Table des matières 1. Éléments propres, caractéristiques 1 2

Table des matières
1. Éléments propres, caractéristiques 1
2. Diagonalisation 4
3. Co-diagonalisation 6
4. Décomposition de Dunford 7
1. Éléments propres, caractéristiques
Soient f∈ L(E)et λK. On dit que λest une valeur propre de fsi fλIdEn’est
pas inversible. De manière équivalente, λest une valeur propre pour fsi ker(fλIdE)6=
0, c’est-à-dire, il existe xEtel que f(x) = λx.
On appelle xEun vecteur propre pour fsi x6= 0 et il existe λKtel que
f(x) = λx. Bien que xsoit supposé non nul, la valeur propre λcorrespondante peut
être zéro.
Étant donnés f∈ L(E)et une valeur propre λde f, on appelle sous-espace propre
associé à λ, noté Eλ, le sous-espace ker(fλId). Donc Eλest constitué de tous les
vecteurs propres de valeurs propre λainsi que le vecteur nul. On appelle multiplicité
géométrique, notée mg(λ), la dimension de Eλ.
Proposition 1.1. Soit f∈ L(E). Toute famille finie de vecteurs propres associés à
des valeurs propres pour fdeux à deux distincts est libre. En particulier, si Eest de
dimension finie, alors il existe au plus dim Evaleurs propres deux à deux distinctes.
Proof. La preuve est par récurrence sur le nombre de vecteurs dans la famille. S’il y a
un seul vecteur dans la famille, alors c’est une famille libre car un vecteur propre est
par définition non nul.
Maintenant supposons le résultat vrai pour toute famille finie à Néléments. Soit
{x1, . . . , xN+1}une famille vérifiant les hypothèses de la proposition. Désigons par λila
valeur propre associée à xi. Supposons qu’on ait une relation α1x1+· · ·+αN+1xN+1 = 0E.
On lui applique fpour trouver λ1α1x1+· · · +λN+1αN+1xN+1 = 0E. En multipliant la
première relation par λN+1 et en lui soustrayant la seconde relation, on obtient
(λN+1 λ1)α1x1+· · · + (λN+1 λN)αNxN= 0E.
Par l’hypothèse de récurrence on a (λN+1 λi)αi= 0 pour tout i= 1, . . . , n. Mais les
λisont deux à deux distincts par hypothèse, donc αi= 0 pour tout i= 1, . . . , N. Inséré
dans la première relation, cela implique αN+1 = 0 puisque xN+1 6= 0E.
Le dernier énoncé suit de façon triviale du premier, car le nombre de membres d’une
famille libre de vecteurs ne peut pas excéder la dimension.
Exemple 1.1.1. Soit E=C(R)et f∈ L(E)donné par la dérivation. Alors si les
scalaires λ1, . . . , λnKsont deux à deux distincts, alors les vecteurs eλ1t, . . . , eλnt
forment une famille libre dans E.
Exemple 1.1.2. On a déjà montré, à travers des critères de cyclicité (polynôme mini-
mal, commutant) que si un f∈ L(E)admet dim Evaleurs propres distinctes alors f
est cyclique. Donnons maintenant une autre preuve, qui repose sur la proposition 1.1.
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Pour motiver le raisonnemment, on se rappelle qu’un générateur du produit direct
Z/p1Z×· · ·×Z/pnZ, où les pisont des nombres premiers deux à deux distincts, est donné
par le produit des générateurs des facteurs. Dans notre context, si x0, . . . , xn1sont les
vecteurs propres associés aux nvaleurs propres distinctes on pose x=x0+· · · +xn1.
Montrons que les vecteurs x, f(x), . . . , fn1(x)forment une base de E.
Supposons que Pakfk(x) = 0Eet montrons que les aksont tous nuls. Or on calcule
fk(x) = λk
0x0+λk
1x1+· · · +λk
n1xn1.
