R e v u e d e ... L’étude avortée CRESCENDO : requiem pour un médicament contre l’obésité !

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R ev u e
de
presse
Coordination : Estelle Louiset (Rouen)
L’étude avortée CRESCENDO : requiem
pour un médicament contre l’obésité !
L’étude avortée
CRESCENDO : requiem
pour un médicament
contre l’obésité !
Anacetrapib :
effets robustes
sur le HDL et le LDL
sans les effets
secondaires
du torcetrapib :
étude DEFINE
Adipocytes, obésité
et interleukine 6
L’aldostérone au cœur
de l’athérosclérose
Risque de thrombose
dans l’hypercortisolisme
172
Le rimonabant est un inhibiteur sélectif des récepteurs
cannabinoïdes 1 qui a démontré des effets bénéfiques
et significatifs sur le poids, le périmètre abdominal
et les anomalies biologiques retrouvées dans le syndrome métabolique. CRESCENDO est une étude randomisée en double aveugle, étudiant le bénéfice du
rimonabant chez des sujets âgés de plus de 55 ans
ajoutant à une obésité abdominale soit une maladie
cardio-vasculaire survenue dans les 3 années précédant l’inclusion, soit au moins 2 facteurs de risque
majeurs. L’étude comparait l’effet de 20 mg de rimonabant par jour au placebo, sur le critère principal
composite (décès cardio-vasculaire ou infarctus du
myocarde ou accident vasculaire cérébral). Un suivi
régulier était prévu pour l’ensemble des patients
via un questionnaire psychiatrique. L’étude a inclus
18 695 patients, qui devaient être suivis pendant une
durée minimale de 33 mois. Après un suivi moyen de
14 mois, l’étude a été interrompue par les autorités de
plusieurs pays, contre l’avis du comité de pilotage et
sans la demande du comité de surveillance des événements indésirables, en raison de la survenance d’effets
indésirables psychiatriques (en particulier dépressions et suicides), par ailleurs rapportés dans d’autres
études. Avec seulement 700 patients ayant atteint le
critère principal de jugement alors que 1 600 étaient
nécessaires selon le calcul de puissance, les résultats
ne sont pas vraiment interprétables : critère primaire
(4 % pour placebo versus 3,9 % pour rimonabant) ;
décès (2,2 % pour placebo versus 2,1 % pour rimonabant) ; infarctus du myocarde (1,5 % pour placebo
versus 1,5 % pour rimonabant) ; accident vasculaire
cérébral (1,6 % pour placebo versus 1,4 % pour rimonabant). Les effets indésirables psychiatriques étaient
tous significativement plus élevés (p < 0,001) dans le
groupe traité par rimonabant, avec un taux d’anxiété
de 9,6 % (versus 4,02 % dans le groupe placebo), et
un taux de dépression de 7,6 % (versus 4,6 % dans le
groupe placebo). Quatre cas de suicide ont été rapportés dans le groupe rimonabant contre 1 cas dans
le groupe placebo.
L’intérêt de l’étude CRESCENDO ne réside pas dans
ses résultats sur l’efficacité du rimonabant, qui sont
probablement décevants mais qui restent surtout
ininterprétables étant donné l’arrêt prématuré de
l’étude. CRESCENDO confirme les effets indésirables
psychiatriques du rimonabant. Néanmoins, comme le
soulignent ses auteurs, l’arrêt de l’étude, décidé par les
autorités, enlève à tout jamais la possibilité de savoir si
les effets du rimonabant sur la morbi-mortalité – et, par
extension, les molécules de la même famille – auraient
pu contrebalancer ses effets indésirables.
F. Beygui (Paris)
• Topol EJ, Bousser MG, Fox KA et al. Rimonabant for prevention of cardiovascular events (CRESCENDO): a randomised, multicentre, placebo-controlled
trial. Lancet 2010; 376:517-23.
Anacetrapib : effets robustes sur le HDL
et le LDL sans les effets secondaires
du torcetrapib : étude DEFINE
Les inhibiteurs de la protéine de transfert des esters
de cholestérol (CETP) augmentent le HDL et baissent
le LDL. Le torcetrapib augmente les décès, via une
élévation tensionnelle et une élévation de l’aldostérone, du cortisol et des perturbations électrolytiques
non liée au CETP. L’anacetrapib est bien toléré chez
les sujets sains ou dyslipidémiques.
