Nous faisons de vos spécialités Nous faisons de vos spécialités notre respécspéc not ialitéialité é ditorial Directeur de la publication : Claudie Damour-Terrasson Rédacteur en chef : Pr P. Amarenco (Paris) Rédacteur en chef adjoint : Dr M. Sarazin (Paris) Secrétaire scientifique : A. Kemmel Comité de rédaction Dr J. d’Anglejan-Chatillon (Versailles) - Pr P. Azouvi (Garches) Dr A. Béhin (Paris) - Dr P. Bouche (Paris) Dr P. Derkinderen (Nantes) - Dr S. Dupont (Paris) Dr O. Heinzlef (Poissy) - Dr M. Kalamarides (Clichy) Dr F. Laigle-Donadey (Paris) - Dr T. Maisonobe (Paris) Pr J.M. Pinard (Garches) - Dr P.F. Pradat (Paris) Dr P.J. Touboul (Paris) - Dr J.M. Visy (Reims) Conseil de rédaction Pr S. Bakchine (Reims) - Pr H. Chabriat (Paris) Pr J.Y. Delattre (Paris) - Pr B. Dubois (Paris) - P. Krack (Grenoble) Pr C. Lubetzki (Paris) - Pr F. Parker (Le Kremlin-Bicêtre) Pr P. Pollak (Grenoble) - Pr J.P. Pruvo (Lille) Pr M.J. Vidailhet (Paris) Conseillers scientifiques Pr Y. 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Leys - H. Loiseau - G. Lot - D. Malapert M.H. Marion - P. Masnou - H. Massiou - J. Melki - A. Monjour T. Moulin - A. Moulonguet - P. Neuschwander - P. Niclot F. Pasquier - S. Peudenier - V. Plante-Bordeneuve - O. Rascol J. Reis - P. Rémy - G. Rodesch - D. Rodriguez - D. Rougemont E. Roullet - M. Sanson - J. Touchon - F. Turjman - L. Vallée M. Vérin - P. Vermersch - J.M. Verret - H. Vespignani F. Viallet - J. Vrigneaud - S. Zemrag Société éditrice : EDIMARK SAS Président-directeur général Claudie Damour-Terrasson Tél. : 01 46 67 63 00 – Fax : 01 46 67 63 10 Rédaction Secrétaire générale de la rédaction : Magali Pelleau Secrétaire de rédaction : Laurence Ménardais Rédactrices-réviseuses : Cécile Clerc, Sylvie Duverger, Muriel Lejeune, Catherine Mathis, Odile Prébin Infographie Premier rédacteur graphiste : Didier Arnoult Responsable technique : Virginie Malicot Rédactrices graphistes : Mathilde Aimée, Christine Brianchon, Cécile Chassériau Dessinateurs d’exécution : Stéphanie Dairain, Antoine Palacio Commercial Directeur du développement commercial Sophia Huleux-Netchevitch Directeur des ventes : Chantal Géribi Directeur d’unité : Béatrice Tisserand Régie publicitaire et annonces professionnelles Valérie Glatin Tél. : 01 46 67 62 77 – Fax : 01 46 67 63 10 Abonnements : Lorraine Figuière (01 46 67 62 74) 2, rue Sainte-Marie - 92418 Courbevoie Cedex Tél. : 01 46 67 63 00 – Fax : 01 46 67 63 10 E-mail : [email protected] Site Internet : http://www.edimark.fr Adhérent au SNPM Revue indexée dans la base PASCAL Crédits photos (couverture) : © Goodshoot - © stockdisc Démence parkinsonienne : quand et comment traiter ? éditorial La Lettre du Neurologue Dementia associated with Parkinson’s disease: when and how to treat? ●● O. Moreaud*, P. Krack** L a démence parkinsonienne (DP) se définit comme un syndrome démentiel survenant chez un patient atteint d’une maladie de Parkinson (MP). Elle altère principalement l’attention et les fonctions exécutives ; l’intensité des troubles de la mémoire est moindre que dans la maladie d’Alzheimer (MA), et qualitativement différente (on constate surtout des difficultés de rappel et d’évocation). Elle survient habituellement après 8 à 10 ans d’évolution, mais il peut y avoir de grandes variations. On estimait traditionnellement à 40 % la prévalence de la démence dans une population de patients parkinsoniens, mais une étude longitudinale récente retrouve une prévalence cumulée de la démence de 78 % à 8 ans (1). Une proportion substantielle de patients souffrant d’une MP va donc développer une démence. L’âge est le principal facteur associé à sa survenue. Les autres facteurs de risque sont la sévérité du syndrome parkinsonien, notamment des signes dits “axiaux” (rigidité nucale, instabilité posturale, troubles de la marche, dysarthrie), la présence de troubles cognitifs dont l’intensité n’est pas suffisante pour porter le diagnostic de démence, et l’apparition d’hallucinations visuelles sous traitement dopaminergique stable, bien toléré auparavant aux mêmes doses. La DP grève le pronostic de la MP, puisqu’elle augmente le taux d’institutionnalisations et de décès. Un déficit cholinergique qui résulte de la dénervation des neurones cholinergiques du noyau de Meynert projetant sur le cortex frontal est supposé être à la base du syndrome dysexécutif de la MP (2). Grâce à l’immunomarquage de l’alpha-synucléine, on a aussi pu montrer que les hallucinations et la démence sont hautement corrélées à la présence de corps de Lewy dans les structures limbiques et le néocortex (3). L’observation de corps de Lewy corticaux dans la MP a * Unité de