 ∈ IR ainsi qu’une forme linéaire continue λ tels que Re λ(a) < γ1 < γ2 ≤ Re λ(b), ∀a ∈ A, ∀b ∈ B. Exercice 5.2.9 Réécrire la démonstration du théorème 5.1.11 dans le cadre des e.l.c. Puisque les formes linéaires continues séparent les points d’un e.l.c, le théorème 5.1.19 s’applique dans ces espaces. Quant au théorème 5.1.21, sa démonstration ne faisait que combiner le théorème de séparation de Hahn-Banach et l’énoncé 5.1.19. Le théorème de Krein-Milman reste donc valable dans les e.l.c 99 Théorème 5.2.10 (Krein-Milman) Soit X un IR-espace vectoriel muni d’une topologie d’e.l.c. Soit K une partie compacte de X et E l’ensemble des points extrémaux de K. Alors 1) Toute partie extrémale et fermée de K contient un point extrémal. 2) Si ϕ : K → IR est une fonction convexe continue alors ϕ atteint sa borne supérieure sur E (i.e supK ϕ = supE ϕ). b et K = E b si K est convexe. 3) K ⊂ E 5.2.2 Topologies faibles On cherche ici à remplacer la topologie d’espace vectoriel normé sur un espace X ou son dual X 0 par une topologie affaiblie (c’est à dire possédant moins d’ouverts) dans l’espoir de rendre les boules unités compactes tout en ne perdant pas (ou pas trop) de formes linéaires continues. Dans ce but, il est naturel de considérer les topologies σ(X 0 , X) et σ(X, X 0 ) définies ci-dessous, ce sont des topologies d’e.l.c induites par des familles de semi-normes. Définition 5.2.11 Soit X un IK-espace vectoriel normé. 1) On note σ(X 0 , X) la topologie d’e.l.c induite sur X 0 par la famille de seminormes px1 ,···,xn (λ) := sup |λ(xi )| où n ∈ IN et x1 · ··, xn ∈ X. 1≤i≤n 0 2) On note σ(X, X ) la topologie d’e.l.c induite sur X par la famille de seminormes pλ1 ,···,λn (x) := sup |λi (x)| où n ∈ IN et λ1 , · · ·, λn ∈ X 0 . 1≤i≤n Il est évident que la topologie σ(X 0 , X) est séparée. La topologie σ(X, X 0 ) l’est aussi mais il faut utiliser le théorème de Hahn-Banach pour le voir : d’après le théorème 4.4.1, si x1 6= x2 alors il existe λ ∈ X 0 telle que λ(x1 − x2 ) 6= 0 si bien que Bp (x1 , ) ∩ Bp (x2 , ) = ∅ si p := pλ et est assez petit. On voit immédiatement en utilisant la première assertion de la proposition 5.2.4 que σ(X 0 , X) est la topologie de la convergence simple sur X 0 . De même, σ(X, X 0 ) est la topologie de la convergence faible (xk → x ⇔ λ(xk ) → λ(x), ∀λ ∈ X 0 ). Il est important d’observer que les ”demi-espaces” Ωλ := {x ∈ X/ λ(x) < γ} sont des ouverts pour la topologie σ(X, X 0 ) lorsque λ ∈ X 0 et γ ∈ IR. Exercice 5.2.12 Soit X un IK-espace vectoriel normé et F un sous-espace vectoriel de X. En utilisant le théorème de prolongement de Hahn-Banach, montrer que la topologie σ(F, F 0 ) coı̈ncide avec la topologie induite sur F par σ(X, X 0 ). 100 L’injection canonique J : X → X 00 jouera un rôle fondamental dans l’investigation des questions de compacité relatives à la topologie σ(X, X 0 ). Pour l’instant elle nous permet de mieux interpreter la nature des topologies faibles σ(X 0 , X) et σ(X, X 0 ). La topologie σ(X 0 , X) est ”naturelle” car, comme nous l’avons vu, c’est la topologie de la convergence simple sur X 0 . Voyons en quoi la topologie σ(X, X 0 ) n’est pas moins naturelle. Tout comme pour X 0 , on peut munir X 00 de la topologie σ(X 00 , X 0 ), on voit alors que la topologie σ(X, X 0 ) est l’image réciproque par J de la topologie induite par la ”topologie naturelle” σ(X 00 , X 0 ) sur J(X). Autrement dit, les ouverts 0 −1 de la topologie σ(X, X ) sont les ensembles de la forme J J(X) ∩ O où O est un ouvert de X 00 pour σ(X 00 , X 0 ). La proposition suivante reprend l’essentiel de ce que nous venons de voir, étant donné son importance nous en donnons une démonstration explicite. Proposition 5.2.13 Étant donné un espace vectoriel normé X, l’injection canonique J : X, σ(X, X 0 ) → X 00 , σ(X 00 , X 0 ) est continue. Si J est surjective alors J : X, σ(X, X 0 ) → X 00 , σ(X 00 , X 0 ) est un homéomorphisme. t u Notons λ̃ := {λ1 , · · ·, λn } les collections finies d’éléments de X 0 . Les seminormes qui définissent la topologie σ(X 00 , X 0 ) sont de la forme p00λ̃ (ϕ) := M ax1≤i≤n |ϕ(λi )| , ∀ϕ ∈ X 00 et celles qui définissent la topologie σ(X, X 0 ) de la forme pλ̃ (x) := M ax1≤i≤n |λi (x)| , ∀x ∈ X. On voit donc que p00λ̃ (J(x)) = M ax1≤i≤n |x̂(λi )| = M ax1≤i≤n |λi (x)| = pλ̃ (x) , ∀x ∈ X puis, composant avec J −1 , p00λ̃ (ϕ) = pλ̃ (J −1 (ϕ)) , ∀ϕ ∈ X 00 . Ces égalités traduisent la continuité de J et J −1 (voir la proposition 5.2.4). t u Nous allons terminer cette partie en précisant quelles sont les formes linéaires continues sur X ou X 0 munis des topologies faibles. 101 Proposition 5.2.14 Soit (X, k k) un espace vectoriel normé. Une forme linéaire f sur X 0 est continue pour la topologie σ(X 0 , X) si et seulement si il existe x ∈ X tel que f = x̂. Une forme linéaire f sur X est continue pour la topologie σ(X, X 0 ) si et seulement si il existe λ ∈ X 0 tel que f = λ. On peut résumer ceci par les formules 0 X 0 , σ(X 0 , X) = J(X) et 0 X, σ(X, X 0 ) = X 0 . Les exercices 5.2.15 et 5.2.16 ci-dessous montrent que les formes linéaires continues sur X 0 pour la topologie faible σ(X 0 , X) sont exactement les évaluations. On montre de la même façon que les formes linéaires continues sur X pour la topologie faible σ(X, X 0 ) sont les éléments de X 0 . Exercice 5.2.15 Soit (X, k k) un espace vectoriel normé. Montrer que si λ ∈ X 0 alors λ est continue pour la topologie σ(X, X 0 ). Montrer que x̂ est continue sur X 0 pour la topologie σ(X 0 , X) pour tout x ∈ X. Exercice 5.2.16 Soit (X, k k) un espace vectoriel normé et f une forme linéaire sur X 0 continue pour la topologie σ(X 0 , X). 1) Justifier l’existence de C > 0 et x1 , ···, xn ∈ X tels que |f (λ)| ≤ C sup1≤i≤n |λ(xi )| pour tout λ ∈ X 0 . Soit F l’espace vectoriel engendré par x1 , · · ·, xn . Après renumérotation, on suppose que {x1 , · · ·, xr } est une base de F pour un certain r ≤ n. 2) Montrer qu’il existe λ1 , · · ·, λr ∈ X 0 telles que λi (xk ) = δik pour 1 ≤ i, k ≤ r (on aura à utiliser le théorème P de prolongement 4.4.1). 3) Soit λ ∈ X 0 et λ0 := λ − ri=1 λ(xi )λi . Montrer que f (λ0 ) = 0 (observer que λ0 (xi ) = 0 pour tout 1 ≤ i ≤ n) puis en déduire que f = xb0 où x0 = P r i=1 f (λi )xi . Exercice 5.2.17 Soient X, k kX et Y, k kY deux espaces de Banach et f : X → Y une application linéaire. Montrer que : 0 f : X, k kX → Y, k kY continue ⇔ f : X, σ(X, X ) → 0 Y, σ(Y, Y ) continue. Pour ⇒ on utilisera l’exercice 4.4.8. Pour ⇐, on observera que le graphe de f est 0 0 fermé dans X × Y, σ(X × Y, X × Y ) . Exercice 5.2.18 Soit K un espace topologique compact et X := C(K), k k∞ . Soit P l’ensemble des mesures de probabilités sur K, on considérera P comme une partie de X 0 . Soit D le sous-ensemble de P constitué des masses de Dirac. 102 1) Montrer que P est un convexe fermé dans X 0 , σ(X 0 , X) (on utilisera le théorème de Radon-Riesz 1.4.11). σ(X 0 ,X) = P (on utilisera le théorème de séparation de 2) Montrer que Conv(D) Hahn-Banach 5.2.8). 3) On suppose maintenant que K = [0, 1]. Montrer que toute mesure de probabilité sur K est limite faible d’une suite de mesures de probabilités discrètes. 5.2.3 Bornés faibles et bornés forts, fermés faibles et fermés forts Nous avons vu qu’une suite faiblement convergente d’un espace de Hilbert est toujours bornée (voir les exercices 3.3.14 et surtout l’exercice 4.2.4 où ceci est établi à l’aide du théorème de Banach-Steinhaus). Ce phénomène trouve son explication dans le fait plus général qu’une partie d’un espace vectoriel normé X est bornée pour la topologie faible σ(X, X 0 ) si et seulement si elle est bornée pour la norme. Rappelons la définition suivante. Définition 5.2.19 On dit qu’une partie B d’un espace vectoriel X muni d’une topologie (τ ) est τ -bornée si et seulement si pour tout voisinage V de l’origine il existe t > 0 tel que B ⊂ tV . On a alors le Théorème 5.2.20 Soit X un espace de Banach et B ⊂ X 0 . Alors B est σ(X 0 , X)bornée si et seulement si elle est bornée dans (X 0 , k| k|). Il s’agit d’une simple reformulation du théor‘eme de Banach-Steinhaus, le même argument fonctionne pour la topologie σ(X, X 0 ) mais il faut aussi utiliser l’isométrie J : X → X 00 . Théorème 5.2.21 Toute partie B d’un espace vectoriel normé (X, k k) est bornée si et seulement si elle est σ(X, X 0 )-bornée. Exercice 5.2.22 Considérons un espace vectoriel normé (X, k k). 1) Établir le théorème 5.2.20. 2) Montrer que B est σ(X, X 0 )-bornée si et seulement si ∀λ ∈ X 0 , ∃M > 0 tel que |λ(x)| ≤ M, ∀x ∈ B. 3) En utilisant le théorème de Banach-Steinhaus, montrer que si B est σ(X, X 0 )bornée alors J(B) est une partie équicontinue de X 00 . 4) Montrer que B est σ(X, X 0 )-bornée si et seulement si B est bornée dans (X, k k). 103 Dans le cadre des espaces de Hilbert, nous avions vu que les limites faibles de suites à valeurs dans un convexe fermé appartiennent à ce convexe. Là encore ce phénomène s’inscrit dans un cadre plus général : toute partie convexe C d’un espace normé X est fermée si et seulement si elle est fermée pour la topologie faible σ(X, X 0 ). Ceci est une conséquence du théorème de séparation de Hahn-Banach 5.1.11. Théorème 5.2.23 Soit (X, k k) un espace vectoriel normé et C une partie convexe de X. Alors σ(X,X 0 ) C =C autrement dit, l’adhérence faible de C coı̈ncide avec son adhérence forte. σ(X,X 0 ) /C . D’après le théorème de séparation t u Montrons que si x0 ∈ / C alors x0 ∈ 5.1.11 il existe λ ∈ X 0 telle que λ(x0 ) < γ1 < γ2 < λ(x) pour tout x ∈ C. Autreσ(X,X 0 ) ment dit x0 ∈ Ωλ := {x ∈ X/ λ(x) < γ1 } et Ωλ ∩ C = ∅ ce qui, puisque σ(X,X 0 ) 0 Ωλ est ouvert pour σ(X, X ), montre que x0 ∈ / C . Nous avons montré que σ(X,X 0 ) C ⊂ C, l’inclusion opposée est évidente. t u Corollaire 5.2.24 Soit (X, k k) un espace vectoriel normé et (xn )n une suite dans X qui converge vers x0 pour la toplogie faible σ(X, X 0 ). Alors kx0 k ≤ lim inf kxn k. t u Soit r := lim inf kxn k et (xnk )k extraite de (xn )n telle que limk kxnk k = r. Pour tout > 0, notons Br+ la boule fermée centrée à l’origine et de rayon r + pour σ(X,X 0 ) k k. Puisque xnk ∈ Br+ pour k assez grand on a x0 ∈ Br+ = Br+ = Br+ pour tout > 0 et donc kx0 k ≤ r. t u Exercice 5.2.25 Soit fn n une suite de fonctions continues sur [0, 1] qui converge simplement vers une fonction continue f et vérifient kfn k∞ ≤1. Montrer que f est limite uniforme d’une suite de fonctions gn n où chaque fonction gn est une combinaison linéaire convexe de fonctions fk . La propriété suivante est utile. Proposition 5.2.26 Soit X un espace normé et C ⊂ X 0 . Si C est convexe alors σ(X 0 ,X) C l’est également. Exercice 5.2.27 Établir la proposition 5.2.26. 