D O S S I E R Indication et contre-indication du THS après carcinome in situ strict (CCIS) ● A. Lesur*, N. Dohollou** L a problématique de la prescription d’hormones substitutives de la ménopause (THS) chez des femmes atteintes d’un CCIS est plus fréquente qu’autrefois pour deux raisons : – d’une part, l’incidence du CCIS est en augmentation, du fait notamment des campagnes de dépistage, – d’autre part, les demandes de traitement de la ménopause sont plus nombreuses, chez des patientes habituées depuis des années à prendre une contraception estroprogestative et bien décidées à poursuivre par un traitement substitutif. Le dogme de l’interdiction pure et simple de toute hormone estroprogestative après un cancer, qu’il soit infiltrant ou in situ, a été depuis plusieurs années ébranlé, mais la contre-indication reste médicolégale, même si, sporadiquement, chacun reconnaît l’avoir enfreinte dans certains cas. Les publications récentes sur le THS n’ont pas simplifié le débat. En effet, si la possibilité de réintroduire les hormones substitutives de la ménopause chez des patientes traitées pour un cancer invasif du sein est évoquée régulièrement dans la littérature (6, 12, 19, 24, 32, 35, 44, 46, 52, 60, 61), l’association THS et risque de cancer du sein fait l’objet de nombreuses autres publications. Depuis plus de dix ans, les études se succèdent, qu’il s’agisse d’études cas-témoins, de cohortes ou de méta-analyses : l’augmentation du risque semble réelle, bien que faible ; elle est uniquement enregistrée après au moins sept ans d’utilisation et disparaît rapidement à l’arrêt du traitement. La mise en évidence de cette augmentation du risque, très nette dans la métaanalyse du Lancet, dont la méthodologie est satisfaisante (7), avait déjà déclenché un certain émoi à travers les médias à l’époque. Les articles récents (50, 54) ont à nouveau alerté l’opinion publique sur ce risque, notamment en ce qui concerne l’association estroprogestative. Même si le risque est faible, il concerne un nombre important de patientes, compte tenu de l’incidence du cancer du sein (augmentation majeure depuis trente ans) et du nombre des candidates au THS. La question est de savoir si ce risque, acceptable eu égard au bénéfice escompté du THS chez une patiente indemne de toute pathologie antérieure, est autorisé chez des patientes ayant présenté un CCIS. * Centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy. ** Clinique Bordeaux-Nord Aquitaine. La Lettre du Sénologue - n° 9 - juin 2000 L’entité CCIS est complexe. Elle présente de multiples facettes, qui rendent difficile la définition d’une conduite unique. En effet, il existe une diversité importante de formes cliniques et infracliniques, corrélées à des choix thérapeutiques divers. Si actuellement, l’association quadrantectomie-radiothérapie devient le standard, on observe retrospéctivement une grande disparité de traitement, allant de la zonectomie seule à la mammectomie. L’élaboration du diagnostic histologique est difficile, et nécessite une équipe entraînée. Le taux de récidives du CCIS varie de façon importante, de 3 à 63 % (18). Depuis l’essai du NSABP B-17 de Fisher (21), on sait que ce taux est amélioré par une radiothérapie, qui le ramène de 16,4 % à 7 %. Les récidives peuvent se faire une fois sur deux sous forme infiltrante, hypothéquant alors le pronostic vital, qui n’était pas en jeu initialement. Toute la question de l’association THS/CCIS réside dans l’hypothèse que les hormones augmentent le risque de récidive de la maladie. Peu d’articles sont consacrés à ce problème, et il est difficile d’en tirer une conclusion précise. Récemment, les résultats du NSABP B-24 ont été publiés (20), mettant en évidence une diminution des récidives des CCIS traités par tamoxifène, qu’elles soient invasives ou in situ. Cette réduction d’incidence s’harmonise avec les données antérieurement connues sur la diminution du risque de cancer controlatéral chez des patientes traitées par tamoxifène pour cancer invasif du sein (B-14), et avec celles de l’essai de prévention NSABP P1 (22), qui montre également une