Poly CECMV - Etat de choc - polys-ENC

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Polycopié National des Enseignants de Cardiologie / 2002-2003
CHOC SEPTIQUE, HEMORRAGIQUE,
CARDIOGENIQUE, ANAPHYLACTIQUE
Dr Jérôme Lacotte - Pr Jean-Luc Dubois-Randé
Fédération de Cardiologie - Hôpital Henri Mondor, Créteil
POINTS PRINCIPAUX
L'état de choc est défini comme une insuffisance circulatoire aboutissant à une hypoxie tissulaire.
D’un point de vue physiopathologique, ce défaut de perfusion tissulaire peut être du à :
- Une hypovolémie absolue dont le modèle est le choc hémorragique,
- Une hypovolémie relative par vasoplégie telle qu’on peut la constater dans un choc
anaphylactique,
- Une défaillance initiale de la pompe cardiaque, entraînant une chute du débit cardiaque comme
c’est le cas lors d’un choc cardiogénique.
Le choc septique répond à une physiopathologie beaucoup plus complexe, pouvant associer certains
des mécanismes précédents à un trouble majeur de la microcirculation responsable d'une mauvaise
distribution et donc d’une mauvaise utilisation de l'oxygène à l’étage tissulaire.
L’état de choc est dans tous les cas une urgence vitale, grevée d’un mauvais pronostic, justifiant un
diagnostic rapide basé sur la constatation d’anomalies de l'hémodynamique et de signes de
vasoconstriction cutanée. Outre les mesures symptomatiques (oxygénation, remplissage vasculaire,
drogues vaso-actives ou inotropes positives), le traitement devra avant tout être étiologique.
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I - ETIOLOGIES ET PHYSIOPATHOLOGIE
A - Choc cardiogénique
Il est caractérisé par la chute du débit cardiaque (index cardiaque < 2 l/mn/m2) responsable des
signes d’hypoperfusion tissulaire, associée à une augmentation des pressions en amont se traduisant
par l'apparition de signes congestifs gauches (crépitants) et/ou droits (turgescence et reflux hépatojugulaire, oedèmes des membres inférieurs). Dans ce cas, l'hypoxémie est consécutive à un défaut
d'apport en oxygène (d'où une différence artério-veineuse en oxygène élargie). Quatre mécanismes
physiopathologiques peuvent être à l’origine d’un choc cardiogénique :
1 - Baisse de la contractilité myocardique
C’est le cas le plus fréquent, consécutif à un infarctus avec nécrose étendue, à une décompensation
d’une cardiopathie dilatée hypokinétique (d'origine valvulaire, ischémique, hypertensive, toxique,
infectieuse, sinon primitive) ou à la prise de médicaments inotropes négatifs (bêtabloquants,
inhibiteurs calciques, anti-arythmiques, antidépresseurs tricycliques).
2 - Bradycardie ou tachycardie extrême
Il s’agit surtout des troubles du rythme ventriculaire, des tachycardies supraventriculaires
(fibrillation et flutter) avec réponse ventriculaire rapide et des bradycardies (blocs sino-auriculaires
ou auriculo-ventriculaires).
3 - Anomalie de l'écoulement sanguin intracardiaque
Ce sont des causes rares correspondant aux pathologies valvulaires chroniques et aiguës
(insuffisance mitrale par rupture de cordage spontanée, septique ou ischémique, insuffisance
aortique septique ou secondaire à une dissection aortique) et aux complications des prothèses
valvulaires (thrombose occlusive de prothèse mécanique, désinsertion, rupture d'une bioprothèse
dégénérée). De façon exceptionnelle, citons les ruptures septales post-infarctus, les myxomes et
thrombi auriculaires occlusifs.
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4 - Dysfonction ventriculaire droite
Trois formes particulières de choc cardiogénique sont secondaires à une dysfonction ventriculaire
droite aiguë : la tamponnade, l’embolie pulmonaire grave et l’infarctus du ventricule droit. Elles
seront diagnostiquées sur le contraste existant entre l’absence de signes d’oedème pulmonaire (sauf
dysfonction cardiaque gauche associée) et l’importance des signes d’insuffisance cardiaque droite.