Ainsi la relation ci-dessus devient
n1
X
k=0
ak(λk
0x0+λk
1x1+· · · +λk
n1xn1) =
n1
X
j=0 n1
X
k=0
akλk
j!xj= 0E.
Or les xiforment une base de E(car associés à des valeurs propres distinctes – voir
la proposition 1.1). On en déduit que Pakλk
j= 0 pour tout j. Mais cela équivaut à
l’équation
V(λ0, . . . , λn1)
a1
a2
.
.
.
an
=
0
0
.
.
.
0
,
où à gauche apparaît la matrice de Vandermonde. Comme det V(λ0, . . . , λn1)est égal
àQi<j (λiλj), on en déduit de l’hypothèse que les valeurs propres sont distinctes que
les aisont tous 0.
Proposition 1.2. Soit f∈ L(E). Soient λ1, . . . , λndes valeurs propres de f, supposées
deux à deux distinctes. Alors les Eλisont en somme directe.
Proof. Soit xEλ1+· · · +Eλnet supposons que
x1+· · · +xn=x=y1+· · · +yn,
avec xi, yiEλi. Alors (x1y1) + · · · + (xnyn)=0Eavec xiyiEλi. Or les
différences xiyidoivent toutes être 0E, car sinon celles qui sont non zéro seraient
liées, en contradiction à la proposition 1.1.
Proposition 1.3. Soient f∈ L(E)et λune valeur propre de f. Alors λest racine de
toute polynôme annulateur de f. En particulier, les valeurs propres sont exactement les
racines du polynôme minimal.
Proof. Si xest un vecteur propre associé à λ, alors P(f)x=P(λ)x. En effet, par
linéarité il suffit de vérifier cette relation pour des monômes, ce qui peut se faire par un
argument de récurrence. Ainsi, puisque P(f)annule fon a P(λ)x= 0E, d’où P(λ) = 0
car x6= 0E.
Pour voir comment le deuxième énoncé s’en déduit du premier, supposons que αK
est racine de µfsans être une valeur propre. Alors µf(x)=(xα)Q(x), pour un
polynôme QK[x]de degré strictement inférieur à celui de µf. Ainsi 0L(E)=µf(f) =
(fαId) Q(f). Comme αn’est pas valeur propre de f, l’endomorphisme fαId est
inversible. Ainsi Qest annulateur de f, ce qui contredit la minimalité de f.
Soient f∈ L(E)et λKune valeur propre de f. On appelle multiplicité minimale
de λ, notée mm(λ), la multiplicité de λen tant que racine de µf.
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1.4. Racines du polynôme caractéristique.
Proposition 1.5. Soit f∈ L(E)Eest de dimension finie. Alors les valeurs propres
de fsont précisément les racines de χf. En particulier, si K=C, alors fadmet au
moins une valeur propre.
Proof. Le scalaire λKest valeur propre de fsi, et seulement si, fλIdEn’est pas
inversible, c’est-à-dire χf(λ) = det(fλIdE) = 0.
Maintenant prenons K=C. On peut supposer que dim E1. Alors le théorème
d’Alembert-Gauss dit que χf(x), puisque ce n’est pas un polynôme constant, admet au
moins une racine. Par la première partie de la proposition, ceci implique que fadmet
au moins une valeur propre.
1.6. Sous-espaces caractéristiques. Soit f∈ L(E), où Eest de dimension finie. Soit
λKune valeur propre de f. Alors la multiplicité de λen tant que racine de polynôme
caractéristique χfde fest appelée multiplicité algébrique. On la note ma(λ). On
appelle espace caractéristique l’espace ker(fλId)ma(λ). Noter bien l’égalité
ker(fλId)ma(λ)= ker(fλId)mm(λ).
L’espace caractéristique est un sous-espace stable de f. En effet l’endomorphisme
(fλId)ma(λ)est un polynôme en fet donc commute avec f. Ainsi son noyau est
stable par f.