diminution du risque de cancer du sein chez des femmes à risque ayant été soumises au tamoxifène. Le débat théorique pourrait donc se résumer, comme le suggère K. Pritchard, par la proposition “THS ou tamoxifène ?”, voire, de façon plus osée, “THS et tamoxifène ?” (47). De surcroît, les hormones sont responsables, dans un certain nombre de cas, d’une densification du tissu mammaire, entraînant des difficultés de diagnostic mammographique. Cette constatation est particulièrement importante dans le cas de la surveillance des CCIS, car la majorité des récidives se fait sous forme infraclinique (microcalcifications), nécessitant une excellente lisibilité des mammographies. Il faut reconnaître cependant que les progrès de l’imagerie, le contrôle de qualité (56) et la pratique de clichés centrés agrandis augmentent 17 D O S S I E considérablement la valeur prédictive de l’examen, ces patientes n’étant de toute façon pas soumises au dépistage organisé, compte tenu de leur antécédent (11, 34). RISQUE SPONTANÉ DE RÉCIDIVE DU CCIS Si le taux des récidives est variable selon les études, un certain nombre de facteurs sont maintenant connus, qui favorisent leur survenue (voir p. 11 à 16). Le diagnostic histologique est très difficile, nécessitant une expérience importante afin de distinguer les différents états d’hyperplasie atypique du CCIS et sans méconnaître une lésion micro-invasive (39, 66). Pour exemple, dans une nouvelle analyse de la série Dupont et Page publiée en 1989 (15), 30 % des hyperplasies atypiques étaient en fait des CCIS de bas grade. Le risque de micro-invasion est lié à la taille du CCIS, la probabilité étant d’autant plus grande que sa taille est importante et qu’il existe de la nécrose. Le compte-rendu anatomopathologique doit obéir à des règles précises, car il guide la thérapeutique ultérieure (Comment bien lire un compterendu d’anatomie pathologique en pathologie mammaire. La Lettre du Sénologue 1999 ; 4 : 29). Les facteurs de récidive seront donc la taille de la tumeur, l’existence d’une nécrose, le haut grade de la lésion. Le respect des marges saines nécessitera souvent des reprises chirurgicales pouvant nécessiter une mastectomie. Ainsi, paradoxalement, pour une lésion non invasive, le traitement local peut s’avérer beaucoup plus agressif que pour une petite tumeur invasive permettant un traitement locorégional conservateur. Le taux de récidives après mastectomie est faible mais non nul si l’on considère un recul suffisant d’une dizaine d’années (63). En termes de geste conservateur, Fisher, dans l’essai NSABP B-17, a démontré l’efficacité de la radiothérapie : on passe de 13,4 % à 8,2 % de récidives non invasives, et de 13,4 % à 3,9 % de récidives invasives (21). Cette efficacité est confirmée dans la récente publication de l’EORTC. ARGUMENTS THÉORIQUES À L’ENCONTRE DU TRAITEMENT SUBSTITUTIF Le rôle hypothétique du THS dans la survenue de récidives après CCIS est peu documenté, les prescriptions étant assez rares jusqu’à présent. Les mécanismes d’action in vitro des estrogènes ont été beaucoup étudiés. Les résultats d’observation sont souvent discordants, et les conclusions difficiles à valider (3, 37, 41, 49). On dénombre peu d’études s’intéressant à l’association THS et risque de récidive de CCIS. Nous retenons celle de Habel et Daling (26), qui s’intéresse au risque de récidive après carcinome in situ du sein, sur une étude de cohorte de 709 patientes dans la région de Washington de 1981 à 1992. Ces patientes ont bénéficié d’une chirurgie conservatrice ; 15 % d’entre elles présentaient une récidive dans les cinq premières années après le diagnostic, et 31 % au bout de dix ans. Plusieurs facteurs sont étudiés, dont le THS. Il n’y a pas de lien entre l’utilisation du THS et la survenue d’un carcinome in situ ; en revanche, la prise ou la poursuite d’un THS pendant au moins deux ans 18 R après le diagnostic aurait entraîné une augmentation du risque de récidive (RR = 1,8 ; IC 95 % : 0,7-5,0). Dans cette étude, l’indice corporel joue également un rôle important dans le risque de récidive. Cette augmentation du risque concerne