104 Il est important de souligner que le théorème 5.2.23 est faux pour la topologie σ(X 0 , X). C’est le cas pour l’espace X := C([0, 1]), k k∞ et le convexe Conv(D) des mesures de probabilité discrètes sur [0, 1]. On a vu à l’exercice 5.2.18 que σ(X 0 ,X) Conv(D) est égal à l’ensemble des mesures de probabilité sur [0, 1] or la mesure de Lebesgue m n’est pas dans l’adhérence forte de Conv(D) car, comme on le vérifie facilement, k|m − µk| ≥ 1 pour toute mesure µ ∈ Conv(D). Le lemme suivant, connu sous le nom de lemme de Goldstine, nous éclaire sur cette différence fondamentale entre les topologies σ(X, X 0 ) et σ(X 0 , X). Lemme 5.2.28 Soit X, k k une espace vectoriel normé et BX sa boule unité fermée. Alors σ(X 00 ,X 0 ) J BX = BX 00 où BX 00 est la boule unité fermée du bidual X 00 , k| k| . Lorsque X est un espace de Banach alors J(BX ) est un convexe fermé dans X 00 , k| k| . Le lemme 5.2.28 montre que si J n’est pas surjective alors ce convexe fermé fort n’est pas fermé pour la topologie faible X 00 , σ(X 00 , X 0 ) . Nous verrons plus tard que le lemme de Goldstine est la pierre angulaire de la caractérisation des espaces de Banach pour lesquels J est surjective. σ(X 00 ,X 0 ) t u Notons F := J BX . Commençons par montrer que BX 00 ⊂ F . Procédons par l’absurde et supposons qu’il existe z0 ∈ BX 00 \ F . D’après le lemme 5.2.26, F est un convexe (fermé) dans X 00 , σ(X 00 , X 0 ) et le théorème de séparation 0 de Hahn-Banach 5.2.8 fournit ϕ ∈ X 00 , σ(X 00 , X 0 ) telle que |ϕ(z0 )| > a et |ϕ(z)| < a, ∀z ∈ F. Or la proposition 5.2.14 montre que ϕ est une évaluation : ∃λ ∈ X 0 telle que ϕ(z) = z(λ), ∀z ∈ X 00 . Nous avons donc d’une part a < |z0 (λ)| ≤ k|z0 k| k|λk| ≤ k|λk| et, d’autre part, k|λk| = supx∈BX |λ(x)| = supx∈BX |x̂(λ)| = supz∈J(BX ) |z(λ)| = supz∈J(BX ) |ϕ(z)| ≤ a. Contradiction ! σ(X 00 ,X 0 ) Montrons maintenant que F ⊂ BX 00 . Puisque J(BX ) ⊂ BX 00 on a F ⊂ BX 00 σ(X 00 ,X 0 ) et il suffit donc de montrer que BX 00 ⊂ BX 00 . σ(X 00 ,X 0 ) Soit z0 ∈ BX 00 , il nous faut montrer que k|z0 k|X 00 ≤ 1. Considérons une pboule Bp (z0 , ) dans X 00 où p est une semi-norme sur X 00 donnée par p(z) := |z(λ)| avec λ ∈ BX 0 . Par définition de la topologie σ(X 00 , X 0 ), on a Bp (z0 , ) ∩ BX 00 6= ∅ et il existe donc z1 ∈ X 00 tel que k|z1 k| ≤ 1 et |(z1 − z0 )(λ)| ≤ . Il vient alors |z0 (λ)| ≤ |z0 (λ) − z1 (λ)| + |z1 (λ)| ≤ + k|z1 k|X 00 k|λk|X 0 ≤ + 1 105 puis, en faisant tendre vers 0 : |z0 (λ)| ≤ 1. Enfin, puisque ceci est valable pour tout λ ∈ BX 0 , on obtient k|z0 k|X 00 = supλ∈BX 0 |z0 (λ)| ≤ 1. t u 5.2.4 Compacité faible dans un espace dual Nous allons étendre le théorème de compacité de Banach-Aloglu aux espaces non séparable. Théorème 5.2.29 La boule unité BX 0 du dual topologique de tout espace vectoriel normé X, k k est σ(X 0 , X)-compacte. La démonstration nécessite de recourir à l’axiome du choix ou, plus exactement, au théorème de compacité de Tychonov qui repose cet axiome. Nous en décrivons ici le principe. t u Soit Y := IKX . Notons ω = (ωx )x∈X les éléments de Y . On munit Y de la topologie produit P. C’est la plus faible des topologies pour laquelle, lorsque x décrit X, chaque fonction Y 3 ω 7→ ωx ∈ IK est continue. D’après le théorème de Tychonov, l’ensemble I : {ω ∈ Y tel que |ωx | ≤ kxk, ∀x ∈ X} est compact dans Y, P . Pour tout f ∈ X 0 , posons V (f ) := f (x) x∈X . On vérifie que l’application V : X 0 , σ(X 0 , X) → Y, P ainsi définie est un homéomorphisme sur son image et que V (BX 0 ) est fermé dans Y, P . La compacité faible de BX 0 se déduit alors du fait que V (BX 0 ) ⊂ I t u En combinant le théorème de Banach-Alaoglu 5.2.29 et le théorème de KreinMilman 5.1.19 on voit qu’un espace de Banach dont la boule unité ne possède aucun point extrémal n’est isométriquement isomorphe à aucun espace dual. Cette méthode est très puissante. Exercice 5.2.30 Montrer que l1 n’est pas isométriquement isomorphe à un espace dual. 5.3 5.3.1 Espaces réflexifs Critères de réflexivité et exemples Définition 5.3.1 On dit qu’un espace vectoriel normé X est réflexif si et seulement si l’injection canonique J : X → X 00 est surjective. 106 Il est important dans cette définition que l’isométrie soit réalisée par J ; il peut arriver que X et X 00 soient isométriquement isomorphes sans que J soit surjective. On dira qu’un espace réflexif X est canoniquement isométriquement isomorphe à son bidual X 00 . Notons qu’étant isomorphe à un dual, tout espace réflexif est nécessairement un espace de Banach. Voyons quelques exemples. Les espaces de Hilbert sont réflexifs. Les espaces lp pour 1 < p < ∞ sont réflexifs. L’espace c0 n’est pas réflexif. Exercice 5.3.2 Justifier les exemples ci-dessus. Pour les espaces de Hilbert on utilisera le théorème 3.3.3. Pour les espaces de suites on utilisera le théorème 1.4.14 ainsi que, pour c0 , les exercices 5.1.16 et 1.4.15. Exercice 5.3.3 Soient X1 et X2 deux espaces vectoriels normés et ψ : X1 → X2 un isomorphisme bicontinu. 1) Montrer que ψ ∗ : X20 → X10 où ψ ∗ (λ) := λ ◦ ψ est un isomorphisme bicontinu, isométrique si ψ l’est. 2) Montrer que si X1 est réflexif alors X2 l’est également, on vérifiera que J2 ◦ ∗ ψ = ψ ∗ ◦ J1 où Ji est l’injection canonique de Xi dans Xi00 . Exercice 5.3.4 Montrer que si X est un espace de Banach réflexif et séparable alors X 0 est également séparable. On utilisera le théorème de prolongment de HahnBanach 4.4.6 et le critère de densité 4.4.15. L’essentiel de la théorie des espaces réflexifs repose sur leur caractérisation par la compacité faible de la boule unité. Ce résultat s’obtient en combinant le lemme de Goldstine et le théorème de Banach-Alaoglu. Théorème 5.3.5 Pour tout espace vectoriel normé X on a : X est réflexif ⇔ BX est σ(X, X 0 )-compacte. t u Supposons BX σ(X, X 0 )-compacte. Puisque J : X, σ(X, X 0 ) → X 00 , σ(X 00 , X 0 ) est continue (proposition 5.2.13), J(BX ) est σ(X 00 , X 0 )-compacte. Par le lemme de σ(X 00 ,X 0 ) = J(BX ) d’où la surjectivité Goldstine 5.2.28 il vient alors BX 00 = J BX de J, c’est à dire la réflexivité de X. Supposons X réflexif, c’est à dire J surjectif. Alors J : X, σ(X, X 0 ) → X 00 , σ(X 00 , X 0 ) est un homéomorphisme (proposition 5.2.13) et, puisque d’après le théorème de 00 0 −1 Banach-Alaoglu BX 00 est σ(X , X )-compacte, on voit que BX = J BX 00 est 107 σ(X, X 0 )-compacte. t u Nous allons récolter les fruits de nos efforts en exploitant le théorème 5.3.5 pour statuer sur la réflexivité de plusieurs espaces de Banach. Proposition 5.3.6 Soit X un espace de Banach et F un sous-espace fermé de X. 1) X réflexif ⇔ X réflexif. 2) X réflexif ⇒ F réflexif. t u Si X est réflexif alors σ(X 0 , X) = σ(X 0 , X 00 ) et, par le théorème de BanachAlaoglu, BX 0 est σ(X 0 , X 00 )-compacte. La réflexivité de X 0 découle alors du théorème 5.3.5. Examinons la seconde assertion. D’après le théorème 5.2.23 BF est σ(X, X 0 ) fermée. Puisque X est réflexif, BX est σ(X, X 0 )-compacte et donc BF l’est aussi. On termine en combinant le théorème 5.3.5 et l’exercice 5.2.12. Si X 0 est réflexif alors, en appliquant ce que nous venons de montrer, X 00 et J(X) sont réflexifs. Il s’ensuit que X est réflexif (voir l’exercice 5.3.3). t u Exercice 5.3.7 Montrer que les espaces l1 et l∞ ne sont pas réflexifs. Exercice 5.3.8 Montrer de plusieurs façons que C [0, 1] n’est pas réflexif. Définition 5.3.9 On dit qu’un espace de Banach(E, N ) est uniformément convexe si et seulement si sa boule unité vérifie la propriété suivante : x + y < 1−δ. ∀ > 0 ∃δ > 0 tel que ∀x, y ∈ E : N (x), N (y) ≤ 1 et N (x−y) > ⇒ N 2 DESSIN L’exercice suivant permet de voir que, pour ∞ > p ≥ 2, les espaces Lp (Ω, µ) sont uniformément convexes. Exercice 5.3.10 Soit 2 ≤ p < ∞. kpp + k f −g kpp ≤ 21 kf kpp + kgkpp pour 1) ( Inégalité de Clarkson) Montrer que k f +g 2 2 p tout f, g ∈ Lp (Ω, µ). On commencera par établir que αp +β p ≤ (α2 +β 2 ) 2 pour tout α, β ≥ 0, on posera α = | a+b | et β = | a−b | puis on utilisera la convexité 2 2 p 2 de x . 2) Déduire de l’inégalité de Clarkson que Lp (Ω, µ) est uniformément convexe. Théorème 5.3.11 Tout espace de Banach uniformément convexe est réflexif. 1 1. Il est absolument remarquable qu’une propriété géométrique de la boule unité entraine une propriété structurelle globale d’un espace de Banach. L’étude de ces phénomènes est à la base de la ”géométrie des espaces de Banach”, théorie qui s’est beaucoup développée et à laquelle le livre de Beauzamy [?] constitue une excellente introduction. 108 La démonstration de ce théorème fait l’objet de l’exercice 5.3.12. Avant cela, nous montrons comment en déduire facilement la réflexivité des espaces Lp (Ω, µ) et une preuve du théorème de dualité Lp /Lq 1.4.13. t u Rappelons le contenu de la proposition 1.4.12 : si q est l’exposant conjugué de p (i.e 1q + p1 = 1) alors on dispose d’une injection isométrique Λ : g 7→ Λg de 0 R Lp (Ω, µ) dans Lq (Ω, µ) définie par Λg (h) := Ω hg dµ pour tout h ∈ Lq (Ω, µ). En 0 particulier Λ Lp (Ω, µ) est un sous-espace fermé de Lq (Ω, µ) . Nous allons établir 0 la réflexivité des espaces Lp (Ω, µ) puis en déduire que Λ Lp (Ω, µ) = Lq (Ω, µ) . D’après le théorème 5.3.11 et l’exercice 5.3.10, Lp (Ω, µ) est réflexif si ∞ > p ≥ 2. Si 1 < p < 2 alors ∞ > q ≥ 2 et donc Lq (Ω, µ) est réflexif. La proposition 5.3.6 et p l’exercice 5.3.3 permettent alors de voir que Λ L (Ω, µ) puis Lp (Ω, µ) sont réflexifs. Pour montrer que Λ est surjective, il suffit de montrer que Λ Lp (Ω, µ) est dense 0 dans Lq (Ω, µ) . Pour cela on utilise le critère de densité 4.4.15 et l’on vérifie que 00 si ϕ ∈ Lq (Ω, µ) est identiquement nulle sur Λ Lp (Ω, µ) alors ϕ = 0. Or, puisque q Lq (Ω, µ) est réflexif, ϕ est de la forme ĥ pour un certain h ∈ L (Ω,R µ). La fonctionq q−2 p u := |h| h̄ est dans L (Ω, µ) et 0 = ϕ Λu = ĥ Λu = Λu (h) = Ω hu dµ = khkq donc ϕ = ĥ = 0. t u Exercice 5.3.12 Soit (X, N ) un espace de Banach uniformément convexe. On note k k la norme usuelle sur X 0 ou X 00 . Soit ξ ∈ X 00 tel que kξk = 1. 1) Montrer que si ∀ > 0, ∃x ∈ BX tel que kξ − J(x)k ≤ alors ξ ∈ J(BX ) (on remarquera que si x̂n converge alors xn est de Cauchy). 2) Soit > 0 fixé et δ donné par l’uniforme convexité de (X, N ). a) Justifier l’existence de f ∈ X 0 tel que kf k = 1 et ξ(f ) > 1 − 2δ . b) Montrer que V ∩ J(BX ) 6= ∅ où V := {η ∈ X 00 / |η(f ) − ξ(f )| < 2δ } (on utilisera le lemme de Goldstine). c) Soit x ∈ BX tel que J(x) ∈ V . Montrer que si kξ − J(x)k > alors il existe y ∈ BX tel que J(y) ∈ V et N (x − y) > (on utilisera g ∈ X 0 telle que |ξ(g) − g(x)| > ). 3) Montrer que (X, N ) est réflexif. 5.3.2 Réflexivité et compacité séquentielle faible Nous sommes maintenant en mesure de généraliser aux espaces réflexifs le théorème de compacité (séquentielle) faible établi dans le cadre des espaces de Hilbert (voir la sous-section 3.3.3). À toutes fins utiles, faisons quelques rappels sur la notion de compacité pour un espace topologique quelconque. Une espace topologique (séparé) est dit compact si il satisfait la propriété de Borel-Lebesgue c’est à dire si de tout recouvrement par 109 des ouverts on peut extraire un sous-recouvrement fini. On voit facilement que toute suite à valeurs dans un compact admet au moins une valeur d’adhérence mais attention : cela ne signifie pas que cette suite admette une sous-suite convergente. Tel serait par contre le cas si la topologie était à base dénombrable. Un espace topologique est dit séquentielement compact si il satisfait la propriété de Bolzano-Weierstrass c’est à dire si toute suite de points de cet espace admet une sous-suite convergente. Pour les espaces métriques ces deux notions de compacité coı̈ncident. Nous allons voir que la boule unité d’un espace réflexif est séquentielement compacte. D’une certaine façon, ceci constitue un résultat indépendant du théorème 5.3.5. Théorème 5.3.13 Soit X un espace de Banach réflexif. Toute suite (xn )n bornée dans X possède une sous-suite qui converge pour σ(X, X 0 ). Autrement dit, après une extraction éventuelle, il existe x ∈ X tel que limn λ(xn ) = λ(x) pour toute forme λ ∈ X 0. t u Soit M l’adhérence de l’espace vectoriel engendré par les xn . Par construction M est séparable et, d’après la proposition 5.3.6, il est réflexif. En utilisant l’exercice 5.3.4 on voit alors que M 0 est séparable, ce qui permet d’appliquer le théorème de Banach-Alaoglu 2.1.22 à la suite (x̂n )n . Ainsi, il existe ϕ ∈ M 00 tel qu’après une éventuelle extraction limn x̂n (λ) = ϕ(λ) pour toute forme λ ∈ M 0 . Or, puisque M est réflexif, ϕ = x̂ pour un certain x ∈ M puis, comme toute forme λ ∈ X 0 est aussi par restriction un élément de M 0 , on a limn λ(xn ) = limn x̂n (λ) = ϕ(λ) = x̂(λ) = λ(x) pour toute forme λ ∈ X 0 . t u L’exercice suivant a pour but de généraliser aux espaces réflexifs le théorème ergodique de Von Neuman établi dans le cadre des espaces de Hilbert (voir l’exercice 3.3.9). Exercice 5.3.14 Soit (E, k k) un espace de Banach et A ∈ Lc E, E tel que |||A||| ≤ 1. On pose Tn := n1 I + A + ... + An−1 et V := Ker (I − A), W := Im (I − A). 