Par ailleurs, si f∈ L(E)est tel que χfest scindé, une application du lemme des
noyaux montre que Ese décompose en somme directe des sous-espaces caractéristiques.
1.7. Multiplicités. Soit λune valeur propre de f∈ L(E). Regardons maintenant les
relations entre les trois multiplicités mg(λ), mm(λ), ma(λ).
Il est clair qu’on a
1mm(λ)ma(λ).
En effet, par le théorème de Cayley-Hamilton, puisque µf|χf, la multiplicité de λen
tant que racine de µfest inférieure ou égale à sa multiplicité en tant que racine de χf.
Proposition 1.8. Soient f∈ L(E)et λune valeur propre de f. Alors
ma(λ) = dim ker(fλId)ma(λ).
In particular 1mg(λ)ma(λ).
Proof. Posons gl’endomorphisme induit de fsur le sous-espace caractéristique G=
ker(fλId)ma(λ). Alors gλId est un endomorphisme nilpotent. Ainsi, il existe une
base dans laquelle la matrice de gλId est triangulaire supérieure stricte. Dans cette
même base la matrice de gest donc triangulaire supérieure avec λcomme coefficient
sur chaque diagonal. Ainsi le polynôme caractéristique de gest χg(T)=(Tλ)dim G,
ce qui montre que dim G=ma(λ).
L’inégalité mg(λ)ma(λ)découle de l’inclusion ker(fλId) ker(fλId)ma(λ)
(car ma(λ)1par définition), et la première partie de la proposition.
Exemple 1.8.1. Soit f∈ L(E), où Eest de dimension finie. Soit λune valeur propre
de f. On a maintenant trois notions de multiplicité de λ: géométrique, minimale, et
algébrique. Comparons ces multiplicités dans le cas des endomorphismes nilpotents.
Noter que la seule valeur propre d’un endomorphisme nilpotent est 0.
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Soit f∈ L(E)nilpotent d’indice pet posons n= dim E < . Alors
p=mm(0), n =ma(0),et dim ker f=mg(0).
Rappelons-nous que l’hypothèse p= dim Eimplique dim ker fk=kpour k= 0, . . . , p.
En particulier mm(0) = ma(0) implique mg(0) = 1.
Par exemple,
pour diag(J1, J1, J2)M4(K)on a mm(0) = 2,ma(0) = 4, et mg(0) = 3;
pour diag(J1, J3, J4, J5)M13(K)on a mm(0) = 5,ma(0) = 13, et mg(0) = 4.
2. Diagonalisation
Soit f∈ L(E), où Eest de dimension finie. On dit que fest diagonalisable si l’une
des conditions suivantes équivalentes est vérifiée
(1) il existe une base de Edans laquelle la matrice de fest diagonale;
(2) il existe une base de Econstituée de vecteurs propres de f;
(3) Eest somme directe des sous-espaces propres de f.
On dit qu’une matrice MMn(K)est diagonalisable si elle est semblable à une
matrice diagonale, c’est-à-dire, il existe PGLn(K)telle que P MP 1est diagonale.
Ces définitions sont compatibles: un fest diagonalisable si, et seulement si, toute
matrice qu’on peut associer à fen choisissant une base de Eest diagonalisable.
Si MMn(K)est diagonalisable, avec P MP 1une matrice diagonale D, les valeurs
propres de Msont les coefficients diagonaux de D.
Proposition 2.1. Soit f∈ L(E)avec dim E=n. Si fadmet nvaleur propres deux
à deux distinctes, alors fest diagonalisable. De façon équivalente, si χfest scindé de
racines simples, alors fest diagonalisable.
Proof. Par la proposition 1.1, les vecteurs propres associés à des valeurs propres deux
à deux distinctes sont en famille libre. Comme il y a n= dim Eéléments dans cette
famille libre, c’est une base.
Que l’hypothèse que χfsoit scindé de racines simples est équivalente à l’hypothèse
que fadmette n= dim Evaleur propres deux à deux distinctes est clair, car les racines
des χfsont précisément les valeurs propres et deg χf=n.
