Quelles ont été les conséquences de l`intégration

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Quelles ont été les conséquences de l’intégration européenne sur les
économies des pays membres ?
Eléments de correction - N.Danglade
ECE2 Camille Vernet
(Accroche) La crise des dettes souveraines a rappelé à quel point les économies nationales des
pays formants l’UE, et en particulier la zone euro, sont hétérogènes. Cette d’hétérogénéité est
d’ailleurs régulièrement citée dans les débats portant sur les institutions et politiques
européennes : le policy mix européen est-il adapté à cette situation ? L’hétérogénéité des
situations économiques est-elle le signe d’un échec de l’intégration européenne ? Des pays
aussi différents économiquement peuvent-ils cohabiter dans une même zone monétaire ?
(Définir intégration européenne) L’intégration européenne répond d’un processus politique
assis sur une intégration d’abord économique, avant d’être monétaire et politique (théorie du
couronnement). La typologie des différents degrés de l’intégration économique fournie par
B.Balassa est utile, mais elle ne peut pas s’appliquer strictement au cas européen (à
développer en quelques lignes, par exemple la PAC est mise en place dès le début des années
1960 avant même la réalisation de l’union douanière et du marché unique). Pour définir la
notion d’intégration, nous pouvons utiliser la définition de F.Perroux, « l’acte d’intégrer
rassemble des éléments pour former un tout, ou bien il augmente la cohérence du tout déjà
existant ». Cette définition insiste sur l’idée que l’intégration consiste à passer de plusieurs
parties à un seul tout, à faire d’un espace hétérogène un espace homogène. Il y a donc l’idée
de rattrapage et de convergence.
(Définir convergence des économies) Des économies convergent à partir du moment où leurs
caractéristiques économiques se rapprochent. Il faut alors définir les caractéristiques en jeu.
On peut distinguer des critères « réels » : taux de croissance, PGF, taux de chômage, solde
extérieurs, compétitivité, structure économiques … et des critères « nominaux » : taux
d’intérêt, inflation, dette et déficit publics par exemples.
(Annonce problématique) Si l’on reprend la définition proposée par Perroux, on constate que
l’intégration économique doit permettre à des éléments séparés de former un tout ou bien
d’augmenter la cohérence d’un tout déjà existant. Dit autrement, l’intégration économique
devrait être un facteur de convergence économique. C’est bien là un des objectifs fondateurs
de la construction européenne que l’on retrouve dans le préambule du Traité de Rome
(1957) : assurer un développement harmonieux des pays membres en réduisant l'écart entre
les différentes régions et le retard des moins favorisées. On peut alors se demander si
l’hétérogénéité des économies européennes est un résidu de cette dynamique d’intégration,
résidu en voie de disparition. Ou bien, s’il s’agit, à l’inverse, d’une conséquence de
l’intégration européenne, conséquence qui conduirait à repenser l’architecture européenne.
(Annonce du plan) Dans une première partie, nous verrons que la convergence des économies
est le résultat de l’intégration européenne à travers deux arguments. Le premier s’appuie sur
le développement des échanges et de l’interdépendance des économies. Le second s’appuie
sur la mise en place de politiques économiques européennes.
Dans une seconde partie, nous verrons au contraire que l’intégration européenne est aussi un
vecteur de divergence et d’hétérogénéité des économies et territoires européens. Pour cela
nous montrerons comment le passage au marché unique puis à la monnaie unique ont produit
cette divergence, et nous demanderons alors quelles transformations politiques et
institutionnelles la gestion de cette hétérogénéité des territoires peut entraîner.
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1. Convergence et rattrapage des économies européennes : résultat de
l’intégration européenne
(Phrase d’introduction) L’intégration européenne produit de la convergence car elle favorise
les échanges de biens, services, capitaux et personnes. Cet essor des échanges conduit à une
interdépendance accrue des économies. Elle produit aussi de la convergence à travers la mise
en place de certaines politiques économiques.