1) Montrer que Tn (x) = x pour tout x ∈ V et tout n ∈ IN∗ . 2) Montrer que limn Tn (x) = 0 pour tout x ∈ Im (I − A) puis pour tout x ∈ W (on observera que |||Tn ||| ≤ 1). En déduire que V ∩ W = {0}. On suppose dorénavant E réflexif. On utilisera la théorie de l’adjonction développée à l’exercice 4.4.13 (voir aussi la proposition 4.4.14). 3) Montrer que V ⊥ ∩ W ⊥ = {0} puis en déduire que V 110 L W est dense dans E. 4) Soit F un sous-espace vectoriel fermé de E. Montrer que toute suite (xn ) bornée dans F possède une sous-suite qui converge faiblement σ E, E 0 vers un élément x ∈ F . 5) Montrer que ||x|| ≤ ||x L + y|| ∀x ∈ V, ∀y ∈ W . 6) Montrer que E = V W . Quelle est la limite simple de Tn ? Dans tout le reste de cette section, nous consacrerons nos efforts à établir la réciproque du théorème 5.3.13. Théorème 5.3.15 (Eberlein-Smulian) Un espace de Banach X, k k est réflexif si et seulement si toute suite bornée possède une sous-suite faiblement convergente. Pour étudier cette question, on introduit une classe naturelle de suites de points de la sphère unité d’un espace normé qui ne possèdent pas de sous-suites faiblement convergentes. Définition 5.3.16 Soit X, k k un espace de Banach et 0 < θ < 1. On dit qu’une suite (xn )n telle que kxn k = 1 satisfait la condition Jθ si et seulement si dist Conv(x1 , · · ·, xk ) , Conv(xk+1 , · · ·) ≥ θ, ∀k ≥ 1. De telles suites sont appelées suites de James. Proposition 5.3.17 Aucune sous-suite d’une suite de James ne converge pour la topologie faible σ(X, X 0 ). t u Soit (xn )n normalisée et satisfaisant Jθ . Il suffit de montrer que la suite (xn )n ne converge pas faiblement car toutes ses sous-suites satisfont la même condition Jθ . Procédons pas l’absurde et supposons que (xn )n converge faiblement vers y0 . Posons σ(X,X 0 ) = ∩k≥1 Ck . Ck := conv(xk , · · ·), puisque Ck est convexe on a y0 ∈ ∩k≥1 Ck θ Alors il existe y1 ∈ Conv(x1 , · · ·, xl ) tel que ky0 − y1 k ≤ 3 et y2 ∈ Conv(xl+1 , · · ·) tel que ky0 − y2 k ≤ 3θ . Cela montre que (xn )n ne satisfait pas la condition Jθ : contradiction. t u Exercice 5.3.18 Soit X, k k un espace réflexif. Soit (xn )n une suite dans X telle que kxn k = 1. On pose Ck := conv(xk , · · ·). Montrer que ∩k≥1 Ck 6= ∅ (les Ck forment une suite décroissante de compacts pour la topologie σ(X, X 0 )). En déduire que la suite (xn )n n’est pas de James. (on argumentera comme dans la preuve de la proposition 5.3.17). Comme le montre l’exercice ci-dessus, il n’existe pas de suite de James dans un espace réflexif C’est un fait remarquable que la réciproque soit vraie, ce qui constitue un nouveau critère géométrique de réflexivité. Théorème 5.3.19 (James) Un espace de Banach X, k k est non-réflexif si et seulement si il existe 0 < θ < 1 et une suite normalisée satisfaisant la condition Jθ . 111 La proposition 5.3.17 montre que le théorème de James entraine celui d’EberleinSmulian, il nous reste donc à établir ce résultat. Nous avons déjà vu qu’il n’existe pas de suite de James dans un espace réflexif (exercice 5.3.18). La partie la plus technique de la démonstration consiste donc à fabriquer une suite de James dans un espace non réflexif donné. Pour cela, notre principal outil sera le lemme suivant qui est connu sous le nom de ”lemme de selection de Helly”. Lemme 5.3.20 Soit X un espace de Banach réel dont la dimension est supérieure à (n + 1). Soit M > 0, λ1 , · · ·, λn ∈ X 0 et c1 , · · ·, cn ∈ IR. Les conditions suivantes sont équivalentes. 1) ∀ P>n 0 ∃x ∈ X tel que Pn kxk = M + et λk (x) = ck pour 1 ≤ k ≤ n 2) | i=1 ai ci | ≤ M k| i=1 ai λi k|; ∀a1 , · · ·, an ∈ IR. t u Il est clair que la première condition implique la seconde. Supposons la condition 2) satisfaite. Notons F := ∩ni=1 {λi = ci }. On supposera les ci non tous nuls car dans le cas contraire l’existence de x découle facilement de l’exercice 5.1.3. Quitte à renuméroter, on peut supposer qu’il existe 1 ≤ r ≤ n tel que les formes λ1 , · · ·, λr soient linéairement indépendantes et λq ∈ V ect(λ1 , · · ·, λr ) pour tout r < q ≤ n. Il s’agit de trouver x ∈ F tel que kxk = M + . Pr Vérifions que F = ∩ri=1 {λi = ci }. Si Prqui, d’après Pqr ≥ r + 1 alors λq = i=1 ai λi ce la condition 2) ; entraine que cq = i=1 ai ci . Il s’ensuit que λq (x) = i=1 ai ci = cq pour tout x ∈ ∩ri=1 {λi = ci } et tout q ≥ r + 1. Ceci montre que ∩ri=1 {λi = ci } ⊂ F d’où l’égalité cherchée. Soit α := inf x∈F kxk. Comme les ci sont non tous nuls, 0 ∈ / F et donc α > 0. D’après l’exercice 5.1.13, il existe λ ∈ X 0 et c ∈ IR tels que λ = c sur F et |λ| < c sur la boule ouvertePB(0, α). Comme λ = c sur F = ∩ri=1 {λi = P ci }, il existe a1 ; · · ·, ar ∈ IR tels que λ = ri=1 ai λi (voir l’exercice 5.1.3) et donc c = ri=1 ai ci comme on le voit en évaluant l’identité précédente en x ∈ F . Pr ai ci c = k Pi=1 ≤ M où On a alors k|λk| = supx∈B(0,α) |λ( αx )| ≤ αc puis α ≤ k|λk| r i=1 ai λi k la dernière majoration provient de la condition 2). Il existe donc x0 ∈ F tel que kx0 k ≤ M + . Comme supx∈F kxk = +∞, l’existence de x ∈ F tel que kxk = M + résulte alors d’un simple argument de valeurs intermédiaires. t u Il est instructif de remarquer que le lemme de Helly, appliqué dans X 0 pour n = 1 montre que k|f k| > θ ⇒ ∃x ∈ X tel que kxk = 1 et f (x) = θ (5.3.1) En effet, si > 0 est défini par θ = (1 − )k|f k| alors |aθ| = (1 − )k|af k| pour tout a ∈ IR et, d’après le lemme de Helly, il existe x ∈ X tel que kxk = (1 − ) + = 1 et f (x) = θ. On peut bien sur établir 5.3.1 directement. Nous achevons maintenant la preuve du théorème de James 5.3.19. 112 t u On désignera par SY la sphère unité d’un espace normé Y . Puisque X n’est pas réflexif, J(X) est un sous-espace propre de X 00 . Comme X est complet et J isométrique, J(X) est fermé et il existe donc ϕ ∈ X 00 tel que ϕ θ dist(ϕ, J(X)) > θ > 0, on posera dist(ϕ, J(X)) = 1− . En remplaçant ϕ par M et θ θ par M avec M assez grand, on s’assure que : θ , ∀x ∈ X. (5.3.2) 1− Nous allons simultanément construire des suites (xk )k dans SX et (fn )n dans SX 00 telles que ∃ϕ ∈ X 00 et ∃θ ∈]0, 1[ tel que kϕkX 00 ≤ (1 − ) et kx̂ − ϕkX 00 ≥ ∀n ∈ IN, ϕ(fn ) = θ et fn (xk ) = θ (resp. = 0) si n ≤ k (resp. si n > k). (5.3.3) P La suite (xk )k est alors de James. En effet, pour 0 ≤ α1 , ···, αk tels que k1 αi = 1 P et 0 ≤ αk+1 , · · ·, αl tels que lk+1 αi = 1, on a θ=θ l X αi = fk+1 l X k+1 k+1 α i xi − k X αi xi ≤ kfk+1 kX 00 k 1 l X α i xi − k X k l X α i xi k X = 1 k+1 αi xi − k X αi xi kX . 1 k+1 Justifions l’existence de f1 et x1 . Puisque kϕkX 00 > θ, (5.3.1) nous montre qu’il existe f1 ∈ SX 0 telle que ϕ(f1 ) = θ. De même, puisque kf1 kX 0 = 1 > θ, il existe x1 ∈ SX tel que f1 (x1 ) = θ. Supposons maintenant x1 , · · ·, xp−1 ainsi que f1 , · · ·, fp−1 construits et justifions l’existence de fp et xp . D’après (5.3.2), pour tous a1 , · · ·, ap ∈ IR on a (1 − )k p−1 X ai x̂i + ap ϕkX 00 ≥ |ap |θ = | 1 p1 X ai × 0 + ap θ|. (5.3.4) 1 En utilisant le lemme de Helly 5.3.20 dans l’espace X 0 , on voit que la condition (5.3.4) entraine l’existence de fp ∈ X 0 telle que kfp kX 0 = (1 − ) + = 1 ; ϕ(fp ) = θ et fp (xi ) = x̂i (fp ) = 0 pour 1 ≤ i ≤ p − 1. Pour tous a1 , ···, ap ∈ IR, on peut maintenant écrire en tenant compte de (5.3.2) : | p X 1 ai θ| = | p X 1 ai ϕ(fi )| ≤ kϕkX 00 k p X 1 ai fi kX 0 ≤ (1 − )k p X ai f i k X 0 (5.3.5) 1 ce qui, d’après le lemme de Helly 5.3.20 appliqué cette fois dans X, entraine l’existence de xp ∈ X telle que kxp kX = (1 − ) + = 1 et fi (xp ) = θ pour 1 ≤ i ≤ p. t u 113 114 Leçon 6 Solutions des exercices 6.1 Exercices de la première leçon Exercice 1.1.3 II suffit de montrer que c est fermé dans l∞ , k k∞ . Soit xj := (xj,n )n une suite d’éléments de c qui converge dans l∞ , k k∞ vers x := (xn )n , nous devons montrer que x ∈ c. Pour cela on vérifie que la suite (xn )n est de Cauchy. Comme (xm − xn ) = (xm − xj,m ) + (xj,m − xj,n ) + (xj,n − xn ) on a |xm − xn | ≤ 2kx − xj k∞ + |xj,m − xj,n | Fixons j assez grand pour que kx − xj k∞ < puis choisissons n0 pour que |xj,m − xj,n | < dès que m ≥ n ≥ n0 . Il vient m ≥ n ≥ n0 ⇒ |xm − xn | < 3 ; la suite (xn )n est bien de Cauchy. Exercice 1.2.5 1) Observons que la quantité O(f, η) mesure l’oscillation maximale de la fonction f entre deux points de K au plus distants de η. Dire que limη→0 O(f, η) = 0 revient à dire que f est uniformément continue sur K. Or c’est un fait bien connu (théorème de Heine) qu’une fonction continue sur un espace métrique compact est uniformément continue. 1 . Puisque K est compact, 2) Recouvrons K par les boules ouvertes de rayon 2n il satisfait la propriété de Borel-Lebesgue et l’on peut donc extraire de ce re1 couvrement un sous-recouvrement fini. On note B an,i , 2n , 1 ≤ i ≤ Nn les boules de ce recouvrement. Donnons nous χ, une fonction continue et positive sur [0, +∞[ telle que χ(t) = 1 si 0 ≤ t ≤ 12 et χ(t) = 0 si t ≥ 1. Il suffit de poser χn,i (x) := χ (nd(x, an,i )). 1 3) Comme les fonctions χn,i sont positives et égales à 1 sur B an,i , 2n , on déduit P n 1 immédiatement du recouvrement K = ∪1≤i≤Nn B an,i , 2n que N i=1 χn,i ≥ 1 115 χ sur K. Les fonctions σn,i := PNnn,iχ sont donc bien définies et continues sur i=1 n,i K. On observera que σn,i prend ses valeurs dans [0, 1], est supportée par B an,i , n1 P n et que N i=1 σn,i = 1. On résume ceci en disant que (σn,i )1≤i≤Nn est une parti tion continue de l’unité subordonnée au recouvrement K = ∪1≤i≤Nn B an,i , n1 . P n Les fonctions fn := N i=1 f (an,i ) σn,i sont clairement continues sur K et, plus précisément, appartiennnent au sous-espace vectoriel de C(K) engendré par ∪n∈IN {σn,i , 1 ≤ i ≤ Nn }. P n PNn De N σ = 1 on déduit que f − f = n,i n i=1 i=1 (f (an,i ) − f ) σn,i puis, comme σn,i est supportée par B an,i , n1 , que |f − fn | ≤ Nn X max |f (an,i ) − f (x)| |σn,i | ≤ 1 i=1 x∈B an,i , n Nn X i=1 1 1 O(f, )σn,i = O(f, ). n n Il s’ensuit que kf − fn k∞ ≤ O(f, n1 ). 4) Notons S l’espace vectoriel engendré par ∪n∈IN {σn,i , 1 ≤ i ≤ Nn }. D’après la première question limn O(f, n1 ) = 0 et donc, puisque fn ∈ S et kf − fn k∞ ≤ O(f, n1 ), l’espace S est dense dans C(K). Les combinaisons linéaires finies à coefficients rationnels de fonctions σn,i étant clairement denses dans S elles constituent une partie dénombrable et dense dans C(K). L’espace C(K) est donc séparable. Exercice 1.2.7 1) L’implication i. ⇒ ii. est évidente. L’implication ii. ⇒ iii. découle du fait que pour tout point x ∈ X on a x ∈ Kk ⊂ int Kk+1 ⊂ Kk+1 pour un certain k. L’implication iii. ⇒ i. s’obtient facilement en utilisant la propriété de Borel-Lebesgue. 2) La symétrie est évidente car pk (f −g) = pk (g−f ). Pour l’inégalité triangulaire on utilise le fait que min(1, a + b) ≤ min(1, a) + min(1, b) pour a, b ≥ 0 et pk (f − h) ≤ pk (f − g) + pk (g − h). Enfin, d(f, g) = 0 entraine pk (f − g) = 0 pour tout k et donc f − g = 0 sur ∪k Kk = X. 3) Ce point est pour l’essentiel traité dans le cours après l’énoncé de l’exercice. 4) Soit (fn )n une suite de Cauchy dans C(X), d . Pour k fixé considérons 0 < < 2−k . Il existe alors nk tel que m ≥ n ≥ nk ⇒ 2−k min (1, pk (fm − fn )) ≤ d(fn , fm ) ≤ ⇒ min (1, pk (fm − fn )) ≤ 2k < 1 ⇒ pk (fm − fn ) ≤ 2k . Ceci montre que la suite (fn |Kk )n est de Cauchy pour la norme de la converence uniforme et donc que (fn )n converge uniformément sur Kk . La conclusion résulte maintenant de la première question. 