Chinoiseries

publicité
Pour trouver la dernière version de ce texte, taper didrygaillard sur Google. Date de cette version :
Tue Dec 23 09 :13 :38 CET 2008. Jean-Marie Didry et Pierre-Yves Gaillard
Chinoiseries
Table des matières
1
Introduction
2
2
Séries de Laurent
3
3
Fractions rationnelles généralisées
4
4
Théorème chinois
6
5
Exponentielle
9
6
Matrices
10
7
Suites récurrentes
11
8
Équations différentielles
12
9
Euclide
13
10 Le cas d’un anneau quelconque
18
11 Reste universel
20
12 Une adjonction
21
13 Wronski
22
1
1
Introduction
Le propos de ce texte est de fournir une formulation commode de certains résultats
folkloriques. Les cinq enoncés principaux sont le théorème 28 page 15, le théorème 30 page 17, le théorème 31 page 17, le théorème 32 page 18, et le théorème
33 page 19.
Par “polynôme” on entend “polynôme à coefficients complexes dans l’indéterminée X”.
Nous montrons que
– le calcul du quotient et du reste de la division euclidienne d’un polynôme par
un polynôme non nul,
– la décomposition d’une fraction rationnelle en éléments simples,
– le calcul d’une suite récurrente,
– l’exponentiation d’une matrice,
– l’intégration d’une équation différentielle ordinaire linéaire d’ordre n à coefficients constants
résultent d’une formule unique, simple et évidente : c’est la formule (3) page 7,
que nous appelons formule de Taylor-Gauss.
Le corps C(X) des fractions rationnelles et l’anneau E des fonctions entières
sont deux exemples importants d’anneaux différentiels contenant C[X]. Le sousanneau C[X] “contrôle” E dans le sens où toute fonction entière peut être divisée
euclidiennement par un polynôme non nul, le reste étant un polynôme de degré
strictement plus petit que celui du diviseur. Parmi les anneaux jouissant de cette
propriété, il y en a un qui contient tous les autres : c’est l’anneau différentiel
Y
C[[X − a]].
(1)
a∈C
Tout C[X]-module de torsion est un module sur l’anneau (1), et cet anneau est
universel pour cette propriété. En particulier tout élément f de (1) peut être évalué
sur une matrice carrée A, la matrice f (A) étant par définition R(A), où R est le
reste de la division euclidienne de f par un polynôme non nul annulant A. Comme
il y a une formule évidente pour ce reste (la formule de Taylor-Gauss), le tour est
joué. Un exemple important consiste à prendre pour f la fonction exponentielle,
vue comme l’élément de (1) dont la a-ème composante est la série de Taylor de eX
en a. On retrouve bien sûr la notion habituelle d’exponentielle de matrice, mais
débarrassée de ses complications artificielles.
2
Il est commode d’introduire l’anneau différentiel fourre-tout
Y
C((X − a))
a∈C
qui contient à la fois C(X) et E. Un avantage accessoire de cet anneau est qu’il
court-circuite la construction habituelle (particulièrement peu instructive) du corps
des fractions rationnelles (en tant que corps différentiel) à partir de l’anneau des
polynômes.
2
Séries de Laurent
Soit a un nombre complexe. Une série de Laurent en X − a est une expression
de la forme
X
f = f (X) =
fa,n (X − a)n ,
n∈Z
où (fa,n )n∈Z est une famille de nombres complexes pour laquelle il existe un entier
na tel que n < na implique fa,n = 0.
On définit les opérations d’addition, multiplication et dérivation sur les séries
de Laurent en X − a par
(f + g)a,n = fa,n + ga,n ,
X
(f g)a,n =
fa,p ga,q ,
p+q=n
(f 0 )a,n = (n + 1) fa,n+1 ,
et on vérifie que ces opérations ont les mêmes propriétés que sur les polynômes.
Théorème 1. Soit f une série de Laurent en X − a. Si f 6= 0, alors il existe une
unique série de Laurent g en X − a telle que f g = 1.
Preuve. Exercice.
On pose alors g = 1/f =
X − a.
1
f
et h g = h/f =
3
h
f
si h est une série de Laurent en
3
Fractions rationnelles généralisées
Une fraction rationnelle généralisée est une famille f = (fa )a∈C dont chaque
membre fa est une série de Laurent en X − a. Les nombres complexes fa,n
s’appellent les coefficients de f . Les fractions rationnelles généralisées s’additionnent, se multiplient et se dérivent composante par composante.
À tout polynôme P est associée la fraction rationnelle généralisée
!
∞
(n)
X
P (a)
.
(X − a)n
n!
n=0
(2)
a∈C
Comme la somme formelle dans la parenthèse ne contient qu’un nombre fini de
termes non nuls, elle peut être vue comme un polynôme. En tant que telle, elle est
bien sûr égale au polynôme P . Les sommes, produits et dérivées de polynômes
en tant que polynômes coïncident donc avec leurs sommes, produits et dérivées
en tant que fractions rationnelles généralisées. Ces faits nous invitent à désigner
encore par P la fraction rationnelle généralisée (2).
