École des Mines de Douai — FIAASMathématiques Intégrales multiples Chapitre 2 Intégrales multiples F. Delacroix, École des Mines de Douai, 10 septembre 2010 Introduction Présentation et objectifs Les intégrales multiples constituent la généralisation des intégrales dites simples, c’està-dire des intégrales de fonctions d’une variable réelle. On s’attache ici à la généralisation à des fonctions dont le nombre de variables est plus important (deux ou trois, rarement plus). On se place ici dans le cadre de l’intégrale de Riemann. Notons que d’autres généralisations sont possibles, comme les intégrales de Riemann généralisées (cf. chapitre 4), l’intégrale de Lebesgue (liée à la théorie de la mesure), les intégrales curvilignes, l’intégrale de formes différentielles. . . Au niveau des applications les plus directes, on trouve les calculs d’aires, volumes, masse, centre de gravité, moments. . . Les résultats présentés dans ce chapitre ne sont qu’un aperçu de la théorie générale. On pourra consulter à ce sujet tout traité d’analyse. Prérequis: Chapitre 1 Analyse et topologie (limites, continuité, dérivation, développements limités) (SUP) Intégration (SUP) Suites: Chapitre 15 Analyse 1ère année (transformations intégrales, fonctions spéciales, EDP,. . .) Analyse numérique, analyse complexe Thermodynamique, Electromagnétisme, Mécaniques classique, quantique et relativiste Exemples Exemple 1 Pour optimiser la puissance d’un chauffage à installer, un chauffagiste est amené à estimer le volume d’un bâtiment. Ce bâtiment, ayant bénéficié d’une architecture moderne, a une base rectangulaire mais un toit d’une forme compliquée. Comment connaître son volume ? L’installateur commence par quadriller (virtuellement) le sol et mesure la hauteur du toit en chaque point de la grille. Comment l’ensemble de ces mesures permet-il de donner une approximation du volume du bâtiment ? Quels paramètres permettent d’améliorer la qualité de cette approximation ? 1 Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS Cet exemple touche à la définition même d’une intégrale multiple. En effet, le volume du bâtiment n’est autre que l’intégrale triple de la fonction constante 1 sur toute la zone d’espace délimitée par le bâtiment. Comme on le verra dans ce chapitre, cette intégrale est définie comme une forme de limite : on « remplit » cette portion d’espace par des pavés (des parallélépipèdes rectangles) de plus en plus petits et on ajoute leurs volumes. Cette définition assure donc que l’intégrale en question peut être approchée en considérant la somme des volumes de parallélépipèdes basés sur le quadrillage dont il est question. Cette méthode fournit l’analogue, pour une intégrale double, de la méthode des rectangles, fréquemment utilisée pour calculer une approximation des intégrales simples. Exemple 2 Dans les papiers laissés par l’architecte, le propriétaire du bâtiment précédent retrouve la spécification précise de la forme du toit, sous forme d’une surface d’équation cartésienne z = P (x, y) où P est une fonction polynôme (connue) du 4ème