116 Exercice 1.2.9 1) Soit (fn )n une suite de Cauchy dans Lipα Ω , kf kα . Comme k k∞ ≤ k kα , cette suite est également de Cauchy dans Cb (Ω), k k∞ et, en vertu du théorème 1.2.1, il existe donc f ∈ Cb (Ω) telle que limn kf − fn k∞ = 0. Toute suite de Cauchy étant bornée, il existe une constante A telle que |fn (x) − fn (y)| ≤ Akx − ykα , ∀x, y ∈ Ω, ∀n. En faisant tendre n vers +∞ dans cette inégalité on voit que f ∈ Lipα Ω . Soit maintenant > 0 et n0 un entier tel que kfm −fn kα < pour m ≥ n ≥ n0 . On a |fm (x) − fn (y)| ≤ kfm − fn kα kx − ykα < kx − ykα , ∀x, y ∈ Ω, ∀m ≥ n ≥ n0 n (y)| ≤ pour n ≥ n0 . d’où, en faisant tendre m vers +∞, Supx6=y∈Ω |f (x)−f kx−ykα Comme par ailleurs limn kf − fn k∞ = 0, il s’ensuit que limn kf − fn kα = 0. 2) La continuité uniforme de f ∈ Lipα résulte immédiatement de la majoration |f (x) − f (y)| ≤ kf − f kα kx − ykα valable pour tout x et y dans Ω. Soit ξ ∈ bΩ. Montrons que pour toute suite xn de points de Ω qui converge vers ξ, la suite (f (xn ))n converge et que sa limite ne dépend que de ξ. Cela suffit pour obtenir un prolongement continu à Ω en posant f (ξ) := limn f (xn ). La suite (f (xn ))n converge car elle est de Cauchy : |f (xm ) − f (xn )| ≤ kf − f kα kxm − xn kα les suites f (xn ) et f (yn ) ont la même limite lorsque limn xn = limn yn = ξ car |f (xn ) − f (yn )| ≤ kf − f kα kxn − yn kα . 3) Comme Ω est borné on a Lipα Ω ⊂ Lipα Ω . L’inclusion inverse s’obtient essentielement en procédant comme dans la question précédente. Exercice 1.3.5 1) Pour toute suite x := (xn )n notons Tp (x) la suite tronquée obtenue en ne gardant de x que les k premiers termes et en remplaçant les termes restant par 1 P p p 0. Tp (x) := (x1 , x2 , · · ·, xk , 0, · · ·). Si p 6= ∞ alors kx−Tk (x)kp = n>k |xn | et donc limk kx − Tk (x)kp = 0. Ceci montre que les suites nulles à partir d’un certain rang sont denses dans lp . On en déduit facilement que lp est séparable en considérant les suites nulles à partir d’un certain rang dont les termes sont rationnels. Le même argument montre que c0 est séparable car limk kx − Tk (x)k∞ = limk |xk | = 0 pour tout x ∈ c0 . 117 2) i) En associant à tout t ∈ [0, 1] la suite des termes de son développement décimal, on obtient une injection de [0, 1] dans D. ii) Si x := (xn )n et y := (yn )n sont deux éléments distincts de D alors il existe n tel que xn 6= yn . Comme xn et yn sont des nombres entiers on a donc kx − yk∞ ≥ |xn − yn | ≥ 1. Supposons l’espace l∞ séparable puis recouvrons le par une collection dénombrable (Bi )i≥1 de boules de rayon 41 . Tout élément de D appartient à l’une de ces boules et, puisque la distance entre deux éléments distincts de D est plus grande que 1, une boule Bi ne peut contenir plus d’un élément de D. On obtient ainsi une injection de D dans l’ensemble des entiers naturels en associant à tout élément de D l’unique boule Bi à laquelle il appartient. Ceci contredit la non-dénombrabilité de D. Exercice 1.3.6 Soit (X, µ) un espace mesuré. Montrer que L2 (X, µ) est un C-espace I vectoriel ; x+y 2 1 2 1 2 on utilisera l’inégalité de convexité 2 ≤ 2x + 2y . Montrer ensuite, en utilisant l’identité 2Ref ḡ = |f + g|2 − (|f |2 + |g|2 ), que f ḡ est µ-intégrable Exercice 1.3.8 1) Soit z ∈ Ω et 0 < ρ < r < d(z, bΩ). Comme toute R 2π fonctioniθ holomorphe 1 satisfait la propriété de moyenne on a f (z) = 2π 0 f (z + ρe ) dθ et, par R 2π 1 inégalité triangulaire, |f (z)| ≤ 2π |f (z + ρeiθ )| dθ. L’inégalité de Cauchy0 Schwarz donne alors 12 Z 2π Z 2π 21 Z 2π 1 1 iθ iθ 2 |f (z + ρe )| dθ ≤ 1 dθ |f (z + ρe )| dθ |f (z)| ≤ 2π 0 2π 0 0 R 2π 1 |f (z + ρeiθ )|2 dθ. puis en élevant au carré on obtient |f (z)|2 ≤ 2π 0 Multiplions cette inégalité par ρ et intégrons sur [0, r]. En utilisant le théorème de Fubini et la formule de changement de variables pour le passage des coordonnées cartésiennes aux coordonnées polaires, il vient : Z r Z r Z 2π Z 1 1 iθ 2 |f (z)|ρ dρ ≤ ρ dρ |f (z + ρe )| dθ = |f |2 dλ 2π 2π 0 0 0 D(z,r) R c’est à dire |f (z)|2 ≤ πr1 2 D(z,r) |f |2 dλ. Choisissons 0 < r < d(K, bΩ). Pour tout z ∈ K on a D(z, r) ⊂ Ω et donc, compte tenu de l’inégalité précédente, Z Z 1 1 2 2 |f (z)| ≤ 2 |f | dλ ≤ 2 |f |2 dλ. πr D(z,r) πr Ω 118 Ainsi kf |K k∞ ≤ √1πr kf k2 , ce qui signifie que l’application linéaire f 7→ f |K est continue de (B(Ω), k kL2 ) dans (C(K), k k∞ ). 2) Soit (fn )n une suite de Cauchy dans B(Ω). D’après la question précédente, pour tout compact K contenu dans Ω on a kfn |K −fm |K k∞ ≤ CK kfn −fm k2 ce qui montre que (fn |K )n est de Cauchy dans (C(K), k k∞ ). Le théorème 1.2.1 permet alors d’affirmer l’existence d’une fonction f telle que (fn )n converge uniformément localement vers f sur Ω. Comme l’holomorphie est préservée par convergence uniforme, on peut affirmer que f est holomorphe sur Ω. Montons maintenant que B(Ω) est fermé dans L2 (Ω), k k2 ). Pour cela supposons qu’une suite (fn )n dans B(Ω) converge vers f dans (L2 (Ω), k k2 ) et montrons que f ∈ B(Ω). D’après ce que nous venons de voir, il existe une fonction g holomorphe sur Ω vers laquelle (fn )n converge uniformément localement. Pour tout compact R R K contenu dans Ω on a K R|fn − f |2 dλ ≤ Ω |fn − f |2 dλ = kfn − f k22 d’où, en passant à la limite, K |g − f |2 dλ ≤ 0 Ceci montre que f et g sont presque partout égales et donc que f = g dans L2 (Ω). Nous avons montré que f ∈ O(Ω) ∩ L2 (Ω) = B(Ω). Exercice 1.4.5 On vérifie très facilement que p(x) := lim supn xn est une pseudo-jauge sur l∞ . Rappelons que lim supn xn est la plus grande valeur d’adhŕence de (xn )n . Soit > 0, pour n assez grand on a xn + yn ≤ (lim supn xn ) + (lim supn yn ) + d’où l’on déduit que lim supn (xn + yn ) ≤ (lim supn xn ) + (lim supn yn ) + pour tout > 0. La propriété de sous-additivité s’obtient en faisant tendre vers 0, la propriété d’homogeneité est claire. Exercice 1.4.8 1) Partons d’une suite (uj )j dense dans E. En supprimant de cette suite les vecteurs ej qui sont des combinaisons linéaires de leurs prédécesseurs u1 , · · ·, uj−1 , on obtient une famille libre et dénombrable. Par construction, l’espace vectoriel H engendré par cette famille contient tous les termes de la suite (uj )j . Ainsi E = {uj / j ≥ 1} ⊂ H. 2) Puisque f est linéaire continue sur M , sa norme k|f k| := supkxk≤1 |f (x)| est bien définie. On définit une pseudo-jauge µ sur E en posant µ(x) := k|f k| · kxk. Par définition, f ≤ µ sur M . Supposons avoir prolongé f à M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n) et que ce prolongement, encore noté f , vérife f ≤ µ. Si en+1 ∈ M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n) alors ce prolongement est en fait défini sur M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n + 1), sinon le lemme 1.4.6 montre qu’il 119 existe un prolongement de f à M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n + 1) qui est encore majorée par µ. En particulier la norme du prolongement est plus petite que celle de f et ces deux normes sont donc égales car la norme d’un prolongement est toujours plus grande que celle de la forme initiale. Il résulte de la construction que λn+1 coincide avec λn sur M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n). 3) Comme λm coincide avec f sur M et avec λn sur M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n) lorsque m ≥ n, on obtient un prolongement λ de f à M + V ect(ej , j ≥ 1) en posant λ(x) := λn (x) lorsque x ∈ M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n). Notons que |λ(x)| = |λn (x)k ≤ k|λk| = k|f k| si x ∈ M + V ect(ej , 1 ≤ j ≤ n) ce qui montre que k|λk| ≤ k|f k|. Comme λ est un prolongement de f on a donc k|λk| = k|f k|. C’est un fait bien connu qu’une forme linéaire continue λ sur un sous-espace vectoriel H d’un espace vectoriel normé E se prolonge en une forme linéaire continue de même norme sur H. Rappelons qu’un tel prolongement est obtenu en remarquant que (λ(xn ))n est une suite de Cauchy pour toute suite (xn )n qui converge vers x ∈ H (en effet |λ(xm ) = λ(xn )| ≤ k|λk| kxm − xn k) et que si deux suites (xn )n et (x0n )n convergent toutes deux vers x alors (λ(xn ))n et (λ(x0n ))n ont la même limite (en effet |λ(xn ) = λ(x0n )| ≤ k|λk| kx0n − xn k). On termine donc la démonstration en utilisant le fait que, d’après la première question, M + V ect(ej , j ≥ 1) est dense dans E. 6.2 Exercices de la deuxième leçon Exercice 2.1.2 La famille de fonctions de la variable réelle {|x|α ; α ∈ [0, 1]} n’est pas équicontinue 1 en 0. Ceci est tout à fait analogue à l’exemple x n traité dans le cours. Exercice 2.1.3 Notons F l’adhérence de F dans C(K), k k∞ . Soit a ∈ K et > 0. Puisque F est équicontinue en a, il existe un voisinage Ua de a tel que x ∈ Ua ⇒ |f (x) − f (a)| < , ∀f ∈ F. 3 Pour tout g ∈ F il existe f ∈ F tel que kg − f k∞ < 3 . Alors |g(x) − g(a)| ≤ |g(x) − f (x)| + |f (x) − f (a)| + |f (a) − g(a)| < pour tout x ∈ Ua . Ceci montre que F est équicontinue en a. 120 2.1.4 1) Ici K est un espace métrique compact. Notons Un la boule ouverte centrée an a ∈ K et de rayon n1 . Si F n’est pas équicontinue en a alors on peut trouver > 0 et, pour tout n, un point xn ∈ Un et une fonction fn ∈ F tels que |fn (xn ) − fn (a)| > . Si une sous-suite (fnk )k convergeait uniformément vers g sur K alors, d’après le principe d’interversion des limites on aurait limk fnk (xnk ) = limk g(xnk ) = g(a) ce qui est impossible puisque limk fnk (a) = g(a) et |fnk (xnk ) − fnk (a)| > . 2) Si la famille F n’était pas uniformément bornée sur K alors on trouverait fn ∈ F telle que limn kfn k∞ = +∞. Par compacité de K il existe an ∈ K tel que |fn (an )| = kfn k∞ et, après une éventuelle extraction, an converge vers un point a de K. Tenant compte de l’équicontinuité de F on déduit de ceci que Supf ∈F |f (a)| = +∞ : contradiction. 3) Soit > 0. Si F est relativement compacte dans C(K) alors on la recouvre par un nombre fini de boules dans l’espace C(K), k k∞ : F ⊂ ∪1≤i≤N B(fi , ). On voit alors immédiatement que F est uniformément bornée sur K car kf k∞ ≤ + sup1≤i≤N kfi k∞ . La continuité des fi fournit l’existence d’un voisinage Ua de a tel que |fi (x) − fi (a)| < , ∀1 ≤ i ≤ N, ∀x ∈ Ua . Pour tout f ∈ F il existe 1 ≤ i ≤ N tel que kf − fi k∞ < et donc |f (x) − f (a)| ≤ |f (x) − fi (x)| + |fi (x) − fi (a)| + |fi (a) − f (a)| < 3, ∀x ∈ Ua . Ceci montre que F est équicontinue en a X. Exercice 2.1.8 1) Comme dp (xp n, xp ) ≤ dpr (xn , x) on voit que (xnp )n converge vers xp si (xn )n converge vers x. Supposons maintenant que (xnp )n converge vers xp pour tout p. Pour tout N ∈ IN on a : dpr (xn , x) = N X X −p 2 min 1, dp (xnp , xp ≤ 2−p min 1, dp (xnp , xp + p=0 p>N N X 2−p min 1, dp (xnp , xp + 2−N . p=0 Il s’ensuit que 0 ≤ lim supn dpr (xn , x) ≤ 2−N pour tout N ∈ IN et donc que limn dpr (xn , x) = 0. 2) Pour démontrer le théorème de Tychonov, on combine le procédé diagonal et la caractérisation de la compacité dans les espaces métriques par la propriété de Bolzano-Weierstrass. 121 Exercice 2.1.12 1) L’application h : K → l∞ , k k∞ est bien définie car la suite (fn )n est uniformément bornée. Elle est continue car (fn )n est équicontinue, en effet cette propriété permet de rendre kh(x) − h(x0 )k∞ = supn |fn (x) − fn (x0 )| arbitrairement petit en prenant x0 dans un voisinage assez petit de x. 2) L’image continue d’un compact étant compacte, on voit que h(K) est compact dans l∞ , k k∞ . Comme toute partie compacte d’un espace métrique est ∞ séparable, h(K) est séparable bien que l , k k∞ ne le soit pas (voir Exercice 1.3.5). 