Plasticité synaptique et addiction Ou Comment les drogues modifient la transmission synaptique Sommaire • Rappel du contexte des études • Le circuit de la récompense • Rappels sur La Potentialisation à long terme et la Dépression à Long Terme dans l’hippocampe • Effets aigus des drogues sur PLT/DLT dans le circuit de la récompense • Effets des prises chroniques • Corrélats comportementaux 1 Rappel du contexte • Toute personne consommant une drogue ne devient pas nécessairement dépendante • Plusieurs facteurs interviennent – – – – Génétiques? peut être Epigénétique? Environnementaux? Histoire du patient Précocité de la « rencontre » est importante • Toutes les drogues activent le même circuit neuronal central: « le circuit de la récompense » Toutes les cibles moléculaires initiales des drogues ont été clonées et caractérisées On connaît beaucoup moins les mécanismes comportementaux des drogues (qui ont lieu après la fixation de la drogue à sa cible et la mise en jeu des voies de signalisations cellulaires). 2 Les recherches ont portées sur: • Comment les drogues influencent la communication neuronale à court terme ? • Comment le SNC s’adapte aux expositions répétées de drogues à long terme ? Ont été proposées • Des adaptations homéostasiques (boucles de rétro-contrôle négatives en réponse à de fortes stimulations par les drogues) • Des adaptations synaptiques de types « Hebbien » comme celles sous-jacentes à la mémoire associative à long-terme (plasticité synaptique) • Seul ce second point sera abordé 3 Lien entre addiction et plasticité synaptique • 1894 : Ramon y Cajal : – le stockage d’informations dans le cerveau s’effectue par l’altération à long terme de l’efficacité des synapses neuroneuronales • 1973 : Bliss et Lomo – découvre la PLT dans l’hippocampe; centre de la mémoire déclarative et spatiale • 1977: Lynch et al. – découvre la DLT dans l’hippocampe • 2004 ….la PLT et la DLP sont des propriétés de quasi toutes les synapses excitatrices et jouent un rôle dans l’apprentissage, la mémoire, la stabilisation et l’élimination des synapses…. Lien entre addiction et plasticité synaptique • De fait, les drogues peuvent moduler la plasticité synaptique dans les régions impliquées dans la récompense et le renforcement des stimuli (circuit de la récompense). • Hypothèses actuelles: – L’addiction représente une forme pathologique d’apprentissage et de mémorisation – Les interactions entre drogues et plasticité synaptique dans différentes régions contribueraient aux différents aspects des addictions : le « craving »; le « manque »; et la rechute 4 Le Système Cérébral de la Récompense Bleu = glutamate; Rouge = Dopamine; Orange = GABA; Vert = =Orexine NAc = Noyau accumbens; VTA = aire tegmentale ventrale; PFC = cortex prefrontal AMG; amygdale; BNST = noyau du lit de la strie terminale; LDTg = noyau tegmental Laterodorsal; LH; hypothalamus lateral; VP= pallidum ventral. Toutes les drogues activent les neurones de la VTA qui répondent aussi à la nouveauté. Leur mode de décharge pourrait également coder une prédiction signalant la valeur récompensante d’un stimulus par rapport à sa valeur espérée. Le Système Cérébral de la Récompense La plasticité synaptique dans les autres régions formations des liens entre les aspects « renforçants » de l’expérience « drogue » et les multiples références (cues) associées avec cette expérience. La plasticité synaptique dans la VTA réponses comportementales précoces au début des prises Adaptations à long terme des régions innervées par la VTA 5 La Potentialisation et la Dépression à long terme dans l’hippocampe Structure interne de l’hippocampe Réseau neuronal interne: Boucle tri-synaptique de l’hippocampe Synapses glutamatergiques (+ IN locaux GABAergiques) 6 Coupe transversale d’un hippocampe de rat s ien al Or mid a r py t um re dia ul a Ra lec mo CA2 sum uno Lac CA3 um iat rad um id luc idal ram ns py ie or CA1 gr an u lo su m