aussi bien les récidives in situ que les récidives invasives. THS et cancer du sein : un lien possible De nombreuses études ont tenté d’évaluer le risque hormonal et la survenue d’un carcinome invasif du sein. Récemment, deux articles ont mis en cause non seulement l’augmentation due aux estrogènes mais aussi une augmentation majorée avec l’association estroprogestative (50, 54, 64). Il n’est pas de notre propos d’analyser cette relation, mais seulement de rappeler qu’il n’existe aucune étude randomisée en double aveugle THS contre placebo, méthodologie idéale pour des résultats fiables. Toutes les études de cohortes, cas-témoins et méta-analyses présentent de nombreux biais. Il faut également se souvenir que les hormones utilisées dans ces études sont des estrogènes équins (hormones le plus fréquemment utilisées aux ÉtatsUnis) à des doses de 0,625 à 1,250 mg/j durant 21/28 jours, soit isolés, la patiente étant hystérectomisée, soit associés à des progestatifs non utilisés en Europe, norstéroïdes et androgéniques. Néanmoins, la méta-analyse du Lancet en 1997 a mis en évidence un risque modéré mais réel, après un certain nombre d’années de traitement, qui peut se rapporter au risque spontané d’une ménopause tardive. Toutes ces études sont concentrées sur la survenue de carcinomes invasifs, et ne mentionnent jamais l’existence de lésions in situ. Cependant, tous les arguments retenus par les opposants au THS après cancer du sein sont utilisables dans ce cas de figure, obéissant à la même logique, en vertu de la possibilité de récidives des CCIS sous forme invasive. Ainsi, la ménopause précoce et la castration, en diminuant le risque de survenue d’un cancer du sein, pourraient être profitables (14, 32). Tamoxifène et CCIS Plaidant également contre l’utilisation du THS après un CCIS, on retiendra les résultats de l’essai B-24 de Fisher (20), publiés en juin 1999, qui mettent en évidence une diminution du risque de récidive dans le groupe traité par tamoxifène, par rapport au groupe témoin traité par placebo, randomisé en double aveugle. Mille huit cent quatre femmes atteintes de CCIS, incluant résection avec ou sans marges saines, ont été randomisées de mars 1991 à avril 1994 les deux groupes recevaient le même traitement local ; la randomisation se faisait sur l’adjonction ou non du tamoxifène. Le suivi médian est de 74 mois, et la comparaison s’est faite entre les taux de récidives sous forme invasive et non invasive, ipsilatérales et controlatérales. Soixante-cinq pour cent des patientes étaient ménopausées et 35 % préménopausées ; 80 % des lésions mesuraient un centimètre ou moins ; 16 % de l’effectif présentait des marges positives. Cent trente cancers (70 invasifs, 60 in situ) sont apparus dans le groupe des 899 patientes sous placebo, contre 84 (41 invasifs, 43 in situ) dans le groupe des 899 patientes sous tamoxifène. Comme cela apparaît dans le tableau I, il existe une diminution du taux de récidives tout événement, qui passe de 13,4 % à 8,2 % (p = 0,0009), soit une réduction relative La Lettre du Sénologue - n° 9 - juin 2000 Tableau I. Site, incidence cumulative, taux et ratios de premier évènement. Fisher. B-24. Placebo Placebo Groupe Nombre Nombre Incidence cumulative d’événements d’événements à 5 ans (%) (n = 899) Taux* Tamoxifène Tamoxifène Groupe IC 95 %* Nombre Nombre Incidence cumulative d’événements d’événements à 5 ans (%) (n = 899) Ratio** Taux* Cancer mammaire et autres 169 169 16-7 38-12 126 126 12-6 27-50 0-72 (0,57-0,91) Tous les cancers mammaires Total Invasif*** Non invasif**** 130 130 70 70 60 60 13-4 7-2 6-2 29-32 15-79 13-53 84 84 41 41 43 43 8-2 4-1 4-3 18-33 8-95 9-39 0-63 (0,47-0,83) 0-57 (0,38-0,55) 0-69 (0,46-1,04) Cancer mammaire ipsilatéral Total Invasif Non invasif 87 87 40 40 47 47 – 4-2 5-1 19-62 9-02 10-60 63 63 23 23 40 40 – 2-1 3-9 13-75 5-02 8-73 0-70 (0,50-0,98) 0-56 (0,32-0,95) 0-82 (0,53-1,28) Cancer mammaire controlatéral Total Invasif Non invasif 36 36 23 23 13 13 2-3 1-1 8-12 5-19 2-39 18 18 15 15 33 1-8 0-2 3-93 3-27 0-66 0-48 (0,26-0,87) 0-63 (0,31-1,26) 0-22 (0,04-0,81) Cancer mammaire