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Chapitre 2 : Offre, demande, prix :
L’équilibre sur le marché concurrentiel
Après avoir détaillé les comportements du consommateur et du producteur dans une logique
microéconomique, il convient de poursuivre l’analyse en montrant comment les décisions
individuelles conduisent à l’échelle d’un marché (ou d’une branche) à la formation d’une
offre et d’une demande collectives. Par un processus d’agrégation des comportements
individuels, il est en effet possible de déterminer le comportement de l’ensemble des agents
acheteurs et vendeurs. À partir de là, en situation de concurrence, apparaît un prix d’équilibre
sur le marché auquel est associée une quantité d’équilibre qui maximise l’utilité des offreurs
et des demandeurs, conformément aux hypothèses de la microéconomie. Cet équilibre partiel
(qui concerne un seul marché) ne permet pas de conclure quant à l’évolution d’une économie
dans son ensemble, puisque les nombreux marchés sont dans les faits interdépendants. Pour
cette raison, les économistes utilisent l’équilibre général.
Plan :
I) La courbe de demande et la courbe d’offre sur un marché..................................................... 2
A) La construction de la courbe demande et le surplus du consommateur ............................ 2
1) Qu’est-ce qu’une courbe de demande ? ......................................................................... 2
2) La construction d’une courbe de demande .................................................................... 2
3) Le déplacement de la courbe de demande ..................................................................... 6
4) Le surplus du consommateur ....................................................................................... 10
B) La construction de la courbe d’offre et le surplus du producteur .................................... 12
1) Qu’est-ce qu’une courbe d’offre ? ............................................................................... 12
2) La construction de la courbe d’offre ............................................................................ 13
3) Le déplacement de la courbe d’offre individuelle ....................................................... 21
4) Le surplus du producteur ............................................................................................. 22
II) L’équilibre de marché en situation concurrentielle ............................................................. 26
A) Les hypothèses de la concurrence pure et parfaite .......................................................... 26
B) La détermination de l’équilibre de marché...................................................................... 27
C) De l’équilibre partiel à l’équilibre général ...................................................................... 30
Mots- clés : équilibre du consommateur, courbe de demande individuelle, courbe de demande
de marché, déplacement sur/de la courbe de demande, courbe de consommation-revenu, biens
substituables, biens complémentaires, le surplus du consommateur, surplus agrégé des
consommateurs, équilibre du producteur, la courbe d’offre individuelle, la courbe d’offre de
branche, rendements factoriels, rendements d’échelle, économies d’échelle, déséconomies
d’échelle, surplus du producteur (en courte/longue période), surplus total des producteurs de
la branche, profit économique, profit comptable, coût d’opportunité, concurrence pure et
parfaite, price taker/price maker, mécanisme de marché, équilibre du marché (courte/longue
période), équilibre partiel, équilibre général, loi des débouchés, équilibre walrassien,
théorème d’Arrow et Debreu, Théorème de Sonnenschein-Mantel-Debreu.
1
I) La courbe de demande et la courbe d’offre sur un marché
A) La construction de la courbe demande et le surplus du consommateur
À partir de la théorie des courbes d’indifférence (vue précédemment), on peut déduire deux
« lois » de comportement de la demande pour un individu :
• La demande d’un bien (« normal ») est une fonction décroissante de son prix,
c’est-à-dire que lorsque prix d’un bien augmente, la demande formulée pour ce bien
par les consommateurs diminuent.
• La demande est une fonction croissante du revenu, c’est-à-dire que si le revenu
d’un agent économique augmente, la demande qu’il exprime va augmenter.
Ces deux « lois » donnent le sens de la relation entre la demande, d’une part, et le revenu et
les prix, d’autre part, mais ne disent rien de l’intensité de cette relation. Pour mesurer cette
intensité, on utilise le concept d’élasticité (élasticité-prix, élasticité-revenu, élasticité croisée)
que nous verrons plus tard.
Le comportement d’un seul individu est certes intéressant, mais l’économie essaie de
comprendre le fonctionnement des marchés sur lesquels se rassemblent un grand nombre
d’agents économiques, afin de déterminer la demande totale d’un bien. Toutefois, si l’on
considère que tous les individus présents sur un marché sont soumis aux mêmes contraintes
de prix et qu’en général la demande d’un agent n’a pas d’influence sur la demande d’un autre
agent (hypothèse qu’il est possible de discuter), alors la demande totale de ce bien pour un
prix donné est la somme des demandes individuelles à ce prix. Le procédé d’agrégation des
comportements individuels permet ainsi facilement de passer de l’expression d’une demande
individuelle à la formulation de la demande totale sur le marché
1) Qu’est-ce qu’une courbe de demande ?
La courbe de demande individuelle montre la quantité de biens que les consommateurs
sont prêts à acheter quand le prix unitaire change. Le prix est représenté sur l’axe des
ordonnées et les quantités demandées apparaissent sur l’axe des abscisses. La relation peut
s’écrire de la façon suivante : QD = QD(P).
Cette courbe est décroissante ou de pente négative (la dérivée première de la fonction de
demande liant quantité et prix est négative), puisque les consommateurs sont disposés à
acheter davantage d’un bien, lorsque son prix diminue. [Bien sûr la quantité d’un bien que les
consommateurs sont disposés à acheter peut dépendre d’autres choses que de son prix, comme
le revenu, la météo ou encore le prix d’autres biens.
2) La construction d’une courbe de demande
2
De l’équilibre du consommateur à la courbe de demande individuelle
On peut construire une courbe de demande individuelle en repartant de l’équilibre du
consommateur, lorsqu’il cherche à maximiser son utilité (ou, dit autrement, quand il souhaite
obtenir le maximum de satisfaction) en tenant compte de la contrainte budgétaire. Le point
de tangence entre la courbe d’indifférence et la droite budgétaire correspond à cet
optimum.
Pour déterminer une série de points liant prix et quantité demandée, il faut jouer sur les
variations du prix et noter les quantités correspondantes du bien. En effet, la variation de prix
modifie la pente de la droite budgétaire. Par exemple, si le prix d’un bien X diminue (celui du
bien Y restant inchangé), la consommation maximum du bien X augmente et le point extrême
de la droite budgétaire se déplace vers la droite sur l’axe X. En revanche, le maximum
possible pour Y ne varie pas et le point extrême de la droite budgétaire sur Y ne change pas.