3) Les applications ϕn sont des formes linéaires sur l∞ , k k∞ dont les normes |kϕn k| sont clairement égales à 1. Comme alors |ϕ(u) − ϕ(u0 )| ≤ ku − u0 k∞ on peut considérer (ϕn )n comme une suite équicontinue de fonctions sur l∞ , k k∞ . Cette suite est de surcroit uniformément bornée sur le compact h(K) car |ϕn (h(x)| = |fn (x)|. Puisque h(K) est un compact séparable, on peut appliquer le théorème 2.1.10 à la suite constituée des restrictions des ϕn à h(K) ce qui nous fournit une sous-suite (ϕnk )k qui converge uniformément sur h(K). Finalement, comme kfm − fn k∞ = sup |fm (x) − fn (x)| = sup |ϕn (h(x) − ϕm (h(x)| x∈K x∈K = kϕm − ϕn kh(K),∞ on voit que la sous-suite (fnk )k est uniformément de Cauchy sur K. Exercice 2.1.14 Commençons par vérifier que boule unité fermée B de Lip [0, 1] , k k α α α est une partie fermée dans C [0, 1] , k k∞ . Soit donc fn ∈ Bα et f ∈ C [0, 1] tels que n (y)| ≤ kfn kα ≤ 1 pour kfn − f k∞ → 0. En passant à la limite dans kfn k∞ + |fn (x)−f |x−y|α x et y distincts et fixés arbitrairement dans [0, 1] on voit que f ∈ Bα. Il reste donc à voir que Bα est relativement compacte dans C [0, 1] , k k∞ et pour cela qu’elle vérifie les hypothèses du théorème d’Ascoli 2.1.9. Comme k k∞ ≤ k k∞ on voit que Bα est uniformément bornée. L’équicontinuité découle immédiatement de la majoration |f (x) − f (y)| ≤ kf kα |x − y|α ≤ |x − y|α pour tout f ∈ Bα et tout x, y dans [0, 1]. Exercice 2.1.15 Comme K(x, y) est une fonction continue sur [0, 1] × [0, 1], on a |K(x, y)| ≤ M < +∞ pout tout x et y dans [[0, 1]. Il s’ensuit que kT f k∞ ≤ M kf k∞ et donc que T est une application linéaire continue de C [0, 1] , k k∞ dans lui-même dont la norme est au plus égale à M . Le fait que T f soit une fonction continue sur [0, 1] découle du théorème classique dit de continuité sous le signe somme mais sera implicitement 122 démontré dans ce qui suit. Soit B la boule unité de C [0, 1] , k k∞ . Comme nous venons de le voir, T (B) est une partie bornée de C [0, 1] (on a |T f | ≤ M pour tout f ∈ B). D’après le théorème d’Ascoli 2.1.9, T (B) sera relativement compacte si elle est équicontinue. C’est ce que nous allons vérifier pour finir. Pour tout f ∈ B et tout x, x0 ∈ [0, 1] on a Z 1 0 (K(x, y) − K(x0 , y)) f (y)dy| ≤ |T f (x) − T f (x )| = | 0 Z 1 Z 1 0 (|K(x, y) − K(x , y)|) |f (y)|dy ≤ |K(x, y) − K(x0 , y)|dy. 0 0 L’équicontinuité de la famille {T f / f ∈ B} découle alors immédiatement de l’uniforme continuité de la fonction continue K sur le compact [0, 1] × [0, 1] (théorème de Heine). Exercice 2.1.17 On utilise ce que l’on appelle un argument de seule valeur d’adhérence. Voyons cela en détail. Soit (fn )n une suite bornée dans H ∞ (Ω) qui convergence simplement vers f . Comme kfn k∞ ≤ M < +∞ pour tout n, la fonction f est bornée sur Ω mais n’est à priori pas holomorphe. Elle le sera dès que nous aurons trouvé une sous-suite de (fn )n qui converge localement uniformément vers f . L’existence d’une telle sous-suite découle en fait immédiatement du théorème de Montel 2.1.16. En remplaçant fn par fn −f on peut maintenant supposer que fn converge simplement vers 0. Si fn ne convergeait pas localement uniformément vers 0 alors il existerait un ouvert Ω0 relativement compact dans Ω et une suite (fnk )k extraite de (fn )n telle que supΩ0 |fnk | ≥ > 0 pour tout k. Or, comme nous venons de le voir, (fnk )k possède une sous-suite qui converge uniformément vers 0 sur Ω0 , ce qui est impossible. La suite fn := z n converge simplement vers 0 sur le disque unité du plan complexe mais n’y converge pas uniformément. Exercice 2.1.18 Soit Ω un ouvert borné du plan complexe et z0 ∈ Ω. On voit, grâce au théorème de Montel 2.1.16, que la boule unité fermée B de H ∞ (Ω) est compacte. L’existence de f0 ∈ B telle que |f00 (z0 )| = supf ∈B |f 0 (z0 )| découle alors immédiatement de la continuité de l’application H ∞ (Ω) 3 f 7→ |f 0 (z0 )|, laquelle est une conséquence des inégalités de Cauchy. Exercice 2.1.20 123 Soit K un compact de X. Comme (Y, d) est complet, il suffit de montrer que la suite (fn )n est uniformément de Cauchy sur K, c’est à dire que ∀ > 0, ∃n0 tel que m ≥ n ≥ n0 ⇒ sup d(fm (x), fn (x)) < . x∈K Soit donc > 0. Par équicontinuité tout point a ∈ K possède un voisinage Ua tel que d(fk (x) − fk (a)) < 2 pour tout x ∈ Ua et tout k. On a donc aussi d(fk (x) − fk (y)) ≤ d(fk (x) − fk (a)) + d(fk (a) − fk (y)) < pour tout x, y ∈ Ua et tout k. Par compacité K ⊂ ∪N i=1 Uai . Par densité de S on peut choisir un point si de S dans chaque ouvert Uai . Puisque (fn )n converge simplement sur S il existe n0 tel que m ≥ n ≥ n0 ⇒ d(fm (si ) − fn (si )) ≤ , ∀1 ≤ i ≤ N. Soit maintenant x un point arbitraire de K et i0 tel que x ∈ Ui0 . Pour m ≥ n ≥ n0 il vient alors : d(fm (x)−fn (x)) ≤ d(fm (x)−fm (si0 ))+d(fm (si0 )−fn (si0 ))+d(fn (si0 )− fn (x)) ≤ 3. Exercice 2.1.21 A FINIR 1) La fonction f est uniformément continue sur le compact [0, 1] × K (théorème de Heine) et donc pour tout > 0 il existe η > 0 tel que kf (t1 , ·)−f (t2 , ·)k∞ < pour |t1 − t2 | < η. On a donc |hλ, f (t1 , ·)i − hλ, f (t2 , ·)i| ≤ k|λk|kf (t1 , ·) − f (t2 , ·)k∞ < k|λk| pour |t1 − t2 | < η. CeciR justifie la continuité de t 7→ 1 hλ, f (t, x)i sur [0, 1]. La continuité de x 7→ 0 f (t, x)dt sur K s’établit de façon analogue. R1 2) SN converge uniformément vers 0 f (t, x)dt sur K. Soit (K, d) un espace métrique compact et f (t, x) une fonction continue sur [0, 1] × K. Soit λ une forme linéaire continue sur C(K), k k∞ . Pour tout N ∈ IN on pose N −1 1 X k f ( , x). SN (x) := N k=0 N R1 1) Montrer que les fonctions t 7→< λ, f (t, x) > et x 7→ 0 f (t, x)dt sont respectivement continues sur [0, 1] et K. R1 2) Montrer que la suite de fonctions SN converge uniformément vers 0 f (t, x)dt sur K. R1 R1 3) Montrer que < λ, 0 f (t, ·)dt >= 0 < λ, f (t, ·) > dt. Exercice 2.1.23 1) Comme |ϕn (x)−ϕn (y)| ≤ (supn k|ϕn k|) kx−yk, la suite ϕn 124 n est équicontinue. 2) Soit (xk )k une suite dans E. Pour tout k la suite ϕn (xk ) n est bornée et converge donc après une éventuelle extraction. Le procédé diagonal fournit une nouvelle extraction telle que ϕn (xk ) n converge pour tout k. 3) Lorsque la suite (xk )k est dense dans E, la proposition 2.1.19 montre que (ϕn )n possède une sous-suite (ϕni )i telle que ϕni (x) i converge pour tout x ∈ E. Finalement, ϕ(x) := limi ϕni (x) est une forme linéaire comme limite simple de formes linéaires et est continue car |ϕ(x)| ≤ (supn k|ϕn k|) kxk. Exercice 2.1.24 1) On vérifie facilement que d est une distance sur BE 0 . En particulier, si d(λ, µ) = 0 alors (λ − µ) est nulle sur {ek / k ≥ 0} et donc sur E puisque (λ − µ) est continue et la suite (ek )k dense dans BE . Observons que d(λn , λ) tend vers 0 si et seulement si (λn )n converge simplement vers λ sur {ek / k ≥ 0}. Cela s’obtient facilement à partir de l’encadrement suivant : 2−k |λn (ek ) − λ(ek )| ≤ d(λn , λ) ≤ N X 2−k |λn (ek ) − λ(ek )| + k=1 1 . 2N Il reste à voir que la convergence simple sur {ek / k ≥ 0} entraine la convergence simple sur BE , et donc sur E par homogéneité. Soit x dans BE et ek tel que kx − ek k < . Comme λn ∈ BE 0 on a |λm (x) − λn (x)| ≤ 2kx − ek k + |λm (ek ) − λn (ek )| < 2 + |λm (ek ) − λn (ek )| ce qui permet de voir que (λn (x))n est de Cauchy. 2) La question précédente et le théorème de Banach-Alaoglu 2.1.22 montrent que (BE 0 , d) est séqentiellement compact. Exercice 2.1.25 La suite de formes linéaires ϕn définie par ϕn (x) := xn sur l∞ ne possède aucune sous-suite qui converge simplement. En effet, pour toute sous suite (ϕni )i , la suite (ϕni (x))i ne converge pas si x est définie par xn = 0 si n 6= ni et xni = (−1)i . Exercice 2.1.27 1 m + τ? m + · · ·τ?n m est une mesure de probablité sur K Il est clair que µn := n+1 car τ? m est une mesure de probablité. D’après le théorème 2.1.26, il existe une soussuite de µn qui converge faiblement vers une mesure de probablité σ. Vérifions que σ 1 est invariante par τ . Cela découle de l’identité τ? µn = n+1 τ? m + τ?2 m + · · ·τ?n+1 m = 1 µn + n+1 τ?n+1 m − m et du fait que τ? µn → τ? σ si µn → σ. Exercice 2.2.5 125 1) Établissons le Lemme de Dini. Fixons > 0. Puisque fn converge simplement vers f et f ≥ fn , on a K ⊂ ∪n {x ∈ K / f (x) − fn (x) < }. Comme f et les fn sont continues, les ensembles {x ∈ K / f (x) − fn (x) < } sont des ouverts. Par compacité de K, on peut extraire de ce recouvrement ouvert un recouvrement fini et il existe donc un ensemble fini d’indices n1 < n2 < ··· < nN tels que K ⊂ ∪i≤N {x ∈ K / f (x) − fni (x) < }. Enfin, puisque fn (x) converge en croissant vers f (x) pour tout x ∈ K, on a |f (x) − fn (x)| = f (x) − fn (x) ≤ f (x) − fni (x) pourvu que n ≥ ni .On voit donc que si n ≥ nN alors |f (x) − fn (x)| < pour tout x ∈ K. C’est la convergence uniforme de fn vers f sur K. 2) On pose P0 = 0. La relation de récurrence Pn+1 = Pn + 21 X 2 − (Pn )2 définit alors clairement une suite de polynômes (Pn )n. Observonsmaintenant que Pn (x) + 21 x2 − (Pn (x))2 = Pn (x) + 12 |x| − Pn (x) |x| + Pn (x) ≤ |x| − Pn (x) pourvu que 0 ≤ Pn (x) ≤ |x| ≤ 1. Une récurrence facile permet alors de voir que 0 ≤ Pn (x) ≤ Pn+1 (x) ≤ |x| pour tout n et tout x ∈ [−1, 1]. La suite Pn (x) converge car elle est croissante et majorée. Sa limite l(x), qui est positive et vérifie x2 − (l(x))2 = 0, est donc égale à |x|. Par le lemme de Dini, la convergence est uniforme. Exercice 2.2.8 Soit x0 fixé dans K. La fonction x 7→ d(x0 , x) est dans Lip(K) car |d(x,x0 ) − d(y, x0 )| ≤ d(x, y). Pour montrer que Lip(K) est dense dans CIR (K), k k∞ nous allons vérifier que Lip(K) satisfait les hypothèses du théorème 2.2.6. La fonction d(x,x1 ) est dans Lip(K) et prend respectivement les valeurs α1 et α2 en x1 α1 + α2 d(x 1 ,x2 ) et x2 . On vérifie facilement que le maximum et le minimum de deux fonctions de Lip(K) est encore dans Lip(K). Exercice 2.2.9 Soit K un espace topologique compact et H une sous-algèbre de CIR (K) qui est séparante. Si x0 ∈ K on note Nx0 := {f ∈ CIR (K) tel que f (x0 ) = 0}. 1) Comme CIR (K) 3 f 7→ f (x0 ) ∈ IR est un morphisme d’algèbre continu, son noyau (c’est à dire Nx0 ) est en fait un idéal fermé de CIR (K). L’indicatrice de K n’est pas dans Nx0 et donc cet idéal est strict. 2) On va montrer que H satisfait les hypothèses du théorème 2.2.6. Pour l’hypotèse i) il n’y a pas de changement par rapport à la démonstration donnée dans le cours. On utilise une suite de polynômes Pn qui converge uniformément sur [−1, 1] vers la fonction |x| et le fait que H est une algèbre tout comme H. Passons à l’hypothèse ii). Soit σ une fonction de H qui ne s’annule pas sur K. Si x1 6= x2 ∈ X alors il existe h ∈ H telle h(x1 ) 6= h(x2 ). Si σ(x1 ) = σ(x2 ) =: s alors, en résolvant le système linéaire λh(x1 ) + µs = α1 , λh(x2 ) + µs = α2 , on trouve une fonction h0 := λh + µσ qui est dans H et vérifie h0 (xi ) = αi pour i = 1, 2. Si maintenant σ(x1 ) 6= σ(x2 ) on cherche h0 de la forme λσ + µσ 2 . 