B - Choc septique
La physiopathologie du choc septique est complexe, associant anomalies cardiaques et vasculaires
avec pour conséquence principale une distribution anormale du sang dans la microcirculation d'où
le terme de choc "distributif".
L'oxygène mal distribué dans les tissus est utilisé de façon hétérogène, ce qui explique que la
différence artério-veineuse en oxygène reste normale (contrairement aux autres types de chocs).
Ces troubles de la micro-circulation témoignent d'une réponse inflammatoire systémique résultant
de l'action de substances microbiennes (endotoxine libérée lors de la destruction bactérienne,
exotoxine sécrétée par la bactérie). Celles-ci provoquent la libération de médiateurs de
l'inflammation par le système immunitaire (cytokines, fractions du complément, kallicréine,
histamine, platelet activating factor, monoxyde d'azote) provoquant une dérégulation des débits
sanguins régionaux (atteinte de la micro-circulation), une vasodilatation artérielle et veineuse
(secondaire à l’atteinte des cellules musculaires lisses vasculaires) et une exsudation plasmatique
(lésions endothélium vasculaire). A ces conséquences vasculaires se surajoutent un effet inotrope
négatif direct, retardé, de mécanisme encore obscur.
De ce fait, deux phases se succèdent généralement dans un choc septique : l'une hyperkinétique
pendant laquelle l'augmentation du débit cardiaque arrive à compenser la baisse des résistances
vasculaires, l'autre hypokinétique, correspondant à la chute du débit cardiaque, consécutive à
l'action inotrope négative des médiateurs libérés par l'inflammation.
Tous les états septiques peuvent se compliquer d’un choc septique : pneumopathie, pyélonéphrite,
cholécystite… Toutefois, les germes les plus souvent impliqués sont les bacilles gram négatif dont
la lyse produit une endotoxine (lipopolysaccharide) et les cocci gram positif. Plus rarement il s’agit
d’anaérobies, de levures, de mycobactéries, de virus ou de parasites (plasmodium falciparum)
C - Choc hémorragique
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Il s’agit d’une hypovolémie absolue secondaire à une perte brutale et importante de masse sanguine
également responsable d’une anémie aiguë, les deux mécanismes participant à l’hypoxémie
tissulaire.
Le saignement peut être interne ou extériorisé : hémorragies digestives, traumatismes avec
hémothorax, hémopéritoine, hématome profond (splénique, hépatique, rétropéritonéal, du psoas).
D - Choc anaphylactique
Il est consécutif à une réaction anaphylactique importante et brutale (type 1 de la classification de
Gell et Coombs) survenant après contact avec un allergène auquel le sujet aura été préalablement
sensibilisé. Le choc est secondaire à la libération par dégranulation des cellules effectrices
(mastocytes et polynucléaires basophiles) après un contact allergène-IgE de puissants médiateurs
vasoplégiants (histamine, produits dérivés de l'acide arachidonique, prostaglandines, leucotriènes,
sérotonine, bradykinines).
La libération de ces substances vasodilatatrices engendre une chute brutale des résistances
vasculaires systémiques (d'ou hypovolémie relative) et une augmentation de la perméabilité
capillaire (hypovolémie absolue et oedèmes) entraînant un exsudat. Dans un premier temps, la
pression artérielle reste stable sous l'effet d'une augmentation du débit cardiaque par tachycardie.
Rapidement se constitue le choc, par baisse des pressions de remplissage et chute du débit
cardiaque.
Les allergènes à l’origine de cette réaction sont d’origine venimeuse (hyménoptères) ou
médicamenteuse : antibiotiques (béta-lactamines, sulfamides), curares.
Le choc anaphylactoïde est assez proche du choc anaphylactique puisqu’il est également consécutif
à la libération des mêmes substances vasodilatatrices.
Cependant cette libération ne se fait pas par le biais d’un contact allergène-anticorps mais par
l’action directe d’un toxique (ex : produit de contraste iodés).