degré en deux variables. Comment ce renseignement permet-il au chauffagiste de calculer de manière exacte le volume du bâtiment sans recourir à de nombreuses mesures ? Pour la suite de cet exemple, on est amené à utiliser une méthode de calcul exact d’une intégrale double d’une fonction assez simple (un polynôme). Pour ce type de calcul on est amené à invoquer le théorème de Fubini, qui consiste, sous certaines conditions bien précises, à intégrer selon une variable à la fois. La possibilité d’utiliser ce théorème dépend fortement de la forme du domaine d’intégration. Une autre méthode explicite est celle du changement de variable, qui sera illustrée plus loin. 1 1.1 Intégrales doubles Intégrale sur un pavé Définition 3 Un pavé de R2 est le produit cartésien de deux intervalles compacts [a, b] × [A, B] (cf. figure 1). Son aire est (B − A)(b − a). y B Δ A 0 a b x Figure 1 – Pavé dans R2 Soit f une fonction continue sur un pavé ∆ = [a, b] × [A, B]. On sait alors que f est bornée (en tant que fonction continue sur un compact, cf. chapitre 1) et que, pour tout 2 École des Mines de Douai — FIAASMathématiques Intégrales multiples x ∈ [a, b], l’application partielle [A, B] −−−→ R y 7−−−→ f (x, y) est continue sur [A, B], donc intégrable sur cet intervalle. Notons F : [a, b] −−−→ R x Z B 7−−−→ f (x, y) dy A Lemme 1 La fonction F définie ci-dessus est uniformément continue sur [a, b]. Preuve. Soit ε > 0. Comme f est continue sur le compact ∆, d’après le théorème de Heine, elle est uniformément continue sur ∆. Il existe donc η > 0 tel que, pour tous (x, y), (x0 , y 0 ) ∈ ∆, on ait (k(x, y) − (x0 , y 0 )k∞ < η) =⇒ f (x, y) − f (x0 , y 0 ) < ε B−A Soit un tel η et x, x0 ∈ [a, b] tels que |x − x0 | < η. Alors, pour tout y ∈ [A, B], on a (en choisissant y 0 = y) : k(x, y) − (x0 , y)k∞ = |x − x0 | de sorte que l’inégalité précédente peut être intégrée de A à B : 0 F (x)−F (x ) = Z B A 0 [f (x, y) − f (x , y)] dy 6 Z B A 0 f (x, y)−f (x , y) dy 6 Z B A ε dy = ε. B−A Ainsi, pour ε > 0 arbitraire, on a prouvé l’existence de η > 0 tel que dès que x et x0 vérifient |x − x0 | < η on a F (x) − F (x0 ) 6 ε. Ceci signifie que F est uniformément continue sur [a, b]. La fonction F est en particulier continue sur [a, b], donc intégrable sur [a, b]. Ceci justifie la définition 4 suivante. Définition 4 Avec les notations précédentes, on appelle intégrale double de f sur ∆ le nombre ZZ f (x, y) dx dy = Z b "Z B a ∆ # f (x, y) dy dx. A Remarques 1. La notation « dx dy » ne désigne pas la « multiplication de dx par dy » (c’est en fait un produit tensoriel de mesures). 2. On prouve assez facilement que l’on a aussi ZZ f (x, y) dx dy = ∆ Z B "Z b A # f (x, y) dx dy. a 3 Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS R RR 3. On écrit parfois ∆ au lieu de ∆ (surtout dans un contexte théorique), la définition de ∆ et le dx dy ne laissant aucune ambiguïté quant à la dimension. Proposition 2 (Linéarité et croissance de l’intégrale sur un pavé) L’application I∆ : C 0 (∆, R) −−−→ R ZZ f 7−−−→ f (x, y) dx dy, ∆ où C 0 (∆, R) désigne le R-espace vectoriel des fonctions continues sur ∆, est une forme linéaire croissante. ♠ Que signifie « forme linéaire croissante » ? ♠ Démontrer cette proposition. 