1.1 Essor des échanges : vers davantage d’interdépendance et de convergence des
économies européennes
L’intégration européenne s’appuie sur une logique régionale qui se distingue de la logique
multilatérale. Cette intégration est marquée par des évènements importants (à développer
1957-1993-1999). Cette intégration régionale porte sur les échanges commerciaux mais
également sur la circulation des capitaux et des personnes.
En termes d’échanges commerciaux, l’objectif attendu est de réaliser le « doux commerce »
de Montesquieu. L’échange permet la richesse, la richesse permet le rattrapage des
économies, la croissance généralisée (qui profite à tous) assure la paix
Dans le cadre de la théorie néoclassique du commerce international (théorie des avantages
comparatifs et théorie HOS), l’intégration conduit à la croissance car les ressources sont
mieux allouées. Elle conduit aussi à l’égalisation de la rémunération des facteurs, et donc à la
réduction des différences de rémunération des facteurs entre territoires.
Dans le cadre des nouvelles théories du commerce international, l’intégration économique
permet la hausse de la taille des marchés et ses conséquences en termes d’économie d’échelle
et de diversification des produits (échanges intrabranches, baisse des coûts unitaires de
production, effet pro-concurrentiel, baisse des situations de rentes, hausse du choix des
consommateurs). On retrouve ici les arguments présentés dans des rapports comme les
rapports Padoa-Schioppa et Cecchini portant sur « le coût de la non Europe ».
En termes d’échange de capitaux, l’objectif attendu est le développement de la DIPP au sein
de l’UE et le développement des IDE, dont la conséquence marchande est l’essor des
échanges de biens intermédiaires.
Cet essor des échanges et de l’internationalisation du système productif conduit à une
interdépendance économique accrue entre pays de l’UE. Cette interdépendance s’observe par
une sensibilité commune plus forte aux cycles économiques ; par exemple, la crise des dettes
souveraines a un impact sur le bilan des banques allemandes et françaises.
Nous observons un processus de rattrapage économique et donc de convergence sur la période
1960/2000 à partir des données suivantes : PIB par tête, essor du commerce intrabranche (qui
est corrélé positivement avec la réduction de la distance économique : lorsque deux
économies se rapprochent, l’échange intrabranche se développe au détriment de l’échange
interbranche), convergence des coûts unitaires de production.
Il faut ici citer les exemples des pays de l’Europe du Sud : Espagne et Grèce (le pib/tête grec
passe de 45% du pib/ tête allemand au début 2000 à plus de 75% en 2007), Irlande (Pib/tête
inférieure de 40% à la moyenne européenne dans les années 1980, supérieur de 15% en
2005). Rattrapage de pays membres plus anciens comme l’Italie durant les années 1970/1980.
(phrase de liaison 1.1/1.2) L’intégration européenne ne produit pas de la convergence
uniquement en raison de l’essor des échanges de produits et de capitaux. Cette convergence
est également le résultat de la mise en place de certaines politiques économiques.
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1.2 Des politiques économiques européennes pour assurer le rattrapage des économies
(phrase d’introduction) L’intégration européenne s’appuie sur la mise en place de politiques
uniques, communes ou coordonnées qui font converger les économies.
Nous pouvons tout d’abord nous pencher sur les politiques européennes structurelles. Elles
répondent à une logique d’une croissance « harmonieuse » au sein de l’UE. Cette croissance
« harmonieuse » doit passer par la mise en place d’outils permettant le rattrapage des
territoires les moins avancés. Les inégalités territoriales rentrent en contradiction avec
l’objectif d’amélioration du bien être qui doit asseoir le projet politique européen. Ces
politiques élaborées progressivement durant les années 1960/1970 visent à renforcer la
cohésion territoriale : création de la Banque européenne d’investissement, création Fonds
social européen, création FEDER,… Les politiques structurelles et de cohésion consistent
donc à soutenir des territoires en retard économiquement, touchés par des phénomènes de
désindustrialisation ou bien essentiellement agricoles et peu modernisés. Par ailleurs, si l’on
considère qu’une partie des fonds alloués à la Politique Agricole renvoie à une logique de
lutte contre les inégalités territoriales, on mesure à environ 60% aujourd’hui la part du budget
de l’UE consacré à cet objectif de réduction et de lutte contre l’hétérogénéité des territoires.
