Université Paris 6 Année universitaire 2011-2012 Master enseignement, première année, cours d’algèbre. Résumé de la séance du 14 septembre. On désigne toujours par K un corps de caractéristique nulle. Structure naturelle de K-espace vectoriel sur l’ensemble L(E, F ) des applications linéaires d’un K-ev E dans un K-ev F . Si G est un troisième K-ev, si λ ∈ K, si f et f 0 sont deux applications linéaires de E vers F et g et g 0 deux applications linéaires de F vers G, alors (g + g 0 ) ◦ f = g ◦ f + g 0 ◦ f, (λg) ◦ f = λ(g ◦ f ), g ◦ (f + f 0 ) = g ◦ f + g ◦ f 0 et g ◦ (λf ) = λ(g ◦ f ). Remarque : les égalités de la première ligne se démontrent en n’utilisant que les définitions de la somme de deux applications linéaires et du produit d’une application linéaire par un scalaire, et non la linéarité elle-même ; cette dernière est par contre cruciale pour établir les égalités de la seconde ligne. Familles libres, génératrices, bases, dimension Définition d’une famille libre, d’une famille génératrice, et d’une base d’un K-ev E, et premiers exemples. • Si (ei ) est une famille d’éléments de E telle que tout élément de E soit l’un des ei alors ei est une famille génératrice. • La famille vide est libre ; à ce propos, courte digression : toute assertion de la forme ∀x ∈ ∅ , P (x) est vraie, indépendamment de la proposition logique P . • Si l’on désigne par ei l’élément (0, . . . , 0, |{z} 1 , 0, . . . , 0) de K N alors (ei ) au rang i est une base de K n . • La famille (X i )i∈N est une base de K[X]. • Toute sous-famille d’une famille libre est libre. • Toute famille contenant une famille génératrice est génératrice. Quelques remarques : si (ei ) est une famille libre de E alors ei 6= ej dès que i 6= j, et ei 6= 0 pour tout i. Si (ei ) est une famille génératrice de E et si (fj ) est une famille d’éléments de E telle que chaque ei soit combinaison linéaire des fj , alors (fj ) est également génératrice. Théorie de la dimension. Étant donnée son importance, j’ai choisi de faire en cours toutes les démonstrations la concernant. On a ainsi tout d’abord défini un espace de dimension finie comme un espace admettant une famille génératrice finie, puis établi successivement les résultats suivants. Lemme. Soit E un K-ev, soit P un sous-ensemble de E, et soit (ei ) une famille libre déléments de P qui est maximale en tant que famille libre d’éléments de P . Tout élément de P est alors combinaison linéaire des ei . 1 Lemme. Soit E un K-ev, soit (e1 , . . . , en ) une famille libre de E et soit (f1 , . . . , fm ) une famille génératrice de E. Il existe alors un sous-ensemble J de {1, . . . , m} tel que ((ei )16i6n , (fj )j∈J ) soit une base de E. Corollaire (théorème de la base incomplète). Si E est un K-espace vectoriel de dimension finie, toute famille libre finie de E peut être prolongée en une base (finie) de E. Corollaire. Tout K-espace vectoriel de dimension finie admet une base finie. Remarque. On peut montrer que tout espace vectoriel (sans hypothèse de dimension) admet une base, mais la preuve fait alors appel à un résultat délicat de théorie des ensembles (lemme de Zorn). Lemme. Soit E un K-espace vectoriel, soit (e1 , . . . , en ) une famille libre de E et soit (f1 , . . . , fm ) une famille génératrice de E. On a alors nécessairement n 6 m. Remarque. La preuve consiste en réalité à montrer le résultat suivant, plus fort, par récurrence : pour tout r 6 n on a r 6 m et il existe un sous-ensemble J de {1, . . . , m} de cardinal m − r tel que ((ei )16i6r , (fj )j∈J ) soit génératrice. Soit E un K-espace vectoriel de dimension finie. On montre à l’aide de ce qui précède que les bases de E sont toutes finies et de même cardinal, appelé dimension de E. Si on note n cette dimension alors toute famille libre de E est finie de cardinal inférieur ou égal à n, et est une base si et seulement si son cardinal est égal à n. Toute famille génératrice de E contient une base de E, est de cardinal supérieur ou égal à n, et est une base si et seulement si elle est de cardinal égal à n. Un K-espace vectoriel est de dimension nulle si et seulement si il est réduit à {0}. Si E est un K-espace vectoriel de dimension finie n et si F est un sous-espace vectoriel de E alors F est de dimension finie majorée par n, et dim F = n si et seulement si F = E. Le sous-espace F admet un supplémentaire et pour tout supplémentaire G de F on a dim E = dim F + dim G. Comportement vis-à-vis des applications linéaires. Soient E et F deux K-espaces vectoriels et soit f : E → F une application linéaire. Soit (ei ) une famille d’éléments de E. Si f est injective et si (ei ) est libre alors f (ei ) est libre ; si f est surjective et si (ei ) est génératrice alors f (ei ) est génératrice ; si f est bijective et si (ei ) est une base alors (f (e − i)) est une base. Il s’ensuit que si f est bijective alors E est de dimension finie si et seulement si F est de dimension finie, et si c’est le cas dim E = dim F . Si S est un sous-espace vectoriel de E supplémentaire de Ker f alors f|S induit une bijection S ' Im f . On en tire la formule du rang : si E est de dimension finie alors Im f aussi et dim Ker f + dim Im f = dim E. 2 Notons que lorsque E = F cette égalité ne signifie pas, en général, que Ker f et Im f soient supplémentaires. La formule du rang a un corollaire fondamental : si E et F sont tous deux de dimension finie et si dim E = dim F (ce qui s’appliquera notamment lorsque E = F ) alors on a équivalence entre les assertions suivantes : i) f est injective ; ii) f est surjective ; iii) f est bijective. La dérivation et la multiplication par X dans le R-espace vectoriel R[X] constituent des contre-exemples à cette équivalence en dimension infinie. Exercices traités en cours Nous avons fait les exercices 1, 2 et 3 de la feuille 1. Pour l’exercice 1 deux preuves ont été données (m’une en exhibant une base, l’autre en appliquant la formule du rang à une application linéaire bien choisie). 3