Nous pouvons alors définir une fraction rationnelle comme étant une fraction
rationnelle généralisée obtenue en divisant un polynôme par un polynôme non
nul. Les sommes, produits et dérivées de fractions rationnelles sont des fractions
rationnelles. Si une fraction rationnelle généralisée non nulle f = (fa )a∈C est une
fraction rationnelle, alors fa est non nulle pour tout a.
Pour toute fraction rationnelle généralisée f et tout nombre complexe a on pose
µ(a, f ) := inf {n ∈ Z | fa,n 6= 0}
avec la convention inf ∅ = +∞, et on dit que µ(a, f ) est la multiplicité de a
comme zéro, ou racine, de f . On a
µ(a, f g) = µ(a, f ) + µ(a, g).
Si µ(a, f ) ≥ 0 on dit que f est définie en a, et on désigne fa,0 par f (a). Si une
fraction rationnelle généralisée f est définie en un nombre complexe a, alors on a
fa =
∞
X
f (n) (a)
n=0
n!
(X − a)n .
Toute somme, produit ou dérivée de fractions rationnelles généralisées définies en
a est une fraction rationnelle généralisée définie en a.
4
Pour toute fraction rationnelle généralisée f , tout nombre complexe a et tout
entier µ posons
X
DLµa (f ) :=
fa,n (X − a)n ,
n≤µ
et disons que cette série de Laurent en X − a est le développement limité de f
en a à l’ordre µ. Si f et g sont des fractions rationnelles généralisées définies en
a, on a
DLµa (f + g) = DLµa (f ) + DLµa (g), DLµa (f g) = DLµa DLµa (f ) DLµa (g) .
Soient a un nombre complexe, soit µ un entier, et soient f et g deux fractions
rationnelles généralisées.
Exercice 2. Montrer que les conditions suivantes sont équivalentes
1. µ(a, f − g) ≥ µ,
2. (X − a)−µ (f − g) est définie en a,
3. DLaµ−1 (f ) = DLaµ−1 (g).
Si ces conditions sont satisfaites et si f et g sont définies en a, alors on dit que
f et g sont congrues modulo (X − a)µ et on écrit
f ≡ g mod (X − a)µ .
Nous avons donc
DLaµ−1 (f ) ≡ f mod (X − a)µ ,
ainsi que

f1 ≡ g1 mod (X − a)µ 
f2 ≡ g2 mod (X − a)µ 
⇒

 f1 + f2 ≡ g1 + g2 mod (X − a)µ

f1 f2 ≡ g1 g2 mod (X − a)µ .
Exercice 3. Supposons f définie en a et µ ≥ 0. Soit R un polynôme de degré
< µ. Montrer que les conditions suivantes sont équivalentes.
1. R = DLaµ−1 (f ),
2. R ≡ f mod (X − a)µ ,
3. (X − a)−µ (f − R) est définie en a.
En d’autres termes
f − DLaµ−1 (f )
, DLaµ−1 (f )
(X − a)µ
est l’unique couple (q, R) tel que
5
1. q est une fraction rationnelle généralisée définie en a,
2. R est un polynôme de degré < µ,
3. f (X) = (X − a)µ q(X) + R(X).
Si nous désirons étendre le résultat obtenu dans l’exercice 3 à la division par
un polynôme D quelconque, il est naturel de se restreindre aux fractions rationnelles généralisées définies en tout point de C. Définissons donc un polynôme
généralisé comme étant une fraction rationnelle généralisée définie en tout point
de C. Toute somme, produit ou dérivée de polynômes généralisés est un polynôme
généralisé.
Notations 4. Fixons un polynôme non constant D et, pour tout nombre complexe
a, notons µa la multiplicité de a comme racine de D.
Exercice 5. Soit f un polynôme généralisé. Montrer que la fraction rationnelle
généralisée f /D est un polynôme généralisé si et seulement si
f ≡ 0 mod (X − a)µa
pour tout a.
Nous admettons le
Théorème 6 (théorème fondamental de l’algèbre). Il existe un nombre complexe
non nul c satisfaisant
Y
D(X) = c
(X − a)µa .
D(a)=0
Exercice 7. Soit P un polynôme. Montrer que les conditions suivantes sont équivalentes
1. P ≡ 0 mod (X − a)µa pour tout a,
2. P/D est un polynôme généralisé,
3. P/D est un polynôme,
4. P/D est un polynôme de degré deg P − deg D.
4
Théorème chinois
Théorème 8 (théorème chinois). Pour tout polynôme généralisé f et tout polynôme non constant D il existe un unique couple (q, R) tel que
1. q est un polynôme généralisé,
6
2. R est un polynôme de degré < deg D,
3. f = D q + R.
Dans les notations 4 page 6 on a la formule de Taylor-Gauss (voir [1])
R(X) =
X
(X − a)µa
D(X)
f (X)
D(X)
(X − a)µa
DLaµa −1
D(a)=0
(3)
On dit que R est le reste de la division euclidienne de f par D, et que q est
son quotient.
Preuve. Unicité. Supposons
f = D q1 + R1 = D q2 + R2
(notations évidentes). Il vient
R2 − R1
= q1 − q2
D
et l’exercice 7 (2. ⇒ 4.) implique R1 = R2 et donc q1 = q2 .
