IV- Ensemble canonique

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IV - ENSEMBLE CANONIQUE
L’ensemble microcanonique est particulièrement adapté pour l’étude des systèmes
isolés caractérisés par les grandeurs N , V et E . Cependant il comporte de grandes
difficultés mathématiques pour le calcul du nombre de configurations W . De plus, le
système isolé n’est pas le cas le plus général de système : il existe des systèmes dont
l’énergie est variable, par exemple les systèmes thermostatés (gardés à la même
température par un contact thermique avec un réservoir de chaleur). C’est pourquoi nous
allons introduire un autre type d’ensemble : l’ensemble canonique. Il est adapté aux
systèmes en contact thermique avec un réservoir de chaleur : la température T , le nombre
de particules N et le volume V du système sont constants . L’énergie est variable ; sa
valeur moyenne est identifiée avec la grandeur thermodynamique énergie interne.
1- Equilibre d’un système avec un réservoir de chaleur :
Considérons un système constitué d’un nombre de particules N , dans un volume
V , en contact thermique avec un réservoir de chaleur à la température T ; il a une énergie
E s , qui peut varier. Lorsque l’équilibre thermique est atteint, le système que nous
considérons est aussi à la température T . L’ensemble (système + réservoir) est isolé. Le
réservoir est beaucoup plus grand que le système qu’on étudie ; on a donc :
E s ' = E0 − E s
où l’énergie
Es
de notre système est très
petite devant l’énergie
E s ,T
E0
de l’ensemble.
Pour un état d’énergie Es du système, l’état
du réservoir peut être obtenu par un nombre
W ( E s ' ) = W ( E0 − E s )
E s' ,T
d’états microscopiques, tous équiprobables
puisque l’ensemble est isolé. La probabilité
ps que le système ait l’énergie Es (et donc
que le réservoir ait l’énergie
E s ' ) est
proportionnelle à W ( E s ' ) . On peut donc écrire
Log ( p s ) ∝ Log (W (E0 − E s ))
Log (W ( E0 − E s )) en série de Taylor autour de E0
En développant
premier ordre, nous avons :
Log ( p s ) ∝ Log (W ( E0 )) − E s
Sachant que :
Nous pouvons donc écrire :
∂Log (W )
∂E s
∂Log (W )
1
=β =
∂E
kT
Log ( p s ) ∝ Log (W ( E0 )) − βE s
Ce qui nous permet de déduire que :
⎛
En normalisant cette probabilité ⎜⎜
⎝
p s ∝ exp(− βE s )
⎞
∑ ps = 1⎟⎟ , nous avons :
s
ps =
⎠
1
exp(− βE s )
QN
Es =0
et en se limitant au
21
où Q N est la fonction de partition du système, ou somme d’états ; elle est définie par la
relation:
QN = ∑ exp(− βE s )
s
la sommation étant effectuée sur tous les états accessibles au système. C’est une
sommation pondérée qui favorise les états de basse énergie.
D’autre part, nous avons :
N s exp(− βE s )
.
=
N
QN
La fraction de particules dans l’état E s est proportionnelle à sa contribution à la somme
d’états Q N .
2- Grandeurs thermodynamiques :
La fonction de partition QN étant déterminée, nous pouvons en déduire les
grandeurs thermodynamiques liées à notre système . L’énergie moyenne (ou énergie
interne) du système , que nous noterons simplement E , définie par :
E = Es ps :
∑
s
est donnée par:
E=
∑ Es exp(− βEs )
s
∑ exp(− βEs )
=−
∂Log (QN )
∂β
s
L’entropie S est donnée par la relation :
S = −k ∑ p s Log ( p s ) = −k ∑ p s (− βE s − Log (QN ))
s
s
Elle s’écrit :
S=
L’énergie libre de Helmoltz
F
E
+ kLog (Q N )
T
a pour expression :
F = E − TS = −kTLog (QN )
Elle a une expression relativement simple ; c’est cette grandeur que nous prendrons comme
fonction d’état de base.