régional ou à distance 77 – 1-58 33 – 0-66 0-42 (0,07-1,82) Autre cancer Total Second cancer autre qu’endométrial Cancer endométrial Décès sans maladie évidente 39 39 26 26 22 11 11 3-3 – – – 8-80 5-86 0-45 2-48 42 42 25 25 77 10 10 4-4 – – – 9-17 5-46 1-53 2-18 1-04 (0,66-1,65) 0-93 (0,52-1,68) 3-39 (0,64-33,42) 0-88 (0,33-2,28) * Taux annuel pour 1 000 patientes. ** Taux du groupe tamoxifène sur taux du groupe placebo. *** Comprend le cancer mammaire ipsilatéral, controlatéral, maladie locale, régionale et distante. **** Comprend les tumeurs ipsilatérales et controlatérales non invasives. d’environ 40 %. On notera que le bénéfice est plus marqué pour les récidives invasives du même côté (40 contre 23, c’est-à-dire 4,2 % contre 2,1 %). En effet, la différence n’est pas significative pour les récidives sous forme in situ, du même côté (47 contre 40, c’est-à-dire 5,1 % contre 3,9 %, p = 0,43), ni pour les récidives sous forme invasive de l’autre côté (23 contre 18, c’est-à-dire 2,3 % contre 1,8 %, p = 0,22). En ce qui concerne les récidives sous forme in situ controlatérales, la différence est significative, mais les cas sont peu nombreux (13 contre 3). En revanche, le bénéfice est constant dans le groupe tamoxifène, même si les marges sont atteintes (14,7 % de rechutes homolatérales contre 9 % dans le groupe tamoxifène), et même s’il existe un comédocarcinome et une nécrose. À noter également que la réduction du taux de récidives est de 38 % chez les femmes non ménopausées et de 22 % chez celles de plus de 50 ans. Même si les comparaisons indirectes entre essais sont hasardeuses, les résultats des essais B-17 et B-24 montrent que le taux de récidives après zonectomie seule serait de 22 %, de 13 % avec radiothérapie associée, et de 8 % avec tamoxifène ! Toutes les femmes traitées pour un CCIS devraient-elles prendre du tamoxifène ? Auquel cas, la question du THS serait réglée, à moins de l’associer au tamoxifène... Il n’y a pas, à l’heure actuelle, de recommandations en ce sens en France, l’essai B-24 étant le seul à avoir donné ces résultats, même si ceux-ci s’harmonisent parfaitement dans une logique allant des résultats en situation métastatique à la prévention, en La Lettre du Sénologue - n° 9 - juin 2000 passant par les résultats de la dernière méta-analyse (16). Ce qui fait dire à Wilcken : “y a-t-il quelque chose que le tamoxifène ne puisse pas faire (65) ?”. Donner du tamoxifène à toutes les femmes traitées pour CCIS est probablement excessif pour celles qui seront guéries par la chirurgie d’une maladie de bon pronostic (55), et probablement insuffisant pour celles qui récidiveront, notamment d’un cancer RH–, de mauvais pronostic (65). Pour mémoire, le tamoxifène n’est pas dénué d’effets secondaires, dont certains sont délétères, ce qui implique une utilisation raisonnée, en tenant compte du bénéfice attendu et des risques encourus. Anti-aromatases et CCIS En ce qui concerne les anti-aromatases, il n’existe, à l’heure actuelle, aucune donnée sur leur efficacité éventuelle sur le taux de récidives des CCIS, dans l’hypothèse où ils seraient donnés selon un schéma analogue à celui du tamoxifène. ARGUMENTS POUR LE THS CHEZ DES PATIENTES TRAITÉES POUR CCIS Des expérimentations en situation métastatique de cancer du sein et certains essais randomisés ont testé à maintes reprises l’action des estrogènes sur la maladie : dans l’essai de Palshoff (40), il n’y a pas de différence entre les deux bras, diéthylstilbestrol d’une part, tamoxifène d’autre part, qui sont tous deux significativement plus efficaces que le placebo. 