126 3) Commençons par obsrver qu’il existe au plus un point x0 ∈ K tel que H ⊂ Nx0 car sinon H ne serait plus séparante. D’après la question précédente, il suffit de montrer que si H n’est contenue dans aucun idéal de la forme Nx0 alors il existe une fonction ne s’annulant pas sur K. Pour tout x ∈ K il existe alors une fonction hx ∈ H telle que hx (x) 6= 0. Par continuité cette fonction ne s’annule pas sur un voisinage Vx de x et, quitte à la remplacer par (hx )2 (H est une algèbre), on peut la supposer positive. On peut recouvrir le compact K par un nombre fini de voisinages Vx , la fonction h obtenue en sommant les fonctions hx correspondantes est dans H et est strictement positive sur K. 4) D’après la question précédente, H ⊂ Nx0 pour un certain point x0 ∈ K. e := {f + c / f ∈ H et c ∈ IR} satisfait les hypothèses du théorème L’algèbre H 2.2.1. Donc, pour tout f ∈ CIR il existe des suites fn ∈ H et cn ∈ IR telles que fn + cn converge uniformément vers f sur K. Alors cn = fn (x0 ) + cn → f (x0 ) et en particulier cn → 0 lorsque f ∈ Nx0 ce qui montre que fn converge uniformément vers f sur K. Exercice 2.2.12 1) Comme dans tout espace métrique compact, il existe une partie A dénombrable et dense dans (K, d). L’ algèbre engendrée par les fonctions ϕa (x) := d(a, x) où a ∈ A contient les constantes et sépare les points. Si x1 6= x2 alors ϕa (x1 ) 6= ϕa (x2 ) pour a ∈ A assez proche de x1 . Cette algèbre est donc dense dans C(K), k k∞ (théorème 2.2.1). Pour en déduire que C(K), k k∞ est séparable, on considère l’algèbre engendrée sur Q I par les ϕa où a ∈ A. 2) Les fonctions continue sur K séparent les points de K (si x1 6= x2 alors y 7→ d(x1 , y) sépare x1 de x2 ). Leurs restrictions à F forment une sous-algèbre de C(F ) qui sépare les points de F et contient les constantes. Ces restrictions sont donc denses dans C(F ) en vertu du théorème 2.2.1. Si f ∈ C(F ) et > 0 alors il existe g ∈ C(K) telle que kf − gk∞,F < . Quitte à remplacer g par inf (kf k∞,F , g), on peut aussi supposer que kgk∞,K = kf k∞,F . 3) Soit f une fonction continue sur K. D’après la question précédente, il existe f1 ∈ C(K) telle que kf1 k∞,K = kf k∞,F et kf − f1 k∞,F ≤ 21 . En appliquant ceci à (f − f1 ) on trouve f2 ∈ C(K) telle que kf2 k∞,K = kf − f1 k∞,F ≤ 21 et k(f − f1 ) − f2 k∞,F ≤ 212 . En continuant ce procédé on 1 construit fn ∈ C(K) pour lesquelles kfn k∞,K ≤ 2n−1 et P une suite de fonctions 1 kf − 1≤i≤n fi k∞,F ≤ 2n . P Le prolongement de f cherché est donné par f˜ := +∞ 1≤i fi . Exercice 2.2.13 A FAIRE R Soit m la mesure de Lebesgue dans IRd et f ∈ L1 (m). Montrer que si f tα1 1 · · · tαd d 1K dm = 0 pour tout monôme tα1 1 · · · tαd d et tout compact K alors f = 0. 127 Exercice 2.2.15 Il est clair que HIR := {h ∈ H t.q. f (x) ∈ IR ∀x ∈ K} est une sous-algèbre de CIR (K). Vérifions qu’elle satisfait les hypothèse du théorème 2.2.1 ; c’est à dire qu’elle est séparante et contient les constantes. Puisque H contient les constantes, HIR les contient aussi. Observons que si h ∈ H alors Re h = 21 (h + h̄) ∈ HIR . Soient x1 6= x2 ∈ K, comme H est séparante il existe h ∈ H telle que h(x1 ) 6= h(x2 ). Quitte à remplacer h par ih, on peut supposer que Re h(x1 ) 6= Re h(x2 ) ce qui montre que HIR est séparante. Nous savons maintenant que HIR est dense dans CIR (K), k k∞ . Soit f ∈ CCI (K) et > 0. D ’après ce qui précède, il existe h1 , h2 ∈ HIR telles que kRe f − h1 k∞ < et kIm f − h1 k∞ < . Alors h := h1 + ih2 ∈ H et kf − hk∞ < 2. Exercice 2.2.16 Comme K1 et K2 sont deux espaces métriques compacts, C(K1 ) C(K2 ) séparent les points. C(K1 )tensorC(K2 ) est clairement une sous-algèbre de C(K1 ×K2 ) qui est séparante et contient les constantes. On applique le théorème de Stone-Weierstrass 2.2.1. Exercice 2.2.17 On vérifie facilement que la classe des fonctions continues sur (K, dpr ) qui ne dépendant que d’un nombre fini de variables satisfait les hypothèses su théorème de Stone-Weierstrass 2.2.1. Exercice 2.2.18 Les polynômes trigonométriques sont précisément les éléments de l’algèbre engendrée par e2iπt . C’est une sous algèbre de C(T ) qui contient les constantes et sépare les points de T (remarquer que e2iπt le fait). Le théorème de Stone-Weierstrass 2.2.1 montre donc que les polynômes trigonométriques sont denses dans C(T ). Exercice 2.2.19 Ici (A, k k) est une C-algèbre I de Banach commutative unitaire munie d’une involution ? : A → A et ∆ est un espace topologique compact. On suppose qu’il existe un morphisme d’algèbre isométrique G : A 3 x 7→ x̂ ∈ C(∆) vérifiant les deux conditions suivantes : (1) ∀h1 6= h2 ∈ ∆, ∃ x ∈ A tel que x̂(h1 ) 6= x̂(h2 ) (2) x̂¯ = xb? pour tout x ∈ A. 128 1) G(A) est clairement une sous-algèbre de C(∆) qui, en vertu des conditions (1) et (2), est séparante et auto-conjugée. La condition (1) montre aussi qu’il existe h0 ∈ ∆et x0 ∈ A tels que xˆ0 (h0 ) 6= 0. Soit e l’élément neutre de A. Comme xˆ0 = G(ex0 ) = êxˆ0 , on voit que ê(h0 ) = 1. Par ailleurs, êê = ê et donc ê est une fonction continue sur ∆ qui ne peut prendre comme valeurs que 0 et 1. Compte tenu de l’observation précédente, ê est l’indicatrice de ∆. Ceci montre que G(A) contient les constantes. La version complexe du théorème de Stone-Weierstrass 2.2.14 montre alors que G(A) est dense dans C(∆), k k∞ . 2) Il suffit de montrer que l’image de l’isométrie G est fermée dans C(∆), k k∞ . Soit f ∈ C(∆)∩G(A). Il existe an ∈ A telle que abn converge vers f dans C(∆). Puisque G est isométrique, la suite (an )n est de Cauchy dans A et il existe donc a ∈ A tel que kan − ak → 0. La continuité de G permet de conclure que f ∈ G(A) : f = limn abn = limn G(an ) = G(a). Exercice 2.3.4 Ici (K, d) est un espace métrique compact convexe dont toutes les boules sont convexes. 1) Recouvrons le compact K par n1 boules fermées deux à deux distinctes de rayon 21 . Recouvrons ensuite chacune de ces boules par n2 boules de rayon 212 et continuons ce procédé. Définissons les points xi1 ,i2 ,···,ip comme étant les centres 1 . Par construction des np boules de rayon 21p qui recouvrentB xi1 ,i2 ,···,ip−1 , 2p−1 1 d xi1 ,i2 ,···,ip−1 , xi1 ,i2 ,···,ip−1 ,ip ≤ 2p−1 , ∀1 ≤ ip ≤ np et de plus la réunion des boules B xi1 ,i2 ,···,ip , 21p recouvre K. Il s’ensuit que xi1 ,i2 ,···,ip p où ij ∈ {1, 2, · · ·, nj } est une suite de points deux à deux distincts dense dans K. 2) On construit ces applications par récurrence. Voyons d’abord comment obtenir l’application γ1 . Considérons les points x1 , · · ·, xn1 et fixons des réels 0 = t1 < · · · < tn1 = 1. Comme K est convexe, il existe des applications continues [ti−1 , ti ] 3 t 7→ σi (t) prenant leurs valeurs dans K et telles que σi (ti−1 ) = xi−1 et σi (ti ) = xi . On peut supposer que ces applications sont constantes au voisinage de ti−1 et ti . L’application γ1 est obtenue par concaténation des applications σi . Elle nous fournit un chemin continu dans K, joignant x1 à xn1 en passant successivement par x2 , · · · , xn1 −1 et en marquant un temps d’arrêt en chacun des points xi . Supposons maintenant disposer d’une application continue γp : [0, 1] → K telles que : γp (ti1 ,i2 ,···,ip ) = xi1 ,i2 ,···,ip où les ti1 ,i2 ,···,ip sont deux à deux distincts γp est constante au voisinage des points ti1 ,i2 ,···,ip 1 d γp (t), γp−1 (t) ≤ 2p−1 , ∀t ∈ [0, 1] et voyons comment la modifier pour obtenir l’application γp+1 . Fixons des réels ti1 ,i2 ,···,ip ,1 < · · · < ti1 ,i2 ,···,ip ,inp+1 dans un voisinage de ti1 ,i2 ,···,ip sur lequel γp est constante. En exploitant le fait que la boule B xi1 ,i2 ,···,ip , 21p 129 est convexe, on peut modifier γp au voisinage de ti1 ,i2 ,···,ip de façon à ce que la nouvelle courbe passe par les points xi1 ,i2 ,···,ip ,j aux temps ti1 ,i2 ,···,ip ,j en y marquant un arrêt et reste dans la boule B xi1 ,i2 ,···,ip , 21p lorsqu’elle diffère de γp . 3) Pour tout t ∈ [0, 1],la suite γp est de Cauchy donc γ(t) := limp γp (t) existe. Comme d γp (t), γ(t) ≤ 21p , ∀t ∈ [0, 1], la convergence est uniforme et γ est donc une application continue de [0, 1] dans K. Vérifions que γ est surjective. Soit x un point arbitraire de K, par construction il existe une suite de points xn de la forme xi1 ,i2 ,···,ipn telle que x = limn xn . Notons tn des réels de la forme ti1 ,i2 ,···,ipn tels que γpn (tn ) = xn . Après extraction, on peut supposer que tn converge vers t ∈ [0, 1]. Puisque la convergence de γpn vers γ est uniforme on a alors x = limn xn = limn γpn (tn ) = γ(t). 6.3 Exercices de la troisième leçon Exercice 3.1.6 Si x, y ∈ l2 , l’inégalité de Cauchy-Schwarz sur C I n donne n X j=1 |xj yj | ≤ n X ! 21 |xi |2 n X ! 12 |yi |2 ≤ j=1 j=1 ∞ X ! 21 |xi |2 j=1 ∞ X ! 21 |yi |2 pour tout n j=1 P∞ ce qui justifie la convergence absolue de la série j=1 xi yi . Il est alors clair que P∞ (x|y)l2 := j=1 xi yi définit un produit hermitien sur l2 . Il reste à montrer que la norme associée est complète. Soit xn := (xn,j )j une suite de Cauchy dans l2 . Soit > 0. Il existe n0 tel que m ≥ n ≥ n0 ⇒ N X |xm,j − xn,j |2 ≤ kxm − xn k2l2 < 2 pour tout N. j=1 On voit donc en particulier que les suites (xn,j )n sont de Cauchy dans C I pour tout j. On peut alors poser xj := limn xn,j ; il reste à vérifier que x := (xj )j ∈ l2 et que xn converge vers x dans l2 . En faisant tendre m vers +∞ dans l’inégalité ci-dessus on obtient que n ≥ n0 ⇒ N X |xj − xn,j |2 ≤ 2 pour tout N. j=1 P 2 2 En faisant maintenant tendre N vers +∞ on obtient n ≥ n0 ⇒ ∞ j=1 |xj −xn,j | ≤ ce qui montre simultanément que x ∈ l2 et que kx − xn kl2 ≤ pour n ≥ n0 . Exercice 3.2.2 130 1) C1 et C2 étant deux parties convexes et fermées de H, appliquons l’identité du parallélogramme à x − PC1 (x) et x − PC2 (x). Cela donne P (x)−P (x) P (x)+P (x) kx − C1 2 C2 k2 + k C1 2 C2 k2 = 12 kx − PC1 (x)k2 + kx − PC2 (x)k2 ou encore P (x)+P (x) kPC1 (x) − PC2 (x)k2 = 2 d(x, C1 )2 + d(x, C2 )2 − 4kx − C1 2 C2 k2 . P (x)+P (x) Puisque C1 ⊂ C2 et C2 est convexe on a kx − C1 2 C2 k2 ≥ d(x, C2 )2 d’où l’inégalité voulue : ||PC1 (x) − PC2 (x)||2 ≤ 2 d(x, C1 )2 − d(x, C2 )2 . 2) Il est évident qu’une réunion de parties convexes est encore convexe. Vérifions que l’adhérence d’un convexe C est convexe. Si x, y ∈ C alors il existe xn ∈ C et yn ∈ C tels que xn → x et yn → y, on a alors tx+(1−t)y = limn txn +(1−t)yn ∈ C pour tout 0 ≤ t ≤ 1. Si maintenant (Cn )n est une suite croissante de parties convexes fermées non vides de H et C := ∪n Cn alors d(x, Cn ) est décroissante et d(x, Cn ) ≥ d(x, C). Vérifions que limn d(x, Cn ) = d(x, C). Pour tout > 0 il existe c ∈ C tel que kx − ck < d(x, C) + , puisque C := ∪n Cn on peut trouver ck ∈ Ck tel que kx − ck k < 2 + d(x, C) et donc d(x, Cn ) < d(x, C) + 2 pour n ≥ k. Comme d(x, Cn ) converge, la question précédente montre que PCn (x) est de Cauchy et donc converge vers un point c0 de C. Comme d(x, C) = limn d(x, Cn ) = limn kx − PCn (x)k = kx − c0 k, on voit que limn PCn (x) = PC (x). Exercice 3.2.6 1) Si X 3 xn → x ∈ X alors (T (xn ))n est une suite de Cauchy dans F car kT (xn )−T (xm )kF ≤ k|T k|kxn −xm k. Si X 3 xn → x ∈ X et X 3 x0n → x ∈ X alors T (xn ) − T (x0n ) → 0 car kT (x0n ) − T (xn )kF ≤ k|T k|kx0n − xn k. 2) D’après la question précédente, pour tout x ∈ X la limite limn T (xn ) existe et ne dépend pas du choix de la suite X 3 xn → x ∈ X. On peut donc définir T̂ par T̂ (x) := limn T (xn ). L’application T̂ est linéaire car si X 3 xn → x ∈ X et X 3 yn → y ∈ X alors αxn + yn → αx + y et donc T̂ (αx + y) = limn T (αxn + yn ) = limn αT (xn ) + T (yn ) = αT̂ (x) = T̂ (y). Elle est continue car kT̂ (x)kF ≤ lim supn kT (xn )kF ≤ k|T k|kxk si X 3 xn → x ∈ X, elle prolonge T comme on le voit en prenant pour xn la suie constante égale à x lorsque x ∈ X. Comme on vient de le voir, k|T̂ k| ≤ k|T k| et cette inégalité est une égalité car T̂ coincide avec T sur X. 3) Soit p le projecteur orthogonal de H sur X. On vérifie facilement que T̃ := T̂ ◦p satisfait les conclusions du théorème 3.2.5 en utilisant le fait que k|pk| = 1 et p = Id sur X. Exercice 3.2.9 ⊥ Si ϕ une forme linéaire non nulle et continue sur H alors Ker ϕ 6= {0} car ⊥⊥ ⊥ sinon on aurait H = {0}⊥ = Ker ϕ = Ker ϕ. Lorsque b ∈ Ker ϕ \ {0} on a ϕ(x) ϕ(b) 6= 0 car (Ker ϕ)∩(Ker ϕ)⊥ = {0}. Pour tout x ∈ H on a x = x− ϕ(x) b + ϕ(b) b ϕ(b) 131 ∈ (Ker ϕ)⊥ . Cette décomposition montre ⊥ b et donc en que la projection orthogonale sur Kerϕ est donnée par x 7→ ϕ(x) ϕ(b) ⊥ particulier que Kerϕ = V ect(b). où clairement x− ϕ(x) b ∈ Ker ϕ et ϕ(b) ϕ(x) b ϕ(b) Exercice 3.3.2 Soit a? la forme linéaire définie par a? (x) = x|a. Par l’inégalité de Cauchya ) = kak Schwarz on obtient |a? (x)| ≤ kakkxk et donc k|a∗ k| ≤ kak. Comme a? ( kak ∗ on a aussi k|a k| ≥ kak. Exercice 3.3.4 1) Pour z ∈ Ω fixé, l’application d’évaluation B(Ω) 3 f 7→ f (z) ∈ C I est une forme linéaire. Donnons-nous R > 0 tel que D(z, R) ⊂ holoR 2πΩ. Les fonctions 1 iθ morphes satisfont l’inégalité de moyenne |f (z)| ≤ 2π 0 |f (z + re )| dθ pour tout 0 ≤ r < R. L’inégalité de Cauchy-Schwarz donne alors Z 2π 1 2 |f (z + reiθ )|2 dθ . |f (z)| ≤ 2π 0 En multipliant par r puis en intégrant sur [0, R] on obtient : Z 2π Z R2 1 1 2 iθ 2 |f (z)| ≤ |f (z + re )| rdrdθ = |f |2 2 2π 0 2π D(z,R) 1 d’où l’on déduit que |f (z)| ≤ R√ kf kL2 et que l’évaluation f 7→ f (z) est π continue sur (B(Ω), k kL2 ). 