Hilus Gyrus Denté Fimbria 7 La plasticité synaptique peut résulter de deux mécanismes principaux: • 1) un renforcement de l’efficacité des synapses existantes (PLT et DLT) • 2) formation ou élimination, remodelage de dendrites et d’axones • changement à long terme des circuits neuronaux et donc des comportements La PLT NMDA dépendante dans l’hippocampe Stimulus haute fréquence 8 La DLT NMDA dépendante dans l’hippocampe Stimulus basse fréquence Effets aigus des drogues sur PLT/DLT dans le circuit de la récompense: la VTA • Neurones DA • Reçoivent des excitations GLU • Interneurones GABAergiques, qui projettent sur NAc, PFC, hippocampe.. • organisation cytoarchitectonique similaire à l’hippocampe • possibilité de PLT et de DLT 9 Toutes les drogues provoquent une augmentation de libération de DA dans le NAc - hippocampe PLT ?? Les mécanismes cellulaires et moléculaires des addictions aux niveaux comportementaux et des systèmes doivent pourvoir expliquer: • 1) Comment des libérations répétées de DA consolident le comportement de prise de drogues en un comportement compulsif ? • 2) Comment les « signaux » liés aux drogues arrivent à contrôler les comportements ? • 3) Comment le risque de rechute peut il persister pendant des années ? 10 Les neurones DA de la VTA expriment de la PLT NMDA-dépendante Antago NDMA Antago mGLUR Les drogues induisent la PLT dans la VTA Etudes in vivo; application aigue; mesures 24h après 11 Mesure du ratio AMPAc/NMDAc • Méthode de normalisation qui facilite la comparaison de la « force » des synapses entre différentes cellules parce qu’indépendant de paramètres tels que le positionnement des électrodes, le nombre de synapses activent… • A) On « clampe » le neurone à -40mV (libération du bouchon Mg2+ du R NMDA) et mesure des composantes NMDA et AMPA des EPSCs. • • 1)Evoquer un EPSC mixte 2) Appliquer un antago NMDA (APV): mesure de la composante AMPA. 3) Soustraction de la composante AMPA de l’EPSC mixte = composante NMDA • • B) Après induction de la LTP: Si des R AMPA sont insérés dans la mbre, la composante AMPA est augmentée. Celle du NMDA reste fixe. Le ratio est donc augmentée. Les drogues induisent la PLT dans la VTA Etudes in vivo; application aigue; mesures 24h après Souris Cocaïne 15mg/kg la veille Pach-clamp: EPSC PLT NMDA-dépdte Durée du ratio et spécificité de région Cocaïne in vivo induit PLT; PLT spontanée est réduite Ungless et al., 2001 12 Les drogues déclenchent la PLT dans la VTA Etudes in vivo : mesures 24h après injection Drogues addictives Drogues psychostimulantes mais non addictives Saal et al., 2003, ref 61 Conclusion de ces observations • L’aspect transitoire du changement de ratio AMPA/NMDA renforce l’idée que les adaptations dans la VTA ne sont pas permanentes et • qu’elles représentent une première étape dans les processus neuronaux amenant aux addictions 13 Conclusion de ces observations • La PLT dans la VTA est déclenchée par des drogues addictives dont les mécanismes moléculaires (mais pas cellulaires : neurones DA de la VTA) sont différents ainsi que les profils comportementaux • Cette adaptation synaptique (la LTP des synapses excitatrices des neurones DA de la VTA) serait directement liée aux propriétés addictogènes de ces drogues Les drogues déclenchent la PLT dans la VTA Etudes in vivo en application chronique + groupe naïf chronique Le courant AMPA est augmenté, pas le NMDA chronique Borgland et al., 2004 14 Durée de la modification du ratio AMPAR/NMDAR : 5j quelque soit le type d’exposition Delta t : 5 ou 10 j après inj. unique Delta t : 5 ou 10 j après inj. répétées Borgland et al., 2004, ref 70 Ces effets se traduisent ils par des modifications comportementales? Locomotion Corrélation Pas de Corrélation Juste après inj Cocaine Juste après inj. NaCl Après 7J d’inj Cocaine Après 7J d’inj NaCl 15 Quel serait le rôle physiologique de la PLT dans la VTA ? • La rechute peut être provoquée par – Des « signaux » liés aux drogues (internes/externes) – Le stress • Le stress seul peut favoriser la première prise de drogue • Etude des effets du stress sur la PLT/VTA. – A-t-il le même effet qu’une prise aigue de drogue? – Interagit-il avec les effets des drogues? Effet d’un stress aigu sur le ratio AMPAR/NMDAR des neurones DA Stress: faire nager le rat dans l’eau froide. Mesure 24h après Stress les glucocorticoïdes augmentent. Utilisation d’un antagoniste RU486 pour dévoiler son rôle dans cette réponse. Seule la réponse au stress est bloquée par RU486 mais pas la réponse à la Cocaïne. La réponse Coc n’est pas due au stress Saal et al., 2003, ref 61 16 Les effets Cocaïne impliquent le récepteur DA de type D1 SCH = Antagoniste D1 ETI = Antagoniste D2 Coc aug le ratio SCH bloque l’effet Coc pas l’effet stress ETI ne bloque pas l’effet Coc Dong et al., 2004 Conclusion de ces observations • Le stress aigu et l’administration aigue de cocaïne ont les mêmes effets sur la plasticité synaptique des neurones DA de la VTA, MAIS ils agissent par des mécanismes cellulaires différents. • Le fait que la corrélation entre le ratio AMPAR/NMDAR et l’activité locomotrice disparaissent après plusieurs j de traitement indique que l’effet sur la PLT contribue initialement à la valeur incitative de la drogue mais que ce sont dans les structures cibles de la VTA qu’il faut chercher les changements comportementaux à long terme associés à l’addiction 17 Quels sont les conséquences fonctionnelles (comportementales) du déclenchement de la PLT dans les neurones DA/VTA par les drogues? il faut jouer sur les récepteurs acteurs de la PLT • 1) Le blocage des R au Glutamate (AP5 + CNQX) dans la VTA annule la préférence de place conditionnée induite par la cocaïne Harris et al., 2003 Quels sont les conséquences fonctionnelles (comportementales) du déclenchement de la PLT dans les neurones DA/VTA par les drogues? • 2) Etudes sur souris KO pour GLuR1: Abolition de l’augmentation du ratio et de la PPC à la cocaïne Dong et al., 2004 18 Quels sont les conséquences fonctionnelles (comportementales) du déclenchement de la PLT dans les neurones DA/VTA par les drogues? • 3) Surexpression de GluR1 dans la VTA renforce les effets stimulants des drogues. Activité locomotrice Morphine 1 mg/kg J1, puis 1 mg/kg 2-3j après PPC Morphine 0.5mg/kg (seuil) Comment les drogues induisent elles la PLT ? • On se sait pas exactement !!!!!!!! mais – Amph bloque les PPSI dus au mGLUR – Nic excite directement les neurones DA et augmente la libération de GLU présyn – Les opiacées hyperpolarisent les IN GABA de la VTA (levée d’inhibition) – CRF (hormone du stress) augmente les réponses au NMDA 19 Plasticité dans le noyau accumbens • Rôle important dans les changements comportementaux liés aux drogues • Neurone moyen épineux GABAergique • Se projette vers la VTA • Recoivent des afférences GLU depuis l’hippocampe, l’amygdale, le cortex préfrontal • PLT and DLT NMDA dépendantes existent • Les endocannabinoïdes sont responsables d’une forme de LTD propre 20 La DLT des endocannabinoides • Un influx Calcique postsynaptique important via les récepteurs mGLU ou mAch induit la synthèse des eCBs • Molécule lipophile • Action rétrograde via CB1 • Diminue la libération de NT (GLU) pendant pls sec • A certaines synapses, la libération d’eCBs est prolongée et il y a DLT Endocannabinoïdes et PLT • Activation postsynaptique des R mGlu1/5 et/ou l’élévation du Ca2+i postsyn Aug. [eCB] qui activent les R CB1 présyn.et diminuent la libé Glu. • Cette diminution de Glu, diminue la LTP • En bas: les EPSC postsyn sont réduits pendant la DLT. 21 Mécanismes moléculaires de la plasticité synaptique • Peu d’informations sur comment les mémoires sont codées et stockées pour de longues périodes • Régulation de l’expression de gènes – Augmentation/diminution à vie reflétant des modifications de la chromatine (mécanismes épigénétiques) – Expression transitoire de