La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4 - vol. VI - juillet-août 2003
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heures qui suivent : dyspnée, hypotension, urticaire, fièvre, fris-
sons). Ces effets indésirables ont été observés uniquement à
partir de la deuxième perfusion, leur incidence augmentant avec
le nombre de perfusions.
Il existait une relation statistiquement significative entre la
concentration moyenne d’ATI avant la perfusion (≥8,0µg/ml) et
le risque de survenue d’une réaction aiguë allergique lors de la
perfusion (RR = 2,40 ; IC 95% : 1,65-3,66).
En revanche, le risque d’effets secondaires retardés (syndrome
pseudo-grippal, arthralgies, éruptions cutanées, myalgies et asthé-
nie) n’était pas corrélé au taux d’ATI.
La durée de la réponse clinique à l’infliximab était également
significativement inférieure chez les patients avec des taux d’ATI
supérieurs ou égaux à 8,0µg/ml (35 jours contre 71 ; p<0,001).
Concernant les concentrations sériques d’infliximab, celles-ci
étaient en moyenne de 12,0 µg/ml 4 semaines après une perfu-
sion d’infliximab.
Les patients avec un traitement immunosuppresseur avaient des
taux d’infliximab plus fréquemment supérieurs à 12,0 µg/ml
(RR= 1,93 ; IC 95 % : 1,40-2,60).
Les concentrations d’infliximab mesurées 4 semaines (S4) après
une perfusion étaient, quant à elles, significativement plus basses
(p<0,001) chez les patients ayant déjà présenté une réaction aiguë
allergique lors d’une perfusion (1,2µg/ml) par rapport à ceux
n’ayant jamais présenté un tel effet indésirable (14,1µg/ml).
Après la survenue d’une réaction aiguë lors d’une perfusion, la
durée moyenne de la réponse à l’infliximab était plus courte
(38,5jours) que chez les patients qui n’avaient jamais présenté
cet effet secondaire pendant cette étude (65 jours ; p < 0,001).
Des concentrations d’infliximab supérieures ou égales à
12,0µg/ml à la semaine 4 étaient associées à une durée de la
réponse clinique à l’infliximab de 81,5 jours contre 68,5 jours
pour des taux inférieurs à 12,0µg/ml (p <0,01).
Cependant, en régression logistique, seule la présence d’ATI était
corrélée de manière indépendante à la durée de la réponse cli-
nique à l’infliximab, alors que la prise d’un agent immunosup-
presseur et les concentrations d’infliximab ne l’étaient pas.
Les résultats de cette étude semblent donc confirmer l’importance
d’associer un agent immunosuppresseur (azathioprine,
6-mercaptopurine ou méthotrexate) au traitement par infliximab,
voire peut-être la nécessité d’instaurer le traitement immunosup-
presseur avant la première perfusion d’infliximab, cela dans le but
de réduire l’incidence des réactions aiguës allergiques pouvant
être observées lors de chaque perfusion et d’augmenter la durée
de la réponse clinique à ce traitement. Les auteurs suggèrent que
le traitement d’entretien par des perfusions d’infliximab toutes les
8 semaines pourrait également prévenir l’apparition des ATI grâce
à une présence continue d’infliximab dans le sang plutôt qu’en
maintenant des concentrations sériques élevées (≥12,0 µg/ml).
TOLÉRANCE DU TRAITEMENT PAR INFLIXIMAB
À l’heure actuelle, plus de 500 000 patients ont été exposés au
traitement par infliximab à travers le monde. Les trois indications
principales de ce traitement sont la MC, la polyarthrite rhuma-
toïde (PR) et la spondylarthrite ankylosante.
Le problème majeur qui se pose en pratique clinique est d’éta-
blir de manière formelle l’imputabilité des maladies intercur-
rentes rencontrées sous traitement par infliximab à ce dernier. En
effet, il est clairement établi qu’une maladie comme la PR peut
elle-même induire un état d’immunodépression pouvant favori-
ser l’apparition d’infections opportunistes comme la tuberculose.
Le risque le mieux établi est celui de la réactivation d’une tuber-
culose latente à l’origine d’une tuberculose maladie.
La majorité des cas de tuberculose rapportés sous infliximab ont
été observés lors des quatre premières perfusions.
Le nombre des cas incidents de tuberculose, après une progres-
sion constante depuis la première utilisation de l’infliximab aux
États-Unis en octobre 1998, connaît depuis près de deux ans un
plateau avec une incidence estimée à 0,06 %. Le respect des
recommandations internationales (radiographie pulmonaire et
IDR à la tuberculine systématiques avant chaque perfusion), une
meilleure sélection des patients et l’information des praticiens
susceptibles de prescrire ce traitement devraient permettre de
limiter à l’avenir la survenue de nouveaux cas.
D’autres infections opportunistes comme la pneumocystose, la lis-
tériose ou l’aspergillose, quelquefois mortelles, peuvent également être
favorisées par l’état d’immunosuppression induit par l’anti-TNFα.
Les anticorps anti-ADN et antinucléaires pouvant apparaître après
une perfusion d’infliximab sembleraient avoir peu de traduction
clinique, puisque l’incidence des anticorps antinucléaires peut,
par exemple, atteindre 50% après plusieurs perfusions d’inflixi-
mab (20), alors que seuls quelques rares cas de lupus induit ont
été répertoriés sous infliximab.
L’infliximab ne semble pas non plus être associé à une toxicité
cardiovasculaire particulière. La grande majorité des cas d’in-
suffisance cardiaque notés chez des patients atteints de PR et
bénéficiant d’un traitement par anti-TNFαpeut être expliquée
par les comorbidités fréquemment rencontrées avec l’évolution
de la PR (absence d’association significative dans les différentes
études ayant analysé cette relation). Cependant, le principe de
précaution veut que la présence d’une insuffisance cardiaque
sévère (grade 3/4) contre-indique le traitement par infliximab, ce
qui est rarement le cas dans la MC, qui survient chez des patients
relativement jeunes. À noter que le risque d’insuffisance car-
diaque, s’il venait à être confirmé par d’autres études, pourrait
dépendre du nombre de perfusions, d’après les données de la
littérature déjà en notre possession.
Sur le plan neurologique, des cas de démyélinisation centrale, de
syndrome de Guillain-Barré et de neuropathies ont notamment
été rapportés sous infliximab, sans qu’aucun décès ait été observé.
NOUVEAUTÉS EN THÉRAPEUTIQUE