Rimonabant : perspectives pharmacologiques Rimonabant: pharmacological perspectives ... Points forts ...

publicité
M I S E
A U
P O I N T
Rimonabant : perspectives
pharmacologiques
Rimonabant: pharmacological perspectives
❐ A. Pathak*
... Points forts ...
❐ Le rimonabant incarne la nouvelle classe des antagonistes des récepteurs endocannabinoïdes dits CB1.
❐ Les essais cliniques (programme RIO) montrent que le rimonabant diminue le poids
et le périmètre abdominal lorsqu’il est associé à un régime hypocalorique et à une
activité physique. Ces effets sont encore plus prononcés chez l’obèse diabétique.
❐ Les essais cliniques n’ont, à ce jour, démontré aucun effet sur la morbi-mortalité
associée à l’obésité mais les patients dans le bras rimonabant ont présenté des bénéfices sur des critères biologiques sous la forme d’un abaissement du taux de CRP ou
d’une amélioration du contrôle glycémique.
❐ Les essais montrent une fréquence accrue des effets indésirables neuropsychiatriques et ces observations justifient l’absence d’utilisation chez les patients aux
antécédents de dépression.
❐ La HAS a édicté des règles du bon usage du rimonabant qui encadrent son utilisation.
Mots-clés : Rimonabant – Développement – Pharmacologie clinique – Bon usage.
Keywords: Rimonabant – Development – Clinical pharmacology – Appropriate use.
L
es actualités autour du rimonabant, tête
de série de la classe des antagonistes dits
“sélectifs” des récepteurs CB1, permettent
de remettre au goût du jour les “fondamentaux”
de la pharmacologie clinique et, plus généralement, du développement d’un médicament.
Un médicament du hasard
* Service de pharmacologie clinique,
faculté de médecine et CHU de Toulouse.
La découverte du rimonabant repose sur des
observations cliniques empiriques parmi
lesquelles, principalement, l’excès d’appétit
constaté chez les fumeurs de cannabis. La décou-
verte du ligand endogène puis des récepteurs
CB1 et CB2 dans un grand nombre de tissus est,
elle, le fruit du labeur.
Une sélectivité relative
Ce médicament dit “antagoniste”, sélectif des
récepteurs CB1 des tissus périphériques perd,
comme tout (autre) médicament, sa sélectivité lors
de l’augmentation des doses (ici sélectivité pour
les récepteurs CB1 et les tissus périphériques). La
fixation au niveau central pourrait, en partie, expliquer la survenue d’effets indésirables centraux
▸▸▸/▸▸▸
126
Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2007
▸▸▸/▸▸▸
observés au cours des essais cliniques (épisodes
dépressifs plus fréquents dans le groupe rimonabant 20 que dans le groupe placebo).
pertinence des critères d’évaluation
Le programme de développement RIO comportait 4 essais cliniques menés chez des patients
obèses ou en surpoids avec comorbidités, dont
un chez le diabétique. Dans ces études, tous les
patients devaient respecter des mesures hygiéno­
diététiques (régime hypocalorique adapté et activité physique). Ces essais contrôlés avec tirage
au sort, en double insu contre placebo, comportaient trois bras : rimonabant 5 mg/j, rimonabant
20 mg/­j et placebo. Au terme du suivi sur 1 à 2 ans
des différentes populations de sujets obèses et
diabétiques, plus de 6 600 patients ont été inclus,
dont 5 000 ont effectivement reçu du rimonabant.
La perte de poids (critère principal d’évaluation) a
été plus prononcée chez les patients des groupes
rimonabant, en moyenne autour de 6,3 kg. Audelà du poids, le rimonabant a agi sur un grand
nombre de paramètres biologiques marqueurs du
risque cardiovasculaire. Ainsi, il diminue la CRP
(C-Reactive Protein), l’HbA1c et élève les fractions HDL-c. Cependant, dans ce programme de
recherche, aucune donnée d’efficacité sur des
critères cliniques durs (morbidité, mortalité) n’a
été rapportée, mais des essais sont en cours.
Des essais cliniques à la pratique quotidienne
La pharmacodynamie du rimonabant ouvre des
perspectives intéressantes dans la prise en charge
du risque cardiométabolique. Mais le caractère
réversible de la perte de poids à l’arrêt du traitement, le bénéfice à court terme, exclusivement
sur des critères intermédiaires, et l’incertitude
sur le long terme avec la notion d’événements
indésirables fréquents font vaciller la balance
bénéfice-risque.
Néanmoins, l’actualité récente autour du rimonabant, qui consiste en un avis négatif de la Food
and Drug Administration (FDA) quant à sa mise
sur le marché américain, doit être analysée avec
esprit critique et sans chauvinisme. À cet égard,
les règles édictées par la Haute Autorité de santé
(HAS) et relayées par le laboratoire sur le bon
usage du rimonabant sont claires et simples à
mettre en application.
Comme pour tous les médicaments indiqués dans
la prise en charge du risque cardiovasculaire (RCV),
un traitement médicamenteux ne doit être instauré
qu’en deuxième intention, après la mise en place
des règles hygiéno-diététiques, en association avec
la poursuite de ces mesures. Les indications de la
Commission d’autorisation de mise sur le marché
(AMM) vont au-delà du périmètre remboursable
puisque le rimonabant a obtenu une AMM dans
le traitement des patients obèses ou en surpoids
avec facteurs de risque associés, tels que diabète
de type 2 ou dyslipidémie, en association avec
un régime et de l’exercice physique. Il n’a pas été
étudié et ne doit pas être prescrit dans d’autres
indications (lutte contre la prise de poids liée au
sevrage tabagique, amincissement à des fins
esthétiques, etc.). Quant à l’indication remboursable, elle est réservée aux patients obèses et
diabétiques de type 2, insuffisamment contrôlés
par une monothérapie par metformine ou par
sulfamide, et dont l’HbA1c est comprise entre
6,5 % et 10 %. Les données des essais cliniques
font craindre principalement la survenue d’effets
indésirables neuropsychiatriques (troubles de
l’humeur avec symptômes dépressifs, irritabilité,
anxiété, vertiges et insomnie). En conséquence, un
traitement par rimonabant ne doit pas être instauré
chez un patient présentant un épisode dépressif en
cours. Pour accompagner au mieux les praticiens
dans l’évaluation post-AMM, un plan de gestion de
risque a été mis en place à l’échelle européenne
et l’introduction de ce médicament dans plus de
25 pays n’a entraîné aucune alerte.
Conclusion
Laissons au rimonabant le temps de faire ses
preuves au cours des essais cliniques de morbimortalité en cours. D’ici là, favorisons son bon
usage, luttons contre son usage inapproprié,
en associant régime hypocalorique et activité
physique accrue à sa prise. Le temps joue en
faveur de nos patients.
■
Les articles publiés dans Correspondances en Risque CardioVasculaire le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays.
DaTeBe SAS © novembre 2003 - Imprimé en France - ÉDIPS - 21800 Quetigny - Dépôt légal à parution.
Ce numéro est routé avec un numéro spécial de La Lettre du Cardiologue,”Les Proches” (12 pages).
Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2007
127
Téléchargement