Sachant que :
dF = − SdT + μdN − PdV
nous pouvons déterminer S , μ et P connaissant F , qui est la fonction thermodynamique
pratique dans ce cas canonique:
S =−
∂F
∂T
μ=
N ,V
∂F
∂N
P=−
T ,V
∂F
∂V
N ,T
La chaleur spécifique à volume constant a pour expression :
Cv =
3- Fluctuations de l’énergie:
∂E
∂T
= kβ 2
N ,V
∂ 2 Log (Q N )
∂β 2
Considérons la fluctuation quadratique moyenne ΔE de l’énergie par rapport à la
valeur moyenne E . En utilisant le fait que :
22
E 2 = ∑ E s2 p s =
s
1 ∂
(QN )
Q N ∂β 2
2
Nous avons :
(ΔE )
2
=
E s2
2
− Es =
∂ 2 Log (Q N )
∂β 2
Cette relation peut s’écrire sous la forme :
(ΔE )2 = − ∂E = kT 2CV
∂β
La fluctuation relative est donnée par la relation :
kT 2 CV
ΔE
=
E
E
Sachant que les grandeurs
E
et
CV
sont toutes les deux des grandeurs extensives (donc
proportionnelles au nombre de particules N du système) alors que la température
intensive (indépendante de N ) nous avons :
T
est
1
ΔE
∝
E
N
On voit donc que la fluctuation relative est très faible quand le nombre de particules est
grand . Sachant que les nombres de particules que nous considérons sont de l’ordre de
10 23 , nous avons :
ΔE
∝ 10 −12
E
Nous pouvons dire que l’énergie du système est sa valeur moyenne E avec une très bonne
précision ; elle fluctue continuellement autour de E mais les écarts ont une amplitude
relative négligeable.
4- Degrés de liberté indépendants :
Soit un système physique dont les niveaux d’énergie sont obtenus par la somme de
termes dus à des degrés de liberté indépendants i, j , k ,..... :
ε s = ε ijkl = ε i + ε j + ε k + ......
La fonction de partition de ce système est :
( (
))
Q = ∑ exp − β ε i + ε j + ε k + ε l .... = QI Q J QK QL .....
ijkl
La fonction de partition est le produit des fonctions de partition associées à chaque degré de
liberté. Sachant que les grandeurs thermodynamiques sont déduites de Log (Q ) , on voit
que les grandeurs liées au système sont la somme des grandeurs liées aux différents degrés
de liberté :
G = G I + G J + G K + G L .....
Cette indépendance des niveaux d’énergie est aussi utilisée lorsqu’on étudie un système de
particules sans interaction : l’énergie totale étant la somme des énergies individuelles, la
fonction da partition totale est le produit des fonctions de partition individuelles, les
grandeurs thermodynamiques sont les sommes des grandeurs individuelles.
5- Exemples :
1°)Gaz parfait :
Considérons un gaz parfait constitué de N particules dans un volume
température T . La fonction de partition d’une particule dans ce gaz est :
V,
à la
23
Q1 = ∑ exp(− βE s )
s
L’énergie d’une particule d’un gaz parfait est formée uniquement de l’énergie cinétique
(particule libre). Sachant que nous traitons des systèmes dans un volume macroscopique,
les niveaux d’énergie sont très serrés ; nous pouvons donc remplacer la sommation par une
3
intégration sur l’espace des phases permis, en comptant un état par volume h de l’espace
des phases. On a ainsi :
Q1 =
∫∫∫
d 3 pd 3 r
h3
exp(− βH ( p, q ))
Les particules d’un gaz parfait sont des particules libres ; leur hamiltonien H ( p, q ) a la
forme :
H ( p, q ) =
p2
2m
Ceci conduit à :
Q1 = ∫∫∫
d 3 pd 3 r
h3
⎛
p 2 ⎞⎟ V
exp⎜ − β
=
⎜
⎟ λ3
2
m
⎝
⎠
où :
λ=
h
2πmkT
est la longueur d’onde thermique moyenne d’une particule. C’est la longueur d’onde de De
Broglie d’une particule d’impulsion :
p = 2πmkT
et donc d’énergie cinétique :
EC =
p2
= πkT
2m
Cette énergie est proche de l’énergie cinétique moyenne d’une particule dans le gaz :
EC =
3
kT
2
La fonction de partition du système est égale au produit des fonctions de partition
individuelles car les particules sont indépendantes (système sans interactions) :
Q N = (Q1 )
N
⎛ V ⎞
=⎜ 3 ⎟
⎝ λ ⎠
N
Energie libre de Helmotlz :
⎛
⎛ V ⎞⎞
F = − kTLogQ N = − NkT ⎜⎜ Log ⎜ 3 ⎟ ⎟⎟
⎝ λ ⎠⎠
⎝
Energie interne :
E=−
∂LogQ N 3
= NkT
∂β
2
Pression :
P=−
∂F NkT
=
∂V
V
On retrouve ainsi l’équation d’état des gaz parfaits. L’entropie du système est donnée par :
S =−
⎛
∂F
⎛ V ⎞ 3⎞
= Nk ⎜⎜ Log ⎜ 3 ⎟ + ⎟⎟
∂T
⎝λ ⎠ 2⎠
⎝
24
Cette expression donne une entropie S qui n’est pas extensive; elle conduit au paradoxe
de Gibbs : la variation d’entropie quand on mélange deux systèmes de particules identiques,
dans les mêmes conditions ( N1 ,V1 , T ) et ( N 2 ,V2 , T ) avec
N1 N 2
=
V1 V2
n’est pas nulle.