Alors que cette part était ultra-minoritaire au début des années 1970. Dans le cas de certaines
économies (Grèce, Irlande, Portugal par exemples) les transferts provenant de l’UE
représentent plusieurs points de PIB chaque année (en dehors des périodes de crise).
D’autres actions publiques initiées dans le cadre européen ont des conséquences en termes de
convergence des économies nationales. Ainsi le passage à la monnaie unique s’est
accompagné de la mise en place de critères de convergence puis d’un pacte de stabilité et de
croissance, et aujourd’hui du Traité pour la Stabilité. Les Etats susceptibles de participer à la
monnaie unique ont suivi l’argumentation suivante : pour pouvoir adopter une monnaie
unique, et commune, il est nécessaire d’avoir des critères relativement proches en termes de
taux d’intérêt et d’inflation. La poursuite d’une convergence de ces critères qualifiés de
« nominaux » doit alors permettre, par la suite, une convergence réelle des économies : la
baisse des taux d’intérêts permet l’accès à un financement moins coûteux et donc, stimule
l’investissement et la production. Cette coordination des politiques relevant de compétences
nationales doit être théoriquement contraignante. Dans les faits, on constate que le passage à
la monnaie unique s’est effectivement accompagné d’une convergence des taux d’intérêts et
de l’inflation à la fin des années 1990 et au début des années 2000. Cette convergence s’est
traduite par un accès plus important à l’endettement des pays en rattrapage comme l’Espagne
ou l’Irlande.
(phrase de conclusion partie I) Dans cette première partie nous avons cherché à expliquer
pourquoi l’intégration européenne s’est accompagnée d’une convergence des économies
européennes. Cette convergence a permis d’atteindre un des objectifs que les Etats signataires
du Traité de Rome s’étaient donnés en 1957, à savoir, « renforcer l'unité de leurs économies
et d'en assurer le développement harmonieux, en réduisant l'écart entre les différentes
régions et le retard des moins favorisées l’objectif de développement harmonieux ». C’est
sans nul doute en référence à cette réussite que l’UE, en pleine crise des dettes souveraines, a
reçu en 2012 le Prix Nobel de la Paix.
(phrase de liaison I/II) La crise économique et institutionnelle que traverse l’UE depuis 2009
a souligné les limites importantes de cette convergence, qui semble par ailleurs bien moins
importante depuis la fin des années 1990 et le passage à l’euro.
Comment expliquer que l’intégration européenne n’est pas produite le rattrapage attendu ?
Quels problèmes la divergence économique des territoires posent-elle au projet d’intégration
européen ?
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2. L’intégration européenne :
nationales et territoires
vecteur de divergence entre économies
(Phrase d’introduction) Dans cette seconde partie, nous allons nous attacher à expliquer
pourquoi l’intégration européenne est porteuse d’une dynamique de creusement des inégalités
territoriales. Puis nous nous demanderons comment l’UE peut arriver à gérer ces inégalités
qui semblent inévitables.
2.1 Intégration économique et monétaire et hétérogénéité des économies
le creusement des inégalités territoriales en Europe (et particulièrement dans la zone euro)
apparaît clairement une fois la crise des dettes souveraines déclenchées en 2011/2012. Durant
la décennie 2000, la forte croissance des pays du Sud et le rattrapage auquel on assiste aurait
plutôt eu tendance à conforté la thèse de la convergence. Or, derrière ce rattrapage il y a en
réalité deux phénomènes : une divergence très nette des structures économiques entre Europe
du Sud et Europe du Nord, et, une hausse du financement externe des pays du Sud (par les
pays du Nord) qui a permis de stimuler la consommation, la demande et donc la hausse du
PIB. La crise des dettes souveraines va faire éclater ce financement externe (sudden stop) et
mettre à jour les limites et défauts de la coordination européenne.
