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La Lettre du Sénologue - n° 17 - juillet/août/septembre 2002
environ 15 % de prélèvements jugés comme non contributifs (4)
et la présence d’atypies épithéliales n’est pas exceptionnelle (5).
En pratique, lorsque le tableau clinique et mammographique est
typique de gynécomastie, la cytologie n’est pas indispensable ;
mais il faut la réaliser au moindre doute ainsi qu’un tru-cut ou
une exérèse si la cytologie ne permet pas de conclure.
La responsabilité d’une prise médicamenteuse ou toxique doit
être validée par une démarche d’imputabilité : médicament
reconnu, chronologie, effet de l’arrêt du traitement, voire de sa
réintroduction, absence d’autre cause. Si tel est le cas, cela per-
mettra d’éviter des examens complémentaires inutiles. L’unila-
téralité n’est pas un argument contre une cause médicamenteuse.
GYNÉCOMASTIES IATROGÈNES
Elles étaient observées surtout dans le traitement du cancer de la
prostate (6). Aujourd’hui, elles sont aussi rapportées chez des
patients séropositifs sous traitement antirétroviral intensif (7, 8).
Diagnostic étiologique
Celui-ci peut naturellement aller d’un diagnostic simple à une
situation très complexe, étant donné la multiplicité des causes
envisageables.
En pratique, en fait, la démarche initiale doit rester relativement
simple et réalisable par n’importe quel praticien. Elle permet de
découvrir les causes les plus fréquentes et aussi les plus graves.
➣l’interrogatoire sera soigneux, permettant naturellement de
lister les médicaments et les drogues pouvant être impliqués,
mais aussi à la recherche d’un hypogonadisme, d’une hyper-
thyroïdie, de signes d’insuffisance rénale ou hépatique, d’une
atteinte neurologique.
➣sur le plan clinique, même dans un contexte de gynécomastie
pubertaire évidente, il faut absolument réaliser une palpation
abdominale à la recherche d’une masse (surrénales) et surtout un
examen soigneux des testicules pour éliminer une tumeur testi-
culaire.
Au moindre doute, l’échographie testiculaire est extrêmement
performante.
•À ce stade, deux situations sont déjà clairement individua-
lisables :
– Une cause médicamenteuse.
Si la suspicion est forte, on peut interrompre le produit (ce qui
est parfois difficile) et évaluer après 1 à 2 mois, sans autre exa-
men.
– Une gynécomastie pubertaire idiopathique.
Le plus important sera de rassurer l’adolescent et de le revoir à
3 mois, puis à 6 mois pour s’assurer de la régression.
•Dans tous les autres cas, quelques examens sont essentiels :
– une cytologie ou une histologie de la glande ;
– une biologie hépatique, rénale et thyroïdienne ;
– un dosage des bêta-HCG, testostérone, estradiol et éventuelle-
ment FSH et LH. Le dosage des bêta-HCG permet de suspecter
une tumeur germinale testiculaire ou autre.
Si tous ces premiers dosages sont normaux, ainsi que l’examen
testiculaire, en l’absence de cause médicamenteuse, le diagnos-
tic de gynécomastie idiopathique devient très probable.
Autrement, les tests biologiques auront permis de découvrir
l’une des principales causes endocriniennes : tumeur testiculaire,
hypogonadisme primaire, hyperprolactinémie, hyperthyroïdie.
Les autres examens deviennent affaire de spécialiste et seront
naturellement guidés par ce premier bilan.
Traitement
Il est important de souligner d’emblée que beaucoup de gyné-
comasties vont régresser spontanément, notamment en période
pubertaire mais aussi chez l’homme âgé.
Un traitement interventionniste sera donc surtout utile en cas de
gynécomastie symptomatique, soit en raison de tensions, de dou-
leurs, gênant le patient dans sa vie de tous les jours, soit en cas
de mauvaise tolérance psychologique en dehors de la puberté.
Il est important de souligner que la gynécomastie floride et sou-
vent symptomatique pourra répondre à un traitement andro-
génique, alors qu’en phase fibreuse, ce traitement sera beaucoup
moins efficace.
•Chirurgie
S’il s’agit d’une adipomastie (ou pseudo-gynécomastie), la tech-
nique chirurgicale la plus adaptée est la lipoaspiration ; elle est
très efficace, avec une rançon cicatricielle minime, et n’empêche
nullement un examen histologique de principe.
En cas de gynécomastie vraie, le geste consistera en une mas-
tectomie subtotale sous-cutanée par une incision périaréolaire,
conservant la plaque aréolo-mamelonnaire.
La chirurgie peut être indiquée d’emblée lorsqu’il existe une his-
toire clinique ancienne de gynécomastie idiopathique et, à
l’inverse, après échec d’un traitement médical suffisamment pro-
longé.
•Traitement médical
Ce traitement est envisagé après avoir formellement éliminé un
carcinome ou une adipomastie.
Il sera proposé aux gynécomasties sans cause organique ou
médicamenteuse.
Il doit être assez rapidement instauré en cas de symptomatologie
douloureuse.
Le traitement le plus fréquemment proposé est une pommade à
base de dihydrotestostérone (Andractim®). Ce traitement est effi-
cace dans plus de 3/4 des cas et entraîne une disparition com-
plète de la gynécomastie dans environ 25 % des cas.
L’efficacité antalgique est obtenue rapidement.