Existence. Posons
s(a) (X) :=
(X − a)µa
1
f (X)
D(X)
(X − a)µa
DLaµa −1
,
s :=
X
s(a) ,
et observons que Df − s(a) est définie en a par l’exercice 3, que Df − s est un
polynôme généralisé q, et que sD est un polynôme R de degré < deg D. CQFD
Exemple. Soient a et b deux nombres complexes. Pour n ≥ 0 notons sn la somme
des monômes de degré n en a et b. Le reste de la division euclidienne du polynôme
P
n
n≥0 an X par (X − a)(X − b) est
X
an sn−1 X + a0 − a b
n≥1
X
an sn−2 .
n≥2
Corollaire 9. (Première formule de Serret — voir [1].) La partie polaire de g :=
f /D en a est
µa −1
µa
DLa
g(X)(X − a) (X − a)−µa
7
On a des analogues partiels du théorème 8 et du corollaire 9 sur un anneau
commutatif quelconque (voir paragraphe 10), mais l’unicité de la décomposition
en éléments simples disparaît. Par exemple on a, dans un produit de deux anneaux
non nuls,
1
(1, −1)
(−1, 1)
1
−
=
+
.
X −1 X
X − (1, 0) X − (0, 1)
Théorème 10. Soit P un polynôme, soit f la fraction rationnelle P/D, soit Q le
quotient, que nous supposons non nul, de la division euclidienne de P par D, et
soit q le degré de Q. Alors Q est donné par la deuxième formule de Serret (voir
[1]) :
Q(X −1 ) = DLq0 (f (X −1) X q ) X −q
Preuve. Si d est le degré de D et si R est le reste de la division euclidienne de P
par D, alors la fraction rationnelle
X d−1 R(X −1 )
g(X) := X −1 f (X −1 ) − Q(X −1 ) =
X d D(X −1 )
est définie en 0, et nous avons
X q f (X −1 ) − X q Q(X −1 ) = X q+1 g(X) ≡ 0 mod X q+1 ,
ce qui, compte tenu du fait que X q Q(X −1 ) est un polynôme de degré au plus q,
implique
q
q
−1
DL0 X f (X ) − X q Q(X −1 ) = 0.
CQFD
Dans les notations 4 page 6 fixons une racine a de D, désignons par B l’ensemble des autres racines, et, pour toute application u : B → N, b 7→ ub , notons
|u| la somme des ub .
µa
Théorème 11. Le coefficient ca,k de (X − a)k dans DLaµa −1 ( (X−a)
) est
D(X)
X Y µb − 1 + u b 1
k
.
ca,k = (−1)
(a − b)µb +ub
µb − 1
B b∈B
u∈N
|u|=k
Preuve. Il suffit de multiplier les développements limités
µX
a −1 1
µb − 1 + n (−1)n (X − a)n
µa −1
DLa
=
(X − b)µb
µb − 1
(a − b)µb +n
n=0
CQFD
8
.
(4)
Corollaire 12. Le polynôme R(X) du théorème chinois (théorème 8 page 6) est
R(X) =
X
ca,k
D(a)=0
k+n<µa
f (n) (a)
(X − a)k+n ,
n!
où ca,k est donné par (4).
Corollaire 13. Les coefficients de la décomposition d’une fraction rationnelle en
éléments simples sont des polynômes à coefficients entiers dans
• les coefficients du numérateur,
• les racines du dénominateur,
• les inverses des différences des racines du dénominateur.
Ces polynômes sont homogènes de degré un dans les coefficients du numérateur
et ne dépendent que des multiplicités des racines du dénominateur. (On suppose
le dénominateur unitaire.)
5
Exponentielle
L’exemple le plus important de polynôme généralisé est peut-être l’exponentielle
!
∞
n
X
(X
−
a)
eX := ea
,
n!
n=0
a∈C
qui satisfait
d X
e = eX
dX
en tant que polynôme généralisé.
Plus généralement on peut, pour tout nombre réel t, définir le polynôme généralisé
!
∞ n
n
X
t
(X
−
a)
etX := eat
,
(5)
n!
n=0
a∈C
et observer l’identité entre polynômes généralisés
etX euX = e(t+u)X .
On a envie de dériver etX non seulement par rapport à X mais aussi par rapport
à t. Pour faire cela proprement il faut autoriser les coefficients d’un polynôme
9
généralisé à être non plus des constantes complexes, mais des fonctions C ∞ de
R dans C. Appelons polynôme généralisé à coefficients variables un polynôme
généralisé dont les coefficients sont des fonctions C ∞ de R dans C. On a alors
l’identité entre polynômes généralisés à coefficients variables
∂etX
= X etX .
∂t
On est souvent amené à calculer des développements limités du type
DLµa (etX f (X)),
où f (X) est une fraction rationnelle définie en a. Ce développement limité est
l’unique polynôme de degré ≤ µ satisfaisant
DLµa (etX f (X)) ≡ eat DLµa (f (X))
µ
X
tn (X − a)n
mod (X − a)µ+1 .
n!
n=0
(6)
Résumons cela par le
Théorème 14. Dans les notations 4 page 6 le reste de la division euclidienne de
etX par D(X) est donné par la formule de Wedderburn (voir [1])
X
D(a)=0
µa
D(X)
tX (X − a)
e
D(X)
(X − a)µa
DLaµa −1
(7)
le développement limité étant donné par (6).
