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THS et discours schizophrénique
● J.P. Brettes*
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l faut s’y faire. Le 17 ß estradiol (E2) biodisponible diffuse librement dans la cellule cible, et ses effets biologiques résultent d’une liaison directe de haute affinité aux
récepteurs estrogéniques et d’une régulation de l’expression du
gène. L’estrogène (E) est un puissant mitogène, inducteur à la
fois du cycle cellulaire (prolifération) et de la synthèse de facteurs de croissance.
En postménopause, du fait du pic maximal d’incidence du cancer du sein (200 à 300 nouveaux cancers pour 100 000 femmes
et par an), on aurait pu s’attendre à ce que la part estrogénique
de THS (E seul) soit responsable d’une nette augmentation
d’incidence (surrisque induit). Or, il n’en est rien. Il faut
attendre au moins dix à quinze ans d’utilisation pour mesurer,
aux doses habituelles, l’effet carcinogène des estrogènes.
L’augmentation du risque de cancers liés aux estrogènes est
très modeste, de 5 % (1) ou 6 % (RR = 1,06) par tranche de
cinq années d’utilisation (2). Ce surrisque est à peine supérieur
à celui d’une ménopause tardive.
L’adjonction de progestatifs (P) (E + P), qui protègent l’endomètre, devait en toute logique jouer pleinement son rôle de
protection de la glande mammaire (inhibiteur de la prolifération). Or, il n’en est rien. P n’est pas protecteur. Il semble, au
contraire, que certains progestatifs (dérivés norstéroïdes,
androgéniques) aggravent l’incidence du cancer (24 % par
tranche de cinq années d’utilisation) et que certains schémas
de prescription combinés-continus soient plus néfastes que les
discontinus. Ainsi, pour mémoire, l’effet de P exogène sur
l’épithélium mammaire est le suivant :
– physiologiquement, la prolifération de l’épithélium mammaire est maximale au milieu de la phase lutéale du cycle sous
l’influence des hormones conjointes du corps jaune ;
– les progestatifs androgéniques agissent comme les androgènes. Les précurseurs androgéniques, dérivés ∆ 4 et ∆ 5,
considérés comme biologiquement inactifs, ou la puissante testostérone stimulent en effet la prolifération épithéliale mammaire selon différents mécanismes (aromatisation, action sur
RE α ou action directe sur les gènes) ;
– l’apoptose paraît être contrôlée par l’arrêt de P. Les schémas
discontinus respectent l’apoptose. Les schémas combinéscontinus augmenteraient les risques. Cependant, les doses plus
élevées de P des schémas discontinus pourraient jouer en leur
défaveur.
Une certaine cohérence apparaît aussi avec l’étude des modifications de la densité mammaire à l’imagerie. Les densités éle-
* Service de gynécologie et obstétrique, hôpital civil, hôpitaux universitaires
de Strasbourg, 1, place de l’Hôpital, BP 426, 67091 Strasbourg.
La Lettre du Sénologue - n° 8 - mai 2000
vées en postménopause constituent un facteur de risque de
cancer. De fait, la densité des cellules épithéliales présentes
dans le tissu mammaire, mesurée avec les marqueurs de la prolifération (PCNA, Ki 67), est significativement plus élevée
avec E + P qu’avec E seul (3). Cela témoigne d’une prolifération intense (augmentation du tissu fibroglandulaire) beaucoup
plus en rapport avec l’effet biologique des hormones qu’avec
l’effet masque (augmentation du taux de cancers manqués du
fait de difficultés de détection).
L’exposition de la glande mammaire aux niveaux hormonaux
circulants élevés détermine le risque hormonal. Avant la
ménopause, la sécrétion ovarienne d’E2 et de P du cycle élève
les niveaux circulants, dont l’action à distance s’effectue selon
le mécanisme endocrine. Après la ménopause, la principale
source d’estrogènes devient le tissu adipeux. La graisse succède à l’ovaire en tant que source d’aromatase. À l’effondrement ovarien d’estradiol se substitue une importante production sanguine d’estrone (E1) à partir de l’aromatisation
extraglandulaire des précurseurs androgéniques (adipocytes
centraux). La conversion (sulfotransférase) d’E1 et d’E2 en
estrone sulfate (E1s) et estradiol sulfate (E2s) constitue le plus
important pool d’estrogènes circulants inactifs. Cette sulfoconjugaison est constamment réversible (sulfatase), et met à tout
moment une quantité importante d’estrogènes à la disposition
de la cellule cible. L’accumulation en excès de graisse centrale
(obésité viscérale) augmente les niveaux hormonaux circulants, facteur de risque endogène.