DEFINE (Determining the efficacy and tolerability of
CETP inhibition with anacetrapib) est une étude de
sécurité randomisée contrôlée en double aveugle et
menée chez 1 623 patients coronariens (54,7 %) ou à
haut risque cardio-vasculaire, qui a comparé 100 mg/j
d’anacetrapib au placebo pendant 18 mois (suivi >
99 %). Sous statines (99,3 %), le profil lipidique initial
était le suivant : LDL = 0,5-1 g/l (moyenne 0,8 g/l),
HDL < 0,6 g/l (moyenne 0,41 g/l), TG < 4 g/l. Les insuffisants cardiaques et rénaux sévères, les hypertendus
non contrôlés, les patients souffrant de troubles du
rythme, ayant eu un infarctus, une angioplastie, un
pontage, un angor instable (AI) ou un AVC moins de
3 mois auparavant, ceux porteurs d’hépathopathies et
ceux étant traités avec de la warfarine et des inhibiteurs
des cytochromes P4503A4 étaient exclus. Un contrôle
était effectué toutes les 6 à 8 semaines, le traitement
était suspendu en cas de LDL inférieur à 0,25 g/l sur
2 prélèvements (17,6 % des cas avec anacetrapib versus 0,1 %). Les analyses de sécurité intermédiaires à
6 et 12 mois étaient faites par un comité indépendant
du sponsor (Merck). Les résultats à 24 semaines sont
spectaculaires :
✓✓ réduction supplémentaire du LDL = 39,8 %
(p < 0,001, objectif primaire, 0,8 g/l à 0,45 g/l sous
anacetrapib versus 0,82 g/l à 0,77 g/l) ;
✓✓ différence d’augmentation du HDL = 138,1 %
(p < 0,001, objectif secondaire, 0,41 g/l à 1,01 g/l versus
0,40 g/l à 0,46 g/l) ;
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 6 - juin 2011
Revue de presse
✓✓ variation d’ApoLPA1 = 44,7 %, d’ApoLPB
= 21 %(p < 0,001), de non-HDL cholestérol = 31,7 %, de lipoprotéine(a) = 36,4 %,
de TG = 6,8 %, effet maintenu à 76 semaines ;
✓✓ pas de différence pour le critère primaire
de sécurité à 76 semaines (pression artérielle, électrolytes, aldostérone, événements
adverses – myalgies, rhabdomyolyses, décès
toute cause), ni dans les MACE (décès cardiovasculaires, infarctus, AVC, hospitalisation
pour angor instable : 2 % sous anacetrapib
versus 2,6 % ; p = 0,4).
L’analyse bayésienne atteste qu’il y a 94 %
de chances que l’anacetrapib ne soit pas
associé à l’augmentation de 25 % des MACE
survenue sous torcetrapib.
La fonctionnalité des HDL produites en inhibant la CETP n’est pas assurée, mais la cible
semble confortée par la génétique (des mutations de la CETP réduisent le risque cardiovasculaire proportionnellement au gain de
HDL produit). La sécurité d’emploi semble
satisfaisante, mais l’issue d’un LDL très bas
n’est pas certaine, tout comme l’effet sur des
populations non caucasiennes. DEFINE va lancer les études de supériorité de l’anacetrapib
sur les statines en prévention secondaire ou
primaire des sujets à haut risque… à suivre.
A. Bellemain-Appaix (Paris)
• Cannon CP, Shah S, Dansky HM et al. Safety of anacetrapib
in patients with or at high risk for coronary heart disease.
N Engl J Med 2010;363:2406-15.
Adipocytes, obésité
et interleukine 6
L’obésité est une maladie du tissu adipeux
dans laquelle la composante inflammatoire
est importante. Le tissu adipeux joue un
rôle crucial dans l’homéostasie glucidique
en libérant des cytokines, que l’on nomme
“adipokines” – telles que l’interleukine 6
(IL-6) – et qui modulent l’insulinosensibilité.
L’IL-6, via ses effets sur les lymphocytes B
et T, est considérée comme un médiateur
de l’inflammation, elle-même impliquée
dans l’insulinorésistance. Sa sécrétion est
contrôlée par de nombreux facteurs : hormones, cytokines, activité physique, stress,
alimentation et hypoxie. La régulation
exercée par des facteurs nutritionnels est
mal connue. L’objectif de cette étude est
d’analyser, chez le rat, l’effet sur la production d’IL-6 de 3 types de régime, enrichis
soit en lipides saturés (huile de coco ou
coprah), soit mono-insaturés (huile d’olive),
soit poly-insaturés (huile de tournesol), ainsi
que leur interaction avec des facteurs tels
que l’épinéphrine, un marqueur de stress
catécholaminergique. On sait, en effet, que
la stimulation adrénergique élève l’IL-6 en
augmentant sa libération par le tissu adipeux et le tissu musculaire. L’IL-6, libérée
par des adipocytes en culture provenant du
tissu adipeux omental (intra-abdominal), a
été mesurée en réponse à 3 concentrations
d’épinéphrine (0, 500 et 2 000 nM). Les adipocytes issus des animaux nourris avec de
l’huile d’olive ont eu les plus faibles taux de
libération d’IL-6 en présence ou en absence
d’épinéphrine. La libération d’IL-6 a varié
selon le type de régime, le régime huile
de tournesol rejoignant le régime huile de
coco pour des niveaux élevés d’épinéphrine
dans le milieu de culture. Globalement,
pour chaque régime, la libération d’IL-6 n’a
pas varié selon le niveau de concentration
d’épinéphrine, mais il existait une interaction entre alimentation (acides gras) et
épinéphrine pour la libération d’IL-6. Ces
données confirment le rôle des acides gras,
l’intérêt de l’huile d’olive, l’effet pro-inflammatoire des oméga 6, alors que, par ailleurs,
la réduction de la libération d’IL-6 par les
monocytes lors d’une supplémentation en
EPA-DHA (oméga 3) avait été montrée.