6
Matrices
Soit A une matrice carrée à coefficients complexes.
Exercice 15. Montrer qu’il existe un unique polynôme unitaire D qui annule A
et qui divise tout polynôme annulant A.
On dit que D est le polynôme minimal de A.
Exercice 16. Soient f un polynôme généralisé, D un polynôme annulant A, et R
le reste de la division euclidienne de f par D. Montrer que la matrice R(A) ne dépend pas du choix du polynôme annulateur D. [Suggestion : utiliser les exercices
7 et 15.]
10
Il est alors naturel de poser
f (A) := R(A).
Exercice 17. Soient f, g deux polynômes généralisés et D le polynôme minimal
de A. Montrer f (A) = g(A) ⇐⇒ D divise f − g.
Exercice 18. Montrer (f g)(A) = f (A) g(A).
Théorème 19. La matrice etA := f (A), où f (X) := etX (voir (5)), dépend
différentiablement de t et satisfait dtd etA = A etA , e0A = 1.
Exercice 20. Démontrer l’énoncé ci-dessus.
Exercice 21. Soient
D(X) = X q + aq−1 X q−1 + · · · + a0
un polynôme unitaire, (ej ) la base canonique de Cq et A la matrice q fois q caractérisée par
j < q ⇒ A ej = ej+1 ,
A eq = −a0 e1 − · · · − aq−1 eq .
Montrer que D est le polynôme minimal de A.
Soit D un polynôme de degré q ≥ 1, soit f un polynôme généralisé, et soit
bq−1 X q−1 + · · · + b0 le reste de la division euclidienne de f par D.
Exercice 22. Montrer f (A) e1 = b0 e1 + · · · + bq−1 eq .
7
Suites récurrentes
Soit D un polynôme unitaire de degré q ≥ 1 ; soit CN l’ensemble des suites de
nombres complexes ; soit ∆ l’opérateur de décalage qui à la suite u dans CN
associe la suite ∆u dans CN définie par (∆u)t = ut+1 ; soit f ∈ CN ; soient
c0 , . . . , cq−1 dans C ; soit y l’unique élément de CN satisfaisant
D(∆) y = f,
yn = cn pour tout n < q ;
pour (n, t) dans N2 notons gn (t) le coefficient de X n dans le reste de la division
euclidienne de X t par D.
X
X
Théorème 23. Si t ≥ q alors yt =
cn gn (t) +
gq−1 (t − 1 − k) fk .
n<q
k<t
11
Preuve. Introduisons la suite de vecteurs xt := (yt , . . . , yt+q−1 ). Nous avons
xt+1 = B xt + ft eq ,
x0 = c,
où eq est le dernier vecteur de la base canonique de Cq , et B est la transposée de
la matrice A de l’exercice 21. D’où
xt = B t c + f0 B t−1 eq + f1 B t−2 eq + · · · + ft−1 eq .
Il suffit alors de prendre la première composante des membres de gauche et de
droite et d’invoquer l’exercice 22. CQFD
8
Équations différentielles
Soient D un polynôme unitaire de degré q ≥ 1 et y l’unique solution de l’équation
différentielle
d
y = f (t), y (n) (0) = yn ∀ n < q := deg D
(8)
D
dt
où f : R → C est une fonction continue.
Théorème 24. On a la formule de Collet (voir [1])
y(t) =
X
Z
yn gn (t) +
t
gq−1 (t − x) f (x) dx
0
n<q
où gn (t) est le coefficient de X n dans le reste de la division euclidienne de etX
par D.
[Pour D(X) = X q on retrouve la formule de Taylor avec reste intégral.]
Preuve. En posant vn := y (n−1) , v0n := yn−1 pour 1 ≤ n ≤ q, et en désignant par
eq le dernier vecteur de la base canonique de Cq , l’équation (8) prend la forme
v 0 (t) − B v(t) = f (t) eq ,
v(0) = v0
où B est la transposée de la matrice A de l’exercice 21. En appliquant e−tB on
obtient
d −tB
e
v(t) = e−tB f (t) eq , v(0) = v0 ,
dt
d’où
Z
t
f (x) e(t−x)B eq dx.
v(t) = etB v0 +
0
12
Compte tenu la formule de Wedderburn (7), il suffit alors de prendre la première
composante des membres de gauche et de droite et d’invoquer l’exercice 22.
CQFD
Soit h un polynôme généralisé à coefficients variables, soient f et y deux fonctions continues de R dans Cq , soient y0 un vecteur de Cq et A une matrice q fois q
à coefficients complexes. Si y est dérivable et satisfait
y 0 (t) + h(t, A) y(t) = f (t),
y(0) = y0 ,
(9)
alors
H(t, A) :=
Z
t
h(u, A) du
d H(t,A)
e
y(t) = eH(t,A) f (t),
dt
⇒
0
d’où le
Théorème 25. L’unique solution de (9) est donnée par la formule d’Euler (voir
[1])
y(t) = exp
Z
t
9
0
h(u, A) du y0 +
Z
0
t
exp
Z
v
h(u, A) du f (v) dv
t
Euclide
Par “anneau” on entend dans ce texte “anneau commutatif unitaire”. Pour la commodité du lecteur nous prouvons le théorème chinois.