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II – DIAGNOSTIC
A – Clinique
Le diagnostic d'état de choc sera porté sur l’association de signes :
- d’insuffisance circulatoire aiguë se traduisant par une hypotension artérielle (classiquement
pression artérielle systolique < 80 mmHg, avec différentielle pincée), une oligo-anurie (< 30
ml/h ou à 0.5 ml/kg/h) à confirmer par sondage vésical si besoin et une tachycardie avec pouls
filant. Ces données chiffrées (pression artérielle, diurèse, tachycardie) sont néanmoins à
nuancer : la tachycardie peut manquer en cas de prise de traitement bradycardisant, le choc peut
être patent malgré des chiffres de pression artérielle subnormaux chez un patient sévèrement
hypertendu d’habitude. Au cours de l’évolution du choc on peut aussi noter des troubles de la
conscience (confusion, agitation, désorientation) par hypoperfusion cérébrale, une polypnée
signant l’acidose métabolique (parfois aggravée par un oedème pulmonaire) ou une cyanose.
- de vasoconstriction cutanée : marbrures (débutant aux genoux, pouvant se généraliser), temps
de recoloration cutané allongé (> 3 secondes), extrémités froides (surtout dans le choc
cardiogénique), teint livide, sueurs.
La recherche d’une étiologie prendra en compte le contexte (polytraumatisme, douleur thoracique,
contact avec allergène, syndrome septique). Sont en faveur d'une origine :
- septique : fièvre, frissons, hypothermie, signes infectieux focalisés,
- hémorragique : pâleur cutanéo-muqueuse, hémorragie extériorisée ou occulte (touchers
pelviens systématiques ainsi que la recherche de sang dans le liquide gastrique), traumatisme de
l’hypochondre gauche (rupture de rate),
- cardiogénique : signes d'insuffisance cardiaque gauche et/ou droite, anomalie auscultatoire
(souffle, galop), phlébite, pouls paradoxal,
- anaphylactique : rash cutané (urticaire), oedème de Quincke, bronchospasme, dyspnée
laryngée, douleurs abdominales, nausées, vomissements.
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B - Paraclinique
Le diagnostic d'état de choc étant avant tout clinique, les examens paracliniques permettront surtout
d'apprécier le retentissement du choc et l'efficacité du traitement, de dépister les complications
(défaillance d'organes) et de confirmer les hypothèses diagnostiques.
Le bilan classique comprend :
- gaz du sang : acidose métabolique (alcalose respiratoire possible à la phase précoce) avec
hyperlactactémie (lactates > 2 mmol/l),
- ionogrammes sanguin et urinaire : insuffisance rénale fonctionnelle ou organique (nécrose
tubulaire) en rapport avec un « rein de choc »,
- cytolyse, cholestase hépatique dans le cadre d’un « foie de choc »,
- NFS-plaquettes : anémie (hémorragie, hémolyse), hyperleucocytose, neutropénie ou
thrombopénie (septique, allergique),
- TP-INR, TCA, fibrinogène : recherche d'une CIVD (choc septique ou anaphylactique surtout),
- enzymes cardiaques (CPK, Myoglobine, Troponine),
- dosage de la CRP et prélèvements bactériologiques (hémocultures réalisées rapidement au
rythme de 2 ou 3 à une heure d’intervalle, ECBU, prélèvements locaux),
- ECG et RP systématiques.
C - Exploration hémodynamique
Une exploration hémodynamique sera réalisée sauf choc hémorragique ou anaphylactique évident,
surtout s’il existe des arguments pour une cardiopathie sous-jacente (antécédents cardio-vasculaires,
anomalies cliniques ou électrocardiographiques, élévation enzymatique) ou lorsque la nature et les
mécanismes du choc sont incertains.
Elle se fait de plus en plus souvent en première intention par l’écho-doppler cardiaque
transthoracique ou transoesophagien qui permet de préciser la taille et la morphologie des cavités
cardiaques (notamment celle du VG), les fonctions diastolique et systolique (globale et
segmentaire) du VG, les pressions artérielles pulmonaires, l’état du péricarde, des valves et de
l'aorte initiale. De plus, elle permet d’apprécier l’index cardiaque et les pressions de remplissage
droites. Il s’agit donc d’un examen simple, non invasif, souvent disponible, renouvelable si besoin,
capable d’effectuer un bilan étiologique et hémodynamique quasiment exhaustif puisque seule la
pression capillaire pulmonaire ne peut être calculée.
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D’autres moyens existent mais nécessitent la pose d’un cathéter veineux central.