19 D O S S I E R Les THS à base d’estrogènes n’ont pas modifié les taux de risques de cancer du sein chez les patientes porteuses d’hyperplasie même atypique, dans les études bien connues de Page (39). Le nombre de femmes porteuses de cancers du sein de bon pronostic ne cesse de croître, et avec elles, celles porteuses d’un CCIS traité ; peu exposées au risque évolutif de leur maladie mammaire, elles le seront aux complications de la ménopause, qu’elles soient climatériques immédiates, avec une répercussion sur leur qualité de vie (4, 8), ou plus tardives, avec une morbidité cardiovasculaire ou osseuse (25, 48). C’est la raison pour laquelle de nombreux auteurs se sont intéressés à la prescription hors AMM du THS chez ces femmes. S’il n’existe que peu d’études randomisées (27, 61) en cours à travers le monde, de nombreux auteurs ont publié des cas de cancers du sein antérieurement traités et mis sous THS. Il s’agit de cas sporadiques, pour lesquels la méthodologie est contestable, mais qui ont le mérite d’exister. Notre propos n’est pas de rappeler les justificatifs de ces démarches, mais plutôt de nous intéresser aux résultats, notamment en ce qui concerne les CCIS. En effet, dans toutes les séries publiées (2, 12, 17), il existe des cas de CCIS. Les informations sont souvent incomplètes, le suivi bref, les détails évolutifs imprécis. Les cas sont peu nombreux, et certains d’entre eux sont probablement comptés dans les stades 0. Néanmoins, il n’a pas été diagnostiqué de taux anormal de récidives, sur des séries particulièrement surveillées, pour lesquelles il manque malheureusement, le plus souvent, un groupe témoin (tableau II). Tableau II. Principales études recensées (Réalités en gynécologie-obstétrique 1999 ; 43). Pts Stades RE N± Âge Délai Durée Suivi Rechutes (mois) (mois) (mois) Powles (14) 35 T1 : 12 NA T2 : 14 T3 : 9 Di Saïa (12) 77 In situ : 6 + = 28 S11 : 43 – = 12 S12 : 17 NA = 37 Eden (17) 90 Local + = 12 – = 10 NA = 68 Vassipoulos 43 In situ : 2 + = 7 (58) S11 : 22 – = 20 S12 : 19 NA = 20 Peters 56 S10 : 14 + = 24 S11 : 26 –=9 S12 : 14 NA = 23 NA : 2 Bluming 146 T0 : 39 + = 57 (2) T1 : 87 T2 : 19 T3 : 1 Decker 114 S10 : 33 NA S11 : 43 S12a : 24 S12 b : 12 S13a : 1 S13b : 1 Gorins (24) 38 In situ : 3 + = 8 T0 : 4 –=4 T1 : 11 NA = 16 T2 : 7 T3 : 3 * Suivi depuis le diagnostic. 20 10/12 51 NA : 13 31 15 43 2/35 13/58 NA : 6 50 24 27 59* 7/77 18/72 47 60 18 84* 7/90 8/28 NA : 7 46 31 31 43 ? ? 55 % < 2 ans ? 37 0/56 23/12 3 ? 61 30 30 6/146 13/101 52 43 30 30 7/114 33 33 3/38 9/19 54 > 24 * EN PRATIQUE, QUELLE ATTITUDE CONSEILLER ? Avant la publication des résultats de l’essai B-24 de Fisher, il n’était pas de règle de prescrire un traitement adjuvant pour les CCIS. Considérant la maladie locale, les sanctions chirurgicales étant plus drastiques, la mammectomie était fréquente, et parfois même bilatérale. Le caractère exceptionnel, dans ce cas, des récidives permet d’envisager un THS chez des femmes ménopausées et très gênées par les troubles climatériques (29). Dans le cas d’un traitement conservateur, le taux de récidives n’est pas négligeable, et, s’il n’est pas possible d’affirmer que les estrogènes les favorisent, il semble logique d’admettre que le tamoxifène, dans un certain nombre de cas, diminue ce taux. La problématique rejoint donc celle des cancers invasifs, traités pendant cinq ans par des anti-estrogènes, pour lesquels la prescription du THS est délicate... – En effet, est-il logique de prescrire des estrogènes après cinq ans d’anti-estrogènes ? – Faut-il prescrire la molécule en fonction des facteurs de pronostic de la tumeur : des estrogènes s’ils sont favorables, des anti-estrogènes dans le cas contraire (58) ? – Ne faut-il prescrire que du tamoxifène, à titre de THS, pour ses vertus cardiovasculaires et osseuses, en négligeant la demande essentielle des femmes que représentent les bouffées de chaleur (9) ? – Peut-on imaginer l’association des deux molécules, comme l’ont fait Powles et Veronesi, ou comme le propose un essai de l’ECOG (45, 62) ? En conclusion, la solution de sagesse réside peut-être dans l’attente du SERM qui sera à la fois estrogénique et anti-estrogénique (10, 28, 36)... Sur un plan pratique, si l’on commence à envisager la réintroduction hormonale substitutive chez des femmes antérieurement traitées pour un cancer invasif du sein de bon pronostic, avec un recul suffisant (57), il paraît raisonnable de pouvoir la proposer aux femmes porteuses d’un CCIS, pour peu qu’il ait été traité dans les règles de l’art, selon les recommandations actuelles (1). Cela nécessite, en l’absence d’un essai randomisé, techniquement