Théorème 26 (théorème chinois). Soient A un anneau et I1 , . . . , In des idéaux
tels que Ip + Iq = A pour p 6= q. Alors le morphisme naturel de A dans le produit
des A/Ip est surjectif. De plus l’intersection des Ip coïncide avec leur produit.
Preuve. En multipliant les égalités A = I1 + Ip pour p = 2, . . . , n on obtient
A = I1 + I2 · · · In .
(10)
En particulier il y a un a1 dans A tel que
a1 ≡ 1 mod I1 ,
a1 ≡ 0 mod Ip ∀ p > 1.
De même il existe des éléments ap de A tels que ap ≡ δpq mod Iq (delta de Kronecker). Cela prouve la première assertion. Soit I l’intersection des Ip . En multipliant (10) par I on obtient
I = I1 I + II2 · · · In ⊂ I1 (I2 ∩ · · · ∩ In ) ⊂ I.
13
Cela donne la seconde assertion, directement pour n = 2, par récurrence pour
n > 2. CQFD
Soit A un anneau principal. Construisons l’anneau A∧ comme suit. Une famille
(ad )d6=0 d’éléments de A indexée par les éléments non nuls d de A représente un
élément de A∧ si elle satisfait
d | e ⇒ ad ≡ ae mod d
(où d | e signifie “d divise e”) pour toute paire (d, e) d’éléments non nuls de A.
Deux telles familles (ad )d6=0 et (bd )d6=0 représentent le même élément de A∧ si et
seulement si
ad ≡ bd mod d ∀ d 6= 0.
La structure d’anneau est définie de façon évidente. On plonge A dans A∧ en associant à tout élément a de A la famille constante égale à a. Par abus de notations on
désigne souvent par le même symbole un élément de A∧ et l’un de ses représentants. Soit P un système de représentants des classes d’association des éléments
premiers de A.
Lemme 27. Soient a = (ab )b6=0 dans A∧ et d un élément non nul de A tel que
ad ≡ 0 mod d. Il existe alors q dans A∧ tel que a = d q.
Preuve. Soient p dans P et i le plus grand entier j tel que pj divise d. Autrement
dit il existe un élément d0 de A qui est premier à p et qui satisfait d = pi d0 . Pour
tout entier positif j on a
api+j ≡ 0 mod pi .
Par suite il existe un élément a0j de A tel que api+j = pi a0j . On a
pi a0j+1 ≡ api+j+1 ≡ api+j ≡ pi a0j mod pi+j
et donc
a0j+1 ≡ a0j mod pj .
Pour tout j choisissons qpj tel que
d0 qpj ≡ a0j mod pj
et donc
d qpj ≡ apj mod pj .
On a alors
d0 qpj+1 ≡ a0j+1 ≡ a0j ≡ d0 qpj mod pj
14
et donc
qpj+1 ≡ qpj mod pj .
Soient b dans A, b 6= 0, et Pb l’ensemble (fini) des éléments de P qui divisent
b. Pour p dans Pb désignons par i(p) le plus grand entier j tel que pj divise b et
choisissons une solution qb dans A du système de congruences
qb ≡ qpi(p) mod pi(p) ,
p ∈ Pb ,
solution qui existe en vertu du théorème chinois (théorème 26 page 13). On vérifie
alors que la famille q := (qb )b6=0 est dans A∧ et qu’on a bien d q = a. CQFD
Voir théorème 32 page 18 pour une généralisation.
Soit a dans A∧ , soit d un élément non nul de A, soit µ(p) la multiplicité de p
dans P comme facteur de d, et soit
µ(p) p
µ(p)−1
DLp
a
d
un élément de A satisfaisant
µ(p) d
p
µ(p)−1
≡ apµ(p) mod pµ(p) .
a
DLp
µ(p)
d
p
Posons
ρ :=
X
p|d
µ(p) d
p
∈ A.
a
µ(p)
d
p
DLµ(p)−1
p
Soient B un anneau et A un sous-anneau intègre. Disons que A est principal
dans B si pour tout b dans B et tout d non nul dans A il existe un q dans B et un
r dans A tels que b = dq + r.
Théorème 28 (Premier énoncé principal). Soient A un anneau principal, a un
élément de A∧ et d un élément non nul de A. Dans les notations ci-dessus, les
éléments a, ad et ρ de A∧ sont congruents modulo d. De plus, si A est principal
dans B, alors il existe un unique morphisme de A-algèbres de B dans A∧ .
Preuve. Modulo d on a a ≡ ad d’après le lemme, et ad ≡ ρ par le théorème chinois
(théorème 26 page 13). Cela prouve le première assertion. Montrons la deuxième,
en commençant par l’unicité. Soit f un morphisme A-linéaire de B dans A∧ . Si b
et q sont dans B, et si d 6= 0 et r sont dans A, alors l’égalité b = d q + r implique
f (b) = d f (q) + r et donc f (b)d ≡ r mod d. Par suite il existe au plus un tel
15
morphisme. L’existence se démontre en posant f (b)d := r dans les notations cidessus, et en vérifiant que cette formule définit bien un morphisme A-linéaire de
B dans A∧ . CQFD
Un A-module est de torsion si chacun de ses vecteurs est annulé par un scalaire
non nul.
