Dossier thématique Avant-propos D ossier thématique Quels traitements pour les carcinoses péritonéales d’origine digestive ? # Bruno Landi, Gabriel Rahmi* L a carcinose péritonéale correspond à l’envahissement du péritoine par une tumeur maligne dont l’origine n’est pas le péritoine lui-même. Les tumeurs le plus souvent impliquées sont gynécologiques et digestives. Seules les carcinoses péritonéales à l’exception des sarcomes d’origine digestive seront abordées dans cette monographie, en particulier dans le cadre des tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) dont la prise en charge est spécifique. Leur pronostic est globalement mauvais, souvent à court terme, et elles sont souvent responsables de symptômes induisant une qualité de vie médiocre. La mise en place d’un traitement palliatif de qualité est donc essentielle. Des progrès ont néanmoins été faits dans plusieurs domaines. La prise en charge symptomatique, même si elle peut être particulièrement difficile, permet, dans les formes avancées avec obstruction digestive, une fin de vie se déroulant généralement dans des conditions de confort acceptables. Deux articles sont consacrés à ce sujet par les équipes de B. Denis et de G. Laval, qui se sont particulièrement impliquées dans ce domaine. Il est intéressant de mettre en parallèle ces points de vue qui présentent de nombreuses similitudes. Il est clair que la prise en charge doit tenir compte de l’ensemble des symptômes, digestifs ou non, mais aussi des problèmes psychiques et sociaux rencontrés par le patient et par sa famille. Celle-ci s’intègre dans une prise en charge globale de la maladie qui doit être réellement multidisciplinaire. Le recours à la chirurgie a diminué dans les occlusions par carcinose péritonéale. Une revue de la Cochrane Library (1) a montré que son efficacité et ses résultats ne pouvaient être clairement établis. Il n’existe pas d’arguments pour attester que la chirurgie serait supérieure au traitement symptomatique en termes d’amélioration des symptômes, de morbidité, de mortalité et de qualité de vie. La chirurgie n’est donc envisagée qu’au cas par cas chez les patients en bon état général, n’ayant pas un mauvais pronostic à court terme, présentant des sténoses extrinsèques en nombre limité et chez qui l’occlusion persiste. Le recours à un traitement endoscopique par prothèse peut aussi être envisagé en cas de sténose unique. Un bilan tomodensitométrique est donc souvent nécessaire pour essayer de déterminer le ou les niveau(x) et le mécanisme de l’occlusion. La cause possible d’une occlusion n’est pas univoque, même en cas de carcinose péritonéale, et on a parfois la surprise de découvrir une cause non tumorale d’occlusion, notamment une bride. R. Douard et P. Wind nous livrent leur opinion sur “quels malades opérer ?” en cas d’occlusion. L’efficacité des chimiothérapies systémiques a augmenté dans les cancers digestifs, en particulier dans le cancer colorectal. Une chimiothérapie systémique palliative est généralement réalisée chez les patients atteints de carcinose péritonéale d’origine digestive ayant un état général conservé, en l’absence de signes d’occlusion intestinale. Les autres critères influençant son administration sont l’âge, l’origine de la tumeur, le contexte clinique et l’importance de la masse tumorale. En effet, son efficacité reste très limitée en cas de carcinose évoluée, situation où le risque occlusif augmente. Cependant, peu de résultats concernant spécifiquement l’efficacité de la chimiothérapie dans les carcinoses péritonéales d’origine digestive sont disponibles dans la littérature. La carcinose péritonéale d’un cancer colique reste isolée pour plus de 30 % des patients. Ce processus particulier de dissémination tumorale est alors distinct des processus métastatiques vasculaires et lymphatiques. Malgré les progrès de la chimiothérapie systémique et des thérapies ciblées, l’évolution négative de cette carcinose est inéluctable. Quelle que soit la qualité des exérèses chirurgicales, la chirurgie d’une carcinose est au mieux de type R1, de par une maladie résiduelle microscopique constante. C’est pour traiter cette maladie résiduelle que la chimiohypertermie intrapéritonéale (CHIP) a été proposée. Pour les cancers coliques, le niveau de preuve de l’efficacité sur la survie d’une démarche associant chimiothérapie systémique, chirurgie et CHIP est aujourd’hui très élevé, de grade B. Cela n’est donc plus du domaine expérimental ou futuriste ! Parmi les facteurs de succès, l’étendue limitée de la carcinose, son exérèse macroscopique complète et un nombre limité de gestes chirurgicaux sont des critères majeurs. Il faut donc éviter les chirurgies itératives (l’idéal est de réaliser l’ensemble du traitement chirurgical en un seul temps) et sélectionner des carcinoses dont l’exérèse semble raisonnable (donc chimiosensibles). Ces aspects sont parfaitement développés dans l’article de M. Pocard et al. (p. 54). Il ne nous reste plus qu’à vous souhaiter une bonne et enrichissante lecture ! N RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE 1. Feuer DJ, Broadley KE, Shepherd JH, Barton DP. Surgery for the resolution * Hôpital européen Georges-Pompidou, Paris. La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n° 2 - mars-avril 2008 HGE 2(XI) MARS AVRIL 2008.indd 43 of symptoms in malignant bowel obstruction in advanced gynaecological and gastrointestinal cancer. In: The Cochrane Library, Oxford;issue 1, 2002. 43 14/04/08 16:03:25