I Méta-analyse et méta-régression vocabulaire

vocabulaire
30 | La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire n° 419 - novembre 2008
Méta-analyse
et méta-régression
Meta-analysis and meta-regression
S. Laporte*, P. Mismetti*
* Faculté de médecine, université
Jean-Monet, Saint-Étienne ; unité
de pharmacologie clinique, CHU de
Saint-Étienne.
I
maginons que nous souhaitions faire une mise
au point sur une nouvelle molécule dans le
traitement de l’insuffisance cardiaque. Nous
connaissons au moins 5 essais thérapeutiques dans
cette indication, et il doit en exister bien d’autres.
Pour faire simple et didactique, on pourrait ne
présenter que l’essai le plus démonstratif, mais
cela engendrerait une vision partiale de la réalité.
Il est nécessaire de disposer d’une synthèse de
l’ensemble des données pour savoir si le traite-
ment est réellement efficace et estimer l’impor-
tance du bénéfice. La méta-analyse est la seule
technique fiable pour réaliser ce type de synthèse.
De plus, la méta-régression permettra d’évaluer
l’impact éventuel de certaines caractéristiques clini-
ques ou thérapeutiques sur l’effet du traitement,
afin de déterminer quelles seraient les conditions
optimales du traitement.
MÉTA-ANALYSE
La méta-analyse permet de combiner les résultats
de plusieurs essais thérapeutiques pour en faire une
synthèse quantifiée, exhaustive et reproductible
sur une indication donnée. Le gain de puissance
statistique obtenu permet une précision optimale
dans l’estimation de l’importance de l’effet. Trois
grands principes régissent la méta-analyse : l’ex-
haustivité, l’inclusion d’études bien conduites et
la quantification de l’effet du traitement.
Premier principe : l’exhaustivité
Pour qu’une synthèse soit impartiale, tous les
essais entrant dans l’objectif de la méta-analyse
doivent être inclus, qu’ils soient ou non positifs,
sans sélection arbitraire. Cependant une recherche
exhaustive est difficile lorsque l’on sait que les
essais non significatifs sont moins fréquemment
publiés que les essais significatifs. Ne retenir que
les essais publiés peut fausser les conclusions, ce
qui conduit à une surestimation de l’efficacité du
traitement, encore appelée biais de publication. Ce
problème de détection de tous les essais, publiés ou
non, est en partie résolu par l’enregistrement quasi
systématique de tous les projets d’essai clinique
dans un registre publique international. Lexhaus-
tivité concerne la recherche des essais mais aussi
leur sélection. À la lecture d’une méta-analyse,
vous devez donc retrouver la description précise
du processus de recherche des essais, ce qui vous
permettra de vous assurer que tout a été mis en
œuvre pour être exhaustif, tant dans la recherche
que dans la sélection des essais.
Deuxième principe : l’inclusion d’études
bien conduites
Pour être fiable, une méta-analyse doit être fondée
sur des essais fiables, non biaisés. Seule l’inclu-
sion des essais méthodologiquement bien conduits
garantit une bonne qualité méthodologique du
résultat de la méta-analyse. Pour faciliter cette
sélection, des échelles de qualité méthodologique
des essais ont été publiées. Schématiquement, trois
critères sont retenus pour éviter la possibilité de
biais majeurs, le respect du premier de ces critères
étant indispensable :
le caractère aléatoire de la randomisation des
patients, et plus particulièrement l’imprévisi-
bilité de cette randomisation, garantissant que les
investigateurs nont pas pu déterminer à l’avance
vocabulaire
La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire n° 419 - novembre 2008 | 31
dans quel groupe irait le patient qu’ils souhaitaient
inclure ;
le suivi en double aveugle quand il était
possible ;
l’absence ou le faible taux de patients rando-
misés et exclus de l’analyse.
Troisième principe : la quantification de
l’effet
Une fois les essais recherchés et inclus, comment
résumer l’information ? La méta-analyse est tout
sauf un avis d’expert fondé sur une analyse indivi-
duelle des essais. En effet, elle permet de prendre
en compte la possibilité d’un manque de puissance
des essais négatifs (risque d’erreur bêta) et d’un
risque d’erreur alpha pour les essais positifs, afin de
quantifier le bénéfice global du traitement. Cette
quantification se fait par combinaison des effets des
traitements (risque relatif, par exemple) observés
dans chacune des études et pondérés par la taille
de ces dernières études. Un test statistique (test
d’association) permet de conclure à l’efficacité
globale du traitement ; il n’est pas dissociable du
test d’hétérogénéité autorisant ou non l’inter-
prétation du résultat global.
L’hétérogénéité en méta-analyse exprime l’im-
possibilité de considérer que l’efficacité du trai-
tement est constante dans tous les essais. Une
hétérogénéité peut provenir d’une forte variabi-
lité des résultats d’un essai à l’autre, sans raison
apparente, notamment clinique. Cette nuisance,
considérée comme aléatoire, peut être prise en
compte par une méthode adaptée, le modèle à
effets aléatoires.
À l’inverse, une hétérogénéité entre des essais peut
résulter de différences évidentes entre les essais
(doses différentes, profils différents des patients
inclus, etc.) et être analysée par une méthode
adaptée, la méta-régression.
MÉTA-RÉGRESSION
La méta-régression est une analyse en sous-groupes
d’études (et non pas en sous-groupes de patients) qui
peut être utilisée en cas d’hétérogénéité entre les essais,
mais également prévue de manière systématique
lorsque l’on a décidé de combiner des essais dotés de
caractéristiques évidemment différentes : prévention
primaire et prévention secondaire, double aveugle et
ouvert, etc. La méta-régression permet d’étudier la
relation entre une ou plusieurs caractéristiques d’études
et l’importance de l’effet du traitement.
Les caractéristiques des études peuvent être aussi fines
que celles décrites ci-dessous :
la qualité méthodologique : l’effet du traitement n’est-
il pas majoré par les essais de médiocre qualité méthodo-
logique par rapport aux essais de bonne qualité ?
la technique diagnostique ;
la dose du traitement évalué : l’effet des statines
est-il dépendant de la dose ?
la gravité des cas des patients inclus : études
incluant des stades NYHA II-III et études incluant des
stades III- IV.
Ce type d’analyse est principalement limité par :
la nécessité de disposer d’un nombre suffi-
sant d’études (on ne fait pas 4 sous-groupes avec
4 études) ;
des problèmes de puissance statistique des analyses
de sous-groupes ;
le risque de faux positifs du fait de la multiplicité des
tests (risque de détecter une interaction uniquement
par “chance”) ;
le risque d’interprétation erronée du fait des facteurs
de confusion (les essais où sont données les doses fortes
ont-ils inclus le même type de patients que ceux menés
avec des doses faibles ?).
Les essais cliniques étant de plus en plus nombreux,
voire complexes, les méta-analyses et les méta-régres-
sions sont donc aujourd’hui des outils essentiels à
connaître pour interpréter l’information thérapeutique
disponible.
Pour en savoir plus...
Cucherat M. Méta-analyse des
essais thérapeutiques. Paris :
Masson, 1997.
The Cochrane Collaboration
open learning material. Diver-
sity and heterogeneity. http://
www.cochrane-net.org/open-
learning/html/mod13-5.htm
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