Comment expliquer la polarisation des activités en Europe ? Pour cela, il faut revenir aux
débats précédents la mise en place du marché commun au début des années 1990. Le prix
Nobel d’Economie Paul Krugman s’oppose alors à ceux qui soulignent « les coûts de la nonEurope », c’est-à-dire les coûts de l’absence de marché unique. Si la libre circulation des
personnes, capitaux et produits, permet effectivement des spécialisations territoriales sur le
modèle des avantages comparatifs et la hausse des échanges intra-branches, cette
spécialisation territoriale ne signifie pas pour autant que la croissance économique tirée de
cette intégration va permettre le rattrapage des économies « en retard ». Bien au contraire,
pour P.Krugman, le passage au marché unique, associé à la baisse des coûts de distance en
raison des dépenses d’infrastructures et de la révolution des NTIC, va provoquer l’effet
inverse : une polarisation des activités et le creusement des inégalités en Europe. Lorsque les
activités de production se concentrent, cette concentration produit des économies
d’agglomération : réduction des coûts d’approvisionnement, accès à un marché du travail
qualifié plus large, captation de l’information et de la connaissance.
En conséquence, lorsque les coûts de distance sont faibles, que les économies d’échelle et
d’agglomération sont fortes, alors les activités ont d’autant plus de chance d’être concentrées.
Cette concentration de la production s’accompagne d’une concentration géographique de la
main d’œuvre qualifiée. Certaines régions sont donc plus dynamiques que d’autres en termes
de hausse de la population et de hausse de la demande, ce qui stimule la production locale et
renforce les effets d’agglomération et donc la concentration. L’intégration économique a donc
tendance à renforcer les inégalités de développement entre le centre et la périphérie.
P.Krugman s’oppose aux prédictions de la théorie HOS en termes de convergence. Certaines
régions se développent davantage que d’autres.
L’intégration européenne se traduit par le renforcement des activités productives à forte
valeur ajoutée dans une « banane bleue » (ensemble de régions qui partent de la région
française midi Pyrénées pour aller vers le Danemark en passant par le sud de l’Allemagne).
On constate par ailleurs que l’intégration des anciens PECO a d’ailleurs décalé et recentré
cette banane bleue sur l’Allemagne au détriment de la France. Les zones économiques
développées situées au cœur de l’Europe sortent renforcées par les effets d’agglomération
puisqu’elles permettent de minimiser les coûts de transports vers l’ensemble des pays de
l’UE.
Paul Krugman avait débattu avec la Commission européenne au moment du passage au
marché unique au milieu des années 1990, mais la création de l’euro va accentué les effets du
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grand marché européen sur l’hétérogénéité des territoires européens. Ce faisant, c’est la
pertinence du policy-mix européen qui va être remis en cause.
Dans quelle mesure le passage à l’euro a contribué à creuser les disparités économiques entre
territoires européens ?
