Introduction – Les 6 propriétés fondamentales des tumeurs

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C21-22, Pr. PANCREACH
Cours du 07/10/11 de 16h à 18h Master Physiopathologie Cellulaire & Moléculaire
DCEM 1 DELMAS Nicolas et FAUDI Emilien
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Le microenvironnement tumoral
Introduction Les 6 propriétés fondamentales des tumeurs
En 2000, une publication de Hanahan et Weinberg dans Cell, fait l’état des lieux en cancérologie.
A l’époque l’essentiel des travaux sont focalisés sur les cellules tumorales et cette publication décrit
les 6 propriétés fondamentales des tumeurs :
1) Maintien d’un niveau élevé de prolifération et indépendance vis-à-vis des signaux de
prolifération.
2) Insensibilité aux signaux antiprolifératifs (en particulier ceux générés par les suppresseur de
tumeurs RB ou P53).
3) Invasion et métastases.
4) Capacité à se diviser indéfiniment sans entrer en sénescence.
5) Induction de l’angiogenèse.
6) Résistance à la mort cellulaire.
Mais dans cet article on trouve très peu d’information sur le microenvironnement tumoral car assez
peu de choses étaient connues. Au cours des 10 dernières années il y a eu une explosion de la
recherche dans ce domaine.
Cette notion de microenvironnement tumoral (environnement de la tumeur) avait déjà été soulignée à
la fin du XIXième siècle par un chirurgien, Stephen Paget, qui avait développé la théorie du « seed and
soil » c'est-à-dire la théorie de la graine et du sol. La graine étant la cellule cancéreuse et le sol son
microenvironnement.
De ses travaux, en particulier sur des cropsies, il déduit qu’il ne peut pas y avoir de hasard, pour
qu’une tumeur pousse (comme une graine puisse se développer) il fallait qu’elle ait un environnement
favorable (qu’elle pousse sur le bon sol).
Sa démarche :
Il réalise 735 nécropsies sur des patientes atteintes d’un cancer du sein.
*241 patientes ont des métastases hépatiques.
*17 patientes ont des métastases spléniques.
Donc dans une très forte majorité des cas les métastases sont hépatiques. A l’époque on se
concentre sur la vascularisation (vaisseaux sanguins et lymphatiques) pour expliquer la localisation
des métastases. Il montre ici qu’entre ces deux organes il y a un très gros déséquilibre qui ne peut
pas s’expliquer par une différence de vascularisation ou de réseau lymphatique.
Sa conclusion :
Il existe des profils d’organes cibles non aléatoires.
L’environnement doit être favorable au développement de la tumeur et donc à la colonisation.
Le profil seul de la cellule métastatique ne suffit pas.
(la cellule tumorale ne va pas métastaser n’importe ou, il lui faut un environnement favorable pour
qu’elle s’arrête et colonise le milieu)
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Publication de Hanahan et Weinberg (2011)
Cette fois ils s’intéressent à la question du microenvironnement tumoral.
Conclusion :
Le microenvironnement tumoral est évolutif, il n’y a pas un seul microenvironnement tumoral. Au
cours de la vie de la tumeur on va avoir un microenvironnement qui permet le développement initial de
la tumeur, mais la tumeur, qui participe au développement de ce microenvironnement, va participer à
sa modulation et à son remaniement profond. Il va évoluer jusqu’à favoriser les processus invasifs et
métastatique, ce qui suppose un remaniement profond de ce microenvironnement par la cellule
tumorale et un ensemble d’acteur.
Le microenvironnement peut totalement changer, en particulier lorsque la cellule tumorale va migrer à
distance et se retrouver dans une niche secondaire ou niche métastatique. (Exemple : une cellule du
colon migre dans le foie. Le microenvironnement qu’elle va trouver au niveau du foie et différent de
celui du colon.)
Au cours de la progression de la maladie, l’environnement tumoral va lui même évoluer et les cellules
tumorales participent activement à ce remodelage.
- Qu’est ce que le microenvironnement tumoral ?
On peut envisager la tumeur comme un organe complexe (plus complexe qu’un organe sain).
Le microenvironnement fait intervenir différents acteurs qui vont interagir avec les cellules tumorales
et les différents acteurs vont agir entre eux pour favoriser la croissance tumorale, l’invasion et la
formation de métastases.
