ÉDITORIAL
La Lettre du Neurologue - Supplément Céphalées au vol. VIII - n° 9 - novembre 2004 3
Recommandations ANAES pour la pratique clinique –
CCQ : diagnostic, rôle de l’abus médicamenteux,
prise en charge
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V. Dousset*
C
es recommandations ont la particularité d’avoir pour
cible un vaste problème, celui des céphalées chroniques
non symptomatiques (très précisément les céphalées
présentes plus de 15 jours par mois depuis plus de 3 mois, sans
substratum lésionnel sous-jacent).
Quels sont les points forts – et faibles – de ces recomman-
dations ?
Ces recommandations concernant les CCQ ont une première jus-
tification, la fréquence de ces dernières : 3 % en population géné-
rale. Elles font une mise au point et tentent d’éclaircir un cadre
nosologique complexe, qui sera peut-être modifié dans les années
à venir par les progrès des connaissances sur le sujet. Elles ont
l’avantage de faire connaître l’existence d’une entité uniquement
à la lecture du titre des recommandations : en effet, les céphalées
par abus médicamenteux sont méconnues, que ce soit par les géné-
ralistes, les spécialistes ou les pharmaciens d’officine. Ces recom-
mandations sont l’occasion de faire réfléchir la communauté
médicale, notamment médecins prescripteurs et pharmaciens dis-
pensateurs, sur la iatrogenèse qu’ils engendrent. Soulignons aussi
l’intérêt pour les soignants d’identifier une pathologie pour
laquelle existe un traitement, le sevrage, dont la nécessité est
reconnue par l’ensemble des experts, même si ses modalités de
déroulement sont plus variables. Sans ce sevrage, de nombreux
patients ne peuvent voir leur état s’améliorer. Enfin, l’originalité
du sujet permet de démontrer que des acteurs très différents du
système de santé peuvent collaborer pour améliorer le dépistage
et la prise en charge de cette entité. Terminons par le patient – ou
l’usager – lui-même, qui doit être informé du risque de cet abus
médicamenteux : il doit être, lui aussi, acteur du système de soins,
et doit donc constituer l’une des cibles de ces recommandations.
C’est pourquoi une version adaptée et simplifiée va être diffusée
au public, permettant de débuter une action de prévention
primaire.
Mais ces recommandations doivent être lues en gardant à l’esprit
que l’affection a une sévérité variable : de nombreux patients en
population générale ne commettent pas d’abus et ne consultent
pas, alors que les patients issus de consultations spécialisées ont
un handicap souvent très important. Les facteurs intervenant dans
le développement de ces céphalées sont eux aussi très variables
d’un patient à l’autre, ce qui complexifie la standardisation de la
prise en charge. Enfin, rappelons que ces recommandations ont été
bâties sur l’analyse d’une littérature dont le niveau de preuve est
le plus souvent faible. D’autres études permettront sans doute de
répondre à des questions restées en suspens : quelle est la place
des facteurs hormonaux dans le développement des céphalées par
abus médicamenteux et surtout de la migraine chronique ? Quel
est le devenir à long terme des patients pour lesquels le sevrage
a échoué ? Comment prendre en charge les patients souffrant de
migraine chronique ?… Au travail ! ■
* Service de neurologie, CHU de Pellegrin-Tripode, Bordeaux.
12th Congress of the International Headache Society, IHC 2005
9-12 octobre 2005
International Conference Hall, Kyoto, Japon
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