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La Lettre du Cardiologue - n° 341 - janvier 2001
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a 28eJournée française de médecine, organisée par la
Société médicale des hôpitaux de Paris et présidée par
le Pr A. Vacheron, était consacrée aux lipides en
l’an 2000. Plusieurs communications ont porté sur la place des
hypolipidémiants et de la diététique dans la prévention cardio-
vasculaire.
PRÉVENTION PRIMAIRE DE LA MALADIE CORONAIRE PAR
LES HYPOLIPIDÉMIANTS
(M. Farnier, Dijon)
Les études utilisant la colestyramine (étude LRC-CPPT) ou des
fibrates (études WHO et HHS) avaient retrouvé un bénéfice en
prévention primaire des événements coronaires, mais sans effi-
cacité nette sur la réduction de la mortalité globale. À l’inverse,
l’étude écossaise WOSCOPS démontre que la pravastatine à
40 mg/j diminue les événements coronariens et la mortalité glo-
bale chez l’homme de moins de 65 ans avec un LDL-cholestérol
(LDL-C) > 1,55 g/l, et un facteur de risque surajouté parmi l’hy-
pertension artérielle, le tabagisme en cours, le diabète, les anté-
cédents familiaux d’accident cardiovasculaire précoce ou le HDL-
cholestérol (HDL-C) bas. Le traitement de 1 000 patients pendant
5 ans a permis d’éviter 24 infarctus du myocarde mortels et non
mortels. De même, l’étude AFCAPS/TexCAPS retrouve une
diminution de 36 % des événements coronaires majeurs avec la
lovastatine (20 à 40 mg/j) chez l’homme de plus de 45 ans ou la
femme de plus de 55 ans avec un LDL-cholestérol > 1,3 g/l et un
HDL-cholestérol bas. Le traitement de 1 000 patients pendant
5 ans a permis d’éviter dix infarctus du myocarde mortels et non
mortels. Le bénéfice est d’autant plus important que le patient
présente d’autres facteurs de risque cardiovasculaire.
Le risque de survenue d’un événement cardiovasculaire est aussi
élevé chez un patient diabétique de type 2 en prévention primaire
que chez un patient non diabétique en prévention secondaire. Plu-
sieurs études sont en cours pour évaluer le bénéfice des statines
chez les patients diabétiques de type 2 (études CARDS, HPS,
LDS) et chez les patients de plus de 70 ans (études PROSPER,
RESPECT).
Les recommandations ANAES et AFSSAPS pour l’instaura-
tion d’un traitement médicamenteux hypolipidémiant sont
fondées sur la valeur du LDL-cholestérol et sur l’évaluation
du risque cardiovasculaire global, évalué par le nombre de fac-
teurs de risque vasculaire. Un hypolipidémiant doit être prescrit
en prévention primaire après 6 mois d’un traitement diététique si
le LDL-cholestérol est :
2,2 g/l chez l’homme de moins de 45 ans ou la femme non
ménopausée sans autre facteur de risque,
1,6 g/l chez les patients avec un autre facteur de risque,
1,3 g/l chez les patients avec deux autres facteurs de risque.
Les facteurs de risque sont : l’âge (homme de plus de 45 ans ou
femme de plus de 55 ans ou ayant une ménopause précoce sans
hormonothérapie substitutive), un antécédent familial de maladie
coronaire précoce (avant 55 ans chez le père ou chez un parent du
premier degré de sexe masculin, ou avant 65 ans chez la mère ou
un parent du premier degré de sexe féminin), un antécédent per-
sonnel d’artériopathie carotidienne ou des membres inférieurs, un
tabagisme en cours, une hypertension artérielle (traitement anti-
hypertenseur en cours ou pression artérielle > 140/90 mmHg), un
LDL-C < 0,35 g/l, un diabète. D’autres indicateurs additionnels
du risque peuvent être pris en compte : microalbuminurie, trigly-
cérides > 2 g/l, hyperhomocystéinémie. L’objectif en prévention
primaire est donc d’identifier les patients à risque vasculaire suf-
fisamment élevé pour justifier l’introduction d’une statine.