En conséquence, quand le prix de X varie, on obtient une série de droites budgétaires qui
partent toutes du même point sur l’axe des Y et qui aboutissent, sur l’axe des X, à un point
d’autant plus éloigné vers la droite que le prix de X est bas.
Prenons un exemple. Supposons que, d’une part, un consommateur répartisse ses dépenses
entre la consommation de produits alimentaires et de vêtements et que, d’autre part, le prix
des produits alimentaire varie (un déplacement sur la courbe de demande).
Si le prix des produits alimentaires est de 1 euro, celui des vêtements de 2 euros et le revenu
du consommateur de 20 euros, le choix de consommation maximisant son utilité se situe au
point B de la figure (a). Ici, le consommateur achète 12 unités de produits alimentaires et 4
unités de vêtements, ce qui lui procure un niveau d’utilité représenté par la courbe
d’indifférence U2.
La figure (b) en dessous montre la relation entre le prix des produits alimentaires et la quantité
demandée. L’axe horizontal mesure la quantité consommée des produits alimentaires (comme
dans la figure (a)), mais l’axe vertical mesure le prix des produits alimentaires. Le point G de
la figure (b) correspond au point B de la figure (a). En G, le prix des produits alimentaires est
de 1 euro et le consommateur en achète 12 unités.
Quels sont les effets des variations du prix des biens alimentaires sur la quantité
consommée et l’équilibre du consommateur ?
Supposons une augmentation du prix des produits alimentaires qui passe de 1 à 2 euros.
Dans ce cas, la droite du budget de la figure (a) fait une rotation vers la gauche autour de
l’ordonnée à l’origine, ayant ainsi une pente deux fois plus forte. Un prix relativement plus
élevé des produits alimentaires a accentué la pente de la droite de budget. L’utilité maximale
du consommateur est maintenant atteinte en A, qui se trouve sur une courbe d’indifférence
plus basse U1, parce que l’augmentation du prix des produits alimentaires a diminué le
pouvoir d’achat et donc l’utilité du consommateur. En A, le consommateur choisit 4 unités de
produits alimentaires et 6 unités de vêtements. Dans la figure (b), ce choix de consommation
modifié est au point E qui montre que pour un prix de 2 euros, la demande de produits
alimentaires est de 4 unités.
3
Supposons une baisse du prix des produits alimentaires qui passe de 1 euro à 50 centimes.
La droite de budget fait une rotation vers la droite autour de l’ordonnée à l’origine. Le
consommateur peut atteindre un niveau d’utilité plus élevé associé à la courbe d’indifférence
U3 de la figure (a), en choisissant le panier D, avec 20 unités de produits alimentaires et 5
unités de vêtements. Le point H de la figure (b) montre que pour un prix de 50 centimes les
quantités demandées de produits alimentaires sont de 20 unités.
Figure n°1. De l’équilibre du consommateur à la courbe de demande individuelle
La courbe de demande individuelle décrit donc les quantités d’un bien qu’un consommateur
achètera pour chaque niveau de prix de celui-ci. Dans la figure (b), la courbe de demande
individuelle précise la quantité de produits alimentaires que le consommateur achètera pour
chaque niveau de prix de ceux-ci.
Notons deux remarques importantes :
-
-
le niveau d’utilité atteint varie au fur et à mesure qu’on se déplace sur la courbe.
Plus le prix du bien est faible, plus le niveau d’utilité est élevé. Notez que dans la
figure (a) qu’une courbe d’indifférence plus élevée est atteinte lorsque le prix des
produits alimentaires diminue. Ainsi, lorsque le prix d’un bien diminue, le pouvoir
d’achat du consommateur augmente.
la représentation graphique d’une courbe de demande (figure (b)) est inversée
par rapport aux conventions mathématiques. Normalement, on place la variable
4
expliquée (X) sur l’axe vertical (en ordonnée) et la variable explicative (Px) sur l’axe
horizontal (en « abscisse »). Les économistes font généralement le contraire parce que
cela permet de mieux lire les effets des variations de prix, mais c’est une simple
convention qui n’a aucun effet sur les résultats.
De la courbe de demande individuelle à la demande de marché
Jusqu’ici, nous avons discuté de la courbe de demande pour un seul consommateur, nous
allons maintenant voir la courbe de demande de marché : elle montre la quantité d’un bien
que les consommateurs sont prêts à acheter, lorsque son prix varie. Les courbes de demande
de marché peuvent être obtenues comme étant la somme des courbes de demande
individuelles de tous les consommateurs sur un marché donné.
Par exemple, faisons l’hypothèse que seuls trois consommateurs (A, B et C) participent au
marché du café. Le tableau indique plusieurs points appartenant à la courbe de demande de
chaque consommateur. La demande de marché est obtenue en additionnant les colonnes,
représentant la demande totale pour chaque niveau de prix.
Prix (euros)
1
2
3
4
5
Individu A
(unités)
6
4
2
0
0
Individu B
(unités)
10
8
6
4
2
Individu C
(unités)
16
13
10
7
4
Marché
(unités)
32
25
18
11
6
Figure n°2. De la demande individuelle à la demande de marché
5
La figure montre les courbes de demande de café de ces trois consommateurs (notées D A, DB,
DC). La courbe de demande de marché est la somme horizontale des demandes de
chaque consommateur (on additionne horizontalement pour obtenir le montant total que les
trois consommateurs vont demander pour chaque niveau de prix.
Comme toutes les courbes de demande individuelles sont décroissantes, la courbe de demande
de marché l’est aussi. Cependant, bien que les courbes de demande individuelles soient des
droites, la courbe de demande de marché ne l’est pas nécessairement. Ici, elle est incurvée, car
un consommateur n’achète rien à des prix que les autres consommateurs jugent acceptable
(au-dessus de 4 euros).
Deux résultats sont à noter :
- La courbe de demande de marché se déplacera d’autant plus vers la droite que
nouveaux consommateurs entreront sur le marché.