difficile (13), un entretien singulier avec la patiente demandeuse, afin de l’éclairer au mieux sur nos connaissances. Plusieurs auteurs ont d’ailleurs bien montré la réticence des patientes, alors même qu’elles sont très gênées par des signes climatériques altérant fortement leur qualité de vie (5, 23, 61). Encore faut-il se mettre d’accord sur les motivations de traitement substitutif : souhaitons-nous agir sur les phénomènes vasomoteurs, et ce sur une courte durée, ou désirons-nous réaliser une prévention cardiovasculaire et osseuse, apparemment efficace, mais qui demande confirmation d’une part, et une longue durée de prescription d’autre part ? Nous en revenons alors à l’évaluation incontournable du rapport bénéfice/risque (42). Quoi qu’il en soit, il apparaît indispensable de suivre les femmes qui seront candidates au THS (29), en sachant que la réponse à la question posée ne pourrait venir que d’un essai randomisé et que la contre-indication reste légale ! ../.. La Lettre du Sénologue - n° 9 - juin 2000 ../.. Alors, peut-on donner des hormones aux femmes qui le désirent ? Il est trop tôt pour l’affirmer, mais l’heure a changé, comme le dit M.A. Cobleigh, et la prescription individuelle, tenant compte de la qualité de la vie, au regard des risques encourus, peut être discutée, en attendant la molécule miracle ! ■ R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S 1. ANAES. Recommandations : conduite à tenir devant une lésion infraclinique. 2. Bluming AZ, Waisman GM, Dosik GA et al. Hormone replacement therapy in women with previously treated primary breast cancer. Update IV. Proc ASCO 1998 ; 17 : 130a. 3. Campagnoli C, Biglia N, Lesca L et al. Risque de cancer du sein : diverses formes d’hormonothérapie substitutive induisant des effets différents sur d’éventuels paramètres biologiques importants. Reprod Hum Horm 1994 ; 7 (4) : 15763. 4. Carpenter JS, Andrykowski MA, Cordova M et al. Hot flushes in postmenopausal women treated for breast carcinoma. Prevalence, severity, correlates, management and relation to quality of life. Cancer 1998 ; 82 (9) : 1682-91. 5. Chlebowski RT, McTiernan A. Elements of informed consent for HRT in patients with diagnosed breast cancer. J Clin Oncol 1999 ; 17 (1) : 130-42. 6. Cobleigh MA, Berris RF, Bush T, Davidson E, Robert NJ, Sparano JA, Tormey DC, Wood WC. L’estrogénothérapie substitutive après un cancer du sein. L’heure du changement a sonné. JAMA 1994 ; 57 (6) : 33-44. 7. Collaborative Group on Hormonal Factors in Breast Cancer. Breast cancer and hormone replacement therapy : collaborative reanalysis of date from 51 epidemiological studies of 52 705 women with breast cancer and 108 411 women without breast cancer. Lancet 1997 ; 350 : 1047-59. 8. Couzi RJ, Helzlsouer KJ, Fetting JH. Prevalence of menopausal symptoms among women with a history of breast cancer and attitudes toward estrogen replacement therapy. J Clin Oncol 1995 ; 13 : 2737-44. 9. Dargent D. Les antécédents de cancer du sein invasif. Compte rendu des XVes Journées nationales de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire 1993 ; 283-8. 10. Delmas PD, Bjarnason NH, Mitlak BH et al. Effects of raloxifene on bone mineral density, serum cholesterol concentrations and uterine endometrium in postmenopausal women. N Engl J Med 1997 ; 337 : 1641-7. 11. Dilhuydy MH, Henriques C, Barreau B, Gilles R et al. Le rôle de l’imagerie dans la prise en charge des carcinomes intracanalaires stricts du sein. La Lettre du Sénologue 2000 ; 8 : 20-6. 12. Disaia PJ. Estrogen replacement therapy for the breast cancer survivor : a reappraisal. J Surg Oncol 1997 ; 64 : 175-80. 13. Dohollou N. THS après cancer du sein : la réalisation d’un essai randomisé est-elle encore possible ? La Lettre du Sénologue 1998 ; 2 : 26-7. 14. Douglas J, Marchand. Early Breast Cancer Trialists’ Collaborative Group. Ovarian ablation in early breast cancer : overview of the randomised trials. Lancet 1996 ; 348 : 1189-95. 15. Dupont WD, Page DL. Influence of exogenous estrogens, proliferative breast disease and other variables on breast cancer risk. Cancer 1989 ; (63) 948 : 57. 