28eJournée française de médecine :
les lipides en l’an 2000
C. Le Feuvre*
L
* Service de cardiologie, hôpital Necker, Paris.
Tableau. Instauration du traitement diététique ou médicamenteux en
fonction des valeurs du LDL-cholestérol en g/l (RMO n° 15, JORF
29/3/97).
Régime Objectif Médicaments Objectif
Prévention primaire
aucun facteur de risque* 2,2 < 1,6 0
Prévention primaire
aucun facteur de risque*
échec du régime 2,2 < 1,6
Prévention primaire
un facteur de risque 1,6 < 1,6 1,9 < 1,6
Prévention primaire
2 facteurs de risque 1,3 < 1,3 1,6 < 1,3
Prévention secondaire 1,3 < 1 1,3 < 1
* homme de moins de 45 ans ou femme non ménopausée
LDL-cholestérol (g/l) = cholestérol total - (HDL-cholestérol + 0,16 x triglycérides)
PRÉVENTION SECONDAIRE DE LA MALADIE CORONAIRE PAR
LES HYPOLIPIDÉMIANTS
(F. Delahaye, Lyon)
Les études de prévention secondaire réalisées avant les statines,
portant essentiellement sur les fibrates, ont montré une diminu-
tion des infarctus mortels et non mortels, mais sans réduction
significative de la mortalité globale. À l’inverse, les études de
prévention secondaire ont démontré un bénéfice des statines sur
la morbi-mortalité cardiovasculaire et sur la mortalité globale.
Dans l’étude 4S (simvastatine 10 à 40 mg/j), le LDL-cholestérol
et la mortalité totale sont diminués de 30 %. Les patients avec
cholestérol à 2,4 g/l ont le même bénéfice que les patients avec
cholestérol entre 2,7 et 2,98 g/l. Dans l’étude LIPID (pravasta-
tine 40 mg/j), la mortalité totale est diminuée de 23 %, que le cho-
lestérol avant traitement soit < 2,1 g/l ou > 2,5 g/l. Ce bénéfice
de la pravastatine est confirmé dans l’étude CARE. Ces trois
études sont en faveur d’une prescription systématique de sim-
vastatine ou de pravastatine chez tous les coronariens (après
infarctus du myocarde, angor stable ou instable), chez l’homme
comme chez la femme, chez les sujets jeunes et chez les sujets
âgés (sans bénéfice actuellement démontré après 80 ans), quelle
que soit la cholestérolémie de base (sans bénéfice actuellement
démontré quand la cholestérolémie est inférieure à 2 g/l). En pré-
vention secondaire, les recommandations pour l’instauration d’un
traitement médicamenteux hypolipidémiant sont fondées sur la
valeur du LDL-cholestérol, supérieur ou égal à 1,3 g/l malgré une
diététique suivie pendant trois mois. Il est nécessaire d’abaisser
le cholestérol total à moins de 2 g/l (LDL-C < 1 g/l). La réduc-
tion des événements cardiovasculaires est d’autant plus impor-
tante que la cholestérolémie est abaissée. La prescription d’une
statine ne doit pas faire oublier la prise en charge diététique et la
correction des autres facteurs de risque.
La sécurité d’emploi des statines est excellente. Les effets
secondaires (3 à 5 %) sont musculaires ou hépatiques. Le traite-
ment doit être arrêté en cas de myalgies, d’élévation de la CK à
plus de cinq fois la normale, ou des transaminases à plus de trois
fois la normale. L’association d’une statine avec un fibrate a été
longtemps déconseillée en raison du risque de myosite. Cette
association peut être retenue en milieu spécialisé en cas de dys-
lipidémie sévère et non contrôlée en monothérapie chez un patient
à risque vasculaire élevé.