- Les facteurs qui influencent les demandes de nombreux consommateurs devraient
également affecter la demande de marché. Par exemple, si la plupart des
consommateurs sur un marché ont des revenus plus élevés et qu’ils augmentent leur
consommation de café, la courbe de demande de marché se déplacera vers la droite
(puisque la courbe de chaque consommateur se déplacera dans la même direction).
Remarque : l’agrégation des demandes individuelles sur un marché n’est pas seulement un
exercice théorique. Il est important en pratique dans la mesure où les demandes de marché
sont construites à partir de demandes de groupes démographiques différents ou des
consommateurs localisés dans différentes régions.
3) Le déplacement de la courbe de demande
Lorsque le revenu augmente, pour un niveau de prix donné (P1), la quantité consommée va
augmenter (de Q1 à Q2). Si l’on applique ce raisonnement à tous les niveaux de prix (P1 à Pn),
on notera systématiquement une augmentation de la quantité consommée. Graphiquement,
cela se traduit par un déplacement vers la droite de la courbe de demande (on passe de D à
D’). On dit que toutes choses égales par ailleurs (ceteris paribus) la demande d’un bien
augmente, lorsque le revenu des agents augmente.
Si l’on raisonne à partir des quantités, avec cette nouvelle courbe de demande, quelle que soit
la quantité demandée, le prix pratiquée sera plus élevé qu’avec la première courbe. En effet,
avec un revenu plus élevé, les consommateurs seront disposés à payer un prix plus élevé (soit
P2 à la place de P1 pour une même quantité Q1)
6
Figure n°3. Le déplacement de la courbe de demande
Une augmentation générale des salaires provoquerait un tel déplacement de la courbe. À
l’inverse, une récession qui conduirait à une baisse des salaires pratiqués dans l’économie,
aurait l’effet inverse, c’est-à-dire un déplacement vers la gauche de la courbe de demande
(quel que soit le niveau de prix, on observerait une baisse de la quantité demandée par les
consommateurs).
Notions qu’il faut bien distinguer un déplacement de la courbe de demande qui traduit un
changement de la demande suite, par exemple, à une modification du revenu et un
déplacement sur la courbe (ou le long de la courbe) qui correspond à un changement de la
quantité demandée suite, par exemple, à une variation du prix du bien considéré.
Pour bien comprendre comment une augmentation de revenu génère un déplacement de la
courbe de demande, reprenons l’exemple de la consommation de produits alimentaires et de
vêtements dans le cas d’une hausse de revenu (un déplacement donc de la courbe de
demande). Supposons un consommateur qui alloue un revenu fixe aux produits alimentaires et
aux vêtements, pour des prix de produits alimentaires de 1 euro et de vêtements de 2 euros.
Supposons trois niveaux de revenu différents :
- Si le revenu initial du consommateur est de 10 euros : le panier de consommation
maximisant son utilisant, au point A, se compose de 4 unités de produits alimentaires
et de 3 unités de vêtements. Ce choix est représenté par le point E sur la courbe de
demande D1 dans la figure (b). Cette courbe de demande D1 est la courbe tracée pour
un revenu fixe de 10 euros, en faisant varier le prix des produits alimentaires ;
- Lorsque le revenu du consommateur passe à 20 euros, la droite de budget se déplace
vers la droite, parallèlement à la droite de budget d’origine, permettant d’atteindre un
niveau d’utilité associé à la courbe d’indifférence U2. Le panier de consommation
optimal est maintenant au point B (10 unités de produits alimentaires et 5 unités de
vêtements). Dans la figure (b), la consommation de produits alimentaires est
7
-
représentée par G sur la courbe de demande D2 (cette courbe correspond à un revenu
de 20 euros, avec une variation du prix des produits alimentaires).
Enfin, si le revenu passe à 30 euros, le consommateur choisit un panier de
consommation au point D (courbe d’utilité U3), avec 16 unités de produits
alimentaires et 7 unités de vêtements), représenté par le point H sur la figure (b).
Figure n°4. L’effet des variations de revenu sur la courbe de demande
Il est possible de représenter toutes les variations de revenu à la courbe de consommationrevenu (figure a) qui décrit toutes les combinaisons de produits alimentaires et de vêtements
maximisant l’utilité associée à tous les niveaux de revenus. Cette courbe a une pente positive
dans la mesure où la consommation de produits alimentaires et de vêtements augmente avec
le revenu.
Contrairement à ce que nous avons observé dans le cas d’une variation du prix (pour laquelle
s’opère un déplacement sur la courbe de demande), la variation du revenu entraîne un
déplacement de la courbe de demande elle-même. Le point A de la courbe de
consommation-revenu sur la figure (a) correspond au point E de la courbe de demande D1 de
la figure (b) ; B correspond à G sur une courbe de demande différente D2, etc. Une courbe de
8
consommation-revenu de pente positive implique qu’une augmentation du revenu entraîne un
déplacement vers la droite de la courbe de demande (de D1 à D2 à D3).
Outre l’effet du revenu, d’autres changements ont une influence sur la demande et conduisent
à des déplacements des courbes :
-
-
-
L’évolution du prix de biens substituables joue sur la demande de ces biens (des
biens sont substituables, lorsque l’augmentation du prix de l’un entraîne
l’augmentation de la quantité de l’autre). Ex : le cuivre et l’aluminium sont des biens
substituables, puisque l’un peut souvent être substitué à l’autre dans le cadre de la
production industrielle : la demande de cuivre augmentera si le prix de l’aluminium
augmente. De la même façon, le bœuf et le poulet sont des biens substituables, car la
majeure partie des consommateurs est disposée à transférer ses achats de l’un vers
l’autre quand les prix changent. Enfin, dernier exemple, si le prix des places de cinéma
augmente, les agents regarderont plus de vidéos en ligne ou bien s’abonneront à des
chaînes de cinéma.
L’évolution du prix de biens complémentaires pèse sur la demande (des biens sont
complémentaires, quand l’augmentation du prix d’un bien entraîne la diminution de la
quantité demandée de l’autre bien). Ex : les automobiles et l’essence sont des biens
complémentaires, parce qu’elles ont tendance à être utilisées ensemble. Une
diminution du prix de l’essence augmente la quantité d’automobiles demandées. On
peut dire la même chose des ordinateurs et des logiciels : la forte augmentation des
achats d’ordinateurs ces vingt dernières années en raison d’une baisse importante des
prix a conduit à une augmentation de la demande de logiciels.