Si l’on suit P.Artus et I.Gravet dans leur ouvrage « La crise de l’euro » (2012), on peut
distinguer plusieurs conséquences du passage à l’euro. Tout d’abord, l’euro en réduisant les
coûts de transaction renforce les effets d’agglomération présentés par P.Krugman. Ensuite, en
renforçant les spécialisations internationales l’euro a conduit à une transformation des
structures productives. Or, cette transformation s’est réalisée dans un contexte de croissance
des coûts du travail dans les pays du sud (les salaires ont augmenté plus rapidement que les
gains de productivité). Cette croissance du coût du travail est intervenue au moment même où
l’UE s’élargissait à l’Est vers les PECO, et elle montre aussi, selon Artus, que certaines
décisions en matières de politiques économiques ont renforcé la réallocation des ressources en
Europe. Les pays du sud de l’Europe qui auraient donc pu se spécialiser dans l’industrie de
moyen et de bas de gamme ont vu les IDE s’orienter plutôt vers les PECO. La conséquence de
cette situation est donc une désindustrialisation importante de ces territoires. Cette
désindustrialisation intervient par ailleurs dans un contexte de disparité des taux d’intérêt
réels : les pays en rattrapage (les pays du sud, l’Irlande) ont une inflation supérieure à la
moyenne de la zone euro ; or, la politique monétaire est fixée sur l’inflation moyenne. En
conséquence, ces économies en rattrapage ont des taux de croissance supérieure à la zone
euro, une inflation supérieure, et des taux d’intérêt réel inférieurs. Cette faiblesse relative
pousse donc à l’endettement dans un contexte de désindustrialisation, provoquant par ailleurs
l’apparition de bulles dans l’immobilier. La politique monétaire unique s’est donc montrée
pro-cyclique.
Cette hausse des importations qui traduit à la fois ce désengagement de l’industrie a eu pour
conséquence de rendre structurellement déséquilibrée la balance commerciale dans un
contexte d’endettement croissant. La situation des pays du sud de l’UE après 2004 est donc
une situation de besoin de financement, satisfait grâce à l’entrée des capitaux issus des
excédents commerciaux des pays du nord de l’UE. Cette situation n’est pas tenable lorsqu’une
crise de confiance s’empare des investisseurs étrangers, comme cela fut le cas à partir de
2009. Ainsi le taux d’intérêt à 10 ans est passé entre 2009 et fin 2011 de 4% à 15% en
Espagne et de 4% à 50% en Grèce.
(phrase de liaison 2.1/2.2) La divergence des économies nationales est donc une conséquence
du passage au marché unique et à la monnaie unique, et cette divergence était prédit par un
certain nombre d’économiste. Marché unique et monnaie unique ont stimulé les échanges de
biens & services et de capitaux en créant une Europe du Nord exportatrice nette et une Europe
du Sud importatrice nette. Cette différence de structure est-elle problématique ? Faut-il
l’éliminer ou bien considérer qu’elle est « naturelle » dans tout espace économique intégré ?
2.2 Comment traiter l’hétérogénéité nécessaire des territoires européens ? vers une
redéfinition de l’intégration politique et sociale européenne
(phrase d’introduction)
On constate donc que l’intégration européenne accentue la spécialisation des économies. LA
question est, comme la pose M.Crozet dans la Revue Regards croisés sur l’économie (2012),
de savoir si l’UE est en mesure aujourd’hui, non pas de faire disparaître cette polarisation
puisqu’elle est source de compétitivité des territoires et de performances économiques, mais
de gérer cette polarisation. Existe-t-il aujourd’hui des politiques économiques qui permettent
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de « compenser » les effets de la dynamique d’intégration sur les territoires ? L’hétérogénéité
croissante des territoires peut-elle sonner le glas du projet d’intégration politique européen ?
La réponse européenne à la crise des dette souveraine à montrer que la solution privilégiée
dans la zone euro a été de rétablir les balances courantes des pays touchés par les sudden stop,
de manière à résorber les déséquilibres des besoins de financement extérieurs, et ainsi
progressivement être en capacité de rembourser leur dette contractées auprès du reste de
l’Union européenne, de la BCE et du FMI. Pouvait-il en être autrement ? La théorie des zones
monétaires optimales montre qu’en cas de choc asymétrique (donc quand la zone monétaire
n’est pas optimale puisque les économies ne suivent pas le même cycle), il est possible de
réduire l’effet de ce cycle sur l’économie grâce à la mobilité du travail et à des transferts
budgétaires fédéraux. Or, on sait que la mobilité du travail en Europe est faible et qu’il n’y a
pas de fédéralisme budgétaire comme dans le cas des Etats-Unis. Ce dernier cas est
intéressant puisque si l’on étudie les balances courantes des Etats américains, certains d’entre
eux sont nettement plus déficitaires que la Grèce ou l’Espagne et ne connaissent pourtant pas
de crise de la dette. La solidarité budgétaire aux seins des Etats-Unis permet donc à certains
Etats américain d’éviter une troisième solution, celle adoptée dans la zone euro : les politiques
de dévaluation interne qui ont débouché sur des politiques d’austérité. Les conséquences de
ces politiques ont été désastreuses économiquement et socialement.