L’indication d’un fibrate peut être envisagée chez un patient avec
hypertriglycéridémie ou diminution du HDL-C. Le gemfibrozil
diminue la morbi-mortalité coronaire dans l’étude VA-HIT. Par
contre, le bézafibrate est sans effet significatif dans l’étude BIP.
La statine doit donc rester le médicament hypolipidémiant de pre-
mière intention en prévention secondaire.
LES HYPOLIPIDÉMIANTS PEUVENT-ILS PRÉVENIR LES
ACCIDENTS VASCULAIRES CÉRÉBRAUX ?
(P. Lechat, Paris)
Les facteurs de risque d’accident vasculaire cérébral sont par
ordre de fréquence : l’hypertension artérielle, la fibrillation auri-
culaire, le diabète, le tabagisme, l’hypercholestérolémie. Une aug-
mentation du risque d’accident vasculaire cérébral corrélée au
niveau de LDL-cholestérol a été constatée dans l’étude
cas/témoins GÉNIC. Aucune étude avec les fibrates n’avait pour
objectif principal la diminution du risque d’accident vasculaire
cérébral. À l’inverse, une méta-analyse regroupant
25 000 patients des études LIPID, 4S, REGRESS, WOSCOPS et
CARE retrouve un béné
fice des statines avec une réduction de
22 % des accidents vascu
laires cérébraux fatals ou non fatals
(RR = 0,785, p < 0,001). Les statines pourraient donc diminuer
le risque d’accident vasculaire cérébral chez les patients à risque
élevé. Cette efficacité pourrait être secondaire à un effet stabili-
sateur de plaque ou à une amélioration de la fonction endothé-
liale. Deux essais cliniques de prévention secondaire d’accident
vasculaire cérébral avec des statines sont en cours : l’étude
SPARCL, portant sur 4 200 patients, et l’étude PARIS, portant
sur 2 500 patients.
PLACE DE LA DIÉTÉTIQUE DANS LA PRÉVENTION CARDIO-
VASCULAIRE
(B. Jacotot, Créteil)
Les principaux facteurs alimentaires qui augmentent le risque de
maladies cardiovasculaires sont :
l’excès d’apport en graisses, surtout si cet apport est supérieur
à 40 % de l’énergie totale des aliments,
l’excès de graisses saturées, qui augmentent LDL-C et HDL-C,
associé à une insuffisance d’apport en graisses monoinsaturées,
qui diminuent
LDL-C et HDL-C
, et polyinsaturées en n-3, qui
diminuent les VLDL, surtout en cas d’élévation des triglycérides,
l’excès de cholestérol alimentaire, mais il existe une grande
variabilité génétique,
l’insuffisance de glucides complexes, de fibres ou d’anti-
oxydants.
Une diminution du risque de mort subite a été retrouvée avec l’ap-
port d’huiles de poisson (études DART, GISSI 3). Le bénéfice d’un
régime de type méditerranéen ou asiatique traditionnel, pauvre en
graisses, a été retrouvé dans plusieurs études. Dans l’étude lyon-
naise (Lyon Heart Study) portant sur 600 patients de moins de
70 ans avec antécédent d’infarctus, le régime méditerranéen dimi-
nue de 66 % les événements coronaires, de 73 % le risque de décès
cardiaque, et de 70 % le risque de décès de toutes causes. Ce béné-
fice est constaté à 27 mois et se maintient à 4 ans. Dans l’étude
STARS, le risque de survenue d’un événement coronaire diminue
de 69 % dans le groupe régime, et de 80 % dans le groupe asso-
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NFORMATIONS
Limiter les laitages.
La Lettre du Cardiologue - n° 341 - janvier 2001
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I
NFORMATIONS
ciant régime et traitement médical hypolipidémiant.
Les mesures diététiques ont donc prouvé leur efficacité, tout
particulièrement dans les études de prévention secondaire. Ces
mesures doivent être associées à la correction de tous les facteurs
de risque.
