du prix des actifs ainsi qu’à une mauvaise répartition des ressources. Par ailleurs, les économies
développées – en premier lieu desquelles l’Europe – semblent peu disposées à réformer des
éléments obsolètes de gouvernance et de représentation au sein des institutions financières
internationales, malgré plusieurs changements majeurs dans l’économie globale.
Tout ceci conduit à un système multilatéral moins efficace, moins collaboratif, moins instaurateur
de confiance, et plus susceptible de bricolages ponctuels. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant
que la mondialisation et la régionalisation ne suscitent plus le même degré d’adhésion qu’autrefois,
ni que certains mouvements politiques montants des deux côtés de l’Atlantique condamnent ces
deux concepts afin de gagner en soutien à leur propre cause.
Nul ne peut à ce jour déterminer s’il s’agit d’un phénomène temporaire et réversible, ou de
l’apparition d’une défiance durable face au fonctionnement de l’économie mondiale. Ce qui est
clair, en revanche, c’est que cette tendance affecte deux formes majeures de relations.
La première de ces relations intervient entre les petites et les grandes puissances économiques.
Pendant très longtemps, un certain nombre d’économies de faible envergure, ouvertes et
correctement gérées, ont été les principales bénéficiaires du système de Bretton Woods, et plus
généralement du multilatéralisme. Leur taille les rendait non seulement assoiffées d’accès aux
marchés extérieurs, mais incitait également les autres acteurs du marché à les intégrer à leurs
pactes régionaux, en raison des limites de leur propre potentiel de déplacement. Leur appartenance
à plusieurs institutions internationales efficaces a permis à ces petits pays de prendre part à
d’importantes discussions autour des politiques globales, tandis que leurs propres capacités leur
ont permis d’exploiter plusieurs opportunités dans le cadre de chaînes transfrontalières de
production et de consommation.
Seulement voilà, à l’heure d’une poussée nationaliste, ces petites économies ouvertes, même
correctement gérées, sont vouées à souffrir. Leurs relations commerciales perdent en stabilité, les
pactes commerciaux dont elles dépendent deviennent vulnérables, et leur participation aux
discussions sur les politiques mondiales n’est plus aussi certaine qu’auparavant.
La deuxième forme de relation intervient entre les institutions de Bretton Woods et un certain
nombre d’arrangements institutionnels parallèles. Bien qu’elles soient sans commune mesure avec
des entités telles que la Banque mondiale, plusieurs institutions sous conduite chinoise se révèlent
par exemple attrayantes pour un nombre croissant de pays, la plupart des alliés de l’Amérique
ayant rejoint la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures, malgré l’opposition des
États-Unis. De même, des accords bilatéraux de paiement prolifèrent actuellement, auxquels, il n’y
a pas si longtemps, la plupart des États se seraient opposés via le FMI, en raison de leur manque de
cohérence par rapport au multilatéralisme. Beaucoup s’inquiètent de voir ces approches
alternatives saboter, plutôt que renforcer, un système d’interactions transfrontalières prévisible,
bénéfique et fondé sur des règles.
Instituées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale dans le but de maintenir une stabilité, les
organisations de Bretton Woods risquent de perdre de leur influence, et les États qui pèsent
suffisamment pour pouvoir les renforcer ne semblent à ce jour pas disposés à œuvrer avec audace
pour la mise en œuvre des réformes nécessaires. Si ces tendances se poursuivent, les pays en voie
de développement en seront vraisemblablement les premières victimes, et ne seront pas les seuls. À
court terme, l’économie mondiale connaîtrait alors une croissance économique plus lente, ainsi
qu’un risque d’instabilité financière accru. À plus long terme, elle se retrouverait confrontée à la
menace d’une fragmentation systémique, ainsi que d’une prolifération des guerres commerciales.