Enfin, d’autres variables pèsent sur la demande d’un bien, comme la météo. Ex : les
courbes de demande pour les skis et les snowboards se déplacent vers la droite quand
il y a de fortes chutes de neige ; la courbe de demande de glace se déplace vers la
gauche lorsque la température baisse et que l’on passe de l’été à l’automne.
9
Mots- clés : équilibre du consommateur, courbe de demande individuelle, courbe de demande
de marché, déplacement sur/de la courbe de demande, courbe de consommation-revenu, biens
substituables, biens complémentaires, le surplus du consommateur, surplus agrégé des
consommateurs, équilibre du producteur, la courbe d’offre individuelle, la courbe d’offre de
branche, rendements factoriels, rendements d’échelle, économies d’échelle, déséconomies
d’échelle, surplus du producteur (en courte/longue période), surplus total des producteurs de
la branche, profit économique, profit comptable, coût d’opportunité, concurrence pure et
parfaite, price taker/price maker, mécanisme de marché, équilibre du marché (courte/longue
période), équilibre partiel, équilibre général, loi des débouchés, équilibre walrassien,
théorème d’Arrow et Debreu, Théorème de Sonnenschein-Mantel-Debreu.
4) Le surplus du consommateur
10
Figure n°5. Le surplus du consommateur
La courbe de demande individuelle représentée en escalier (plutôt que par une droite pour
simplifier la présentation) permet de mesurer facilement la valeur qu’un consommateur retire
de l’achat de quantités différentes de ticket.
Lorsqu’on raisonne au niveau d’une courbe de demande agrégée (ie plusieurs
consommateurs), on ne calcule plus le surplus individuel d’un consommateur, mais le
surplus agrégé de l’ensemble des consommateurs sur un marché. Pour calculer le surplus
agrégé des consommateurs sur un marché, nous mesurons simplement l’aire au-dessous de la
courbe de demande de marché et au-dessus de la droite de prix. Mathématiquement, il s’agit
d’un calcul d’intégrale de la fonction de demande – le prix.
11
Figure n°6. Le surplus généralisé du consommateur
Précisons que le surplus agrégé de l’ensemble des consommateurs sur un marché est composé
de surplus individuel différent puisque tous les consommateurs n’ont pas le même prix de
réserve, c’est-à-dire qu’ils n’accordent pas la même valeur à un bien.
B) La construction de la courbe d’offre et le surplus du producteur
1) Qu’est-ce qu’une courbe d’offre ?
La courbe d’offre représente la quantité de biens qu’un producteur est disposé à vendre
pour un certain prix, toutes choses égales par ailleurs. Le prix apparaît sur l’axe des
ordonnées (prix que les vendeurs reçoivent pour chaque unité vendue, quand ils offrent une
quantité donnée) ; l’axe des abscisses représente la quantité offerte totale. On peut écrire cette
relation sous la forme d’une équation : QO = QO(P), ou la représenter graphiquement.
La courbe d’offre est de pente positive : plus le prix est élevé, plus les entreprises vont
produire et vendre. Ex : un prix plus élevé peut inciter les entreprises à augmenter leur
production en embauchant des travailleurs supplémentaire ou offrant des heures
supplémentaires aux travailleurs en poste. Elles peuvent aussi augmenter leur production en
agrandissant la taille de leur usine. Un prix plus élevé peut aussi attirer de nouvelles
entreprises sur le marché.
12
2) La construction de la courbe d’offre
De l’équilibre du producteur à la courbe d’offre individuelle
13
Figure n°7. La maximisation du profit à court terme
En concurrence pure et parfaite, chaque entreprise se trouve en situation de price taker (=
preneuse de prix). En effet, chaque entreprise ne vend qu’une petite fraction de la production
totale du secteur si bien que la quantité offerte par l’entreprise n’aura aucun effet sur le prix
de marché du produit. Même si elle se retirait du marché, la quantité offerte ne diminuerait
pas suffisamment pour modifier l’équilibre offre-demande. Le prix de marché est déterminé
par les courbes d’offre et de demande du secteur. L’entreprise preneuse de prix sait que ses
décisions n’auront aucun effet sur le prix de marché.
Parce qu’elle est preneuse de prix, la recette marginale (Rm) de l’entreprise est égale au prix
du marché (p). De plus, la recette moyenne (RM) est égale à la recette marginale (Rm). En
CPP, on obtient donc pour une quantité produite q :
Rm (q) = RM (q) = p
Graphiquement, chaque producteur, en situation de price taker, fait face à une courbe de
demande horizontale d correspondant à niveau de prix du marché p. à laquelle fait face
chaque entreprise concurrentielle est donnée par une droite horizontale. Ce niveau de prix p
est alors égal à la recette marginale Rm et au niveau de recette moyenne de l’entreprise RM.
La courbe de demande du marché D indique les quantités achetées par l’ensemble des
consommateurs pour un niveau de prix p. Cette courbe D a une pente négative, car ils
achèteront une plus grande quantité du bien considéré, si son prix baisse.
14
Figure n°8. La courbe de demande pour une entreprise concurrentielle
Figure n°9. L’équilibre du producteur
15
Profit
Coût
Coût marginal
Prix de vente
Coût moyen
Quantité produite
Intéressons-nous désormais au passage de l’équilibre du producteur à la construction de
la courbe d’offre du producteur. Pour ce faire, il faut non seulement prendre en compte le
coût marginal et le prix de vente pour déterminer l’équilibre du producteur, mais il faut
également intégrer le coût moyen. En effet, l’entreprise n’a intérêt à produire que si le prix de
vente est supérieur au coût moyen car à cette condition qu’elle peut réaliser un profit. A
l’inverse, si le prix de vente est inférieur au coût moyen, elle engrange des pertes. D’autre
part, le producteur n’a aucun intérêt à arrêter sa production avant que la courbe de coût
marginal ne coupe la courbe de coût moyen. En effet, tant que le coût marginal est inférieur
au coût moyen, ce dernier diminue ; l’entreprise a donc tout intérêt à augmenter son volume
de production car à chaque nouveau bien produit, le coût unitaire d’un bien baisse. A
l’inverse, lorsque le coût marginal devient supérieur au coût moyen, ce dernier augmente ;
l’entreprise stoppe son niveau de production là où le prix de vente est égal au coût marginal.