1.2 Intégrale sur un domaine quarrable Définition 5 Deux pavés [a1 , b1 ] × [A1 , B1 ] et [a2 , b2 ] × [A2 , B2 ] de R2 sont quasi-disjoints si leurs intérieurs ]a1 , b1 [×]A1 , B1 [ et ]a2 , b2 [×]A2 , B2 [ sont disjoints. Un compact K de R2 est quarrable si, pour tout η > 0, il existe deux familles finies de pavés quasi-disjoints deux à deux (∆i )ni=1 et (∆0j )m j=1 telles que n [ ∆i ⊂ K ⊂ i=1 m X Aire(∆0j ) j=1 − n X m [ ∆0j j=1 Aire(∆i ) < η i=1 Figure 2 – Un compact quarrable Dans l’exemple de la figure 2, on a représenté deux fois le même compact K. A gauche, il est rempli « par l’intérieur » par la famille des ∆i . À droite, il est contenu « au plus près » dans la réunion des ∆0j . La définition 5 exige donc que ceci soit possible quelle que 4 École des Mines de Douai — FIAASMathématiques Intégrales multiples soit la précision η exigée, celle-ci servant à majorer la différence d’aire des deux familles de pavés. Remarques 1. Il existe des algorithmes permettant de construire de telles familles de pavés. Ils sont utilisés dans les techniques de traitement d’image par ordinateur. 2. Il est assez difficile de présenter simplement un exemple de compact non quarrable. De tels exemples sont en général de nature fractale. En conséquence, cette définition est de nature technique et sert principalement à définir l’intégrale, son usage pratique étant limité. 3. Il s’agit d’une notion ayant trait à la « théorie de la mesure ». Dans le cadre de cette théorie, un tel compact est également dit « mesurable ». Cette notion est en fait subordonnée à un choix. On retrouvera ces phénomènes en théorie des probabilités (chapitre 12). Théorème 3 Soit f une fonction continue et bornée sur un ouvert Ω de R2 et K un compact quarrable inclus dans Ω. Alors il existe un unique réel I tel que, pour tout ε > 0, il existe η > 0 tel que pour toutes familles de pavés quasi-disjoints (∆i )ni=1 et (∆0j )m j=1 vérifiant les conditions de la définition 5, on ait I− n ZZ X i=1 f (x, y) dx dy < ε. ∆i Ce réel I s’appelle l’intégrale de f sur K et se note ZZ f (x, y) dx dy. K En un certain sens, l’intégrale de f sur K apparaît comme limite d’intégrales de f sur des pavés remplissant K. La démonstration du théorème consiste donc en l’établissement de l’existence de cette limite (en construisant des suites de Cauchy) et en montrant qu’elle est indépendante des familles de pavés utilisées pour la construire. 1.3 Théorème de Fubini Soient a, b ∈ R deux réels tels que a < b, ϕ1 et ϕ2 deux fonctions réelles définies et continues sur [a, b] telles que ∀x ∈ [a, b], ϕ1 (x) 6 ϕ2 (x). On pose n D = (x, y) ∈ R2 , o a 6 x 6 b et ϕ1 (x) 6 y 6 ϕ2 (x) (cf. figure 3). Soit f : D −−−→ R une fonction continue. 