Théorème 29. Si A est principal dans B, alors tout A-module de torsion admet
une unique structure de B-module qui étend sa structure de A-module. De plus
tout morphisme A-linéaire entre A-modules de torsion est B-linéaire.
Preuve. Montrons l’unicité. Soit b dans B ; soit v dans notre module de torsion
V ; soit d dans A, d 6= 0, tel que dv = 0 ; soient q dans B et r dans A tels que
b = dq + r. On alors bv = rv, d’où l’unicité. L’existence se démontre en posant
bv := rv dans les notations ci-dessus, et en vérifiant que cette formule définit bien
une structure de B-module sur V qui étend la structure de A-module. La dernière
assertion est claire. CQFD
[Soit Homct (G, H) le groupe des morphismes continus du groupe topologique
b le complété profini de Z. MunisG dans le groupe topologique abélien H, et soit Z
sons Q/Z de la topologie discrète ou de la topologie induite par celle de R/Z. Mub
nissons également Q/Z de la structure de Z-module
fournie par le théorème 29.
On a alors
b Q/Z) = Q/Z.
b R/Z) = Homct (Z,
b Q/Z) = Homb (Z,
Homct (Z,
Z
b dans la catégorie
On retrouve ainsi le fait bien connu que Q/Z est le dual de Z
des groupes abéliens localement compacts. Voir L’intégration dans les groupes
topologiques de Weil, pp. 108-109.]
Soit T un sous-treillis du treillis des idéaux d’un anneau quelconque A. Voici
quelques exemples :
1. T est l’ensemble des idéaux non nuls d’un anneau intègre,
2. T est l’ensemble des puissances d’un idéal fixé d’un anneau quelconque,
3. soient Y un ensemble d’idéaux premiers de A et T l’ensemble des idéaux I
de A tels que tout idéal premier contenant I est dans Y ,
4. T est l’ensemble des idéaux ouverts d’un anneau topologique.
Construisons l’anneau A∧ comme suit. Un élément de A∧ est représenté par une
famille (aI )I∈T d’éléments de A satisfaisant
I ⊂ J ⇒ aI ≡ aJ mod J
16
pour tout I, J dans T . Deux telles familles (aI )I∈T et (bI )I∈T représentent le
même élément de A∧ si et seulement si
aI ≡ bI mod I
∀ I ∈ T.
La structure d’anneau est définie de façon évidente. Par abus de notations on désigne souvent par le même symbole un élément de A∧ et l’un de ses représentants.
On envoie A dans A∧ en associant à tout élément a de A la famille constante égale
à a.
Appelons module de torsion un A-module dont chaque vecteur est annulé
par un élément de T . [Dans le cas de l’exemple 3 ci-dessus, un A-module est de
torsion si et seulement si son support est contenu dans Y — Bourbaki, Alg. Com.
II.4.4.] Supposons pour simplifier que l’intersection des éléments de T est réduite
à zéro, et considérons A comme un sous-anneau de A∧ .
Théorème 30 (Deuxième énoncé principal). Tout A-module de torsion V admet
une unique structure de A∧ -module telle que
a ∈ A∧ , v ∈ V, I ∈ T, Iv = 0 ⇒ av = aI v.
Cette structure de A∧ -module sur V étend la structure de A-module.
Preuve. L’unicité étant évidente, vérifions l’existence. Pour v dans V et I, J dans
T tels que Iv = 0 = Jv, on a aI v = aI+J v ; ce vecteur ne dépendant que de a et
v, on peut le noter av. Montrons a (v + w) = av + aw. Si a est dans A∧ , et si I, J
sont dans T et vérifient Iv = 0 = Jw, on a
a (v + w) = aI∩J (v + w) = aI∩J v + aI∩J w = a v + a w.
CQFD
Théorème 31 (Troisième énoncé principal). Soit B un anneau contenant A. Supposons que tout A-module de torsion est muni d’une structure de B-module qui
étend sa structure de A-module, et que tout morphisme A-linéaire entre A-modules
de torsion est B-linéaire. Il existe alors un unique morphisme de A-algèbres f de
B dans A∧ qui satisfait b v = f (b) v pour tout vecteur v d’un A-module de torsion
et tout b dans B.
Preuve. Pour tout I dans T notons 1I l’unité de A/I. Montrons l’unicité. Soient
b dans B et I dans T . Il existe a dans A satisfaisant
a · 1I = b · 1I = f (b) · 1I = f (b)I · 1I ,
17
et donc f (b)I ≡ a mod I. Pour vérifier l’existence, on pose f (b)I := a dans
les notations ci-dessus, et on vérifie que cette formule définit bien un morphisme
A-linéaire f de B dans A∧ qui satisfait b v = f (b) v pour tout vecteur v d’un Amodule de torsion et tout b dans B. [Pour vérifier que f (b)I et f (b)J sont congrus
modulo J pour I ⊂ J dans T , on utilise l’hypothèse que la projection canonique
de A/I sur A/J est B-linéaire.] CQFD
Soit A un anneau de Dedekind ; soit T l’ensemble des idéaux non nuls de A ;
et soit M l’ensemble des idéaux maximaux de A. Pour tout A-module V , soit
V ∧ la limite projective des V /IV avec I dans T ; et, pour tout P dans M, soit
VP∧ la limite projective des V /P n V . Alors A∧ et A∧P sont des A-algèbres ; d’après
le théorème chinois (théorème 26 page 13) A∧ est le produit direct des A∧P ; le
A-module V ∧ est un A∧ -module ; le A-module VP∧ est un A∧P -module ; V ∧ est le
produit direct des VP∧ . Voici une généralisation du lemma 27 page 14.