16
Figure n°10. De l’équilibre du producteur à la courbe d’offre individuelle à court terme
Coût/Prix
L’offreur ne produit pas
L’offreur produit
Coût marginal = Courbe
d’offre à partir de Q1
Prix de vente
P2
Coût moyen
P1
Q1
Q2
Quantité produite
La courbe d’offre d’une entreprise est donc croissante : un accroissement du prix de marché
incite les entreprises à augmenter leur production et augmente le profit de l’entreprise.
De la courbe d’offre individuelle du producteur à la courbe d’offre de la branche à court
terme
Jusqu’ici, nous avons présenté la courbe de l’offre pour un seul consommateur, nous
allons maintenant voir la courbe d’offre de la branche qui correspond à la somme des
17
quantités produites par chaque entreprise séparément. La courbe d’offre de la branche
peut être obtenue en additionnant les courbes d’offres de chaque entreprise.
Prenons l’exemple d’un marché où trois entreprises aux coûts de production différents
assureraient l’intégralité de la production. Bien entendu, la courbe d’offre de chaque
entreprise correspond la portion de la courbe de coût marginal située au-dessus de la courbe
de coût variable moyen est tracée. Graphiquement, on peut lire que :
- Pour tout prix inférieur à P1, la branche ne produira rien puisque P1 est le minimum du
coût variable moyen pour l’entreprise qui a les coûts les plus faibles ;
- Entre P1 et P2, seule l’entreprise 3 produira : la courbe d’offre sera donc identique à
cette portion de la courbe de coût marginal de l’entreprise 3 ;
- Au prix P2, l’offre de la branche sera égale à la somme des quantités produites par les
trois entreprises : 2 + 5 + 8 = 15 unités ;
- Au prix P3, la branche produit 21 unités (4 + 7 + 10). La courbe d’offre de la branche
est croissante, mais elle a un coude au prix P2, le prix le plus bas pour lequel les trois
entreprises produisent. Lorsqu’il y a un grand nombre d’entreprises, le coude devient
négligeable.
Figure n°11. De la courbe d’offre individuelle à la courbe de branche à court terme
La courbe d’offre individuelle du producteur à long terme
À court terme, il y a au moins un facteur de production fixe. En fonction du temps
disponible, cela peut limiter la capacité de l’entreprise à adapter son processus de production
à de nouveaux développements technologiques ou à augmenter ou réduire son échelle de
production si les conditions économiques évoluent. À long terme, au contraire, l’entreprise
peut faire varier tous ses facteurs, y compris la taille de son usine. Elle peut décider de la
fermer (c’est-à-dire de quitter la branche) ou bien de produire un bien pour la première fois
(c’est-à-dire d’entrer dans une branche), deux hypothèses de la concurrence pure et parfaite
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(sur lesquelles nous reviendrons). Dans ces conditions, l’entreprise peut tenter d’améliorer ses
rendements (sa productivité) en développant ses capacités de production. Une des possibilités
consiste à augmenter l’ensemble des facteurs de production dans les mêmes
proportions : on dit qu’elle change d’échelle tout en maintenant constant le rapport
entre capital et travail (K/L). On parle alors de « rendements d’échelle ».
Rappel n°1. Rendements factoriels et rendements d’échelle
Le concept de rendement d’échelle mesure en quelque sorte l’évolution de la productivité
globale des facteurs quand les capacités de production se développent à long terme. Mais on
interprète le plus souvent les rendements d’échelle en termes de coûts. En effet, nous savons
que les coûts de production suivent une évolution inverse de celle de la productivité. Des
rendements d’échelle croissants correspondent à des coûts décroissants à long terme, ou
encore à des « économies d’échelle ». Inversement, des rendements d’échelle décroissants
indiquent des coûts croissants à long terme, ou encore des « déséconomies d’échelle ».
La maximisation du profit à long terme suppose, comme à court terme, que l’entreprise fait
face à une courbe de demande horizontale (sur la figure qui suit, l’entreprise considère le prix
de marché de 40 euros comme donné). Ses courbes de coût moyen de court terme (CMCT) et
de coût marginal de court terme (CmCT) sont suffisamment basses pour que l’entreprise fasse
un profit positif, donné par le rectangle ABCD, en produisant une quantité q1, pour laquelle
CmCT = P = Rm. La courbe de coût moyen de long terme, CMLT, reflète la présence
d’économies d’échelle jusqu’au point q2 (la courbe est décroissante : le coût moyen diminue
à long terme, ce qui signifie que le produit moyen global du travail et du capital augmente.
Dit autrement, la quantité produite croît plus vite que la quantité de facteurs utilisés : les
19
rendements d’échelle sont croissants), et des déséconomies d’échelle pour des niveaux de
production supérieurs (elle est croissante : le coût moyen croît à long terme, ce qui signifie
que le produit moyen global du travail et du capital diminue. La quantité produite croît moins
vite que la quantité de facteurs utilisés : les rendements d’échelle sont décroissants). En effet,
avant ce point, le coût marginal est inférieur au coût moyen (la courbe CMLT est située audessus de la courbe CmLT). La courbe de coût marginal de long terme, CmLT, coupe la
courbe de coût moyen de long terme en q2, au minimum de la courbe de coût moyen de long
terme.
Si l’entreprise pense que le prix de marché restera à 40 euros, elle voudra augmenter la taille
de son usine afin de produire en q3, où son coût marginal de long terme est de 40 euros. Après
cette extension, la marge de profit augmentera de AB à EF (différence entre prix et coût
moyen), et le niveau de profit total passera de ABCD à court terme à EFGD à long terme. La
quantité q3 est celle qui maximise le profit puisque pour toute production inférieure (par
exemple q2), la recette marginale est supérieure au coût marginal. L’augmentation de la
taille de l’usine est souhaitable puisqu’elle permet d’augmenter le niveau de profit. Mais
pour toute production supérieure à q3, le coût marginal est supérieur à la recette marginale ;
toute production supplémentaire réduirait donc le profit. La production optimale de long
terme pour une entreprise qui maximise son profit se trouve au point où son coût
marginal de long terme est égal au prix de marché.