5 Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS y y=φ2(x) D a b y=φ1(x) x Figure 3 – Un domaine de R2 propice à l’utilisation du théorème de Fubini Théorème 4 (Fubini) Avec les notation précédentes, on a ZZ f (x, y) dx dy = D Z b "Z ϕ2 (x) a # f (x, y) dy dx ϕ1 (x) ♠ Proposer un énoncé similaire dans le cas d’un compact D permettant d’abord une intégration par rapport à x. Lorsque ϕ1 et ϕ2 sont des constantes (i.e. si D est un pavé) et lorsque f s’écrit comme produit d’une fonction de x et d’une fonction de y, on a alors le corollaire suivant. Corollaire 5 Etant donnés un pavé ∆ = [a, b] × [A, B], une fonction F continue sur [a, b] et une fonction G continue sur [A, B], on a ZZ F (x)G(y) dx dy = Z b ! Z B F (x) dx a ∆ ! G(y) dy A ♠ Démontrer ce corollaire à partir du théorème de Fubini. 1.4 Interprétations et applications L’aire d’un domaine quarrable D est, par définition, Lorsque f est une fonction positive, ZZ dx dy. D ZZ f (x, y) dx dy représente le volume de la portion D d’espace délimitée par le plan (xOy), les droites verticales s’appuyant sur la frontière de D (appelées génératrices) et la surface d’équation cartésienne z = f (x, y) (cf. figure 4). ♠ Qu’est-ce que le volume d’un cylindre dont la base est un compact D et la hauteur h ? 6 École des Mines de Douai — FIAASMathématiques z Intégrales multiples Surface d'équation z=f(x,y) pour (x,y)2D (contour apparent) Génératrices 0 y D x Figure 4 – Interprétation graphique de l’intégrale double Si une fonction positive ρ représente la masse volumique d’une plaque P, alors la masse de la plaque P est M= ZZ ρ(x, y) dx dy P et son centre de gravité G a pour coordonnées 1 ZZ x ρ(x, y) dx dy M ZZP 1 yG = y ρ(x, y) dx dy. M P xG = On peut interpréter ces formules en considérant que l’abscisse (resp. ordonnée) de G est la « moyenne » des abscisses (resp. ordonnées) des points de la plaque, moyenne pondérée par la masse volumique ρ. Plus généralement, la moyenne d’une fonction f sur un domaine D (d’aire non nulle), pondérée par une fonction positive ρ est 1 mD (f ) = ZZ ZZ f (x, y) ρ(x, y) dx dy. D ρ(x, y) dx dy D 1.5 Changements de variables Soient D un compact quarrable et f : D −−−→ R une fonction continue. Dans le cadre de la théorie de la mesure, le théorème suivant est parfois appelé théorème de transfert. Théorème 6 (Changement de variables) ◦ ◦ Soit ϕ : ∆ −−−→ D une bijection réalisant un C 1 -difféomorphisme de ∆ sur D. Alors ZZ f (x, y) dx dy = D ZZ ∆ f ◦ ϕ(u, v) Jϕ (u, v) du dv où Jϕ (u, v) désigne le jacobien de ϕ. 7 Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS y φ ~ D v Δ x u f Ñ Figure 5 – Schéma d’un changement de variable pour une intégrale double ◦ La notation ∆ désigne l’intérieur de ∆, c’est-à-dire le plus grand ouvert contenu dans ∆. Le théorème permet donc à la bijection ϕ de ne pas être différentiable en « quelques » points situés sur la frontière du domaine ∆. Exemple 6 (Coordonnées polaires) L’exemple suivant est l’un des changements de variables les plus classiques. Il consiste à représenter les points du plan (identifié à R2 via le choix d’un repère orthonormé) sous forme polaire, selon les formules bien connues suivantes (où (x, y) désigne les coordonnées cartésiennes d’un point et (r, θ) ses coordonnées polaires) : y ( x = r cos θ y = r