16. Early Breast Cancer Trialists’ Collaborative Group. Tamoxifen for early breast cancer. An overview of the randomised trials. Lancet 1998 ; 351 : 145167. 17. Eden JA, Busch T, Nand S, Wren BG. A case-control study of combined continuous estrogen-progestin replacement therapy among women with a personal history of breast cancer. Menopause 1995 ; 2 : 67-72. 18. Ernster VL, Barclay J, Kerlikowske K, Grady D, Henderson JC. Incidence of and treatment for ductal carcinoma in situ of the breast. JAMA 1996 ; 275 : 913-8. 19. Espié M. Traitement hormonal substitutif de la ménopause après cancer du sein. Où en est-on ? La Lettre du Cancérologue 1997; VI (5) : 202-4. 20. Fisher B, Dignam J, Wolmark N. Tamoxifen in treatment of DCIS : NSABP B-24 randomised controlled trial. Lancet 1999 ; 353 : 1993-2000. 21. Fisher B, Dignam J, Wolmark N. Lumpectomy and radiation therapy for the treatment of intraductal breast cancer : findings from NSABP B-17. J Clin Oncol 1998 ; 16 : 441-52. La Lettre du Sénologue - n° 9 - juin 2000 22. Fisher B, Costantino JP, Wickerham DL. Tamoxifen for prevention of breast cancer : report of the NSABP P1 Study. J Nat Cancer Inst 1998 ; 90 : 1371-88. 23. Ganz PA, Gail AG, Kahn B et al. Are older breast carcinoma survivors willing to take HRT ? Cancer 1999 ; 86 (5) : 814-20. 24. Gorins A. THS après cancer du sein : revue de la littérature. Réalités en Gynécologie Obstétrique 1999 ; 43 : 27-32. 25. Grodstein F, Meir Sc D, Qtampfer J, Colditz GA, Wilett WC. Postmenopausal hormone therapy and mortality. N Engl J Med 1997 ; 336 : 1769-77. 26. Habel LA, Daling JR, Newcomb PA et al. Risk of recurrence after ductal carcinoma in situ of the breast. Cancer Epidem Biomarkers & Prévention 1998 ; 689-96. 27. Holmberg L. Hormonal replacement therapy for women with a personal history of breast cancer ? Ann Oncol 1996 ; 7 : 655-6. 28. Jordan VC, McGregor JI, Tonetti DA. Tamoxifen : from breast cancer therapy to the design of a postmenopausal prevention maintenance therapy. J Clin Oncol 1997 ; 9 : 390-4. 29. Kessler Y, Lesur A. Projet d’enregistrement des patientes sous THS après cancer du sein traité. La Lettre du Sénologue 1998 ; 2 : 28-30. 30. Le MG. Traitement hormonal substitutif de la ménopause et risque de cancer du sein. J Gynecol Obstet Biol 1996 ; 25 : 684-7. 31. Le Floch JP, Colau JC, Zartarian M, Gelas B. Rédaction d’un questionnaire d’évaluation de la qualité de vie en ménopause. Contracept Fertil Sex 1996 ; 24 : 238-45. 32. Lesur A, Marchal C, Luporsi E, Verhaeghe JL. Résultats des essais historiques de castration. Étude des méta-analyses. Compte-rendu des XVes Journées nationales de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire 1997 ; 595-613. 33. Lesur A. THS après cancer du sein : un état des lieux à l’aube du XXIe siècle. La Lettre du Sénologue 1999 ; 2 : 15-7. 34. Lifrange E, Colin C. Les faces cachées du cancer du sein : modalités du suivi des hyperplasies et de cancers in situ. Contracept Fertil Sex 1999 ; 27 (5) : 364-7. 35. Love RR. Hormone treatment in women with excellent prognosis breast cancer. Oncol 1990 ; 4 : 59-60. 36. Mitlak BH, Cohen FJ. In search of optimal long term female hormone replacement. The potential of selective estrogen receptor modulators. Horm Res 1997 ; 48 : 155-63. 37. Mustafa IA, Bland KI. Physiologic effects of steroid hormones and postmenopausal hormone replacement on the female breast and breast cancer risk. Ann Surg 1998 ; 228 (5) : 638-51. 38. Noel G, Feuvret L, Gasowski M, Bernard A, Cappelaere P. THS de la ménopause et cancer du sein. Bull Cancer 1998 ; 85 (12) : 997-1014. 39. Page DL, Dupont WD. Marqueurs de risque accru de cancer du sein et influence du traitement estrogénique substitutif de la ménopause. Reprod Hum Horm 1992 ; (V) 2 : 138-49. 40. Palshof T, Cartensen B, Mouridsen HT. Reviews on endocrine related cancer 1985 ; (suppl. 17) ; 43-50. 41. Piana L, Bonnier P, Audrin O. Traitement hormonal substitutif après cancer in situ du sein ? XVes Journées nationales de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire 1993 ; 275-82. 