Figure n°12 : la maximisation du profit à long terme
Précisons que plus le prix est élevé, plus le profit que peut faire l’entreprise est élevé.
Inversement, lorsque le prix baisse (passant de 40 à 30 euros), le profit diminue. Pour un prix
de 30 euros, la production optimale est de q2, au point minimal du coût moyen de long terme.
Dans ce cas, puisque P = CMLT, l’entreprise fait un profit économique nul.
20
En longue période, on peut donc constater que la courbe de coût moyen à long terme est
d’abord décroissante. On peut apporter plusieurs explications à cela :
- En augmentant son échelle de production, l’entreprise peut opérer une meilleure
division du travail, c’est-à-dire une spécialisation de chaque facteur dans son emploi
plus efficace. Ex : si la culture d’une terre nécessite l’accomplissement de dix tâches
indépendantes par des ouvriers agricoles, un ouvrier seul sur un hectare devra
accomplir l’ensemble des tâches, y compris celles pour lesquelles il est le moins doué.
Dix ouvriers sur dix hectares pourront assurer chacun la tâche pour laquelle ils sont le
plus productifs, et le produit moyen sera probablement supérieur à celui qui serait
obtenu si chaque ouvrier cultivait seul un hectare sur dix.
- La présence de coûts fixes : certains frais d’établissement d’une entreprise ou coûts
de gestion (directeur, secrétariat, service comptable, etc.) sont inévitables, même pour
un volume de production limité et ne se développent pas ensuite au même rythme que
la production. De même, certains équipements très coûteux, indispensables dès le
démarrage d’une activité, pèsent lourd dans le coût moyen des premières unités
produites mais sont progressivement amortis sur une production à plus grande échelle.
Jusqu’à présent, nous avons raisonné dans le cadre d’une courbe d’offre d’un producteur à
long terme. A long terme, il est impossible de représenter précisément la courbe d’offre
d’une branche. En effet, les entreprises entrent dans la branche et en sortent en fonction des
variations du prix de marché. L’addition des courbes d’offre individuelles est donc impossible
puisque nous ne savons pas quelles entreprises prendre en compte pour obtenir l’offre de la
branche.
3) Le déplacement de la courbe d’offre individuelle
Il est essentiel de distinguer le déplacement sur la courbe d’offre du déplacement de la
courbe d’offre.
21
Figure n°13. Réaction de l’entreprise à une variation du prix des facteurs
4) Le surplus du producteur
Le surplus du producteur en courte période
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Figure n°14. Le surplus du producteur pour une entreprise
Le fait qu’une entreprise bénéficie d’un surplus du producteur dépend de son coût de
production. Les entreprises avec de forts coûts de production ont moins de surplus ; celles
avec de faibles coûts de production en ont plus. En additionnant le surplus de tous les
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producteurs, on obtient le surplus total des producteurs de la branche. Il correspond à la
zone comprise entre le prix de marché et la courbe d’offre, pour des productions inférieures à
la production d’équilibre Q*.
Le surplus du producteur en longue période
Pour analyser la situation du producteur en longue période, il est impératif de distinguer
profit comptable et profit économique. Le profit comptable se mesure à l’aide de la
différence entre les recettes de l’entreprise et ses dépenses en salaires, matières premières,
intérêts d’emprunts et dépréciation du capital. Le profit économique prend, lui, également en
compte les coûts d’opportunité. L’un de ces coûts d’opportunité est le rendement que le
propriétaire de l’entreprise obtiendrait s’il investissait son capital ailleurs. Si une entreprise
utilise les facteurs travail et capital, et que son capital physique a été acheté, le profit
comptable sera égal aux recettes R moins le coût du travail wL. Le profit économique π quant
à lui égal aux recettes R moins le coût du travail, wL, moins le coût du capital, rK :
Profit économique = π = R – wL - rK
La mesure correcte du coût du capital est le coût d’usage du capital, qui est le rendement
annuel que l’entreprise pourrait obtenir si elle investissait son argent ailleurs au lieu d’acheter
du capital physique, dont la dépréciation annuelle doit être comptabilisée.
Lorsqu’une entreprise intègre un marché, elle le fait parce qu’elle s’attend à recevoir un
retour sur son investissement. Un profit économique nul indique que l’entreprise perçoit un
retour normal – c’est-à-dire concurrentiel – sur cet investissement. Ce rendement normal
(qui fait partie du coût d’usage du capital) est le coût d’opportunité de l’utilisation des fonds
de l’entreprise pour acquérir du capital physique plutôt que de les investir ailleurs. Ainsi une
entreprise qui fait un profit économique nul fait aussi bien en investissant dans l’achat de
capital qu’en l’investissant ailleurs – elle perçoit un rendement concurrentiel. Une telle
entreprise fait une performance normale et devrait rester sur le marché. En revanche, une
entreprise qui ferait des profits économiques négatifs devrait, en revanche, envisager de sortir
du marché car il existe un coût d’opportunité tel que l’entreprise aurait intérêt à investir
ailleurs.
Les profits économiques deviennent nuls à long terme sur des marchés concurrentiels.
Ces profits nuls ne signifient pas que les entreprises sont inefficaces, mais plutôt que la
branche est concurrentielle :
- Si on observe des profits positifs dans une branche, cela signifie un retour
particulièrement élevé sur un investissement. Ce haut rendement incite les
investisseurs à déplacer leurs ressources vers cette branche. L’augmentation de la
production associée à ces entrées déplacera la courbe d’offre de la branche vers la
droite. La quantité produite par la branche augmentera et le prix de marché du bien
baissera (la courbe d'offre de la branche se déplacera vers la droite).
- Inversement, si le prix de marché tombe à un niveau inférieur au coût moyen de long
terme de chaque entreprise, les entreprises subiront des pertes, provoquant des sorties
de la branche. Cela conduirait à un déplacement vers la gauche de la courbe d’offre :
l’offre diminue et le prix de marché augmente.
