Pendant cette période, près d’une vingtaine de molécules sont venues
enrichir notre arsenal thérapeutique, mais c’est surtout la définition
de nouvelles cibles thérapeutiques par les progrès de nos connaissances sur
la physiopathologie de nombreuses affections qui va changer profondément
notre pratique quotidienne. La neurogénétique, depuis la révolution du
génome, inonde la littérature médicale de protéines comme l’huntingtine,
la dystrophine, etc. Le séquençage du génome humain, qui sera complété
en 2002-2003, permettra de déterminer l’origine de toutes les maladies
monogéniques si nombreuses en neurologie. Certes, les promesses de la
thérapie génique, n’ont, pour le moment, pas été tenues, mais des procédés
dignes de films de science-fiction des années 80, comme la greffe intra-
cérébrale, les stimulations intracérébrales chroniques, la neuronavigation,
nous ont convaincus que la profanation du sanctuaire cérébral pouvait être
bénéfique, même dans des pathologies où l’inexorable perte cellulaire nous
avait habitués à une certaine résignation thérapeutique. Dans ces maladies
neurodégénératives, les neurosciences nous ont appris que nos cellules
nerveuses avaient des tendances suicidaires mais nous font rêver avec
le concept de plasticité et l’existence des cellules souches, certes en
nombre limité, dans le cerveau adulte. Les années 70-80 étaient les années
neuromédiateurs. Les années 90 ont été marquées par l’invasion des
facteurs neurotrophiques et des cytokines, dont le nombre a finalement
vaincu nos capacités d’apprentissage. Tous ces progrès en neurosciences
relégueraient-ils le neurologue de terrain inculte en neurosciences dans les
musées d’histoire de la médecine, accompagné de son inséparable marteau
à réflexes datant d’un autre siècle ? A-t-il toujours sa place dans cette ère
où le triumvirat de l’Evidence Based Medicine, de l’accréditation et des
caisses d’assurance-maladie dicterait ses lois aux praticiens qui oseraient
se fier à leur intuition clinique sans se connecter au Web ? Certes non,
les nombreux travaux sur la qualité de vie, la prise en charge globale
montrent qu’il est plus important d’apprécier la souffrance du conjoint
d’un patient atteint de maladie d’Alzheimer que de connaître
les connections cholinergiques cérébrales, que la manière d’annoncer
un diagnostic peut réduire à néant le bénéfice d’un interféron dans la SEP,
que réduire un diagnostic à la positivité d’un seul examen complémentaire
ou une piètre expertise clinique expose à l’iatrogénécité, fléau de moins en
moins toléré par notre société. Le neurologue du XXIesiècle peut rester fier
de l’art (ancestral ?) de la sémiologie, décrit par Dejerine comme
un exposé des rapports existant entre les facultés sensorielles des médecins
et les troubles objectifs présentés par les malades. Il peut aborder
cette nouvelle ère thérapeutique sereinement et en profitant pleinement
des nouvelles acquisitions en neurosciences.
Gageons que Les Actualités en neurologie, par l’ambition de rendre
accessibles à tous, de manière compacte et sans complexe, ces nouvelles
avancées, joueront un rôle important dans cette neurologie future.
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À tous nos lecteurs,
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vous souhaitent un bel été
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Le prochain numéro
paraîtra en septembre.
éditorial
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