On peut dans un premier temps se contenter de monitorer la pression veineuse centrale (PVC) sur
un cathéter simple, notamment pour initier ou surveiller un remplissage vasculaire que l’on
proscrira en cas de pressions élevées. Pour un bilan hémodynamique complet on aura recours à un
cathétérisme cardiaque droit type Swan-Ganz nécessitant l’introduction d’un cathéter spécifique
dans les cavités cardiaques droites et dans l’artère pulmonaire. Celui-ci permet la mesure de la
PVC, des pressions artérielles pulmonaires (PAP), de la pression capillaire (Pcap ou PAPO), de
l’index cardiaque (IC), de la saturation veineuse en oxygène et de la température centrale. Ses
indications sont de plus en plus restreintes depuis l’utilisation large de l’échographie cardiaque et
sont réservées au diagnostic et à la surveillance thérapeutique des états de choc complexes, mixtes
(choc septique sur cardiopathie dilatée par exemple) ou rebelles au traitement afin d’orienter au
mieux la thérapeutique (remplissage, drogues inotropes…).
Le tableau n°1 reprend les caractéristiques hémodynamiques des différents types de choc.
III – TRAITEMENT
A - Prise en charge initiale
Outre l’admission en réanimation, elle comprend la pose de une ou deux voies veineuses
périphériques ainsi que d’une voie veineuse centrale (sauf choc anaphylactique simple)
indispensable pour assurer un bon débit de perfusion (nécessaire lors d’un remplissage) et parfois
requise pour un cathétérisme cardiaque droit. Le sondage urinaire est indispensable dès lors que la
diurèse ne peut être quantifiée de façon fiable et permet par ailleurs de pouvoir l’apprécier heure par
heure. Plus rarement, on met en place un cathéter artériel (« artère sanglante ») en position radiale,
sinon fémorale. Cela est tout particulièrement indiqué en cas d’instabilité tensionnelle (choc
septique ou cardiogénique) nécessitant une adaptation très fréquente des posologies de drogues
inotropes ou vasopressives.
La correction de l’hypoxémie se fera, selon l’importance et la nature du choc, tantôt par une
oxygénothérapie nasale, tantôt par une ventilation assistée (invasive ou non). Dans l’hypothèse
d’une intubation, le patient sera bien sûr laissé à jeun à la phase initiale de la prise en charge.
Parallèlement sera réalisé un bilan sanguin classique (NFS-plaquettes, ionogramme sanguin, INRTCA, enzymes cardiaques et hépatiques, détermination du groupe sanguin, recherche d'agglutinines
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irrégulières, gaz du sang, lactates), des prélèvements bactériologiques si l’on suspecte un choc
septique, un électrocardiogramme et un cliché thoracique au lit.
Les mesures diagnostiques et thérapeutiques spécifiques à chaque type de choc seront menées
simultanément.
B - Traitement du choc cardiogénique
Il est avant tout étiologique : angioplastie à la phase aiguë d’un infarctus du myocarde, fibrinolyse
voire embolectomie chirurgicale pour une embolie pulmonaire mal tolérée, ponction ou drainage
péricardique d’une tamponnade.
Il faudra de plus systématiquement corriger d’éventuels facteurs aggravants : arrêt des traitements
inotropes négatifs, bradycardisants ou hypotenseurs, mise en place d'une sonde d'entraînement
électro-systolique pour corriger une bradycardie, réduction d'un trouble du rythme rapide par
cardioversion électrique ou médicamenteuse.
A l’inverse, il est inutile de corriger une acidose, qui n’est que le reflet de l’inefficacité circulatoire,
sauf en cas d’hyperkaliémie symptomatique. De la même façon, il n’est pas recommandé
d’effectuer un remplissage vasculaire plus souvent délétère (aggravation ou révélation d’un oedème
pulmonaire) qu’utile. Il ne se fera qu’en l'absence de signes congestifs pulmonaires, sous
surveillance très rapprochée (auscultation pulmonaire, saturation, pression capillaire pulmonaire si
besoin), très prudemment (100 à 200 ml de colloïdes sur 20 minutes) uniquement lorsqu’on
suspecte une hypovolémie (par exemple consécutive à un traitement diurétique ou vasodilatateur
préalable), ce qui est très rare à la phase initiale d’un choc cardiogénique. Les seuls cas où le
remplissage s’envisage de manière abondante et rapide sont les chocs cardiogéniques par
défaillance ventriculaire droite (embolie pulmonaire, tamponnade, infarctus du ventricule droit).
