Quels sont les indicateurs d'épisode dépressif majeur chez les patients consultant en médecine générale pour des céphalées ? Par Françoise Radat (CHRU Pellegrin) Article commenté : Indicators of a major depressive episode in primary care patients with a chief complaint of headache Tetsuhiro M et al. Headache 2007, on line L’objectif de cette étude était de déterminer quels sont les prédicteurs de dépression chez les patients se présentant en consultation pour des céphalées. Cent-soixantedix sept patients consultant consécutivement dans plusieurs hôpitaux ou cliniques japonais ont été inclus si leur plainte principale était des céphalées, à l’exclusion des patients présentant des symptômes infectieux ou nécessitant des gestes urgents. Les patients remplissaient un questionnaire portant sur leurs caractéristiques sociodémographiques, la durée et la sévérité de leurs céphalées, les autres plaintes somatiques (lorsqu’il y en avait plus de 3, les auteurs parlent de plaintes somatiques multiples), le fait qu’ils aient déjà consulté pour leurs céphalées (ils étaient alors qualifiés de «forts utilisateurs stressés»). Enfin ils passaient avec le médecin un entretien structuré explorant la présence des principaux troubles psychiatriques (MINI). Les résultats montraient que 25,4% des patients étaient déprimés, 6,2% présentaient un trouble abus/dépendance à l’alcool, 4,5% un trouble anxiété généralisé, 4% une phobie sociale, 2,8% un trouble panique et un trouble obsessionnel compulsif, enfin 3,9% un trouble bipolaire. Lorsque l’on comparait les patients déprimés aux patients non déprimés on observait 4 fois plus de plaintes somatiques multiples, 3 fois plus de céphalées durant depuis plus de 6 mois, des céphalées plus sévères, plus de patients ayant consulté antérieurement pour leurs céphalées. La différence entre toutes ces variables était statistiquement significative et la construction d’un modèle multivarié montrait que la présence de multiples symptômes somatiques et l’antériorité des céphalées supérieure à 6 mois étaient les deux facteurs permettant de prédire la présence d’un épisode dépressif majeur. Il s’agit d’une étude ayant une application pratique importante puisqu’elle permet de conseiller aux médecins généralistes de rechercher systématiquement un épisode dépressif majeur chez les patients se présentant avec une plainte à type de céphalée si la céphalée est ancienne et s’inscrit dans un contexte de plaintes somatiques multiples. Or on a plusieurs études solides qui montrent qu’environ la moitié des patients déprimés ne sont pas diagnostiqués lorsqu’ils se présentent en médecine générale avec une plainte somatique. Ainsi, même s’il l’on a l’impression que cette étude enfonce des portes ouvertes, elle a le mérite de mettre le doigt sur un problème pratique, le dépistage de ces dépression à masque somatique, problème qui n’est pas négligeable en termes de santé publique.