neuropsychologie, département de neurologie et CMRR, CHU de Grenoble. ** Unité de pathologie du mouvement, département de neurologie, CHU de Grenoble. La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007 199 éditorial é ditorial soulevé la question de savoir s’il est encore judicieux de distinguer la DP (démence survenant chez un malade porteur d’une MP) et la démence à corps de Lewy (DCL) [démence survenant de novo, associée dès le début ou ultérieurement à un syndrome parkinsonien], deux pathologies qui semblent être deux extrêmes du même spectre neuropathologique et clinique. La distinction clinique est néanmoins maintenue dans les critères de diagnostic revus récemment. L’évolution des troubles cognitifs dans la MP est inexorable et se fait en général très lentement, au point que Parkinson avait jugé que l’intellect n’était pas touché dans la maladie qui porte son nom. Le syndrome dysexécutif est présent longtemps avant l’installation de la démence, avec un retentissement variable sur les activités du patient. Il peut être facilement suspecté à l’interrogatoire du patient et de son entourage, qui relèvent une lenteur, des difficultés dans les conversations, avec phénomène du “mot sur le bout de la langue”, et des troubles de la concentration. On peut assimiler ces symptômes à la bradyphrénie. Des tests simples, facilement réalisables par le neurologue, peuvent être suffisants pour mettre en évidence les troubles cognitifs qui prédominent sur les fonctions exécutives. Un profil assez caractéristique est observé : le Mini Mental Test est habituellement dans les limites de la normale, car il est peu sensible à ces troubles, mais on note une diminution des performances à la Batterie rapide d’efficience frontale et aux tâches de fluence verbale, ainsi qu’une baisse du rappel différé libre avec normalisation par l’indiçage à l’épreuve des 5 mots. Il faut apprécier le retentissement de ces troubles dans la vie quotidienne du patient. Lorsque ces tests simples sont altérés, il est souvent déjà notable, avec une gêne dans les activités professionnelles et sociales, et éventuellement une altération dans les activités instrumentales de la vie quotidienne (la préparation des médicaments, par exemple). Néanmoins, même en l’absence de retentissement net, et même lorsque les tests précédents sont normaux, une évaluation neuropsychologique plus complète, réalisée au mieux par un neuropsychologue ayant une expérience dans le domaine, peut 200 mettre en évidence des troubles des fonctions exécutives et de la mémoire de travail, et des troubles de la mémoire à long terme entrant dans ce cadre. Les épreuves utilisées sont variées, allant des échelles globales du type Dementia Rating Scale de Mattis aux épreuves plus analytiques combinant différents tests (Trail Making Test A et B, Stroop Test, tests de classement du type Wisconsin, fluences, empan envers, etc.). Les tâches d’apprentissage verbal à long terme de type Grober et Buschke (RL/RI16) montrent de façon caractéristique une chute du rappel libre immédiat, très améliorée par l’indiçage, non aggravée en rappel différé, et normalisée par la reconnaissance. On peut proposer en pratique de réaliser ce bilan dès lors que le patient ou l’entourage se plaint et exprime une gêne dans la vie quotidienne, alors que les tests simples ne montrent pas d’altération. Il faudra tenir compte de certains facteurs qui peuvent interférer avec la passation des tests et générer un pattern de performances proche : dépression, apathie, gêne motrice, prise d’un traitement anticholinergique. L’évolution peut être émaillée d’hallucinations favorisées par les médications dopaminergiques, et ces hallucinations peuvent être des signes précurseurs de la démence. Le syndrome dysexécutif peut répondre partiellement à la L-dopa. Cependant, l’impact global de la dopathérapie sur les troubles cognitifs reste très modeste, et va surtout dans le sens d’un effet motivationnel et non pas d’une vraie amélioration du syndrome dysexécutif. C’est surtout l’atteinte cholinergique qui semble responsable du syndrome dysexécutif au cœur de la DP (on sait aussi que l’injection intraveineuse de scopolamine chez des parkinsoniens sans troubles cognitifs provoque de façon spécifique un syndrome dysexécutif) [2]. Cela explique le fait que le retentissement des troubles des fonctions exécutives peut être longtemps faible chez le parkinsonien jeune avec une bonne réserve cognitive, tant que l’atteinte corticale de la synucléinopathie n’est pas trop importante. L’utilisation des anticholinestérasiques centraux, préconisés dans la MA, était donc licite pour tenter d’améliorer les symptômes cognitifs et