sin θ M r θ O x La fonction ϕ qui à (r, θ) ∈ R+ × [0, 2π] associe (x, y) vérifie bien les hypothèses du théorème 6 et on a ∂x (r, θ) ∂r Jϕ (r, θ) = ∂y (r, θ) ∂r ∂x (r, θ) cos θ −r sin θ ∂θ = =r ∂y sin θ r cos θ (r, θ) ∂θ avec ϕ(R+ × [0, 2π]) = R2 . Comme on peut le constater, cette fonction ϕ n’est pas un C 1 -difféomorphisme de R+ × [0, 2π] sur R2 (elle n’est pas bijective), mais réalise un C 1 -difféormorphisme, lorsque restreinte à R∗+ ×]0, 2π[, de cet ensemble sur R2 \ (R+ × {0}). La demi-droite R+ × {0} est parfois appelée coupure et, quitte à modifier l’intervalle de variation de θ, peut être remplacée par n’importe quelle demi-droite issue de l’origine. L’origine est appelée pôle. Vis-à-vis du calcul intégral, la suppression de cette coupure ne change rien (elle est de « mesure nulle »). Prenons l’exemple de l’intégrale suivante à calculer (où R > 0) : I= ZZ e−(x D 8 2 +y 2 ) dx dy où D = {(x, y) ∈ R2 , x2 + y 2 6 R2 } École des Mines de Douai — FIAASMathématiques Intégrales multiples Par la transformation polaire, le disque D (centre 0 et rayon R) se transforme en le pavé ∆ = [0, R] × [0, 2π] et on a, par le théorème 6, en remarquant que x2 + y 2 = r2 : I= ZZ 2 r e−r dr dθ. ∆ On se retrouve dans la situation du corollaire 5, et l’on obtient : I= Z R −r2 re ! Z 2π dr 0 0 1 2 dθ = 2π − e−r 2 R 2 = π(1 − e−R ). 0 Bien sûr, le choix de passer en coordonnées polaires se justifie par la forme particulière du domaine d’intégration et/ou de la fonction à intégrer. Pour la transformation du domaine d’intégration, on prendra bien soin de ne pas oublier les restrictions inhérentes au passage en polaire (r > 0 et 0 < θ < 2π) avant de procéder à la transformation du domaine proprement dite (conditions sur (x, y) à traduire en conditions sur (r, θ)). ♠ Expliciter le passage de (x, y) à (r, θ). 2 Intégrales triples Les définitions et résultats donnés dans le cas des intégrales doubles s’étendent sans difficulté à la dimension 3 (et même au-delà). On laisse au lecteur le soin de refaire ces constructions. On ne mentionne ici qu’un résumé des résultats les plus utiles en pratique. Soient K un compact quarrable de R2 , ϕ1 et ϕ2 deux fonctions réelles définies sur K telles que ∀(x, y) ∈ K, ϕ1 (x, y) 6 ϕ2 (x, y). On pose n D = (x, y, z) ∈ R3 , tq o (x, y) ∈ K, ϕ1 (x, y) 6 z 6 ϕ2 (x, y) (cf. figure 6). Enfin, soit f : D −−−→ R une fonction continue. z z=φ2(x,y) D z=φ1(x,y) 0 y K x Figure 6 – Un domaine de R3 propice à l’utilisation du théorème de Fubini 9 Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS Théorème 7 (Fubini) Avec ces notations, ZZZ "Z ϕ2 (x,y) ZZ f (x, y, z) dx dy dz = D K # f (x, y, z) dz dx dy ϕ1 (x,y) En appliquant le théorème 7 dans le cas où ϕ1 et ϕ2 sont des fonctions constantes sur K (D est alors un cylindre de base K) et où f est le produit d’une fonction continue sur la base par une fonction continue sur une génératrice (i.e. f (x, y, z) = F (x, y)G(z) avec F continue sur K et G continue sur [ϕ1 , ϕ2 ]), on obtient le corollaire suivant. Corollaire 8 Sous ces hypothèses, Z ϕ2 ZZ ZZZ F (x, y)G(z) dx