Par exemple, une matrice triangulaire supérieure telle que les coefficients le long du
diagonal sont deux à deux distincts est diagonalisable. En effet, les coefficients le long
du diagonal sont précisément les valeurs propres.
La réciproque de la proposition ci-dessus n’est pas vrai: il suffit de penser à des
homothéties en dimension 2.
2.2. Critère de diagonalisibilité avec µf.
Théorème 2.1. Soit f∈ L(E), où Eest de dimension finie. Alors fest diagonali-
sable si, et seulement si, µfest scindé à racines simples. De façon équivalent, fest
diagonalisable si, et seulement si, fadmet un polynôme annulateur scindé à racines
simples.
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Proof. Pour voir l’équivalence entre les deux énoncés, supposons que fadmet un po-
lynôme annulateur scindé Pà racines simples, comme µf|P, on en déduit que µfest
scindé à racines simples. (L’autre direction est évidente).
Alors, supposons que fest diagonalisable. Ainsi fadmet une base x1, . . . , xnde
vecteurs propres; notons λ1, . . . , λnles valeurs propres associés. De ces valeurs propres
on en choisit une pour chaque répétition; on note λ1, . . . , λm, où mn, ces valeurs
propres deux à deux distinctes. On pose P(x) = Qm
i=1(xλi); par construction, c’est
un polynôme scindé à racines simples. Montrons que Pest annulateur de f. Il suffit de
démontrer que P(f)(v) = 0Epour tout v∈ {x1, . . . , xn}. Si λest la valeur propre de
v, et Q(x) = Qλi6=λ(xλi)on calcule
P(f)(v) = Q(f)((fλId)(v)) = 0E,
ce qui montre une direction.
Maintenant supposons que fadmet un polynôme annulateur scindé Pà racines
simples. Écrivons P(x) = Qm
i=1(xλi), où les λisont deux à deux distincts. Alors les
facteurs xλisont premiers entre eux, et le lemme du noyau implique que
E= ker P(f) =
m
M
i=1
ker(fλId).
Ainsi Eest somme directe d’espaces propres, et du coup fest diagonalisable.
Remarque 1. On en déduit que si fest diagonalisable et Fest un sous-espace stable,
alors l’endomorphisme sur Finduit par fest diagonalisable. En effet, µfF|µfet comme
le dernier est scindé à racines simples, le premier l’est aussi.
Exemple 2.2.1. Les symmétries vectorielles et projecteurs sont diagonalisables (de
polynôme annulateurs (x+ 1)(x1) et x(x1), respectivement).
Exemple 2.2.2. Si fest nilpotent et diagonalisable, alors fest nul. En effet, Xpest
le polynôme minimal, où pest l’indice de nilpotence. Pour que les racines de Xpsoit
simple, il faut que p= 1, c’est-à-dire f= 0L(E).
Exemple 2.2.3. Soit AMn(R)telle que A5= Idn. Alors Aest diagonalisable sur C,
car les racines de x51sont deux à deux distinctes.
Qu’est-ce qui se passe sur R? Cherchons à décrire les Aci-dessus qui sont diagona-
lisables. On sait que µA|(x51), puisque ce dernier est annulateur de A. Mais (par
l’hypothèse que Asoit diagonalisable et la proposition ci-dessus) on sait également que
µAest scindé à racines simples. On en déduit que µA(x) = x1. Ainsi A= Idn.
Exemple 2.2.4. Soit f∈ L(E), avec dim E=n. Supposons fde rang 1. Alors f
est diagonalisable si, et seulement si, sa trace est nulle. En effet, le noyau de fest
de dimension n1, et ce noyau est l’espace propre E0de la valeur propre 0. Alors f
est diagonalisable précisément lorqu’il existe λtel que E=EλE0. Un tel λserait
forcément différent de 0.
Exemple 2.2.5. Si une matrice triangulaire par blocs
M=A B
0nD
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