certains gènes (ou traduction) qui produisent un remodelage physique des synapses et donc des réseaux de neurones • Les 2 types d’altérations ont été observées avec les drogues mais aucun liens précis avec des changements cellulaires et/ou comportementaux CREB • cAMP Responding Element Binding • Facteur de transcription le plus étudié dans le contexte mémoire et apprentissage • Activé par PKA, CaM-kinases, MAPK.. • Se fixe a CRE dans les régions promotrices de certains gènes 22 Exemple de la cocaïne, Amph et Morphine dans VTA (!!!! Alcool et Nic diminue CREB !!!!) Activité Libération Cette boucle négative, activée par des expositions aiguës ou répétées aux drogues diminueraient les propriétés récompensantes des drogues. Il s’agirait alors d’un mécanisme possible de la tolérance et/ou de la dépendance au cours de l’abstinence. Une des cibles de CREB est le gène codant pour GLuR1 Autres facteurs de transcriptions • la famille Fos (IEG) : rapide/transitoire (à 2h et pendant 8h) • Se fixe à AP-1 (Activator Protein 1) • Fos s’atténue avec les expositions répétées, mais pas AP-1 qui reste pendant des semaines après arrêt du traitement • Ceci est du à la présence persistante de ∆FosB très stable (cocaïne, Amph, Nic, EtOH, Cannabinoïdes) 23 Altération d’expression des IEG Ex du gène cFOS Serum Response Element Activator Protein 1 ∆FosB • Augmente la sensibilité aux effets récompensant et aux activités locomotrices induites par la cocaïne et la morphine • Augmenterait le comportement de recherche de drogue • Mais on ne connaît pas les gènes régulés par ∆FosB !!!! 24 FIN Tranche d’hippoc Alcool et PLT/DLT 1 inj. P0 (triang blanc) 1 inj. P7 (ronds noirs) Controls (ronds blancs) Mesures à P30 Izumi et al., 2005 25 Adolescent plus sensible que l’adulte Pyapali et al., 1999 Effets sur la DLT des synapses excitatrices sur les neurones DA de la VTA Souris Cocaïne 15mg/kg la veille Rat, tranche, bain Ungless et al., 2001 Jones et al., 2000 26 Alcoolisation chronique intermittente (CIE, sur 14j) inhibe la LTP in vitro Champ dendritique Animaux de 40-45j Champ Somatique Roberto et al., 2002 Effet persistant au moins 8h après arrêt de l’alcool Champ dendritique CA1 Roberto et al., 2002 27 Un effet qui dure au moins 5J Roberto et al., 2002 CIE réduit la transmission synaptique NMDA dans le champ CA1 de l’hippocampe (Nelson et al., 1999) Mode d’exposition des animaux Continuité de la présence d’alcool Dissection Effets aigus de l’alcool Enregistrements somatique et dendritique; mesure de l’amplitude PPSEd et du pop. Spike somatique. 28 Notion de pairedpulse facilitation/inhibition: R1 R2 un indice de la libération présynaptique de GLU (PPF) ou de GABA (PPI) Calcul : R2/R1 A: 100 ms intervalle PPF (GLU) R2 R1 B: 10 ms intervalle PPI (GABA) Résultats: Pas de modification en somatique L’alcool n’a pas d’effets En dendritique, l’alcool diminue les PPF (100 et 200 ms d’intervalles) Seule la libération présynaptique (GLU) au niveau dendritique est augmentée et seulement lors de la présence d’alcool en continue après traitement chronique. Le traitement chronique seul, n’a pas d’effets. 29 Effets d’une dose aigüe d’alcool • PPF dendritique est augmentée libé. de GLU diminuée sur les animaux sains et les animaux CIE Effets d’une dose aigüe d’alcool • Pas d’effets chez les anx sains (C) sur PPF somatique • PPF augmentés chez les CIE (D) libé. GLU diminuée par l’éthanol aigu chez les CIE 30 La sensibilisation dure 14j Le changement du ratio n’existe pas après un jour de traitement (contrairement à la VTA). Ratio diminué N’est pas du à une modification des Effets du NMDA Un modèle de plasticité dépendante de l’expérience est la sensibilisation durable aux effets stimulants locomoteur des drogues d’abus. Par contre la DLT NMDA-Dépendante est diminuée après traitement à la cocaïne Le changement de ratio provenait donc d’une diminution des effets AMPA et non d’une augmentation des effets NMDA 31