La Lettre du Cancérologue • Vol. XX - n° 1 - janvier 2011 | 27
Résumé
Les cancers bronchiques demeurent la première cause de décès par cancer dans le monde et les cancers
bronchiques non à petites cellules (CBNPC), la catégorie la plus fréquente. Une avancée récente dans le
traitement des CBNPC a été le développement des traitements ciblés, et parmi eux, le géfitinib et l’erlotinib
qui ciblent le récepteur de l’
Epidermal Growth Factor
(EGFR). Les médicaments antiangiogènes comme le
bévacizumab sont devenus d’autre part de pratique courante dans le traitement des CBNPC. De plus, la
découverte récente du réarrangement EML4-ALK a conduit au développement de nouveaux traitements
ciblés. Les traitements de maintenance des CBNPC ont été extrêmement étudiés. Deux catégories principales
sont définies, la maintenance de continuation et la
switch maintenance
. Les études de phase III n’ont pas
encore démontré d’avantage de survie globale pour la maintenance de continuation et celle-ci est encore
à l’étude. En revanche, la
switch maintenance
avec le pémétrexed a montré un bénéfice en survie globale
chez les populations non épidermoïdes. Un bénéfice est aussi observé en
switch maintenance
avec l’erlotinib.
Mots-clés
Cancers bronchiques
Épidémiologie
Dépistage
Chimiothérapie
Thérapeutiques
ciblées
Highlights
Lung cancer continues to be the
leading cause of cancer death
worldwide, and non small
cell lung cancer is the most
common type of lung cancer.
A recent breakthrough in this
field has been the development
of molecular-targeting drugs,
among which gefitinib and erlo-
tinib targeting the Epidermal
Growth Factor Receptor (EGFR)
have improved the efficacy of
therapy for NSCLC.
Anti-angiogenetic drug, such
as bevacizumab, had become
clinical use in the treatment
for NSCLC.
Moreover, discovery of EML4-
ALK led to the development
of a new molecular-targeted
therapy.
Maintenance therapy for
patients with advanced non-
small-cell lung cancer has been
an area of intense investiga-
tion. Maintenance therapy has
been divided into two broad
categories: continuation
maintenance or switch main-
tenance. Phase III trials have
not revealed an overall survival
benefit for continuation main-
tenance chemotherapy, and this
approach should be considered
investigational. Phase III trials
have demonstrated an improve-
ment in overall survival with
switch maintenance therapy
with pemetrexed compared
with placebo in patients
with nonsquamous histology
and erlotinib compared with
placebo.
Keywords
Lung cancer
Epidemiology
Screening
Chemotherapy
Targeted therapy
La tomodensitométrie hélicoïdale à faible
dose, utilisée dans des protocoles de dépistage
récents (3-5), a mis en évidence des tumeurs de
stade I ou II dans la majorité des cas. Malgré cette
très bonne sensibilité, le principal problème de la
tomodensitométrie est sa spécificité, avec la décou-
verte de nodules dont il est difficile d’affirmer la
nature et qui sont le plus souvent bénins.
L’amélioration de la survie des patients détectés
à ces stades précoces n’est cependant pas un
argument suffisant pour conclure à l’efficacité du
dépistage, car cette valeur est modifiée par les
biais d’interprétation que sont le “lead time” et le
“length time bias”. Seule la réduction de la mortalité
spécifique est un argument déterminant. C’est la
mortalité spécifique par cancer bronchique qui est
retenue comme objectif principal dans le National
Lung Screening Trial (NLST) [6]. Cette étude rando-
misée a comparé le dépistage des cancers par
tomodensitométrie hélicoïdale à faible dose à la
radiographie thoracique dans une population à haut
risque de cancer bronchique. L’étude, qui a débuté
en 2002, a inclus des patients jusqu’en avril 2004.
Les 53 456 volontaires étaient âgés de 55 à 74 ans,
anciens fumeurs (arrêt dans les 15 dernières années)
ou actuels gros fumeurs (au moins 30 paquets-
année), sans signes ni symptômes ou antécédents
de cancer bronchique. Les volontaires devaient
passer un examen de départ (prévalence), puis un
examen annuel les 2 années suivantes, et faisaient
enfin l’objet d’un suivi pendant encore 5 ans. Les
premiers résultats de cette étude ont fait l’objet
d’un communiqué du National Cancer Institute,
largement repris dans les médias : la tomodensito-
métrie hélicoïdale à faible dose dans une population
à haut risque a permis de réduire la mortalité de
20 % par rapport à la radiographie thoracique.
Au total, 354 décès par cancer bronchique sont
survenus parmi les volontaires dépistés par
tomodensitométrie, contre 442 dans le groupe
dépisté par radiographie.
Le NSLT est la seule étude randomisée en cours
aux États-Unis. D’autres sont attendues ; la plupart
seront réalisées en Europe, avec notamment l’étude
NELSON (7) aux Pays-Bas et en Belgique, un essai
partenaire au Danemark et 2 études en Italie (ItaLung
et DANTE).
La différence entre l’étude NSLT et les essais
européens réside dans le groupe contrôle : seul
l’essai américain utilise la radiographie thoracique.
L’ensemble de ces études sera déterminant pour
établir de façon définitive les bénéfices et risques
de la tomodensitométrie hélicoïdale à faible dose
dans le dépistage des cancers bronchiques.
Traitements de support
Les soins de support sont généralement proposés aux
patients présentant des symptômes gênants et non
contrôlés, ou interviennent alors que tout traitement
“actif” a été arrêté, dans la phase finale de la maladie.
Une étude randomisée incluant 151 patients porteurs
de cancers bronchiques non à petites cellules
(CBNPC) a comparé l’intervention précoce d’une
équipe de soins de support en complément des soins
oncologiques standards et les soins oncologiques
standards exclusifs (8). Cette étude montre une
amélioration de la qualité de vie et des échelles de
dépression dans le groupe intervention précoce et, de
façon plus surprenante, un bénéfice très substantiel
de survie dans ce groupe, avec une médiane de survie
augmentée de 2,7 mois (figure 3, p. 30). Les raisons
de cette amélioration de la survie restent à préciser,
mais pourraient être le résultat d’une prise en charge
plus efficace de la dépression, d’un meilleur soula-
gement des symptômes et enfin, peut-être, d’un
moindre recours aux hospitalisations. Cette étude
doit, bien sûr, être confirmée par d’autres travaux,
mais elle souligne l’importance d’une prise en charge
globale des patients, et ce assez précocement. L’amé-
lioration de survie globale (SG) n’est pas négligeable,
et ce d’autant plus que des stratégies médicales en
investigation actuellement, ciblant telle ou telle
caractéristique, n’ont influé que sur la survie sans
progression (SSP) et non sur la SG.
Traitements sur mesure
Pendant l’année qui vient de s’écouler, les efforts
de l’Institut national du cancer et le dynamisme des
acteurs de terrain ont permis la création de 28 plates-
formes d’analyse moléculaire des cancers. Cela repré-