0 2) Puisque l’évaluation f 7→ f (z) est un élément de B(Ω) , le théorème de Riesz (3.3.3) stipule l’existence de kΩ (z, ·) ∈ B(Ω) telle que f (z) = f |kΩ (z, ·) pour tout f ∈ B(Ω). Pour tout (z, w) ∈ Ω × Ω, posons KΩ (z, w) := kΩ (z, w). par définition nous avons KΩ (z, ·) ∈ B(Ω) et Z f (z) = f (w)KΩ (z, w)dλ(w) Ω pour tout f ∈ B(Ω) et tout z ∈ Ω. 3) Soient z et u dans Ω. Puisque KΩ (z, ·) et KΩ (u, ·) sont dans B(Ω), la question précédente donne Z KΩ (z, u) = KΩ (z, w)KΩ (u, w)dλ(w) Ω et Z KΩ (u, z) = KΩ (u, w)KΩ (z, w)dλ(w). Ω On voit donc que KΩ (z, u) = KΩ (u, z). 132 4) On considère maintenant deux domaines Ω1 et Ω2 et F : Ω1 → Ω2 un biholomorphisme. D’après la formule de changement de variable on a Z Z Z 2 2 0 2 |TF (f )| dλ = |f ◦ F | |F | dλ = |f |2 dλ Ω1 Ω1 Ω2 ce qui signifie que TF est une isométrie linéaire de B(Ω2 ) sur B(Ω1 ). L’identité de polarisation (voir Proposition 3.1.2) permet alors de voir que TF conserve R R le produit hermitien : Ω2 f ḡ dλ = Ω1 TF (f )TF (g) dλ, ∀f, g ∈ B(Ω2 ). Observons que (TF )−1 = TF −1 . (TF )−1 ( En déduire que KΩ1 (w, z) = F 0 (w)KΩ2 (w, z)F 0 (z). (On utilisera le fait que TF conserve le produit hermitien) Exercice 3.3.6 Ici (H, k k) un espace de Hilbert et T un opérateur linéaire continu de H dans lui même. 1) Pour tout y ∈ H on définit un élément de H 0 par y ∗ ◦T . En vertu du théorème ∗ de Riesz (3.3.3) il existe un unique a ∈ H tel que y ∗ ◦ T = a∗ . On note T ∗ y ∗ cet élément ce qui revient à poser y ∗ ◦ T = T ∗ y ou encore T (x)|y = x|T ∗ y pour tous x, y ∈ H. 2) Vérifions que l’application H 3 y 7→ T ∗ y ∈ H est linéaire. Pour x, y1 , y2 ∈ H et α ∈ C I on a x| (T ∗ y1 + αT ∗ y2 ) = x|T ∗ y1 + ᾱ|T ∗ y2 = T (x)|y1 + ᾱT (x)|y2 = T (x)| (y1 + αy2 ) = x|T ∗ (y1 + αy2 ) . Notons que dans ce calcul on a utilisé la définition de T ∗ y et les propriétés de sesquilinéarité du produit hermitien. L’identité x| (T ∗ y1 + αT ∗ y2 ) = x|T ∗ (y1 + αy2 ) ∀x ∈ H entraine que T ∗ y1 + αT ∗ y2 = T ∗ (y1 + αy2 ). 3) Pour tous x, y ∈ H on a T ∗ x|y = x| (T ∗ )∗ y par définition de (T ∗ )∗ . Par ailleurs T ∗ x|y = y|T ∗ x = T y|x = x|T y. On a donc x| (T y − (T ∗ )∗ y) = 0 pour tous x, y ∈ H ce qui entraine que (T ∗ )∗ = T . Rappelons que k|a∗ k| = kak pour tout a ∈ H. Pour tout y ∈ H on a donc kT ∗ yk = k|y ∗ ◦ T k| ≤ kykkkT k| d’où l’on déduit que k|T ∗ k| ≤ k|T k|. L’égalité est obtenue en appliquant ceci à T ∗ et en tenant compte de (T ∗ )∗ = T . Exercice 3.3.9 133 Soit T un endomorphisme d’un espace de Hilbert (H, k k) telque k|T |k ≤ 1. 1) Soit a ∈ H un point fixe de T . En utilisant la définition de l’adjoint et l’inégalité de Cauchy-Schwarz on obtient a|a = a|T a = T ∗ a|a ≤ kT ∗ ak kak. Comme k|T ∗ k| = k|T k| ≤ 1 on a en fait a|a = T ∗ a|a ≤ kT ∗ ak kak ≤ a|a et l’inégalité de Cauchy-Schwarz est en fait une égalité ce qui force T ∗ a à être proportionnel à a. Ainsi T ∗ a = λa et puisqu’alors a|a = λa|a on a bien T ∗ a = a (dans le cas où a = 0 il n’y a rien à démontrer). D’après ce que l’on vient de voir, Ker(T − Id) ⊂ Ker(T ∗ − Id). On peut appliquer cela à T ∗ car k|T ∗ k| = k|T k| ≤ 1, il vient alors Ker(T ∗ − Id) ⊂ Ker((T ∗ )∗ − Id) = Ker(T − Id). On a donc Ker(T ∗ − Id) = Ker(T − Id) . 2) D’après la question précédente et le théorème de projection (3.2.3) on a H = Ker(T ∗ − Id) ⊕ (Ker(T ∗ − Id))⊥ = Ker(T − Id) ⊕ (Ker(T ∗ − Id))⊥ (noter que Ker(T − Id) est fermé puisque T est continue). En utilisant maintenant la Proposition 3.3.8 on obtient H = Ker(T − Id) ⊕ Im(T − Id) qui est la décomposition en somme directe orthogonale voulue. 3) On note π la projection orthogonale sur Ker(T − Id) et, pour tout n ∈ IN, 2 +···+T n Wn := Id+T +T . D’après la question précédente, tout x ∈ H s’écrit de n+1 façon unique sous la forme x = π(x) + x0 avec x0 ∈ Im(T − Id). Comme Wn (π(x)) = π(x), il suffit de montrer que limn Wn (x0 ) = 0 pour tout x0 ∈ Im(T − Id). Commençons par vérifier cela pour x0 ∈ Im(T − Id) c’est à dire x0 = T (z) − z. Dans ce cas n Wn (x0 ) = n 1 X k+1 1 X k T (T (z) − z) = T (z) − T k (z) = n + 1 k=0 n + 1 k=0 1 T n+1 (z) − z) n+1 2 et, puisque k|T k| ≤ 1, kWn (x0 )k ≤ n+1 kzk si bien que limn Wn (x0 ) = 0. Considérons maintenant x00 ∈ Im(T − Id). Alors, pour tout > 0, on peut trouver x0 ∈ Im(T − Id) tel que kx00 − x0 k ≤ . Comme k|Wn k| ≤ 1 on a kWn (x00 )k ≤ + kWn (x0 )k et donc lim supn kWn (x00 )k ≤ pour tout > 0. 4) On considère un espace probabilisé (Ω, µ) et τ : Ω → Ω une application µmesurable tels que µ soit invariante par τ . Nous allons appliquer ce qui précède à l’opérateur Tτ : L2 (Ω, µ) → L2 (Ω, µ) défini par T (f ) := f ◦ τ . Commençons par vérifier que Tτ satisfait les hypotèses requises. L’invariance de µ signifie que µ coı̈ncide avec la mesure image τ∗ (µ), on a donc Z Z Z 2 2 |f | µ = |f | τ? µ = |f ◦ τ |2 µ ∀f ∈ L2 (Ω, µ) Ω Ω Ω 134 ce qui montre à la fois que Tτ est bien un endomorphisme de L2 (Ω, µ) et que sa norme est égale à 1. Nous allons maintenant identifier la projection orthogonale sur Ker(Tτ − Id). L’hypothèse d’ergodicité signifie que Ker(Tτ − Id) est la droite vectorielle des fonctions constantes et donc π est donnée par π(f ) = (f |1Ω ) 1Ω puisque R 2 k1Ω k = Ω 1Ω µ = 1. Dans ces conditions, dire que Wn (f ) converge vers π(f ) signifie que la suite f +f ◦τ +···+f ◦τ n converge en moyenne quadratique vers la fonction constante R n+1 f dµ 1Ω . Ω Exercice 3.3.11 Ici ∆ est le disque unité du plan complexe et B(∆) l’espace de Bergman associé (voir l’exercice 1.3.8). Pour montrer que les polynômes holomorphes (c’est à dire de la forme a0 + a1 z + · · ·z n ) sont denses dans B(∆), nous allons utiliser le critère de densité donné par le théorème 3.3.10. il suffit donc de montrer R Concrétement n n que si f ∈ B(∆) est telle que f |z = ∆ f (z)z̄ = 0 pour tout entier n alors f est identiquement nulle. P k Comme la fonction f est holomorphe sur ∆, on a f (z) = +∞ k=0 ak z et cette série entière converge uniformémentRsur tout disque ∆r centré en 0 et de rayon r < 1. Fixons n ∈ IN, comme f |z n = ∆ f (z)z̄ n = 0, le théorème de convergence dominée montre que Z f (z)z̄ n = 0. lim r→1 ∆r Or, compte tenu de la convergence uniforme locale on a Z n f (z)z̄ = ∆r +∞ X k=0 Z ak Z k n z z̄ = an ∆r n n Z z z̄ = an 2π ∆r r t2n+1 dt = an 0 π 2n+2 r . n+1 On voit donc que an = 0 pour tout n ∈ IN ce qui montre que f = 0. Exercice 3.3.14 Dans cet exercice on considère une suite (xn )n dans un espace de Hilbert H. 1) Si limn kxn k = 0 alors, par l’inégalité de Cauchy-Schwarz, on a 0 ≤ lim sup |(x|xn )| ≤ kxk lim sup kxn k = 0 n n et donc xn converge faiblement vers 0. Considérons la suite en dans l2 définie par en := δnk k . Cette suite converge faiblement vers 0 dans l2 car x|en = xn → 0 pour tout x := (xk )k ∈ l2 . Par contre ken k = 1. 135 2) Il y a unicité de la limite faible car si (xn )n converge faiblement vers a et b alors x|a = limn x|xn = x|b pour tout x ∈ H et donc (a − b) ∈ H ⊥ = {0}. Il est évident que si (xn )n converge faiblement vers x alors toute sous-suite de (xn )n converge également vers x 3) On suppose maintenant que limn ||xn || = ∞ et pour tout entier k on définit Fk par Fk := {x ∈ H : ∀n ∈ N , |(xn |x)| ≤ k}. i) Les fonctions x 7→ |(xn |x)| sont continues sur H et donc Fk est fermé en tant qu’intersection de fermés. ii) Si v ∈ Fk et > 0 alors xn |(v + ||xxnn || ) = xn |v + kxn k ≥ −k + kxn k et donc (v + ||xxnn || ) ∈ / Fk pour n assez grand car limn ||xn || = ∞. Cela montre que Fk est d’intérieur vide car sinon (v + ||xxnn || ) appartiendrait à Fk pour assez petit. iii) Si (xn )n était faiblement convergente alors on aurait H = ∪k Fk or ceci est impossible car, d’après le théorème de Baire, une réunion dénombrable de fermés d’intérieurs vides est d’intérieur vide. Exercice 3.3.16 1) Soit (xn )n une suite bornée dans H. Alors (x∗n )n est une suite bornée dans H 0 et, si H est séparable, le théorème de Banach-Alaoglu (2.1.22) stipule que (x∗n )n possède une sous-suite qui converge simplement vers λ ∈ H 0 . D’après le théorème de Riesz (3.3.3), il existe x ∈ H tel que λ = x∗ . Dire que (x∗nk )k converge simplement vers x∗ équivaut à dire que (xnk )k converge faiblement vers x. 2) i) Soit (xn )n une suite bornée dans H et F := V ect{xn }. Comme F est fermé dans H, l’espace (F, k k) un espace de Hilbert. Il est séparable car l’ensemble des combinaisons linéaires finies à coefficients rationnels de termes de la suite (xn )n est une partie dénombrable et dense dans F . D’après la question précédente, il existe x ∈ F tel que, modulo extraction, limn (xn |a) = (x|a) pour tout a ∈ F . ii) D’après le théorème 3.2.3 on a H = F ⊕ F ⊥ et tout a ∈ H peut donc se décomposer sous la forme a = aF + aF ⊥ où aF ∈ F et aF ⊥ ∈ F ⊥ . Alors (xn |a) = (xn |aF ) converge modulo extraction vers (x|aF ) = (x|a) pour tout a ∈ H. Exercice 3.3.18 Si (xn )n ne converge pas faiblement vers a alors on peut trouver une sous suite (xnk )k telle que (x∗nk )k ne converge pas simplement vers a∗ . Or, modulo extraction, (xnk )k converge faiblement vers b ∈ H. On a nécessairement b∗ 6= a∗ et donc aussi b 6= a. Exercice 3.3.19 136 1) Soit (xn )n une suite de points appartenant à une partie convexe fermée C d’un espace de Hilbert (H, || ||). Supposons que (xn )n converge faiblement vers x. Notons PC (x) la projection de meilleure approximation de x sur C alors Re(x− PC (x)|xn −PC (x)) ≤ 0 pour tout n ∈ IN (voir le théorème 3.2.1). Puisque (xn )n converge faiblement vers x, on obtient Re(x−PC (x)|x−PC (x)) ≤ 0 en passant àla limite. On a donc kx − PC (x)k = 0 ce qui montre que x = PC (x) ∈ C. 2) Soit (Cn )n une suite décroissante de parties convexes fermées non vides de H et (xn )n une suite de points telle que xn ∈ Cn . Si C1 est bornée alors (xn )n converge faiblement modulo extraction et, d’après le point précédent, sa limite appartient à Cn pour tout n ∈ IN. Ceci montre que C := ∩n Cn n’est pas vide. Exercice 3.3.20 Ici A un endomorphisme linéaire d’un espace de Hilbert (H, || ||) un espace de Hilbert tel que A(x)|y = x|A(y) pour tout x, y ∈ H. 1) Sii xn converge faiblement vers x alors xn |A(y) → x|A(y) pour tout y ∈ H. Mais alors A(xn )|y → A(x)|y pour tout y ∈ H ce qui signifie que A(xn ) converge faiblement vers A(x). 2) Si A n’était pas continue il existerait une suite (xn )n telle que kxn k = 1 et limn kA(xn )k = +∞. Or, après une éventuelle extraction, la suite (xn )n converge faiblement et, compte tenu de la question précédente, la suite (A(xn )n également. Cela contredirait le fait qu’une suite faiblement convergente est bornée. Exercice 3.3.21 Soit (xn )n une suite bornée dans espace de Hilbert (H, || ||) telle que xn |y converge pour tout y de H. Supposons que (xn )n ne converge pas faiblement. Alors, d’après la proposition 3.3.17, il existe des suites extraites xϕ1 (n) n et xϕ2 (n) n qui convergent faiblement respectivement vers a1 et a2 avec a1 6= a2 . Construisons ψ(n) une suite strictement croissante d’entiers telle que xψ(2k) k soit extraite de xϕ1 (n) n et xψ(2k+1) k soit extraite de xϕ2 (n) n . Prenons y0 ∈ H tel que (a1 |y0 ) 6= (a2 |y0 ), alors (xψ(n) |y0 ) ne converge pas ce qui contredit l’hyothèse. Exercice 3.3.23 Soit H un espace de Hilbert et B sa boule unité fermée. Soit A : B → B telle que kA(x) − A(y)k ≤ kx − yk pour tout x et tout y dans B. À toute suite (xj )j dans B on associe : n n 1X 1X 2 kz − xj k et sn := xj . ϕn (z) := n j=1 n j=1 137 1) On a n n n 1X 1X 1X ϕn (z) = k(z − sn ) + (sn − xj )k2 = kz − sn k2 + ksn − xj k2 n j=1 n j=1 n j=1 n 1X +2 Re ((z − sn )|(sn − xj )) = kz − sn k2 + ϕn (sn ) + 2Re ((z − sn )|(sn − sn ) = n j=1 kz − sn k2 + ϕn (sn ) 2) Pour tout couple de points a et y dans B on a Re (A(a) − a + y − A(y)|a − y) = Re (A(a) − A(y)|a − y) − ka − yk2 ≤ kA(a) − A(y)k ka − yk − ka − yk2 ≤ 0. 