Les acteurs :
- Les cellules endothéliales (partie vasculaire)
- La matrice extracellulaire
- Les fibroblastes (forment le stroma tumoral, différents des fibroblastes physiologiques)
- Ensemble de cellules du système immunitaire (avec un aspect qui concerne l’immunité innée
et l’immunité adaptative)
Il existe une balance qui peut inhiber ou favoriser la croissance tumorale.
Plan du cours
1. Cellules endothéliales et péricytes : architecture vasculaire er reprogrammation métabolique
2. Fibroblastes associés aux tumeurs
3. La matrice extra-cellulaire
4. Les cellules immunitaires : antagonistes et promoteur de la croissance tumorale
5. Une vision « intégrée » du rôle du microenvironnement dans le processus métastatique
6. Perspective : microenvironnement tumoral et ciblage thérapeutique
I) La vascularisation et l’angiogenèse tumorale
1) Le « switch angionique »
- Dans le processus très précoce de formation des tumeurs (jusque 1-2 mm3), la tumeur naissante
peut se passer de vascularisation. Les vaisseaux qui passent naturellement dans l’organe ou se
développe la tumeur, vont permettre par simple diffusion d’apporter de l’oxygène et des nutriments
aux cellules tumorales. Donc quand la cellule est microscopique la néo-angiogenèse n’a pas de raison
d’être activée de façon très puissante. Certaines publications démontrent que dès l’état de quelques
cellules transformées les cellules prévoient déjà leur capacité à croitre et à se multiplier et
programment déjà un « switch angiogénique » (cela concerne les tumeurs solides et les tumeurs
d’origine hématopoïétique).
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- La vascularisation sert à apporter l’oxygène et les nutriments mais aussi à l’élimination des déchets
métaboliques (acides organiques) et du CO2.
- L’angiogenèse tumorale reproduit des mécanismes physiologiques. Physiologiquement (ex : pendant
l’embryogenèse) il y a des mécanismes qui vont permettre deux types de production de vaisseaux :
*La vasculogenèse = formation de tubes de novo, à partir de rien on forme des tubes vasculaires avec
des cellules endothéliales.
*L’angiogenèse = formation de vaisseaux à partir de bourgeons sur des vaisseaux existants
(processus de néovascularisation des tumeurs mais ce processus existe aussi physiologiquement).
- Chez l’adulte sain, cette angiogenèse existe également (exemple : cicatrisation, grossesse).
La production de vaisseaux par des mécanismes d’angiogenèse est très régulée et dans une situation
normale, une fois que l’enfant grandit, l’architecture vasculaire est globalement quiescente (elle reste
dans l’état dans lequel elle a été produite initialement).
- Dans les tumeurs, activation constante de l’angiogenèse
Dans toutes les tumeurs de façon plus ou moins importante on va avoir une activation de
l’angiogenèse.
Quand une tumeur prolifère elle nécessite en permanence de l’oxygène et des nutriments (production
d’énergie) donc pour pouvoir grossir il faut que la cellule induise ce switch angiogénique pour que les
vaisseaux puissent lui apporter ce dont elle a besoin.
Les facteurs qui interviennent au cours de ce processus :
*facteurs pro-angiogéniques, ex : VEGF-A, PDGF, angiopoiétines
*facteurs anti-angiogéniques (produit de façon physiologique), ex : TSP-1, angiostatine, endostatine
Il y a donc un déséquilibre entre la production de facteurs pro- et anti-angiogéniques qui vont
déterminer l’intensité de l’angiogenèse donc la néovascularisation tumorale.
- Le switch angiogénique serait activé de façon très précoce.
2) Rôle du VEGF et de ses récepteurs (VEGFR1, VEGFR2, VEGFR3)
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Il y a une famille de facteurs VEGF, ex : VEGF-A a un rôle central dans l’angiogenèse tumorale mais il
existe aussi le VEGF-B, VEGF-C… qui vont agir sur différents types de récepteurs comme VEGFR1,
VEGFR2, VEGFR3. Différentes sous populations cellulaires possèdent à leur surface certains
récepteurs qui sont exprimés.
En fonction des récepteurs à la surface des cellules endothéliales surtout, mais aussi à la surface des
cellules tumorales, et du ligand qui va se lier à ce récepteur, la signalisation (via VEGF) va induire
différents types de processus : augmentation de la perméabilité vasculaire avec une déstabilisation de
l’architecture vasculaire, induction d’un signal de prolifération, induction d’un signal de survie,
induction d’un signal de migration, induction de la mobilisation de progéniteurs d’origine
hématopoïétique.