42. Pintiaux A, Gaspard U, Foidart JM. Le THS : l’évaluation incontournable du rapport bénéfice/risque. Mises au point. Gynecol Obstet 1999 ; 6 : 287-91. 43. Pons JY. Vraies et fausses contre-indications mammaires au traitement hormonal substitutif de la ménopause. Sénologie hormonale, Zeneca Pharma Oncologie 1998 ; 81-5. 44. Powles TJ, Hickish HT, Casey S, O’Brien M. Hormone replacement therapy after breast cancer. Lancet 1993 ; 342 : 60-1. 45. Powles TJ, Jones AL, Ashley SE et al. The Royal Marsden Hospital Pilot Tamoxifen Chemoprevention Trial Breast Cancer. Research and Treatment 1994 ; 31 : 73-82. 46. Pritchard KI, Sawka CA. Menopausal estrogen replacement therapy in women with breast cancer. Cancer 1995 ; 75 (1) : 1-3. 47. Pritchard KI. Hormone replacement after cancer therapy : is it safe ? CR ESMO 1998 ; 167-74. 48. Ragaz J, Goldman A. Survival impact of adjuvant tamoxifen on competing causes of mortality in breast cancer survivors, with analysis of mortality from contralateral breast cancer, cardiovascular events, endometrial cancer, and thromboembolic episodes. J Clin Oncol 1998 ; 16 (6) : 2018-24. 23 D O S S I E R 49. Rochefort H. Régulations hormonales des cancers du sein des lignées cellulaires aux malades. Presse Med 1994 ; 23 (26) : 1211-5. 50. Ross RK, Paganini-Hill A, Wan PC, Pike MC. Effect of HRT on breast cancer risk : estrogen versus estrogen plus progestin. J Nat Cancer Inst 2000 ; 92 (4) : 328-32. 51. Rozenbaum H. THS et risque de cancer génital. Reprod Hum Horm 1998 ; 11 : numéro spécial 1. 52. Roy JA, Sawka CA, Pritchard KI. Hormone replacement therapy in women with breast cancer : do the risks outweight the benefits ? J Clin Oncol 1996 ; 14 (3) : 997-1006. 53. Sands R, Boshoff C, Jones A, Sudd J. Current opinion : hormone replacement therapy after a diagnosis of breast cancer. Menopause. The Journal of the North American Menopause Society 1995 ; 2 (2) : 73-80. 54. Schairer C, Lubin J, Troisi R et al. Menopausal estrogen and estrogen-progestin replacement therapy and breast cancer risk. JAMA 2000 ; 283 (4) : 485-91. 55. Silverstein MJ, Lagios MD, Groshen S et al. The influence of margin width on local control of ductal carcinoma in situ of the breast. N Engl J Med 1999 ; 340 : 1455-61. 56. Stines J. Les lésions infracliniques du sein. Éditorial. Le Sein 1999 ; 9 (2) : 99-100. 57. This P, de la Rochefordiere A, Fourquet A et al. THS après cancer du sein. Proposition d’étude multicentrique (FNCLCC). La Lettre du Sénologue 1998 ; 2 : 22-4. 58. This P. Traitement hormonal substitutif de la ménopause chez une femme antérieurement traitée pour un cancer du sein. Presse Med 1996 ; 25 : 141-4. 59. Vassilopoulou-Sellin R, Lein MJ. Estrogen replacement therapy after treatment for localized breast carcinoma : patient responses and opinions. Cancer 1996 ; 78 : 1043-8. 60. Vassilopoulou-Sellin R, Theriault RL, Klein MJ. Estrogen replacement therapy in women with a prior diagnosis and treatment for breast cancer. Gynecol Oncol 1997 ; 65 : 89-95. 61. Vassilopoulou-Sellin R, Asmar L, Hortobagyi GN et al. Estrogen replacement therapy after localized breast cancer : clinical outcome of 319 women followed prospectively. J Clin Oncol 1999 ; 17 (5) : 1482-7. 62. Veronesi U, Maisonneuve P, Costa A et al. Prevention of breast cancer with tamoxifene : preliminary findings from the Italian randomised trial among hysterectomised women. Lancet 1998 ; 352 : 93-101. 63. Wamberg F, Yven J, Holmberg L. Risk of subsequent invasive breast cancer after breast carcinoma in situ. Lancet 2000 ; 355 : 724-5. 64. Willett WC, Colditz G, Stampfer M. Postmenopausal estrogens opposed, unopposed, or none of the above. Editorial. JAMA 2000 ; 283 (4) : 534-5. 65. Wilcken N. RC - Tamoxifen hits the target in situ. Commentary. Lancet 1999 ; 353 : 1986-7. 66. Zafrani B. CCIS : difficultés et limites de l’analyse histopathologique. La Lettre du Sénologue 2000 ; 8 : 8-12. À tous nos lecteurs, à tous nos abonnés... La Lettre du Sénologue vous souhaite un bel été et vous remercie de votre soutien. Le prochain numéro paraîtra en septembre. 24 La Lettre du Sénologue - n° 9 - juin 2000