3) 3.a) D’après la question précédente il vient Re (A(σn ) − σn + y − A(y)|σn − y) ≤ 0 et donc Re (A(σn ) − σn |σn − y) + Re (y − A(y)|σn − y) ≤ 0, ∀y ∈ B. (6.3.1) Puisque σn ∈ B on a |(A(σn ) − σn |σn − y)| ≤ kA(σn ) − σn k kσn − yk ≤ 2kA(σn ) − σn k d’où, comme A(σn ) − σn converge fortement vers 0, lim Re (A(σn ) − σn |σn − y) = 0. n Comme (σn )n converge faiblement vers σ, il vient donc en passant à la limite dans 6.3.1 Re (y − A(y)|σ − y) ≤ 0 pour tout y ∈ B. 3.b) Soit z ∈ B. Comme σn ∈ B on a σ ∈ B et donc yt := tz + (1 − t)σ ∈ B pour tout 0 < t < 1. D’après la question précédente, on a Re (yt − A(yt )|σ − yt ) ≤ 0 pour tout 0 < t < 1. Comme σ − yt = t(σ − z) on a aussi Re (yt − A(yt )|σ − z) ≤ 0 d’où Re (σ − A(σ)|σ − z) ≤ 0 en faisant tendre t vers 0 (noter que A est continue car Lipschitzienne). 3.c) Par hypothèse A(B) ⊂ B et on peut donc appliquer l’inégalité de la question précédente avec z := A(σ). On trouve kA(σ) − σk2 = 0 ce qui montre que σ est un point fixe de A. 4) Il s’agit de trouver une suite (σn )n dans B qui converge faiblement et telle que kA(σn ) − σn k → 0. Nous allons pour cela utiliser la première question avec 138 xj := Aj (x0 ). Il est clair que sn ∈ B. On a n n 1X 1X ϕn (A(sn )) − ϕn (sn ) = kA(sn ) − Aj (x0 )k2 − ksn − Aj (x0 )k2 ≤ n j=1 n j=1 n n 1X 1X 4 ksn − Aj−1 (x0 )k2 − ksn − Aj (x0 )k2 ≤ n j=1 n j=1 n d’où, compte tenu de la première question, kA(sn ) − sn k → 0. Il suffit alors de prendre pour (σn )n une sous-suite de (sn )n qui soit faiblement convergente. Exercice 3.3.25 1) Soit (un )n une suite qui converge faiblement vers 0 dans un espace de Hilbert (H, k k). a) On pose v1 := u1 . Supposons avoir construit v1 , · · · , vn tels que vj = upj , 1 = p1 < p2 < · · · < pn et |(vj |vk )| ≤ k1 pour 1 ≤ j < k ≤ n. Puisque (un )n converge faiblement vers 0 on a limp (maxj≤n |(vj |up )|) = 0 et l’on 1 peut choisir pn+1 > pn tel que maxj≤n |(vj |upn+1 )| ≤ n+1 . On pose alors vn+1 := upn+1 . On obtient ainsi une suite (vn )n extraite de (un )n telle que |(vj |vk )| ≤ k1 pour 1 ≤ j < k et k ≥ 2. b) On a k v1 + · · · + vn 2 1 1 X k = 2 kv1 + · · · + vn k2 = 2 (vj |vk ) = n n n 1≤j,k≤n k−1 n X n n X X 1 X 1 X 2 2 (vj |vk ) = 2 (vj |vk ) ≤ kvq k + kvq k + 2Re 2 n q=1 n q=1 1≤j6=k≤n k=2 j=1 n n X k−1 X 1 X 2 kv k + 2 |(v |v )| q j k n2 q=1 k=2 j=1 Comme toute suite faiblement convergente, la suite (un )n est bornée et donc kvq k2 ≤ M < +∞. En utilisant la majoration |(vj |vk )| ≤ k1 pour 1 ≤ j < k et k ≥ 2, on obtient alors n X v1 + · · · + vn 2 1 k − 1 M + 2 k k ≤ 2 nM + 2 ≤ n n k n. k=2 2) Si (un )n converge faiblement vers u, on applique ce qui précède à la suite n −u) (un − u)n ce qui fournit (vn )n extraite de (un ) telle que (v1 −u)+···+(v → 0. n v1 +···+vn On a alors → u. n Corollaire 6.3.1 Soit (H, k k) un espace de Hilbert. 139 1) Toute suite faiblement convergente à valeurs dans une partie convexe fermée C de H converge vers un point de C. 2) Toute fonction ϕ : C → IR convexe et continue sur une partie convexe, fermée et bornée C de H atteint sa borne inférieure. Exercice 3.3.27 1) Soit (un )n une suite faiblement convergente à valeurs dans une partie convexe fermée C d’un espace de Hilbert (H, k k). Soit u la limite (faible) de (un )n . D’après le théorème de Banach-Saks (3.3.24) on peut supposer, après une n converge fortement vers u. Comme C est éventuelle extraction, que u1 +···+u n u1 +···+un convexe la suite reste à valeurs dans C et donc u ∈ C = C. n n 2) C étant une partie convexe, fermée et bornée d’un espace de Hilbert (H, k k), on considère une fonction convexe et continue ϕ : C → IR. Soit (un )n une suite dans C telle que limn ϕ(un ) = inf C ϕ (où a priori inf C ϕ ≥ −∞). Comme la partie C est bornée on peut, après extraction, supposer (un )n faiblement n convergente puis, quitte à extraire de nouveau, on peut supposer que u1 +···+u n u1 +···+un converge fortement vers u. Puisque C est convexe fermée on a ∈ C et n u ∈ C. La fonction ϕ étant convexe on a inf ϕ ≤ ϕ C u1 + · · · + un ϕ(u1 ) + · · · + ϕ(un ) ≤ n n n) du théorème de Cesarò on tire queque limn ϕ(u1 )+···+ϕ(u = inf C ϕ et de la n n continuité de ϕ que limn ϕ u1 +···+u = ϕ(u). On a donc ϕ(u) = inf C ϕ. n 6.4 Exercices sur la quatrième leçon Exercice 4.1.2 S L’ensemble K := [0, 1] \ n∈IN In est un compact car il est fermé dans [0, 1]. Il est d’intérieur vide car tout ouvert de [0, 1] contient un intervalle du type In puisque les centres rn de ces intervalles sont denses et leurs longueurs 2n tendent vers 0. P La mesure de Lebesgue de K est supérieure à 1 − +∞ n=1 2n = 1 − . Exercice 4.1.5 Soit B := {e1 , e2 , · · ·} une base algébrique dénombrable d’un espace vectoriel normé (E, k k). 1) Soit Fn := V ect{e1 , · · ·, en }. Si Fn était d’intérieur non vide alors il existerait une boule ouverte B(x0 , r0 contenue dans Fn . Mais alors pour tout x ∈ E on aurait x0 + M1 x ∈ B(x0 , r0 ) ⊂ Fn pour M assez grand et x ∈ M ·(Fn − x0 ) = Fn si bien que E serait égal à Fn , ce qui est exclu puisque E est de dimension 140 infinie. Montrons que Fn est fermé dans E. Sur Fn on dispose de deuxPnormes, celle induite par la norme k k de E et la norme kxk∞ qui à tout x = ni=1 αi ei ∈ Fn associe le maximum max1≤i≤n |αi | des modules de ses coordonnées dans la base {e1 , · · · , en }. Or, sur un espace de dimension finie, toutes les normes sont équivalentes. Autrement dit, P l’application linéaire in : (I Cn , k k∞ ) → (Fn , k k) n définie par (α1 , · · · , αn ) 7→ i=1 αi ei est un isomorphisme bi-continu. Soit Maintenant xk ∈ Fn tels que xk → x ∈ E. D’après ce qui précède, la suite αk := i−1 Cn , k k∞ ) et converge donc vers α après une n (xk ) est bornée dans (I éventuelle extraction. On a alors x = limk xk = limk in (αk ) = in (α) ∈ Fn . Supposons maintenant que (E, k k) est complet. Dire que B une base algébrique de E revient à dire que E = ∪n≥1 Fn or, d’après le théorème 4.1.4, E est gras dans lui-même. Nous avons donc obtenu une contradiction ce qui signifie que E n’est pas de dimension infinie. 2) Il n’existe pas de norme qui fasse de IR[X] un espace de Banach car IR[X] est de dimension infinie et possède une base algébrique dénombrable donnée par ek := X k ce qui, d’après la question précédente, est impossible pour les espaces de Banach. Exercice 4.1.6 Comme C([0, 1]) = ∪n {f ∈ C([0, 1])/ kf k∞ ≤ n} =: ∪n Bn il suffit, pour montrer que C([0, 1]), k k1 est maigre dans lui-même, de vérifier que les ensembles Bn sont fermés dans C([0, 1]), k k1 . On utilise pour cela le lemme de Slutsky. Supposons que kf − fk k1 → 0 avec fk ∈ Bn et f ∈ C([0, 1]). Alors, modulo extraction, fk converge presque partout vers f et donc −n ≤ |f | ≤ n presque partout. Comme f est continue on a bien f ∈ Bn . Exercice 4.1.10 Soit E, k k un espace de Banach, F un sous-espace fermé et E/F l’espace quotient associé. Soit π : E → E/F la projection définie par π(x) := ẋ.On pose N (ẋ) := inf y∈F kx − yk. 1) Vérifions que N (ẋ) := inf y∈F kx − yk est une norme. Pour x1 , x2 ∈ E et λ ∈ C I on a {(x1 + λx2 ) + y / y ∈ F } = {(x1 + y1 ) + λ(x2 + y2 ) / y1 , y2 ∈ F } et donc N (x˙1 + λx˙2 ) ≤ kx1 + y1 k + |λ| kx2 + y2 k pour tout y1 , y2 ∈ F. En passant à la borne inférieure sur y1 ∈ F et y2 ∈ F on obtient N (x˙1 +λx˙2 ) ≤ N (x˙1 )+|λ|N (x˙2 ). Lorsque x˙1 = 0 (c’est à dire x1 ∈ F ) les inégalités deviennent des égalités. Si N (ẋ) = 0 alors x ∈ F = F et donc ẋ = 0. 141 2) La projection π : E → E/F définie par π(x) := ẋ est continue car N (ẋ) ≤ kx + 0| = kxk. P 3) Soit (ẋn )n une suite telle que N (ẋn ) < +∞. Par définition de N il existe 1 une suite (yn )n dans F telle que Pkxn + yn k ≤ N (ẋn ) + 2n . Puisque (E, k k) est un espace de Banach, la série n (xn + yn ) converge (voir Proposition 4.1.9). P PN Puisque π est continue il vient π ( (x + y )) = lim n n N n n=1 x˙n ce qui prouve P que la série n x˙n converge. 4) La Proposition 4.1.9 et la question précédente montre que E/F, N est un espace de Banach. Exercice 4.1.12 Soit (E, k k) un espace de Banach et Lc (E) l’espace des applications linéaires continues de E dans lui même muni de la norme |k k|. On rappelle que U ∈ Lc (E) −1 est dit inversible si U est bijectif et son inverse U est continu. 1) Pour montrer que Lc (E), |k k| lorsque (E, k k) l’est, nous allons P utiliser la Proposition 4.1.9. Soit donc An une suite P dans Lc (E) telle que n k|An k| < +∞, il s’agit de montrer que la série n An converge vers un élément P A de Lc (E). Pour x ∈ E on a kAn (x)k ≤ k|An k| kxk et donc la série n An (x) converge dans E, notons A(x) sa somme. IlP est clair que A définit une application linéaire de E dans E. Notons SN := N n=1 An , alors kA(x) − SN (x)k = k N X An (x)k ≤ X k|An k| kxk n>N n>N ce qui montre simultanément que A ∈ Lc (E) et que SN converge ves A dans Lc (E), |k k| . 2) On a (I − A) ◦ N X N X An = An ◦ (I − A) = I − AN +1 . n=0 (6.4.1) n=0 n Si |kAk| < 1 alors la série n An converge car k|Ak|net en passant P k|An k| ≤ P n à la limite dans (6.4.1) on obtient (I − A) ◦ = ◦ (I − A) = I nA nA ce qui prouve que I − A est inversible. −1 −1 3) Si k|V k| < k|U0−1 k|−1 alors k|U 0 V k| ≤ k|U0 k| k|V k| < 1 et d’après la −1 question précédente I + U0 V est inversible. Il s’ensuit que U0 + V = U0 ◦ −1 I + U0 V l’est aussi. P Exercice 4.1.15 1) Soient a ∈ E1 , r > 0 et y ∈ Bf (u(a), mr). Nous allons construire une suite (an )n dans E1 telle que a0 = a, d1 (an−1 , an ) ≤ r 2n−1 142 et d2 (u(an ), y) ≤ mr . 2n Il suffit pour cela d’observer la chose suivante. Puisque, par hypothèse, u satisfait la condition P(m), pour tout a ∈ E1 et tout r > 0 on a : d2 (u(a), y) ≤ mr ⇒ ∃a1 ∈ E1 / d(a1 , a) ≤ r et d2 (u(a1 ), y) ≤ mr . (6.4.2) 2 Supposons avoir construit a0 , · · · , an et appliquons (6.4.2) pour an et nous fournit an+1 ∈ E1 tel que d1 (an , an+1 ) ≤ r . 2n Cela r mr et d2 (u(an+1 ), y) ≤ n+1 . n 2 2 2) On suppose maintenant que u est continue et satisfait la condition P(m). La suite construite à la première question est de Cauchy et il existe donc et donc ã ∈ E1 tel que limn an = ã. Par construction on a d2 (u(an ), y) ≤ mr 2n u(an ) → y. Mais, puisque u(an ) → u(ã) et donc y = u(ã). Pn−1 u est continue,P Comme d(a0 , an ) ≤ k=0 d(ak , ak+1 ) ≤ r k 21k = 2r on voit que d(a, ã) = d(a0 , ã) ≤ 2r. Nous avons trouvéã ∈ Bf (a, 2r) tel que y = u(ã) et donc montré que Bf (u(a), mr) ⊂ u Bf (a, 2r) . Autrement dit u satisfait la condition P( m2 ). 3) Soit O un ouvert de E1 et a ∈ O, nous allons montrer que u(0) est un voisinage ouvert de u(a). Pour cela, prenons r > 0 tel que Bo (a, r) ⊂ O. Alors Bf (a, 2r ) ⊂ O et, puisque u satisfait la condition P(m), on a Bo u(a), mr r mr ⊂ Bf u(a), ⊂ u Bf (a, ) ⊂ u(0). 4 2 2 4) On suppose ici que u est une application linéaire telle que ∃r0 > 0 tel que Bf (0, mr0 ) ⊂ u[Bf (0, r0 )]. Alors, pour tout a ∈ E1 et tout r ≥ 0 on a : r r u Bf (a, r) = u a + Bf (0, r0 ) = u(a) + u Bf (0, r0 ) r0 r0 r ⊃ u(a) + Bf (0, mr0 ) = Bf (a, mr) r0 ce qui prouve que u satisfait la condition P(m). On procède de la même façon pour la condition P(m). 143