Dossier thématique
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La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n°2 - mars-avril 2008
la présence d’une ascite abondante et, bien entendu, de multi-
ples masses abdominales palpables est une contre-indication
à une réintervention (6, 10, 12). En dehors de ces critères, un
antécédent de radiothérapie augmente la mortalité postopéra-
toire (12). La survie médiane après chirurgie d’une occlusion
sur carcinose est de 2 à 7 mois (3, 4, 13, 14), la durée médiane
d’hospitalisation de 12 à 25 jours (4, 6, 14) et le contrôle des
symptômes est obtenu dans 37 à 51% des cas (4, 6, 13-15). Sur des
malades sélectionnés, l’occlusion peut être levée dans 90% des
cas lors de l’intervention (6), notamment lorsque l’on découvre
qu’un seul nodule est responsable de l’occlusion, nodule dont
on peut alors faire l’exérèse ou réaliser la dérivation. Dans une
étude comparant le traitement chirurgical au traitement médical
(4), la durée d’hospitalisation (21 versus 10 jours), la durée de
maintien de la sonde gastrique (8 versus 4 jours) et la survie (7
versus 13 mois) étaient en faveur du traitement médical, même
si la qualité de vie semblait meilleure après traitement chirur-
gical. La mortalité postopératoire des malades en occlusion sur
carcinose péritonéale est d’environ 13 à 25% (3, 4, 8, 14, 15). Les
causes principales de complications postopératoires sont le sepsis
intra-abdominal et les fistules digestives. La moitié des décès
postopératoires est en rapport avec l’évolution terminale de la
maladie chez des patients dont la laparotomie n’a pas permis de
geste efficace. Ces données soulignent l’importance de la sélec-
tion des malades susceptibles de tirer un bénéfice du traitement
chirurgical en termes de qualité de survie. Dans certains cas, le
bilan mettra en évidence une sténose isolée et courte, haute ou
basse sur le tube digestif et qui pourra être traitée par la mise
en place d’une prothèse endoscopique. Ainsi, l’occlusion pourra
être levée dans près de 90% des cas, et cela de façon durable
jusqu’au décès du patient dans 50 à 60% des cas (16).
LORSQUE LA RÉCIDIVE EST INCONNUE
Dans cette situation, l’occlusion a une cause bénigne chez 20 à
50% des malades ayant un antécédent de cancer digestif (5, 6,
8). Compte tenu de la difficulté à établir la cause de l’occlusion,
l’abstention chirurgicale pose le problème majeur de méconnaître
une occlusion du grêle sur bride pour laquelle une opération
chirurgicale en urgence peut être nécessaire. Le tableau clinique
observé peut orienter vers une cause maligne ou une cause
bénigne. Un délai depuis l’intervention pour cancer supérieur
à 5 ans (4, 6), un début brutal des symptômes (6) et un arrêt
complet du transit (6) sont plus fréquemment observés en cas
d’occlusion sur bride. À l’inverse, une maladie initiale étendue ou
un antécédent de tumeur perforée dans l’abdomen (3) sont des
arguments en faveur d’une carcinose péritonéale. La tomoden-
sitométrie abdominale est l’examen de choix, car elle diagnos-
tique l’occlusion mécanique du grêle avec une sensibilité et une
spécificité de plus de 90% (17). Cet examen affirme l’existence
d’une récidive tumorale dans 80% des cas (6) et recherche une
occlusion colique, qui peut être associée dans 8% des cas d’oc-
clusion du grêle sur carcinose (18). Le diagnostic proprement
dit de la carcinose par la tomodensitométrie abdominale est
difficile, avec une sensibilité estimée entre 55 et 75% (19, 20).
De plus, cet examen sous-estime l’extension de la maladie en ne
montrant que les plus gros nodules péritonéaux. L’IRM aurait
une sensibilité et une spécificité de 84 et 87% (19). Quant au
PET scan, sa sensibilité est de 35%, et probablement supérieure
pour les nodules de plus de 1 cm (20).
CONCLUSION
En l’absence d’un tableau d’occlusion du grêle évoquant une stran-
gulation et imposant une intervention en urgence, un traitement
médical comportant une aspiration digestive est institué. Après
exploration clinique et radiologique, si le diagnostic d’occlusion
par carcinose est avéré, le traitement médical est maintenu,
puisque ce seul traitement permet d’obtenir une amélioration
chez la moitié des malades (3, 8). C’est seulement en l’absence
d’amélioration que le traitement chirurgical sera envisagé. Les
patients pour lesquels celui-ci est la meilleure indication sont
ceux en bon état général, ayant une maladie d’évolution lente,
une carcinose non palpable, peu ou pas visible au scanner, sans
ascite et pour lesquels l’occlusion est liée à une sténose unique
mais non accessible à un traitement endoscopique. Si aucune
récidive n’est identifiée à l’issue du bilan clinique et radiolo-
gique, l’intervention chirurgicale est indispensable si l’occlusion
persiste, car une cause bénigne est retrouvée dans la moitié des
cas (5, 6, 8).N
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