L Après FIELD, quelle place reste-t-il pour le fénofibrate en prévention

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Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2006
Après FIELD, quelle place
reste-t-il pour le fénofibrate
en prévention
cardiovasculaire ?
M. Farnier*
L
es essais cliniques utilisant des statines chez des patients diabétiques montrent de
façon convaincante un bénéfice cardiovasculaire plus important que dans l’étude
FIELD, réalisée avec le fénofibrate. Une statine doit être le traitement de première
intention chez le diabétique de type 2.
Quelle place reste-t-il alors pour le fénofibrate en pratique quotidienne ? Trois situations
peuvent être envisagées : les patients avec intolérance aux statines, les patients avec hyper-
triglycéridémie majeure, et, enfin, les patients déjà traités par statine, à haut risque vas-
culaire, et pour lesquels le bilan lipidique reste non normalisé.
Pour les patients avec une intolérance prouvée aux statines, en prévention secondaire, les
résultats de FIELD n’encouragent guère à proposer un traitement par fénofibrate : aucun
bénéfice n’est apparu dans le sous-groupe de diabétiques en prévention secondaire. Pour un
diabétique de type 2 ayant un LDL-cholestérol inférieur à 1 g/l, mais des triglycérides élevés
et un HDL-cholestérol bas, le gemfibrozil est à utiliser de préférence en tenant compte des
résultats de VA-HIT. Pour les patients avec une intolérance aux statines en prévention secon-
daire et ayant un LDL-cholestérol supérieur à 1 g/l, il faut choisir une autre stratégie d’abais-
sement du LDL-cholestérol, comme par exemple l’ézétimibe. Toujours chez un patient intolé-
rant aux statines, en prévention primaire dans le diabète de type 2, le fénofibrate peut être
utilisé, puisque c’est dans ce sous-groupe que le bénéfice est apparu significatif dans FIELD.
Si, alors, le LDL-cholestérol n’est pas normalisé, il est logique d’envisager une stratégie
complémentaire pour le faire baisser.
La deuxième situation est celle des patients ayant une hypertriglycéridémie importante,
en pratique des triglycérides supérieurs à 4 g/l, c’est-à-dire avec un LDL-cholestérol non cal-
culable. Aucune étude de prévention ne permet de privilégier une stratégie par rapport à une
autre pour ces cas particuliers. Un traitement par fibrate est indiqué, mais, très souvent,
sous fibrate, persiste une élévation du LDL-cholestérol pouvant faire envisager secondaire-
ment une association avec une statine. Pour cette raison, le fénofibrate est à privilégier en
première intention plutôt que le gemfibrozil, dans l’optique d’une éventuelle association
médicamenteuse. Il faut toutefois rappeler que les mesures hygiénodiététiques sont capitales
pour ces patients avec des triglycérides franchement augmentés et que, en dehors des formes
familiales, peu de patients conservent des triglycérides supérieurs à 4 g/l lorsque les conseils
diététiques sont bien suivis.
La troisième situation est celle des patients à haut risque traités par statine et pour
lesquels persistent des anomalies lipidiques. Ce sont toutes les hyperlipidémies mixtes ou
combinées sévères avec, sous statine à posologie standard, la persistance d’une élévation
des triglycérides, d’une baisse du HDL-cholestérol, et, souvent, un LDL-cholestérol atteignant
à peine les objectifs. Faut-il alors plutôt utiliser des stratégies de statine à forte dose, ou
éditorial
*Point Médical, Dijon.
proposer une association statine-fénofibrate ou d’autres associations thérapeutiques ?
Aucune étude ne nous permet de répondre à cette question. Ces patients sont a priori de bons
candidats à une association statine-fénofibrate, association qui a, semble-t-il, été bien tolé-
rée dans FIELD, mais dont le bénéfice cardiovasculaire n’est pas prouvé. Les diabétiques de
type 2 en prévention secondaire traités par statine sont également des patients dont le
risque résiduel reste majeur dans les essais de prévention et pour lesquels une stratégie
d’association avec le fénofibrate est possible. Une étude de prévention (ACCORD) est en cours
de réalisation dans ce domaine. Il est certain que, dans les années à venir, des stratégies
variées d’associations thérapeutiques avec une statine seront à notre disposition, et le choix
risque d’être difficile en l’absence d’arguments cliniques.
Le dernier problème, et non le moindre, est le suivant : ce qui vient d’être dit pour le fénofi-
brate doit-il s’étendre à l’ensemble de la classe des PPARαagonistes ? Cela n’est pas évident,
en particulier en raison de la discordance dans les résultats des études VA-HIT, avec le gem-
fibrozil, et FIELD, avec le fénofibrate. Les PPARαsont très largement répandus dans notre
organisme, et il est toujours possible d’évoquer des effets différents d’une molécule à l’autre.
On considère généralement que, vis-à-vis de plusieurs propriétés biochimiques, le gemfibro-
zil est différent des autres fibrates disponibles. Le développement de nouveaux PPARαn’ap-
partenant pas à la famille féno-, béza-, ciprofibrate paraît devoir être poursuivi, en parti-
culier s’il est possible de sélectionner des molécules correspondant à des modulateurs sélec-
tifs des PPARα.
En résumé, de nombreuses questions se posent après la parution de FIELD, avec une seule
certitude : chez le diabétique de type 2, une statine doit rester prioritaire, sauf cas particu-
liers, et la place du fénofibrate est maintenant plus restreinte.
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