En réalité, les mécanismes d’intracrinologie prévalent en postménopause : les estrogènes agissent localement dans les cellules mammaires, à l’endroit même de leur synthèse à partir
des précurseurs androgéniques circulants. La diffusion de ces
estrogènes actifs dans la circulation générale est minime. La
cellule mammaire normale (stroma adipocytaire, épithélium)
est en effet capable de synthétiser et de concentrer elle-même
l’estradiol qui agit directement sur ses récepteurs. La cellule
cancéreuse (hormonodépendante) se caractérise par la capacité
d’amplifier ce phénomène. L’intracrinie repose sur l’existence
d’un système enzymatique spécifique à chaque tissu. La cellule mammaire contient trois enzymes (aromatase, sulfatase,
17ß-HSD types 1 et 2) permettant la biosynthèse de l’estradiol
à partir de l’important pool plasmatique d’estrogènes sulfate.
L’estradiol agit directement ou selon les mécanismes autocrines et paracrines. Les concentrations locales d’estradiol
dans le tissu mammaire tumoral et cancéreux deviennent ainsi
nettement supérieures à celles du plasma, témoignant des
mécanismes de synthèse et d’accumulation des estrogènes
dans la cellule même.
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Si toutes les préparations estrogéniques possèdent un effet hormonal identique, la puissance de celui-ci varie selon différents
agents et voies d’administration. L’administration orale
d’estrogènes (conjugués équins, valérate d’E2, E2 micronisé)
après le premier passage hépatique induit un pic d’E2 élevé et
un taux supraphysiologique d’E1, de trois à cinq fois supérieur
à celui d’E2 (rapport E1/E2 à cinq), facilitant la conversion et
le stockage sous forme d’estrone sulfate. Les voies cutanées
rétablissent des concentrations plasmatiques physiologiques
entre E1 et E2, dont le rapport reste proche de 1. La faible
fraction biodisponible d’E2 (3 %) agit directement sur la cellule cible.
Il reste que, par rapport au mécanisme d’intracrinie, une réduction progressive des doses d’estrogènes doit contrebalancer
l’effet-durée pour ne jamais voir apparaître de signes évidents
d’alarme (intracrinie) à la disposition du clinicien (mastodynies, tension mammaire spontanée ou provoquée) ; que le
choix des progestatifs est d’abord d’exclure les 19 norstéroïdes
et l’acétate de médroxyprogestérone (risque intermédiaire), et
de cibler préférentiellement les dérivés prégnanes ou norprégnanes ayant une activité antisulfatasique et facilitant la sulfotransférase ; enfin, que les schémas discontinus doivent être
privilégiés.
préoccupation anamnestique préchirurgicale, refusent l’évidence biologique et contestent systématiquement le résultat
des études épidémiologiques, même rigoureusement menées.
Quelques oncologues alarmistes attribuent au THS la responsabilité de l’incidence élevée des cancers du sein. Si 5 % des
cancers sont génétiques, 95 % des “cancers sporadiques” sont
en réalité hormonodépendants. L’accumulation centrale de
graisses périménopausique (fréquemment observée dans la
population occidentale) est finalement bien plus dangereuse
(risque endogène élevé) que le THS, qui, prescrit dans ces cas,
n’entraîne pas un surcroît de risque.
La lutte contre le surpoids devrait finalement être au centre de
nos débats. Quoi qu’il en soit, réduire individuellement et progressivement les doses d’estrogènes et choisir ses progestatifs
et ses voies d’administration restent une réflexion thérapeutique constamment prioritaire.
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1. Willet WC, Graham C, Stampfer M. Postmenopausal estrogens – Opposed,
unopposed, or none of the above. JAMA 2000 ; 283 (4) : 534-5.
2. Ross RK, Paganini-Hill A, War PC, Pike MC. Effect of hormone replacement
therapy on breast cancer risk : estrogen versus estrogen plus progestin. J Nat
Cancer Inst 2000 ; 92 (4) : 328-32.
3. Hofseth LJ, Raafat AM, Osuch JR, Pathak DR, Slomski CA, Haslam SZ. Hormone replacement therapy with estrogen or estrogen plus medroxyprogesterone
acetate is associated with increased epithelial proliferation in the normal postmenopausal breast. J Clin Endocrinol Metab 1999 ; 84 (12) : 4559-65.
In medio stat virtus
Toute position extrême concernant le THS est injustifiée. Certains gynécologues, dénués d’inquiétude ou éloignés de toute
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