dy dz = F (x, y) dx dy D G(z) dz . ϕ1 K Théorème 9 (Changement de variables) Soient D un compact quarrable de R3 , f : D −−−→ R une fonction continue et ϕ : ◦ ◦ ∆ −−−→ D une bijection qui réalise un C 1 -difféomorphisme de ∆ sur D. Alors ZZZ f (x, y, z) dx dy dz = ZZZ D ∆ f ◦ ϕ(u, v, w) Jϕ (u, v, w) du dv dw z w D x φ ~ Δ u y v f ℝ Figure 7 – Schéma général d’un changement de variables dans une intégrale triple Exemple 7 (Coordonnées cylindriques) L’espace est rapporté à un repère orthonormé et les points repérés par leurs coordonnées cylindriques (relativement à l’axe (Oz)) (r, θ, z) selon les formules ϕ R3 \ {(0, 0, z), z ∈ R} ←−−− R∗+ × [0, 2π[×R (x, y, z) ←−−−− (r, θ, z) 10 x = r cos θ y = r sin θ z=z École des Mines de Douai — FIAASMathématiques Intégrales multiples Le jacobien de cette transformation donne : ∂x (r, θ, z) ∂r ∂y Jϕ (r, θ, z) = (r, θ, z) ∂r ∂z (r, θ, z) ∂r ∂x (r, θ, z) ∂θ ∂y (r, θ, z) ∂θ ∂z (r, θ, z) ∂θ ∂x (r, θ, z) ∂z cos θ −r sin θ 0 ∂y (r, θ, z) = sin θ r cos θ 0 = r. ∂z 0 0 1 ∂z (r, θ, z) ∂z z z M r M r y x θ Coordonnées cylindriques y φ x θ Coordonnées sphériques Figure 8 – Illustration des coordonnées cylindriques et sphériques ♠ Pourquoi a-t-on choisi ces terminologies : coordonnées «cartésiennes», «polaires», «cylindriques», «sphériques» ? Exemple 8 (Coordonnées sphériques) On considère la transformation suivante : ψ i R3 \ {(0, 0, z), z ∈ R} ←−−− R∗+ × [0, 2π[× − π2 , π2 (x, y, z) ←−−−− (r, θ, ϕ) Alors h x = r cos ϕ cos θ y = r cos ϕ sin θ z = r sin ϕ cos ϕ cos θ −r cos ϕ sin θ −r sin ϕ cos θ Jψ (r, ϕ, θ) = cos ϕ sin θ r cos ϕ cos θ −r sin ϕ sin θ sin ϕ 0 r cos ϕ soit, en factorisant r dans les deux dernières colonnes et cos ϕ dans la seconde colonne, puis en développant par rapport à la troisième ligne : cos ϕ cos θ − sin θ − sin ϕ cos θ Jψ (r, ϕ, θ) = r cos ϕ cos ϕ sin θ cos θ − sin ϕ sin θ sin ϕ 0 cos ϕ 2 h = r2 cos ϕ sin ϕ(sin ϕ sin2 θ + sin ϕ cos2 θ) + cos ϕ(cos ϕ cos2 θ + cos ϕ sin2 θ) = r2 cos ϕ[sin2 ϕ + cos2 ϕ] = r2 cos ϕ. 11 i Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS ♠ Quels sont les noms des angles θ et ϕ ? ♠ Exprimer les formules dans le cas où ϕ est l’angle mesuré entre la demi-droite [Oz) et la demi-droite [OM ). Comment s’appelle alors cet angle ? Que devient le jacobien de ce changement de variables ? ♠ Comment définit-on le volume d’un compact quarrable de R3 ? ♠ Montrer que le volume d’une boule de rayon R de R3 est donné par la formule bien connue 4 V = πR3 . 3 3 Méthodes numériques On ne donne ici qu’un aperçu des méthodes numériques d’intégration, essentiellement dans le cas des intégrales simples. Soient f : [a, b] −−−→ R une fonction continue et a = a0 < a1 < · · · < an = b une subdivision de l’intervalle [a, b]. On définit le pas de la subdivision comme h= max i∈{0,...,n−1} (ai+1 − ai ). Lorsque, pour tout i, on a ai+1 − ai = n1 , la subdivision est dite régulière. Définition 9 On appelle somme de Riemann associée à f et à la subdivision a = a0 < a1 < · · · < an = b toute somme du type S= n−1 X (ai+1 − ai )f (xi ) i=0 où la famille (xi )n−1 i=0 est