Le traitement symptomatique fera appel à un sympathomimétique à effet ß1+ dominant
(dobutamine, dopamine, isoprénaline, adrénaline). La dobutamine (dobutrexR) est le plus souvent
utilisée en raison d'un effet inotrope positif plus puissant et d'effets délétères moindres, c'est à dire
(cf. tableau n°2) : tachycardie minime ou modérée, arythmogénicité faible, baisse des pressions
artérielles pulmonaires et capillaires avec globalement une faible augmentation de la consommation
en oxygène du myocarde. La dobutamine est généralement débutée à faibles doses (5µg/kg/mn en
intraveineux continu), augmentée progressivement par paliers de 2.5 à 5µg/kg/mn, jusqu'à obtention
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d'une réponse hémodynamique correcte (PAM > 70 mmHg, disparition des marbrures, diurèse > 60
ml/h), sous surveillance continue de la tension artérielle et du rythme cardiaque au cardioscope.
Certains l’associent à la dopamine à dose « rénale » (5 µg/kg/mn) afin d’obtenir un effet diurétique.
L’intérêt de cette association n’a jamais été démontré cliniquement.
Les inhibiteurs des phosphodiestérases (énoximone, milrinone), ne sont quasiment plus utilisés de
même que les digitaliques qui sont peu maniables (index thérapeutique faible, effets arythmogènes
aggravés par l'hypoxie) et beaucoup moins efficaces que les sympathomimétiques.
Une assistance circulatoire sera proposée lorsque l'état de choc est rebelle à un traitement bien
conduit sous réserve de l’absence de tare ou d’un âge physiologique avancé. Les solutions
actuellement proposées sont :
- la contre-pulsion intra-aortique : ballon positionné par voie artérielle rétrograde dans l'aorte
descendante (abord fémoral au Scarpa), en aval de l'émergence de la sous-clavière gauche, relié
à une pompe externe, synchronisé au cycle cardiaque (par ECG ou pression intra-aortique), qui
se gonfle en diastole (améliore la perfusion cérébrale et coronaire) et se dégonfle en systole
(chute brutale de la post-charge) d'où augmentation du débit et diminution du travail cardiaque,
- le coeur artificiel externe sous différentes formes (assistance uni ou biventriculaire),
- la greffe cardiaque.
C - Traitement du choc septique
Il a fait l'objet de nombreuses conférences de consensus récentes (cf. recommandations de la SRLF
1998). Sa gravité justifie un traitement agressif et rapide comprenant avant tout un traitement antiinfectieux (antibiothérapie, exclusion du foyer septique et traitement de la porte d'entrée) associé à
un remplissage vasculaire « systématique » ainsi qu’à un traitement vasopresseur et parfois inotrope
positif.
L’antibiothérapie sera débutée après réalisation des prélèvements bactériologiques (deux ou trois
hémocultures réalisées à une heure d’intervalle, ECBU, prélèvements d’une porte d’entrée), par
voie parentérale. Elle sera double ou triple, synergique et bactéricide sur les germes suspectés et
sera secondairement adaptée aux résultats des prélèvements bactériologiques. Le plus souvent, elle
comprend un aminoside associé à une béta-lactamine ou à une céphalosporine.
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Le remplissage vasculaire est l’étape initiale et obligatoire à la restauration d'une volémie et d'une
pression de perfusion efficace. Classiquement on préfère un colloïde à un cristalloïde, du fait d’un
pouvoir d’expansion volémique plus important plus prolongé et plus stable dans le temps, par
exemple : plasmionR ou équivalent, 500 ml/20 minutes, à répéter selon la tolérance et réponse
hémodynamique obtenue en ne dépassant pas la dose quotidienne de 30 ml/kg. Une transfusion
érythrocytaire sera envisagée si l’hématocrite chute en dessous de 30 % (voir de 25 % chez un sujet
cardiaque).