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Figure n°15 : l’équilibre concurrentiel de long terme
Dans une branche avec libre entrée et sortie, une entreprise entre si elle peut obtenir un profit
de long terme positif et sort si elle subit des pertes à long terme.
Lorsqu’une entreprise fait des profits économiques nuls, elle n’a pas intérêt à quitter la
branche. De même, les autres entreprises n’ont pas intérêt à y entrer. Un équilibre
concurrentiel de long terme s’établit si les trois conditions suivantes sont satisfaites :
1. Toutes les entreprises de la branche maximisent leur profit.
2. Aucune entreprise n’est incitée à entrer dans la branche ou à la quitter car elles font toutes
un profit économique nul.
3. Le prix du bien est tel que la quantité offerte par les entreprises est égale à celle qui est
demandée par les consommateurs.
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II) L’équilibre de marché en situation concurrentielle
A) Les hypothèses de la concurrence pure et parfaite
La concurrence pure et parfaite repose sur cinq hypothèses principales :
- L’atomicité des acteurs : puisque les entreprises sont en concurrence sur le marché,
chacune d’elles fait face à un grand nombre de concurrents directs pour ses produits.
Comme chaque entreprise ne vend qu’une petite portion de la quantité totale offerte
sur le marché, ses décisions n’ont aucun impact sur le prix de marché. Chaque
entreprise considère donc le prix de marché comme donné. Les entreprises sur un
marché en concurrence pure et parfaite sont « preneurs de prix » (price taker). Cette
hypothèse s’applique aux offreurs comme aux demandeurs : un acheteur n’acquerra
qu’une petite portion de la production totale et n’a pas d’influence sur le prix de
marché. On peut aussi formuler cette hypothèse en disant qu’il y a beaucoup
d’entreprises indépendantes et de consommateurs indépendants qui croient tous que
leurs décisions n’affecteront pas les prix ;
- La libre entrée et sortie : cette hypothèse précise qu’il n’y a pas de coût particulier
qui rende difficile l’entrée sur le marché pour une nouvelle entreprise, ou la sortie si
elle ne peut faire de profit. Les acheteurs peuvent facilement passer d’un fournisseur à
l’autre, et ces fournisseurs peuvent facilement entrer sur le marché et en sortir. Ex :
l’industrie pharmaceutique n’est pas parfaitement concurrentielle, parce que les
entreprises en place possèdent des brevets qui leur donnent le droit exclusif de
produire certains médicaments. Tout entrant devra soit investir en R&D, soit payer des
droits aux entreprises en place. Les droits et les dépenses de R&D peuvent limiter
l’accès au marché pour les entreprises. De même, l’industrie aéronautique n’est pas
parfaitement concurrentielle, car l’entrée sur le marché demande d’énormes
investissements dans des équipements et des usines qui n’ont que peu de valeur de
revente. Cette hypothèse implique que les consommateurs peuvent facilement se
fournir auprès d’une autre entreprise si leurs fournisseurs actuels augmentent leurs
prix. Pour les entreprises, elle implique qu’elles peuvent librement entrer sur un
marché si elles y voient une opportunité de profit et en sortir si elles perdent de
l’argent. Une entreprise peut donc embaucher des travailleurs, et acheter du capital et
des matières premières, et s’en défaire si elle souhaite fermer ou délocaliser son
usine ;
- L’homogénéité des produits : le comportement de preneur de prix apparaît
généralement sur les marchés où les entreprises produisent des biens identiques ou
quasiment identiques. Lorsque les produits de toutes les entreprises sur un marché sont
parfaitement substituables – c’est-à-dire lorsqu’ils sont homogènes –, aucune
entreprise ne peut fixer un prix supérieur à celui des autres entreprises sans perdre la
totalité de ses clients. La plupart des produits agricoles, le pétrole, l’essence et les
matières premières (telles que le cuivre, l’acier, le coton, etc.) sont relativement
homogènes. Inversement, lorsque les biens sont hétérogènes, chaque entreprise a la
possibilité de fixer un prix supérieur à celui de ses concurrents sans perdre tous ses
clients. Cette hypothèse assure qu’il y aura un seul prix de marché, conformément à
l’analyse offre ;
26
-
La mobilité des facteurs : les facteurs de production sont parfaitement mobiles. Le
travail et le capital peuvent donc se déplacer librement et sans délai d’une entreprise à
une autre ou d’un marché à un autre.
La transparence : l’information des différents agents intervenant sur le marché est
parfaite, c’est-à-dire disponible immédiatement et sans coût. En particulier, cela
signifie que tout le monde connaît en même temps et gratuitement toutes les quantités
offertes et demandées par tous les agents aux différents prix.
La concurrence pure et parfaite correspond à une vision « idéalisée », souvent très éloignée
du fonctionnement réel des marchés. En effet, beaucoup de marchés relèvent de la
concurrence imparfaite (oligopole, concurrence monopolistique, voire oligopole), sont
caractérisés par des imperfections (asymétries d’information, biens collectifs ou externalités).
Les interventions de l’État peuvent aussi contrarier le fonctionnement libre du marché,
lorsqu’elles consistent à interdire ou encadrer la vente de biens ou de services.
B) La détermination de l’équilibre de marché
27
Figure n°16 : Equilibre du marché en courte période
28
Figure n°17 : l’équilibre du marché en longue période
E2
E1
L’annulation des profits à long terme ne signifie pas que les entreprises concurrentielles
ne peuvent pas enregistrer un bénéficie comptable. Ce bénéfice comptable inclut une
rémunération normale des capitaux et, éventuellement, du temps de travail, apportés par les
propriétaires de l’entreprise. Cette rémunération constitue un coût des facteurs de production
et non un profit au sens économique du terme. À long terme, ce n’est pas le bénéfice
comptable qui s’annule, mais le revenu résiduel des propriétaires, c’est-à-dire ce qui reste
quand on payé tous les facteurs, y compris ceux apportés par les propriétaires eux-mêmes.