La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007 comportementaux de la DP. De petits essais ouverts ont suggéré une efficacité de la tacrine, du donépézil, de la rivastigmine et de la galantamine, mais il n’existe que peu d’essais randomisés en double aveugle. Ces essais sont conduits avec des outils développés pour la MA, assez peu sensibles aux déficits cognitifs de la DP, ce qui rend leurs résultats positifs d’autant plus intéressants. Une étude avait montré une efficacité de la rivastigmine dans la DCL (4). Un essai de grande envergure, dans lequel 541 patients atteints de DP ont été enrôlés (parmi lesquels 410 ont terminé l’essai), a été conduit avec cette molécule pendant 24 semaines (5). Les patients présentaient une démence légère à modérément sévère (MMSE 10-24). Un bénéfice du traitement (dose moyenne : 8,7 mg par jour) a été observé sur toutes les mesures d’évaluation : cognition (incluant notamment la fluence verbale et le test de l’horloge), comportement (amélioration des scores globaux d’une version à 10 items de l’Inventaire neuropsychiatrique), impression clinique globale et activités de la vie quotidienne. L’hypertonie et la bradykinésie n’ont pas été aggravées, mais l’accentuation du tremblement était plus fréquemment rapportée dans le groupe traité. Les effets secondaires digestifs (nausées et vomissements) étaient plus fréquents que sous placebo, et constituaient une raison fréquente de sortie d’essai. Cet essai a conduit à une extension d’AMM de la rivastigmine en Europe pour le traitement des “démences légères à modérément sévères associées à la MP”. Doit-on pour autant traiter systématiquement tous les patients dès l’apparition de troubles cognitifs ? À notre avis, un inhibiteur central des cholinestérases devrait être envisagé chez des patients parkinsoniens présentant des troubles cognitifs caractéristiques (lenteur, syndrome dysexécutif, trouble du rappel amélioré par l’indiçage) retentissant sur les activités, après arrêt des anticholinergiques et de l’amantadine, substitution des agonistes dopaminergiques par la L-dopa et traitement d’un éventuel syndrome dépressif sous-jacent. Même si l’on ne dispose pas de données très claires sur la question dans la DP, les résultats obtenus dans la DCL (4) permettent d’envisager aussi la prescription après un La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007 épisode confusionnel ou en cas de persistance d’hallucinations visuelles mal tolérées malgré l’arrêt des traitements favorisant leur apparition, ou encore en cas d’apathie sévère. La titration des doses doit être prudente et très progressive, de façon à limiter le risque de nausées et d’aggravation du tremblement. Chez les patients les plus âgés, on se méfiera du risque cardiovasculaire (bradycardie, hypotension), et on recommandera un examen complet avec ECG avant la prescription. Dans la mesure où aucune étude n’a dépassé 24 semaines, il faudra évaluer régulièrement le bénéfice clinique de ce traitement. Si des hallucinations mal tolérées subsistent sous traitement anticholinestérasique, on discutera la prescription de clozapine. Bien entendu, les prescriptions médicamenteuses doivent être accompagnées de toutes les mesures médico-sociales utiles à la prise en charge des patients avec troubles cognitifs et de leur entourage. éditorial é ditorial En somme, l’arrivée des inhibiteurs des cholinestérases – même si ces traitements ont des limites évidentes, puisqu’ils s’adressent au déficit cholinergique sans contrecarrer le développement et les effets de la synucléinopathie corticale – constitue un progrès certain dans la prise en charge de la DP. On voit aussi, si l’on en doutait, que la prise en charge des patients parkinsoniens ne se limite pas aux signes moteurs, et qu’une évaluation régulière de la cognition et du comportement est nécessaire. ■ RéféRences bibliogRaphiques 1. Aarsland D, Andersen K, Larsen JP et al. Prevalence and characteristics of dementia in Parkinson’s disease: an 8-year prospective study. Arch Neurol 2003; 60:387-92. 2. Dubois B, Danze F, Pillon B et al. Cholinergic-dependent cognitive deficits in Parkinson’s disease. Ann Neurol 1987;22:26-30. 3. Williams DR, Lees AJ. Visual hallucinations in the diagnosis of idiopathic Parkinson’s disease: a retrospective autopsy study. Lancet Neurol 2005;4:605-10. 4. McKeith I, Del Ser T, Spano P et al. Efficacy of rivastigmine in dementia with Lewy bodies: a randomised, double-blind, placebo-controlled international study. Lancet 2000;356:2031-6. 5. Emre M, Aarsland D, Albanese A et al. Rivastigmine for dementia associated with Parkinson’s disease. N Engl J Med 2004;351:2509-18. 201