Le choix du traitement vasopresseur ou inotrope a été longtemps sujet à discussion. Son objectif est
de corriger la vasoplégie (effet +) et le défaut d'inotropisme (effet ß+). Les trois molécules les plus
utilisées (cf. tableau n°2), seules ou en association, sont la noradrénaline (+), la dopamine (dopa+,
+, ß+) et la dobutamine (ß+). Le choix dépend de la situation hémodynamique, en sachant que la
situation est mixte le plus souvent : noradrénaline ou dopamine en phase hyperkinétique, associées
à la dobutamine en phase hypokinétique.
Une exploration hémodynamique est souvent utile pour optimiser le traitement (remplissage,
catécholamines) lorsque le choc n’évolue pas rapidement de façon favorable.
D’autres traitements ont été proposés : les corticoïdes à faibles doses (en cours d'évaluation), les
inhibiteurs de la NO synthétase (en cours d'évaluation), le bleu de méthylène (efficacité non
prouvée), les anticorps anti-interleukine ou TNF (pas d’efficacité démontrée).
D - Traitement du choc hémorragique
L’urgence est avant tout de rétablir une volémie efficace et d’assurer une oxygénation satisfaisante,
l’objectif étant de maintenir un hématocrite supérieur à 25 %. Les schémas thérapeutiques sont
basés sur l’estimation de la masse sanguine perdue, souvent très difficile à estimer.
Dans le cas d'un polytraumatisme, il faudra veiller à disposer d'un accès veineux de gros calibre
dans le territoire cave supérieur et inférieur (en cas de rupture d'un tronc veineux).
Pour une perte de sang inférieure à 25 % de la masse sanguine totale, on se contente de rétablir la
volémie par administration de colloïdes (plasmionR ou équivalent) ou cristalloïdes (Ringer lactate) à
hauteur de 500 ml sur 20 mn (à renouveler selon l’effet obtenu). Entre 25 et 50 % de masse
sanguine totale perdue, le remplissage proposé ci-dessus sera associé à une transfusion
érythrocytaire, dont le volume (en ml) sera calculé selon une des formules suivantes : (hématocrite
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souhaité - hématocrite observé) * poids (kg) ou (hémoglobine souhaitée – hémoglobine observée) *
poids (kg) * 3.5, en sachant qu’un culot érythrocytaire de 250 ml augmente de 1.2 point
l’hémoglobinémie et de 3% l’hématocrite chez un adulte de 60 kg.
Au-delà de 50 % de masse sanguine totale perdue, il faudra bien sûr rétablir la volémie et
l’oxygénation selon les mêmes principes mais aussi corriger les troubles de la coagulation induits
par la transfusion grâce à des apports de facteurs de coagulation par plasma viro inactivé
(anciennement plasma frais congelé).
La prise en charge comprendra également le traitement de la lésion hémorragique, la correction d'un
trouble de la coagulation (AVK, héparine, hémophilie) ou de l'hémostase (transfusion plaquettaire)
et le dépistage des complications potentielles d’une transfusion érythrocytaire massive :
hypocalcémie, hyperkaliémie, coagulopathie de dilution, hémolyse, oedème pulmonaire.
E - Traitement du choc anaphylactique
Le traitement du choc anaphlyactique est basé sur l’administration précoce d’adrénaline
parallèlement à la suppression du contact avec l’allergène. L’adrénaline qui corrige la vasoplégie
(effet +), la bronchoconstriction (effet ß2+) et renforce l'inotropisme par l'effet ß1+, sera d'autant
plus efficace qu'administré tôt. On préconise de diluer 0.5 à 1 mg d’adrénaline dans 10 ml de sérum
physiologique à titrer ml par ml en intraveineux direct, sinon en sous-cutané ou en intramusculaire
(agit moins vite avec risque de nécrose cutanée au point d'injection) à l'aide d'un kit auto-injecteur
(anakitR anahelpR). Cette dose sera répétée au besoin toutes les 5 minutes voire relayée en
intraveineux continu en cas de choc anaphylactique sévère.
Un remplissage vasculaire rapide (500 ml de colloïdes sur 10 mn) sera très souvent adjoint à
l’adrénaline. Par contre il est inutile d’administrer des corticoïdes à
la phase aiguë, étant donné leur délai d'action. Ils sont parfois prescrits pour éviter les réactions
oedémateuses survenant ultérieurement.