RECOMMANDATIONS DIÉTÉTIQUES AUX PATIENTS HYPER-
LIPIDÉMIQUES
(M. Krempf, Nantes)
Les recommandations diététiques doivent être systématiques chez
un patient hyperlipidémique. Elle permettent une diminution de
10 % en moyenne de la cholestérolémie, mais avec de grandes
variations d’un patient à l’autre. La réduction de la surcharge
pondérale est essentielle dans la normalisation d’un bilan lipi-
dique. Chez un patient de 100 kg, un amaigrissement de 10 kg
diminue le risque cardiovasculaire de 20 à 5 % ; ce risque dimi-
nue de 40 à 15 % en cas de tabagisme. En cas d’hypertriglycéri-
démie isolée, l’objectif principal doit être la réduction de la
consommation d’alcool ou de sucreries. En cas d’hypercholesté-
rolémie pure, les acides gras saturés ne doivent pas dépasser 7 %,
et les acides gras polyinsaturés n-6, 10 % de l’apport calorique
total. À l’inverse, les acides gras polyinsaturés n-3 auraient un
effet protecteur (études DART et GISSI). Les acides gras mono-
insaturés, comme l’acide gras oléique contenu dans l’huile
d’olive, pourraient avoir un effet cardioprotecteur (étude lyon-
naise). Cependant, de nombreuses recommandations internatio-
nales préconisent de les limiter à 15 % de l’apport calorique total,
en privilégiant les glucides complexes à 50-55 %.
Les recommandations diététiques aux patients hyperlipidémiques
doivent donc associer :
une réduction de l’apport calorique s’il est excessif, afin de
réduire la surcharge pondérale (l’apport calorique conseillé est
de 1 800 à 2 400 cal/j chez la femme et de 2 000 à 4 000 cal/j
chez l’homme),
une limitation des acides gras saturés (charcuterie, laitage,
viande grasse comme le mouton, l’agneau ou le boeuf),
une préférence à accorder aux viandes maigres (veau, lapin),
aux volailles (sans la peau) et aux poissons,
un encouragement à la consommation de céréales, de fruits et
de légumes (régime méditerranéen),
une consommation modérée d’huile d’olive ou de colza.
LES EFFETS PLÉIOTROPES DES STATINES
(F. Paillard, Rennes)
Le bénéfice des statines en prévention des événements cardio-
vasculaires serait lié non seulement à leur action hypolipidé-
miante, mais aussi à leurs effets pléiotropes. Les statines sem-
blent exercer une action anti-inflammatoire locale, et favorisent
la déplétion de la plaque en matériel lipidique et en macrophages,
ce qui concourt à sa stabilité. À baisse équivalente de LDL-C, le
bénéfice des statines est d’autant plus important qu’il existe des
marqueurs biologiques d’inflammation. Les statines peuvent cor-
riger la dysfonction de la vasomotricité endothélium-dépendante
des artères athéromateuses, et amoindrir le risque de thrombose
par diminution de l’agrégation plaquettaire, de l’expression du
facteur tissulaire par les macrophages, et de la formation de
thrombine chez le patient hypercholestérolémique. Leur action
dans certains mécanismes cellulaires impliqués dans l’immunité
pourrait expliquer la diminution de la mortalité et des rejets obser-
vée sous statines chez les patients transplantés cardiaques traités
par ciclosporine.
Encourager la consommation des légumes et des fruits.
Les articles publiés dans “La Lettre du Cardiologuele sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs.
Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction par tous procédés réservés pour tous pays.
© mai1983 - EDIMARK S.A. -
Imprimé en France - Differdange S.A. - 95110 Sannois -
Dépôt légal 1
er
trimestre 2001
AVENTIS (Nisis), p. 2 ;
GLAXO WELLCOME (Pritor), p. 5 ;
LIPHA SANTÉ (Cardensiel), p. 9 ;
MSD CHIBRET (Zocor), p. 16-17 ;
NOVARTIS (Tareg), p. 20 ;
SERVIER (FLudex et Vastarel), p. 28 et p. 27.
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