J.M. Lecerf (Lille)
la mortalité des patients sont réduits par
les antagonistes du récepteur des minéralocorticoïdes. I.Z. Jaffe et al. ont exploré le
mécanisme d’action de l’aldostérone sur
le système vasculaire en utilisant des fragments d’aortes humaines saines, prélevées
au cours de transplantation cardiaque, et
pathologiques, issues de patients ayant
subi un pontage coronarien, ainsi que des
carotides de souris dont l’endothélium a
été lésé mécaniquement. Les auteurs ont
constaté que l’aldostérone stimule à la fois
l’expression du facteur de croissance placentaire (PGF), apparenté au VEGF (Vascular
Endothelial Growth Factor), et son récepteur,
le FMS-like tyrosine kinase 1 (Flt1), dans les
tissus pathologiques humains et le modèle
murin de lésion artérielle. De plus, la spironolactone, un antagoniste du récepteur des
minéralocorticoïdes, réduit la production de
PGF dans les échantillons, ce qui indique
que l’effet protecteur de la spironolactone
s’exerce directement au niveau artériel.
L’équipe américaine a observé que des injections chroniques d’aldostérone (2 semaines)
à des souris induisent un remodelage vasculaire au niveau de la carotide lésée. Cet effet
délétère de l’aldostérone n’a pas été retrouvé
dans une lignée de souris déficientes en PGF.
Ces données démontrent la participation du
PGF comme relais de l’effet de l’aldostérone
sur le développement de l’athérosclérose.
Elles permettent d’envisager de cibler ce
facteur de croissance ou son récepteur, le
Flt1, dans le traitement de cette pathologie
cardio-vasculaire.
E. Louiset (Rouen)
• Jaffe I.Z. et al. J Clin Invest 2010;120:3891-900.
• García-Escobar E. et al. Int J Obes 2010;34:1328-32.
L’aldostérone
au cœur de l’athérosclérose
Le système rénine-angiotensine-aldostérone
est impliqué dans de nombreuses pathologies cardio-vasculaires. En particulier, il
a été montré que l’aldostérone favorise
l’athérosclérose. Les effets délétères de
l’hormone sur le remodelage vasculaire et
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 6 - juin 2011
Risque de thrombose
dans l’hypercortisolisme
Le syndrome de Cushing est associé à un
risque accru de thrombose veineuse résultant d’une élévation des facteurs de coagulation tels le facteur de von Willebrand
et le facteur VIII. Toutefois, certains patients
en hypercortisolisme présentent des taux
circulants du facteur de von Willebrand
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normaux. V. Daidone et al. ont recherché les
polymorphismes du promoteur du gène codant
pour le facteur de von Willebrand. Ils ont identifié les polymorphismes associés à la variabilité interindividuelle de sensibilité du facteur
de coagulation au cortisol chez 80 patients en
hypercortisolisme. L’haplotype correspondant
à -3268G, -2709C, -2661A et -2527G confère 9
fois plus de risque de développer une hyperproduction du facteur de von Willebrand par
rapport à l’haplotype -3268C, -2709T, -2661G
et -2527A. De même, la forme la plus courte
de répétition de la séquence GT (15 à 19 répétitions) dans la région -2144 augmente de 7,5 fois
le risque d’avoir des taux plasmatiques élevés
du facteur de von Willebrand par rapport aux
formes les plus longues (répétitions de GT > 20).
Cette étude montre que les polymorphismes
-3268G, -2709C, -2661A et -2527G, ainsi que 15 à
19 répétitions de GT en position -2144, sont des
marqueurs de risque de survenue d’une hyperproduction du facteur de von Willebrand au
cours d’un hypercortisolisme. Leur identification
permettrait une meilleure prise en charge du
risque de thrombose veineuse chez les patients
présentant une maladie ou un syndrome de
Cushing.
E. Louiset (Rouen)
• Daidone V. et al. Neuroendocrinology 2011;93:121-5.
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