Théorème 32 (Quatrième énoncé principal). L’anneau A∧ est A-plat. Si V est
un A-module de type fini, alors le morphisme naturel de A∧ ⊗A V dans V ∧ est
un isomorphisme. En particulier, si I est dans T , alors IA∧ est le noyau de la
projection canonique de A∧ sur A/I.
Preuve La première assertion découle de la proposition VII.4.2 de Homological
Algebra par Cartan et Eilenberg (Princeton University Press, 1956). La deuxième
assertion découle de l’exercice II.2 du même livre combiné avec la proposition
10.13 de Introduction to Commutative Algebra par Atiyah et Macdonald (AddisonWesley, 1969). La troisième assertion est obtenue en tensorisant la suite exacte
0 → I → A → A/I → 0
par A∧ sur A. CQFD
10 Le cas d’un anneau quelconque
(Rappel : par “anneau” on entend “anneau commutatif unitaire”.) Soient A un
anneau, X une indéterminée, et a un élément de A. Pour toute série formelle
X
f=
an (X − a)n ∈ A[[X − a]]
n≥0
et tout entier positif k posons
X n
f (k)
:=
an (X − a)n−k ∈ A[[X − a]].
k!
k
n≥k
18
On a alors la Formule de Taylor
f=
X f (n) (a)
(X − a)n .
n!
n≥0
On considère la A-algebra A[[X − a]] comme une A[X]-algebra via le morphisme de A[X] dans A[[X − a]] qui applique P sur
X P (n) (a)
(X − a)n .
n!
n≥0
Pour toute f dans A[[X − a]] et tout entier positif k on appelle développement
limité de f en a à l’ordre k le polynôme
DLka (f ) :=
X f (n) (a)
(X − a)n .
n!
n≤k
Notons que DLka induit un morphisme d’anneaux
DLka : A[[X − a]] −→
A[X]
(X − a)k
.
Soient a1 , . . . , ar des éléments de A ; soient m1 , . . . , mr des entiers > 0 ; et soit
u le morphisme naturel de A[X]/(D) dans le produit B des A[X]/(X − ai )mi :
r
u:
Y
A[X]
A[X]
−→ B :=
(D)
(X − ai )mi
i=1
.
Supposons que ai − aj est inversible pour tout i 6= j. En particulier
Di (X) :=
D(X)
(X − ai )mi
est inversible dans A[[X − ai ]]. Soit v le morphisme
v : Pi mod (X − ai )
mi
r
i=1
7→
r
X
i=1
DLamii −1
Pi
Di
Di mod D
de B dans A[X]/(D).
Théorème 33 (Cinquième énoncé principal). Les applications u et v sont des
isomorphismes inverses. De plus le corollaire 12 page 9 reste vrai (avec les changements de notations évidents).
Preuve La composition u ◦ v est clairement l’identité de B. Les deux anneaux
étant libres de rang deg D sur A, cela prouve l’énoncé. QED
19
11 Reste universel
Dans ce paragraphe on travaille sur un anneau pour lequel aucune notation n’est
introduite (rappel : par “anneau” on entend “anneau commutatif unitaire”). Le
reste de la division euclidienne de X r par (X − a1 ) · · · (X − ak ) est donné par
un polynôme universel à coefficients entiers en a1 , . . . , ak , X. Pour calculer ce
polynôme commençons par rappeler l’interpolation de Newton.
Adoptons la notation générale
f (u, v) :=
f (v) − f (u)
v−u
,
définissons le polynôme d’interpolation de Newton
N(f (X); a1 , . . . , ak ; X)
d’un polynôme arbitraire f (X) en a1 , . . . , ak par
N(f (X); a1 , . . . , ak ; X) := f (a1 ) + f (a1 , a2 )(X − a1 )
+f (a1 , a2 , a3 )(X − a1 )(X − a2 ) + · · ·
+f (a1 , . . . , ak )(X − a1 ) · · · (X − ak−1 )
et posons
g(X) := N(f (X); a1 , . . . , ak ; X),
h(X) := N(f (a1 , X); a2 , . . . , ak ; X).
Théorème 34 (théorème d’interpolation de Newton). On a g(ai ) = f (ai ) pour
i = 1, . . . , k. En particulier g(X) est le reste de la division euclidienne de f (X)
par (X − a1 ) · · · (X − ak ). De plus f (a1 , . . . , ai ) est symétrique en a1 , . . . , ai .
Preuve. Raisonnons par récurrence sur k, le cas k = 1 étant facile. On a
g(X) = f (a1 ) + (X − a1 ) h(X).