Au décours de l’épisode aigu, on n’omettra pas de remettre au patient une liste des substances ou
médicaments auxquels il est allergique, de programmer une désensibilisation si elle est possible et
de lui recommander le port d'un kit d'adrénaline auto-injectable.
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F - Surveillance et dépistage des complications
L’insuffisance circulatoire est susceptible d’entraîner, dès lors qu’elle se prolonge, de nombreuses
défaillances d’organe (insuffisance rénale, hépato-cellulaire, CIVD…) et peut même aboutir à un
syndrome de défaillance multiviscéral (SDMV), de pronostic extrêmement péjoratif. Les autres
complications sont essentiellement liées au décubitus et aux traitements entrepris (escarres,
thrombose veineuse, complications en rapport avec les cathéters et les sondes).
Au plan clinique, on surveillera (toutes les heures initialement) :
- L’état de conscience,
- Les paramètres hémodynamiques : fréquence cardiaque (cardioscope), pression artérielle
(idéalement PAM > 70 ou PAS > 90 mmHg), diurèse (> 60 ml/ml), signes d'insuffisance
cardiaque gauche ou droite (surtout en cas de remplissage),
- Les paramètres respiratoires : fréquence respiratoire et SaO2 (oxymètre de pouls),
- La régression des signes cutanés de vasoconstriction (marbrures),
- La température, de façon plus espacée.
La surveillance paraclinique dépend surtout de la nature et de l’évolution de l’état de choc. Les
principaux paramètres à surveiller sont :
- La correction acidose et de l’hypoxie, la normalisation des lactates,
- Le dépistage biologique des défaillances d'organes (rein, foie, coeur),
- La stérilisation des prélèvements bactériologiques (choc septique),
- La radiographie thoracique (OAP, position sondes et cathéter),
- L’ECG.
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Tableau n°1
Caractéristiques hémodynamiques des états de choc
PVC
PCap
IC
0-8
mmHg
4 - 12
mmHg
2,8 - 4,2
ml/mn/m 2
basse
basse
élévé
basses
diminuée
Septique phase
hypokinétique
basse
basse ou
normale
bas
basses
diminuée
Hémorragique
effondrée
basse
bas
élevées
augmentée
Cardiogénique
élevée
élevée
bas
élevées
augmentée
Anaphylactique
basse
basse
élevé
basses
augmentée
Normales
Septique phase
hyperkinétique
RVS
DAVO2
800 - 1200 4-6 ml d'O2/l
dynes/s/cm5
PVC =.......................... Pression veineuse centrale ou auriculaire droite,
PCap = ......................... Pression capillaire pulmonaire,
IC = ............................. Index cardiaque = Débit cardiaque / surface corporelle,
RVS = ......................... Résistances vasculaires systémiques = (PAM-PVC)/IC*80,
DAV02 = ..................... Différence de contenu artério-veineux en oxygène
(Contenu artériel en oxygène = (Sa02*Hb*1,34)+PaO2*0,003).
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Tableau n°2
Effets hémodynamiques des sympathomimétiques
Dobutamine
ß1+++/ ß2+
Dopamine
dopa puis ß++ puis ++
Noradrénaline
ß1++/+++
Adrénaline
1+++/2+/+++
Inotropisme
FC
Bathmotropisme
PA
PCap
RVS
+++
+
+
=
-
-
++
++
++
+
+
+
+
+
+++
+++
=
+++
+++
+
+++
+
+
+
FC : .............................. fréquence cardiaque,
PA : ............................. pression artérielle,
Pcap : ........................... pression capillaire,
RVS : ........................... résistances vasculaires systémiques.
En résumé : la dobutamine est l'inotrope le plus "pur", augmentant peu la consommation en
oxygène du myocarde (car jouant faiblement sur la pression artérielle et sur la fréquence cardiaque)
et présentant moins d'effets arythmogènes. C'est le traitement de choix du choc cardiogénique (5 à
20 µg/kg/mn). La dopamine, dont les propriétés sont très variables selon la dose, est surtout utilisée
dans le choc septique à doses  et  stimulantes (10 à 30 µg/kg/mn), afin de corriger la chute
tensionelle et la baisse du débit cardiaque. La noradrénaline a elle aussi des effets mixtes cardiaques
et vasculaires, surtout intéressants dans le choc septique en phase hyperkinétique.
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