L’intégration économique européenne conduit donc aujourd’hui à s’interroger sur l’intérêt
d’un fédéralisme budgétaire accru en Europe. Bien sûr cette solution conduit à faire avancer
l’Europe dans un sens fédéral (création d’un gouvernement européen ; capacité à lever ses
propres impôts et à émettre des euro-bonds), qui fasse symétriquement reculer l’Europe des
Etats-nations, ce qui semble être une solution difficile à envisager actuellement compte tenu
de la vague d’euroscepticisme croissante qui travers l’Europe. Il faudrait donc une impulsion
politique forte venant de chefs d’Etat pour faire avancer cette solution, comme cela fut le cas
au début des années 1980 en plein Eurosclérose (relance de la construction européenne en
France par Giscard puis Mitterrand).
La question du fédéralisme budgétaire soulève plus généralement celle de la coopération et
l’harmonisation des politiques fiscales et sociales en Europe. Or, si l’intégration économique
et monétaire a progressé, on constate que ce marché sans frontières intérieures qu’est l’UE a
vu se développer les stratégies de dévaluations fiscale et sociale compétitives, c’est-à-dire de
véritables politiques de passagers clandestins. Certains Etats utilisent donc les écarts de
fiscalité et de financement de la protection sociale pour créer des avantages comparatifs (ils
ne peuvent plus dévaluer leur monnaie pour cela) qui poussent l’ensemble de l’Europe à une
course au moins disant. Au lieu de créer des solidarités de fait, comme le souhaitait
R.Schuman, l’intégration européenne a créer un espace ce compétition entre Etats.
De nouveau, la mise en œuvre d’un fédéralisme budgétaire serait un moyen de dépasser les
limites que rencontrent l’intégration européenne aujourd’hui : dumping social et fiscal,
hétérogénéité et crise de financement externe, mais aussi égoisme territorial (à développer) et
hétérogénéité des modèles sociaux et des dépenses d’investissement social en Europe (à
développer). En conclusion, on peut donc penser que pour réaliser pleinement le projet
d’intégration économique et monétaire européenne, il faudra plus d’intégration politique et
sociale.
(Conclusion) Au cours de notre devoir, nous avons, dans une première partie, cherché à
comprendre pourquoi l’intégration européenne a produit un effet de convergence des
économies nationales. Nous nous sommes appuyés pour cela sur les conséquences de
l’augmentation des échanges, ainsi que sur les résultats de certaines politiques économiques
menées dans le cadre de l’UE. Dans une seconde partie, nous avons cherché à comprendre
pourquoi la dynamique d’intégration européenne à partir du passage au marché unique avait
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eu l’effet inverse, à savoir, une polarisation des activités productives sur certaines territoires
et un creusement des inégalités. Ce creusement des inégalités semble inéluctable et pose la
question du type de solidarités territoriales que l’UE souhaite mettre en place. Faut-il autant
de solidarité entre un habitant d’Ile de France et de la Creuse, qu’entre un français et un
portugais ? Le projet politique de l’UE conduit à répondre par l’affirmative à cette question.
Mais cela doit alors s’accompagner de changements dans les politiques économiques et les
institutions européennes.
(Ouverture) Plus généralement, la gestion des inégalités au sein de l’UE pose la question des
droits liés à la notion de citoyenneté européenne. Dans quelle mesure la mise en place d’un
budget européen de type fédéral va-t-il conduire à une redéfinition des droits du citoyen
européen ?
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