L’égalité g(a1 ) = f (a1 ) est claire. Supposons 2 ≤ i ≤ k. Par hypothèse de
récurrence on a h(ai ) = f (a1 , ai ) et donc
g(ai) = f (a1 ) + (ai − a1 ) f (a1 , ai ) = f (ai ).
Vu que f (a1 , . . . , ak ) est le coefficient dominant de g(X), il est symétrique en
a1 , . . . , ak . CQFD
20
Supposons que
bi :=
Y
(ai − aj )
j6=i
est inversible pour tout i. Par interpolation de Lagrange on a, pour f (X) = X r =
fr (X),
X ar
i
fr (a1 , . . . , ak ) =
.
bi
i
La série génératrice de la somme sn = sn (a1 , . . . , ak ) des monômes de degré n
en a1 , . . ., ak étant
X ak−1 b−1
X ak−1+n
1
i
i
i
=
=
X n,
(1 − a1 X) · · · (1 − ak X)
1 − ai X
bi
i
n,i
on obtient
X ak−1+n
i
sn =
bi
i
,
fr (a1 , . . . , ak ) = sr−k+1 ,
avec la convention sn = 0 pour n < 0, et le reste de la division euclidienne de X r
par (X − a1 ) · · · (X − ak ) est
k
X
sr−i+1 (a1 , . . . , ai ) (X − a1 ) · · · (X − ai−1 )
i=1
(même si certains bi ne sont pas inversibles).
12 Une adjonction
Rappelons qu’une Q-algèbre est un anneau contenant Q (“anneau” signifiant “anneau commutatif unitaire”) et qu’une dérivation sur une Q-algèbre A est endomorphisme a 7→ a0 de Q-espace vectoriel qui satisfait (ab)0 = a0 b + ab0 pour tout
a, b dans A. Une Q-algèbre différentielle est une Q-algèbre munie d’une dérivation. Nous laissons au lecteur le soin de définir les notions de morphisme de
Q-algèbres et de Q-algèbres différentielles. À toute Q-algèbre A est attachée la
d
. Soient
Q-algèbre A[[X]] (où X est une indéterminée) munie de la dérivation dX
A une Q-algèbre et B une Q-algèbre différentielle. Notons respectivement
A(B, A) et D(B, A[[X]])
le Q-espace vectoriel des morphismes de Q-algèbres de B dans A et celui des
morphismes de Q-algèbres différentielles de B dans A[[X]]. Les formules
f (b) = F (b)(0),
F (b) =
∞
X
f (b(n) )
n=0
21
n!
X n,
où F (b)(0) designe le terme constant de F (b), induisent une correspondance bijective et Q-linéaire entre vecteurs f de A(B, A) et vecteurs F de D(B, A[[X]]).
Vérifions par exemple le point suivant. Soit F dans D(B, A[[X]]), soit f dans
A(B, A) le terme constant de F , et soit G dans D(B, A[[X]]) l’extension de f .
Montrons G = F . On a
G(b) =
=
=
∞
X
G(b)(n) (0) n
X par Taylor
n!
n=0
∞
X
G(b(n) )(0) n
X car G(x)0 = G(x0 )
n!
n=0
∞
X
f (b(n) ) n
X
n!
n=0
par définition de G
∞
X
F (b(n) )(0) n
X par définition de f
=
n!
n=0
∞
X
F (b)(n) (0) n
X car F (x0 ) = F (x)0
=
n!
n=0
= F (b)
par Taylor.
13 Wronski
Voici un bref résumé du paragraphe II.2 du livre Calcul différentiel de H. Cartan.
Si E et F sont des espaces de Banach, notons L(E, F ) l’espace de Banach des
applications linéaires continues de E dans F . Soient E un espace de Banach, I
un intervalle ouvert non vide, et A une application linéaire continue de I dans
L(E, E). Considérons les EDO
x0 = A(t) x,
(11)
où l’inconnue est une application x de I dans E, et
X 0 = A(t) X,
(12)
où l’inconnue est une application X de I dans F := L(E, E). Soit t0 dans I. La
solution de (12) satisfaisant X(t0 ) = IdE est appelée la résolvante de (11) et est
notée t 7→ R(t, t0 ).
22
Soient B une application linéaire continue de I dans E et x0 un vecteur de E.
La solution de
x0 = A(t) x + B(t), x(t0 ) = x0
est
x(t) := R(t, t0 ) x0 +
Z
t
R(t, τ ) B(τ ) dτ.
t0
Voici un commentaire additionel. Pour t dans I soit A(t) la multiplication à
gauche par A(t). En particular A est une application linéaire continue de I dans
L(F, F ). Soit R sa résolvante. Alors R(t, t0 ) est la multiplication à gauche par
R(t, t0 ).
Corollaire. Si W est une application différentiable de I dans F satisfaisant
W = A W , alors
W (t) = R(t, t0 ) W (t0).
0
Corollaire du Corollaire. Si de plus W (t0 ) est inversible, alors
R(t, t0 ) = W (t) W (t0)−1 .
*
[1] Pour les justifications terminologiques, taper didrygaillard sur Google.
23
Téléchargement