En effet :
Entropie du système 1 :
N1 ,V1
⎛
⎛V ⎞ 3 ⎞
S 1 = N 1k ⎜ Log ⎜ 13 ⎟ + ⎟
⎝λ ⎠ 2⎠
⎝
N 2 ,V2
Entropie du système 2 :
⎛
⎛V ⎞ 3 ⎞
S 2 = N 2 k ⎜ Log ⎜ 23 ⎟ + ⎟
⎝λ ⎠ 2⎠
⎝
Entropie de la réunion des deux systèmes :
⎛
⎛ (V1 + V2 )
S = S1 + S 2 = ( N1 + N 2 )k ⎜ Log ⎜
⎜
⎜
λ3
⎝
⎝
⎞ 3⎞
⎟+ ⎟
⎟ 2⎟
⎠
⎠
La variation d’entropie lors de cette réunion est :
⎛ V + V2 ⎞
⎛ V + V2 ⎞
⎟⎟ + N 2 kLog ⎜⎜ 1
⎟⎟
ΔS = S − (S1 + S 2 ) = N1kLog ⎜⎜ 1
V
V
⎝
⎠
⎝
⎠
1
2
On constate que ΔS > 0 . Or, quand les particules sont identiques, la transformation est
réversible ; on doit donc avoir ΔS = 0 . Pour obtenir ceci, Gibbs a proposé d’utiliser pour
Q N l’expression empirique suivante :
1 ⎛V ⎞
QN = ⎜ 3 ⎟
N! ⎝ λ ⎠
N
On ne peut pas comprendre classiquement la présence du terme
1
. Il vient de
N!
l’indiscernabilité des particules, concept purement quantique (c’est le nombre de
permutations que l’on peut effectuer sur N particules discernables ; on divise donc par N !
car les particules sont indiscernables). L’utilisation de cette dernière expression de QN
conduit à :
⎡
⎛ V ⎞ ⎤
F = − NkT ⎢ Log ⎜⎜
⎟⎟ + 1⎥
⎝ Nλ 3 ⎠ ⎦
⎣
et à :
⎡
⎛ V ⎞ 5⎤
S = Nk ⎢ Log ⎜
⎟+ ⎥
⎝ N λ3 ⎠ 2 ⎦
⎣
L’entropie est ainsi extensive. La variation d’entropie pour le mélange des deux gaz
précédents est :
⎛ V +V ⎞
⎛V ⎞
⎛V ⎞
ΔS = ( N1 + N 2 )kLog ⎜⎜ 1 2 ⎟⎟ − N1kLog ⎜⎜ 1 ⎟⎟ − N 2 kLog ⎜⎜ 2 ⎟⎟ = 0
⎝ N1 + N 2 ⎠
⎝ N1 ⎠
⎝ N2 ⎠
car les systèmes se trouvant dans les mêmes conditions, on a ::
V1 V2
V +V
=
= 1 2
N1 N 2 N1 + N 2
Le paradoxe de Gibbs est ainsi levé.
25
2°)Solide :
Dans une version simplifiée, on représente un solide par un réseau cubique d’atomes
identiques, chaque atome étant un oscillateur harmonique à trois dimensions, de pulsation
ω . (modèle d’Einstein). Ces atomes sont localisés ; ils ne se mélangent pas ; ils sont donc
discernables. La fonction de partition d’un système de N atomes sans interactions est
donnée par :
Q N = Q13 N
où
Q1
est la fonction de partition d’un oscillateur à une dimension.
a) calcul classique :
La fonction de partition à une dimension s’écrit sous la forme :
dpdx − βH ( x, p )
e
h
L’hamiltonien d’un oscillateur harmonique de masse m et de pulsation ω est :
p2 1
H ( x, p ) =
+ mω 2 x 2
2m 2
Q1 =
∫∫∫
Ceci entraîne que :
Q1 =
1
kT
=
β=ω =ω
On en déduit l’expression de l’énergie moyenne :
E = 3 NkT
et de l’entropie :
⎡
⎛ kT ⎞ ⎤
S = 3 Nk ⎢ Log ⎜
⎟ + 1⎥
⎝ =ω ⎠ ⎦
⎣
La capacité calorifique à volume constant donnée par ce modèle est :
Cv = 3 Nk
C’est la loi de Dulong et Petit. Elle est valable seulement à haute température .
