La personne âgée
souffre aussi
Selon plusieurs enquêtes,
40 à 80 % de la population
âgée en institution souffrent de
douleurs aiguës ou chroniques
que seule la moitié est capable
d’exprimer ou de mesurer. Certes,
des progrès ont été réalisés mais,
compte tenu des fréquents pro-
blèmes de compréhension, d’au-
tant plus forts lorsqu’existent des
pathologies de type Alzheimer, les
douleurs rhumatologiques, par
exemple, sont particulièrement
mal soulagées.
Des expressions différentes
Nombreuses sont les personnes
âgées qui vivent leur douleur sans
se plaindre. Nul ne peut dire que
l’une souffre moins qu’une autre.
C’est l’expression de la douleur
qui est différente.
Les générations anciennes étant
peu habituées à se plaindre, les
idées reçues sont légion. Ainsi,
l’on entend souvent : «la douleur
fait partie du vieillissement, c’est
une faiblesse de caractère, se plain-
dre finit par faire se détourner
l’entourage ».
A contrario, il est vrai aussi que,
pour certaines personnes, ex-
primer une douleur de façon
agressive est un moyen de com-
munication. D’où l’importance de
l’écoute et du savoir-faire en éva-
luation. Certains signes alertent
sur la douleur ressentie par le pa-
tient. Chez les personnes âgées,
les expressions ressemblent fort à
celles exprimées par un enfant.
L’attention du soignant doit être
attirée si un patient présente un
visage aux traits anormalement
crispés ou atones, un regard fixe
ou absent. Des mains en poings
serrés ou crochetant les draps,
une position corporelle inhabi-
tuelle doivent faire penser à des
gestes de défense contre la dou-
leur. Le manque d’appétit, même
s’il n’est pas systématiquement
signe de douleur, peut l’être par-
fois. Une agressivité pendant le
soin chez une personne atteinte
de troubles de communication
verbale peut l’être aussi et déso-
rienter le soignant quant à la vio-
lence exprimée. La douleur induit
toute sorte de changements de
comportement.
Pour le Dr Sylvie Lefebvre-Chapiro,
médecin gériatre (hôpital Paul-
Brousse) : «Savoir prendre en charge
une douleur est d’abord une question
de bon sens. Devant une maladie
potentiellement douloureuse, de-
mandons-nous systématiquement
s’il y a douleur ou pas. Dans certains
cas, comme une fracture du col du
fémur, la douleur est évidente. Donc,
même si le patient ne se plaint pas,
prévoyons des antalgiques pour le
moment où il va être déplacé pour
la radio ».
Est-il besoin de rappeler que
toute plaie, et a fortiori les es-
carres, font souffrir au moment
du soin ? Une douleur non ex-
primée, donc non traitée, peut
entraîner de nombreux troubles
pathologiques : du sommeil, de
l’appétit, constipation, irritabilité,
ou au contraire prostration, ra-
lentissement psychomoteur, dé-
pression... Dans la prise en charge
de la douleur, les observations
et évaluations infirmières trou-
vent là toute leur place.
Anne Cormi
10
Douleur
Compte tenu de l’allongement de la durée de vie, la pré-
servation de la qualité de vie devient une préoccupation
importante. Or, en matière de soulagement de la dou-
leur chez les personnes âgées, des progrès restent à faire.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No29 - septembre 2001
Migraine :
attention aux CAM
Les CAM, c’est-à-dire les céphalées
par abus de médicaments corres-
pondent souvent à des situations
survenant chez les migraineux.
L’utilisation excessive, quasi quoti-
dienne, d’antalgiques non spéci-
fiques induit le développement
d’un état céphalgique chronique.
L’incidence n’est pas négligeable
car elle concerne 4 % des migrai-
neux, ce qui correspond à environ
300 000 sujets.
Les CAM sont en général mal
connues. La littérature fait état de
sujets plutôt féminins, avec un âge
moyen au moment du diagnostic
compris entre 40 et 50 ans. Dans la
grande majorité des cas, ces maux
de tête viennent compliquer une
migraine déjà installée. On consi-
dère que le diagnostic de CAM est
relativement tardif puisque l’abus
médicamenteux est présent depuis
plus de 10 ans alors que le carac-
tère chronique de la céphalée est
patent depuis près de six ans. L’abus
de médicaments expose les patients
à une iatrogénie avec, en particu-
lier, un risque rénal. Le diagnostic
d’une CAM repose sur certains cri-
tères : sa survenue après un usage
quotidien d’au moins 3 mois du
médicament en cause, l’existence
d’une dose minimale, le caractère
quasi permanent (15 jours par
mois), la disparition des céphalées
dans le mois suivant l’arrêt des mé-
dicaments en cause. Sont en cause
les abus d’ergotamine et ceux d’an-
talgiques. L’attitude thérapeutique
repose sur un sevrage médicamen-
teux souvent réalisé dans le cadre
d’une hospitalisation pour les mi-
graineux et sur la mise en route
d’un traitement prophylactique afin
de contrôler le terrain migraineux.
Réf. : cf. M. Lanteri Minet. Les cépha-
lées par abus médicamenteux. Pathol
Biol 2000 ; 48 : 707-14.
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