La Lettre du Pneumologue • Vol. XIV - n° 5 - septembre-octobre 2011 | 175
Points forts
»
Il n’existe pas “le” cancer bronchique mais bien “des” cancers bronchiques avec des sous-groupes
histologiques et moléculaires ayant une signification pronostique et prédictive.
»
Les dernières autorisations de mise sur le marché de traitements antitumoraux en oncologie thoracique
sont conditionnées par le type histologique ou la présence d’anomalies moléculaires.
»
Des résultats très prometteurs sont enregistrés chez certains patients porteurs d’une anomalie génétique
(mutations de l’EGFR, translocation de ALK pour les plus connues) et bénéficiant de thérapies ciblant ces anomalies.
»
Au-delà de l’enthousiasme accompagnant ces résultats, l’évaluation du bénéfice par une recherche
clinique adaptée est indispensable.
»
Les nouveaux algorithmes décisionnels en oncologie thoracique doivent désormais intégrer ces éléments
(type anatomopathologique, anomalies moléculaires) afin d’optimiser la prise en charge.
Mots-clés
Cancer bronchique
Thérapie ciblée
Anatomopathologie
EGFR
EML4-ALK
Highlights
Non-small-cell lung cancer
(NSCLC) is a heterogeneous
disease.
The most significant develop-
ment in recent years was the
discovery of activated EGFR
mutations and ALK transloca-
tion.
Personalized therapy improve
treatment outcomes by identi-
fication of a specific genotypic
anomaly and target-specific
therapy.
Pathological subtype and
biomarkers should now be inte-
grated in decision-making and
management of lung cancer.
Keywords
Lung cancer
Targeted therapy
anatomopathology
EGFR
EML4-ALK
(Avastin® in lung cancer), portant sur une cohorte
de CBNPC non épidermoïdes, ont montré que le
bévacizumab associé à une bithérapie apportait
un bénéfice significatif en termes de SG pour le
premier (3) et de survie sans progression (SSP)
pour le second (4) comparativement au bras stan-
dard. Une méta-analyse récente a été rapportée à
l’ESMO en 2010 et a permis d’éclaircir la place à
faire au bévacizumab dans l’arsenal thérapeutique
de première ligne. Regroupant 2 194 patients, elle
a montré un bénéfice significatif en termes de SG
et de SSP quand le bévacizumab était associé à
une bithérapie à base de platine. Il n’a pas été
montré de supériorité d’une posologie sur l’autre
(7,5 versus 15 mg/kg). Le risque de progression a
été réduit de 28 % et le risque de décès de 10 %.
L’analyse des toxicités a montré que le bévaci-
zumab augmentait significativement le risque de
survenue d’une protéinurie, d’une hypertension
artérielle, d’accidents hémorragiques et d’une
neutropénie fébrile.
Qu’en est-il de l’efficacité du bévacizumab associé
à la chimiothérapie en fonction de l’histologie dans
les CBNPC non épidermoïdes ? Les données de la
cohorte ARIES, rapportées à l’ESMO en 2010 par
J. Brahmer et al. (5), ont montré que les résultats
en termes de SSP et de SG étaient comparables.
En effet, la SSP et la SG étaient respectivement
de 6,8 et 13,7 mois pour les adénocarcinomes
(n = 1 361), de 6,3 et 12 mois pour les carcinomes
indifférenciés (n = 391) et de 6,1 et 11,2 mois pour
les carcinomes à grandes cellules (n = 87).
Certains antiangiogéniques oraux ayant pour point
commun l’inhibition de l’activité tyrosine kinase
(ITK) du VEGFR, deux d’entre eux, dont le sorafénib,
ont été évalués dans les différents types histo-
logiques de CBNPC. L’étude ESCAPE a comparé
l’efficacité d’une bithérapie par carboplatine +
paclitaxel associée ou non au sorafénib (6). Dans
le sous-groupe des patients atteints de CBNPC
épidermoïdes recevant le sorafénib, la SG était
inférieure à celle du groupe traité par bithérapie
seule, alors que, dans le groupe des CBNPC non
épidermoïdes recevant du sorafénib, il n’y avait pas
de différence en termes de SG ou de SSP. Devant
ces résultats, le sous-groupe des CBNPC épider-
moïdes initialement inclus dans l’étude NEXUS
a été retiré. Cette étude évaluait une bithérapie
par cisplatine + gemcitabine avec ou sans sora-
fénib chez 722 patients présentant un CBNPC de
stades IIIB et IV. Dans le groupe traité par sorafénib,
il n’a pas été observé d’amélioration de la SG, mais
U. Gatzemeier et al. (7) ont conclu à une amélio-
ration de la SSP et du temps jusqu’à progression.
Actuellement, le bévacizumab reste le seul anti-
angiogénique ayant l’autorisation de mise sur le
marché en première ligne métastatique dans le
CBNPC, avec une prescription exclusivement guidée
par l’anatomopathologie et réservée aux CBNPC
non épidermoïdes. Nous ne disposons pas, pour le
moment, de marqueurs cliniques ou biologiques qui
pourraient nous permettre de mieux identifier les
patients potentiellement répondeurs.
Pémétrexed et type histologique
Les premières données concernant l’“histo-
guidage” de la chimiothérapie ont été apportées
par G.V. Scagliotti et al. avec les résultats d’une
étude de phase III randomisée, de non-infériorité,
menée chez 1 725 patients présentant un CBNPC
de stade IIIB ou IV, où il a été montré un bénéfice
statistiquement significatif en termes de SG chez
les patients présentant un adénocarcinome ou un
carcinome à grandes cellules, traités par cispla-
tine + pémétrexed versus cisplatine + gemcitabine
(n = 847 ; 12,6 versus 10,9 mois) [8]. Ce résultat
mérite d’être analysé avec prudence, car il s’agit
d’une analyse de sous-groupe sans ajustement de
la valeur p pour les analyses multiples. L’histologie
comme facteur prédictif de l’efficacité du pémé-
trexed dans les CBNPC non épidermoïdes a égale-
ment été démontrée dans son indication en seconde
ligne (versus docétaxel) ainsi qu’en traitement de
maintenance (versus placebo), que ce soit en termes
de SG ou de SSG (9).
Une des raisons de la moindre efficacité du pémé-
trexed dans les CBNPC épidermoïdes pourrait être
l’existence d’une forte expression dans ces tumeurs
de la thymidylate synthase, enzyme cible de cette
molécule (9). Cependant, nous ne disposons actuel-
lement pas d’une technique fiable et reproductible
permettant de l’utiliser en routine.
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