telle que pour tout i, xi ∈ [ai , ai+1 ]. y 0 a ai xi ai+1 b x Figure 9 – Illustration d’une somme de Riemann 12 École des Mines de Douai — FIAASMathématiques Intégrales multiples Théorème 10 Les sommes de Riemann associées à f convergent vers ab f (x) dx lorsque le pas de la subdivision tend vers 0. Plus précisément, pour tout ε > 0, il existe η > 0 tel que, pour toute subdivision de [a, b] de pas inférieur à η et toute somme de Riemann S associée à f et à cette subdivision, on a R Z b − f (x) dx S < ε. a On va tenter d’estimer l’erreur commise en approchant l’intégrale de f sur [a, b] par une somme de Riemann, sous l’hypothèse supplémentaire que f est de classe C 1 . On a, pour une somme de Riemann fixée (en reprenant les notations précédentes) : Z ai+1 ai Z ai+1 f (x) dx − (ai+1 − ai )f (xi ) = ai [f (x) − f (xi )] dx 6 Z ai+1 ai |f (x) − f (xi )| dx avec, pour x ∈ [ai , ai+1 ], d’après l’inégalité des accroissements finis : |f (x) − f (xi )| 6 sup |f 0 | |xi − x| [ai ,ai+1 ] On peut donc minimiser l’erreur commise sur le sous-intervalle [ai , ai+1 ] en minimisant la distance |xi − x| pour tout x variant dans cet intervalle. Cela consiste donc à prendre pour xi le milieu de l’intervalle : xi = 12 (ai + ai+1 ). Ainsi, on aura toujours |xi − x| 6 1 (a − ai ) 6 12 h. On en tire, en remarquant également que sup[ai ,ai+1 ] |f 0 | 6 sup[a,b] |f 0 | : 2 i+1 Z ai+1 ai f (x) dx − (ai+1 − ai )f (xi ) 6 Z ai+1 ai 1 h h2 h sup |f 0 | dx = sup |f 0 |(ai+1 −ai ) 6 sup |f 0 | 2 [a,b] 2 [a,b] 2 [a,b] Ainsi, grâce à la relation de Chasles des intégrales et à l’inégalité triangulaire : Z b f (x) dx − S = a 6 6 n−1 X Z ai+1 i=0 n−1 X i=0 n−1 X i=0 ai Z ai+1 ai f (x) dx − (ai+1 − ai )f (xi ) f (x) dx − (ai+1 − ai )f (xi ) h2 n h2 sup |f 0 | = sup |f 0 | 2 [a,b] 2 [a,b] En particulier, dans le cas où la subdivision est régulière (h = n1 ), on a Z b a f (x) dx − S 6 1 sup |f 0 |. 2n [a,b] C’est la méthode du point milieu, ou méthode des rectangles. Graphiquement, cela consiste à approcher l’aire située sous la courbe représentative de f par l’aire de rectangles 13 Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS de largeur tendant vers 0 et dont la hauteur est la valeur de f au milieu de l’intervalle de la subdivision. L’ordre asymptotique de cette méthode est n1 . La méthode des trapèzes consiste, elle, à approcher (le graphe de) la fonction par (celui d’)une fonction affine par morceaux, coïncidant avec le f sur chaque point de la subdivision (on montre facilement qu’une telle fonction affine par morceaux est définie de manière unique). Pour cette méthode, on pose donc S= n−1 X i=0 f (ai ) + f (ai+1 ) (ai+1 − ai ) 2 ce qui consiste à faire la « somme » des aires des trapèzes ainsi formés. ♠ Illustrer graphiquement cette méthode. ♠ Quelle est l’expression de la fonction affine par morceaux coïncidant avec f aux points de la subdivision ? Citons également la méthode de Simpson, qui consiste à approcher f par des arcs de parabole sur chaque intervalle de la subdivision. La convergence de cette méthode est plus rapide. Ces méthodes numériques peuvent se généraliser au cas d’intégrales multiples, soit grâce au théorème de Fubini, soit par approximation du domaine d’intégration par des pavés (quadrature), cette dernière méthode permettant de généraliser directement la méthode des rectangles (cf. exemple 1). 