E ÉDITORIAL Quelle médecine pour 2009 ?

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ÉDITORIAL
Quelle médecine pour 2009 ?
Which kind of medicine in 2009?
Jean-François Morère*
E
n 2008, les médecins n’ont pas échappé à
la morosité générale : crise, déficit, restriction sont en effet des mots qui peuvent
s’appliquer au champ médical. Cela risque-t-il
d’influencer notre culture m
­ édicale ?
la sécurité des soins, mais plutôt la restriction
des prescriptions coûteuses. Peut-on se satisfaire de cette nouvelle culture ? Sans doute non,
puisqu’elle induit, là encore, un risque accru d’exclusion d’un certain nombre de patients.
Par le passé, cette culture médicale a déjà connu
une évolution en plusieurs étapes. La première
a consisté en la construction d’un art médical, à
partir de l’héritage d’Hippocrate, que nous continuons à revendiquer. Cet art médical, mettant en
exergue le colloque singulier entre le médecin et
son patient ainsi que le devoir du premier de tout
mettre en œuvre pour le bénéfice du second, a
longtemps prévalu.
Alors, faut-il céder de nouveau à la morosité
pour 2009 ? Heureusement non, grâce à Michael
W. Kahn, qui nous propose une nouvelle culture
médicale, celle de l’etiquette-based medicine.
Selon ce principe, on constate en effet que, à
côté des avancées thérapeutiques coûteuses, les
patients peuvent tirer bénéfice d’une humanité
exprimée dans la relation médecin-malade (1).
Selon l’auteur, les patients semblent se sentir
mieux lorsque le médecin prend la peine de
frapper à la porte de leur chambre avant d’entrer,
de se présenter avant d’entamer la consultation
et de s’asseoir avant de s’enquérir aimablement
de leur santé. Ce pourrait être le premier pas vers
le retour à une médecine humaine et individualisée. Un pas qui a, de plus, l’intérêt majeur de ne
pas accroître les dépenses de santé ! Nul doute
que, dans un pays qui a rayonné dans le monde
depuis Louis XIV grâce aux règles de l’étiquette
à la française, cette nouvelle culture médicale
ne puisse obtenir nos faveurs.
Plus récemment, une nouvelle culture s’est peu
à peu imposée, venue des pays anglo-saxons :
l’evidence-based medicine. Avec cette médecine
fondée sur les preuves, les médecins ont, dans un
effort de scientifisation, cherché à rationaliser les
bases de leur pratique. Elle porte cependant en
germe un risque d’exclusion ou de discrimination,
puisque des pans entiers de l’exercice ne sont pas,
aujourd’hui encore, couverts par des preuves.
Que faire, alors, sinon se tourner à nouveau vers
l’art médical, pour ces patients qui restent à l’extérieur du domaine démontré ?
Aujourd’hui, une nouvelle étape nous est
proposée : on peut la qualifier de médecine
fondée sur l’économie. Bien que le socle en soit
l’evidence-based medicine, ses moteurs ne sont
pas réellement l’amélioration de la qualité ou de
Alors, pour 2009, vive la French etiquette-based
medicine !­
La rédaction de La Lettre du Cancérologue vous
prie d’accepter tous ses meilleurs vœux pour
cette nouvelle année.
■
* Service d’oncologie médicale, hôpital
Avicenne, Bobigny.
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www.edimark.fr
Référence bibliographique
Kahn MW. Etiquette-based medicine. N Engl J Med 2008;358(19):1988-9.
La Lettre du Cancérologue • Vol. XVIII - n° 1 - janvier 2009 | 5
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