Le raisonnement développé ici suppose que toutes les entreprises ont les mêmes courbes de
coût. C’est une condition nécessaire pour que toutes les entreprises aient un profit nul au
point E0. Dans la réalité, les entreprises ont des coûts différents : quand le profit s’annule
pour certaines, d’autres, plus performantes, ayant un coût moyen plus faible, continuent à
réaliser un profit. On peut alors considérer que le point d’équilibre de long terme est celui où
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le profit s’annule dans la firme marginale (la dernière entreprise capable d’entrer sur le
marché sans produire à perte), mais reste positif dans les entreprises plus efficaces. Si c’est le
cas, à long terme, d’autres entreprises imiteront les méthodes de production les plus
performantes et seront finalement en mesure de produire aux mêmes coûts que ces dernières.
Ces entreprises entreront sur le marché et feront baisser les prix et les profits jusqu’à les
annuler. Sur un marché de concurrence pure et parfaite, une entreprise même
exceptionnellement performante ne peut maintenir sont profit à long terme, sauf si sa
performance résulte de facteurs de production spécifiques à l’entreprise et dont nulle autre ne
peut disposer (emplacement unique au monde, main-d’œuvre extrêmement qualifiée, matières
premières rares, etc.). Le revenu résiduel de l’entrepreneur reflète alors de la présence de
facteurs fixes et particulièrement rares, et l’économiste désigne ce revenu par le terme de
rente et non plus de profit. C’est pour cette raison que l’on peut affirmer que les profits
normaux s’annulent à long terme.
C) De l’équilibre partiel à l’équilibre général
Une première formulation de l’équilibre général apparaît chez Jean-Baptiste Say (17671832) avec sa fameuse « loi des débouchés » : elle énonce l’impossibilité d’un déséquilibre
entre l’offre et la demande globale. L’idée générale est la suivante : les biens et services
offerts se transforment en un revenu qui est entièrement dépensé pour l’achat de biens et de
services, donc à l’échelle d’une économie, la demande globale (le revenu) est nécessairement
égale à l’offre globale (la production disponible). Chez Say, les agents offrent des biens et des
services afin d’obtenir les moyens d’acquérir d’autres biens et services (y compris les facteurs
de production). Les « produits s’échangent contre les produits » et les échanges monétaires
ne sont que des opérations intermédiaires facilitant les transactions, mais sans incidence réelle
sur le fonctionnement de l’économie. « La monnaie n’est qu’un voile » qui n’est pas désirée
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pour elle-même, elle sert simplement d’intermédiaires dans les échanges. Il affirme ainsi
qu’aucun agent ne détient la monnaie sous forme d’encaisses inutilisées une partie de son
revenu. Tout le revenu est employé pour demander des biens et services. La demande globale
est équivalente à l’offre globale.
Dans son ouvrage « Eléments d’économie pure » (1874), Léon Walras reprend le
raisonnement de Say sur la « loi des débouchés » et jette les bases de la théorie de l’équilibre
générale : il s’agit de montrer que l’équilibre (offre = demande) de plein-emploi peut assuré
sur tous les marchés simultanément et que, de plus, cet équilibre est stable. Si un équilibre
général est possible, il n’y a donc pas déséquilibre entre l’offre et la demande comme le
suppose la loi des débouchés de Say.
Pour mettre en évidence un tel équilibre, Walras raisonne dans le cadre d’une économie de
concurrence pure et parfaite : atomicité du marché (il existe un très grand nombre de
producteurs et d’acheteurs, aucun n’est en mesure de peser sur le prix qui s’impose à tous) ;
homogénéité des produits; libre entrée et sortie de l’industrie ou de la branche; parfaite
transparence du marché (l’information circule librement sur les prix, les quantités et la nature
des produits); parfaite mobilité des facteurs de production. Il ajoute d’autres hypothèses :
l’acteur est parfaitement rationnel ; la monnaie ne peut être désirée pour elle-même (comme
chez Say) ; les consommateurs fondent leurs décisions sur la base de la loi de l’utilité
marginale pondérée par les prix.
Pour démontrer l’existence de cet équilibre général, Walras pose un système d’équations
multiples qui exprime l’égalité entre l’offre et la demande sur chaque marché. Il montre
ensuite qu’il y a autant d’inconnues qu’il y a d’équations dans ce système. Cela signifie que,
mathématiquement, il y a une solution pour résoudre ce système d’équation et qu’un équilibre
général est possible. Sans rentrer dans le détail, le nombre d’équations dans le système est
égal à la somme :
- des équations de demande effective qui rendent compte de la quantité demandée en
fonction du prix ;
- des équations d’échange qui rendent compte de l’égalité entre la demande et l’offre
effectives sur les différents marchés ;
- des équations dites d’équilibre général, qui permettent d’exprimer le prix d’une
marchandise en une autre marchandise et que les rapports des prix entre les
marchandises soient compatibles entre eux (si une marchandise A est exprimée en
marchandise B et une marchandise B en marchandise C, ces deux rapports de prix
doivent être compatibles avec le rapport de prix entre A et C).
Pour m marchandises, il y a donc m(m-1) équations de demande, m-1 équations d’échange et
(m-1)(m-1) équations d’équilibre général. Quant aux inconnues, elles correspondent aux
quantités et aux prix des différentes marchandises échangées. Pour m marchandises
échangées deux à deux, il y a m(m-1) prix et m(m-1) quantités échangées puisqu’une
marchandise n’est pas échangée contre elle-même, soit un nombre total d’inconnues de =
.
Or, le nombre d’équations =
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Le nombre d’équations obtenues est égal au nombre d’inconnues, il y a donc une
solution (prix et quantités d’équilibre) qui permet de résoudre ce système d’équations et
d’assurer un équilibre général.
Néanmoins, tant que les prix d’équilibre ne sont pas trouvés (prix pour lequel offre et
demande coïncident), aucun échange ne doit avoir lieu. C’est alors le rôle du « commissairepriseur » qu’invoque Walras : il s’agit d’un agent extérieur au marché qui annonce les prix et
enregistre les offres et demandes correspondantes à ce prix : tant que l’offre et la demande ne
sont égales, le processus de tâtonnement se poursuit. Il est supposé qu’aucune transaction n’a
lieu avant l’obtention de l’équilibre et le processus de génère aucun coût de fonctionnement.
En recourant au commissaire-priseur, Walras souligne que la stabilité de l’équilibre général
est assurée par la flexibilité des prix : si l’offre est supérieure à la demande, le prix baisse et
vice versa.
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