4 Exercices Les exercices 1 (A, B et D), 2 et 3 (A et B) sont à préparer. Exercice 1 : Exemples d’intégrales doubles Calculer les intégrales doubles suivantes : A= B= ZZ sin(x + y) cos(x − y) dx dy ZZ∆ |x − y| dx dy ∆ où ∆ = {(x, y) ∈ R2 , 0 6 x 6 π, 0 6 y 6 π − x} où ∆ = {(x, y) ∈ R2 , 0 6 x 6 a et 0 6 y 6 b} (a, b ∈ R∗+ ) ( ) x2 y 2 C= 2x(2x + y ) dx dy où ∆ = (x, y) ∈ R , 2 + 2 6 1 et x > 0 (a, b ∈ R∗+ ) a b ∆ ( ) ZZ 2 y2 2 3 2 x D= x y dx dy où ∆ = (x, y) ∈ R , 2 + 2 6 1 et x > 0 (a, b ∈ R∗+ ) a b ∆ ZZ dx dy E= où ∆ = {(x, y) ∈ R2 , |x| 6 x2 + y 2 6 1} 2 2 2 ∆ (1 + x + y ) " # ZZ x3 + y 3 F = exp dx dy où ∆ = {(x, y) ∈ R2 , y 2 − 2px 6 0 et x2 − 2py 6 0} (p ∈ R∗+ ) xy ∆ Indication : poser x = u2 v et y = uv 2 . ZZ 14 2 2 2 École des Mines de Douai — FIAASMathématiques Intégrales multiples Exercice 2 : Aires et volumes 1. Calculer l’aire du domaine de R2 délimité à gauche par le cercle de centre (0, 0) et de rayon 2 et à droite par la parabole d’équation x = 14 y 2 − 1. 2. Calculer le volume du domaine suivant de R3 : n o √ √ √ ∆ = (x, y, z) ∈ R3+ , x + y + z 6 1 . Exercice 3 : Exemples d’intégrales triples Calculer les intégrales triples suivantes : A= B= ZZZ ZZZ∆ |x2 − y 2 | dx dy dz où ∆ = {(x, y, z) ∈ R3 , x2 + y 2 6 z 2 et 0 6 z 6 1} où ∆ = {(x, y, z) ∈ R3+ , x + y + z 6 1} xyz(1 + x + y + z) dx dy dz ∆ Indication : poser x = u(1 − v), y = uv(1 − w), z = uvw. ZZZ dx dy dz C= où ∆ = {(x, y, z) ∈ R3+ , x + y + z 6 1} ∆ (1 + x + y + z)2 Exercice 4 : Une suite d’intégrales Soit la fonction f : R2 \ {(0, 0)} −−−→ R x2 − y 2 (x, y) 7−−−→ (x2 + y 2 )2 1. La fonction f admet-elle une limite en (0, 0) ? 2. Pour tout n entier naturel non nul, calculer l’intégrale double Jn = ZZ f (x, y) dx dy ∆n où ∆n est le quart de couronne circulaire dans R2 délimité par les deux cercles de centre 1 et les deux droites d’équations y = x et y = −x. (0, 0) et de rayons respectifs n1 et n+1 3. Quelle est la limite de la suite (Jn )n∈N∗ ? Exercice 5 Pour tout h ∈ R+ , on considère l’intégrale Ih = ZZZ ∆h dx dy dz (1 + x2 z 2 )(1 + y 2 z 2 ) où ∆h = [0, 1] × [0, 1] × [0, h]. Calculer la limite de Ih lorsque h → +∞ et en déduire l’existence et la valeur de lim Z h h→+∞ 0 Arctan t t !2 dt. 15 Chapitre 2 MathématiquesÉcole des Mines de Douai — FIAAS Exercice 6 : Centre de gravité Déterminer la position du centre de gravité d’une demi-boule de rayon R dont la masse volumique est proportionnelle à la distance au centre. Exercice 7 : Masse et moment d’inertie ( ) x2 y 2 z 2 On considère l’ellipsoïde E = (x, y, z) ∈ R , 2 + 2 + 2 6 1 où a, b, c ∈ R∗+ . a b c 1. Calculer s ZZZ 2 2 2 x y z I= exp 2 + 2 + 2 dx dy dz. a b c E 3 2. E est en réalité un solide homogène de masse volumique 1. Déterminer sa masse. 3. Déterminer le moment d’inertie de E par rapport à l’axe (Oz). 16