Une partie du mécanisme de l’angiogenèse est produit à partir de progéniteurs endothéliaux qui se
trouvent dans la moelle osseuse. Ces progéniteurs vont pouvoir être appelés par les tumeurs qui vont
produire de VEGF qui va être relargué dans la circulation et qui va induire un signal d’appel pour ces
progéniteurs endothéliaux pour permettre de former la vascularisation tumorale.
3) Mécanismes de l’angiogenèse
Publication de G. Bergers
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Les vaisseaux sont constitués :
*de cellules endothéliales (structure de base des vaisseaux)
*de pericytes (autour des cellules endothéliales qui vont donner la stabilité à la structure vasculaire)
*d’une membrane basale (entre ces deux types cellulaires, qui constitue une barrière physiologique
naturelle et est constituée de composants de la matrice extra cellulaire)
Quand on est dans un processus de type cancéreux (croissance tumorale) ou il y a activation du
switch angiogénique, il va y avoir un remaniement très profond qui aboutit à de la néoangiogenèse par
différents mécanismes.
Le mécanisme le plus connu est le bourgeonnement (production de nouveaux vaisseaux à partir de
vaisseaux existants):
A partir d’un vaisseau normal, la cellule tumorale va produire des facteurs (ex : VEGF-A, les
angiopoïétines) qui vont avoir pour effet de déstabiliser les pericytes. Ceci va permettre l’ouverture de
brèches au niveau de l’endothélium vasculaire et quand les cellules endothéliales (qui vont donner
naissance au futur bourgeonnement) vont être libérées entre les pericytes, les signaux produits par
les cellules tumorales (ex : VEGF) vont permettre la prolifération des cellules endothéliales et
permettre la formation de nouveaux capillaires. Ce sont des néovaisseaux qui constituent la
néovascularisation nécessaire à la tumeur pour se nourrir et recevoir de l’oxygène.
Cette néovascularisation, qui résulte d’un très fort déséquilibre dans les facteurs pro- et anti-
angiogéniques produit par la tumeur, va aboutir (après la formation de ces nouveaux tubes) à la
production de capillaires qui ont une architecture aberrante.
Le fait qu’il y ait une production excessive de facteurs pro-angiogénique qui ne sont pas
contrebalancés par des facteurs permettant d’arrêter le processus d’angiogenèse (facteurs anti-
agiogéniques) entraine une activation permanente du switch angiogénique et la production de
vaisseaux anormaux.
- Ce qu’on sait aujourd’hui :
1. Le VEGF-A via le récepteur VEGFR2 va avoir un rôle dans la prolifération des cellules
endothéliales pour la formation des tubes vasculaires (néovaisseaux).
2. Le VEGF-A via le récepteur VEGFR1 va permettre la formation architecturale des tubes,
l’assemblage des cellules endothéliales pour former les tubes.
3. L’angiopoïétine1 (Ang1) via le récepteur Tie2 va permettre le recrutement et la maturation des
pericytes.
4. L’angiopoïétine2 via le récepteur Tie2 va avoir un effet opposé, elle va déstabiliser
l’endothélium.
Comme la cellule tumorale produit ces facteurs en grande quantité, il va y avoir une
compétition entre le recrutement/maturation des pericytes et la déstabilisation des pericytes
qui va entrainer une architecture tumorale anormale et lacunaire.
Il existe d’autres mécanismes d’angiogenèse, également mit en œuvre au cours du processus
tumoral, qui sont : l’intussusception et la septation.
Ce sont des endobourgeonnements, les cellules endothéliales vont former des septas à l’intérieur des
tubes, ce qui va permettre de multiplier les vaisseaux par l’intérieur.
C’est un processus totalement différent mais qui pourrait expliquer pourquoi quand on cible par des
approches thérapeutiques le bourgeonnement par des anticorps antiVEGF-A, il peut y avoir des
échappements thérapeutiques par la mise en action de mécanismes secondaires de type
intussusception et septation pour la production d’une néovascularisation.
L’agiogenese tumorale génère une architecture vasculaire aberrante :
*Les formes et les branchements des vaisseaux sont irréguliers, tortueux.
*Les vaisseaux sont discontinus et lacunaires (zone avec des trous : manque de péricytes ou de
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