b) calcul quantique :
Les énergies d’un oscillateur harmonique à une dimension sont, dans le cas
quantique, données par :
1⎞
⎛
E n = ⎜ n + ⎟ =ω
2⎠
⎝
où l’indice n varie de 0 à l’infini, par pas de 1. Q1 a pour expression :
∞
∞
⎛ β=ω ⎞
Q1 =
exp(− βE n ) = exp⎜ −
⎟ exp(− nβ=ω )
2
⎝
⎠n = 0
n=0
∑
∑
On a ainsi une progression géométrique dont la somme est :
− β=ω / 2
Q1 =
L’énergie libre de Helmoltz
F
e
=
1 − e − β=ω
1
⎛ β=ω ⎞
2 sh⎜
⎟
⎝ 2 ⎠
vaut donc :
⎛
⎛ β=ω ⎞ ⎞
F = − kTLog (Q N ) = 3NkTLog ⎜ 2sh⎜
⎟⎟
⎝ 2 ⎠⎠
⎝
L’énergie moyenne du système est donnée par la relation :
26
⎛1
⎞
⎞
⎛ 1
exp⎜ β=ω ⎟ + exp⎜ − β=ω ⎟
∂Log (QN ) 3
⎝2
⎠
⎝ 2
⎠ = 3 N=ω coth⎛ 1 β=ω ⎞
= N=ω
E=−
⎜
⎟
∂β
2
2
⎛1
⎞
⎛ 1
⎞ 2
⎝
⎠
exp⎜ β=ω ⎟ − exp⎜ − β=ω ⎟
⎝2
⎠
⎝ 2
⎠
Dans le cas des hautes températures, nous avons : β=ω
<< 1 et l’énergie devient :
E = 3 NkT
et la chaleur spécifique :
Cv = 3 Nk
qui est l’expression de Dulong et Petit, en accord avec l’expérience dans le cas de hautes
températures.
A basse température, β=ω ;; 1 , on a :
E≈
3
N=ω (1 + 2 exp(− β=ω ))
2
La chaleur spécifique à volume constant a pour expression :
CV = 3 Nk (β=ω )2 exp(− β=ω )
que l’on peut écrire :
2
⎛ =ω ⎞
⎛ =ω ⎞
CV = 3Nk ⎜
⎟ exp⎜ −
⎟
⎝ kT ⎠
⎝ kT ⎠
3
Elle est en désaccord avec l’expérience (qui donne une variation en T ). L’hypothèse qui
consiste à considérer un solide comme un ensemble de 3 N oscillateurs harmoniques
indépendants, vibrant tous à la même pulsation ω , est trop grossière pour refléter la réalité.
On sait, en effet, que les atomes dans un solide sont couplés et que ce couplage induit tout
un spectre de pulsations (et non pas une seule pulsation comme supposé dans le modèle
précédent). Debye, en considérant des oscillateurs couplés dont la fréquence varie entre 0
et ω D , a retrouvé l’accord de la théorie avec l’expérience.
6 – Intégrales de gaussiennes :
On part de l’intégrale suivante :
∫ exp(− x
+∞
2
)dx =
π
−∞
Avec un changement de variable approprié, on peut montrer facilement que :
∫ exp(− αx
+∞
−∞
Par dérivations successives par rapport à
+∞
(
2
)dx =
π α −1 / 2
α , nous avons :
)
⎛ d ⎞
x 2 n exp − αx 2 dx = ⎜ −
⎟
dα ⎠
⎝
−∞
∫
n
( π α −1 / 2 )
Avec le résultat général :
+∞
(2n − 1)!!α − 2 − n
1× 3 × 5.... − 2 − n
α
x exp − αx dx = π
= π
2 × 2 × 2...
2n
−∞
Par exemple, pour n = 2 :
∫
2n
(
2
)
+∞
∫
−∞
1
(
)
x 4 exp − αx 2 dx =
3
π α −5 / 2
4
1
27
D’autre part, il est facile de voir que :
+∞
1
2
∫ x exp(− αx )dx = 2α
0
Par dérivations successives, par rapport à
+∞
∫x
0
2 n +1
(
α , nous avons :
)
n
⎛ d ⎞ ⎛ 1 ⎞ 1 n!
exp − αx dx = ⎜ −
⎟ ⎜
⎟=
⎝ dα ⎠ ⎝ 2α ⎠ 2 α n +1
2
Par exemple, pour n = 1 nous avons :
+∞
∫x
3
(
)
exp − αx 2 dx =
0
1
2α 2
7 – Progression géométrique :
Soit à calculer la somme:
S n = 1 + x + x + ..........x =
n
2
n
∑ xi
i =0
Les termes de cette somme constituent une progression géométrique de raison x .
On voit facilement que :
S n − S n x = 1 − x n +1
On en tire que :
Sn =
Si x < 1 , alors la limite : n → ∞
1 − x n +1
1− x
conduit à :
S→
car x n +1 → 0
1
1− x
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