DOSSIER THÉMATIQUE Traitements néoadjuvants

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DOSSIER THÉMATIQUE
Cancer du rectum :
actualités 2009
Rectal cancer: what’s new?
T. Conroy*
Traitements néoadjuvants
À la suite des résultats des essais de la Fédération
francophone de la cancérologie digestive (FFCD) et de
l’European Organisation for Research and Treatment
of Cancer (EORTC), la radiochimiothérapie préopératoire est considérée comme un standard en France
pour les adénocarcinomes du rectum localement
avancés. Cependant, certaines équipes chirurgicales
estiment obtenir des taux faibles de récidive locale et
contestent l’utilité de la radiothérapie préopératoire,
et ce malgré un premier essai randomisé mené aux
Pays-Bas (1) qui prouvait une réduction des récidives
locales même en cas de chirurgie optimale avec exérèse
totale du mésorectum (TME). Le Medical Research
Council (MRC) et l’Institut national du cancer du
Canada (NCIC) ont donc conduit un essai randomisé
au design élégant, posant à nouveau la question de
l’intérêt d’une radiothérapie préopératoire systématique (2). Les patients sans métastases, tous stades
confondus, pouvaient être inclus si la tumeur était
non fixée et située à moins de 15 cm de la marge
anale en rectoscopie rigide. L’essai a comparé une
radiothérapie préopératoire à une radiochimiothérapie postopératoire de nécessité, effectuée seulement en cas de marge circonférentielle insuffisante
(considérée comme envahie si mesure ≤ 1 mm entre
la structure tumorale la plus proche et la marge de
résection circonférentielle). Dans les deux bras, une
chimiothérapie adjuvante postopératoire pouvait être
délivrée selon les habitudes locales. La radiothérapie
préopératoire couvrait tout le pelvis (en évitant si
possible le canal anal) et était délivrée à la dose de
25 Gy en 5 fractions de 5 Gy. Elle était suivie d’une
chirurgie avec TME 7 jours après la dernière séance de
radiothérapie. Les patients du bras chirurgie d’emblée
recevaient, en cas de marge envahie, une radiochimiothérapie postopératoire comportant 45 Gy en
25 fractions sensibilisée par du 5-FU. Entre 1998 et
2005, 1 350 patients ont été inclus. Le bilan d’extension
a compris une IRM préopératoire dans seulement 41 %
des cas et un scanner pelvien dans 60 % des cas, des
chiffres toutefois superposables à ceux de l’enquête de
l’Association française de chirurgie (AFC) de 2008 (3).
Dans le bras chirurgie d’emblée, 12 % des pièces ont
présenté une marge latérale insuffisante. La radiochimiothérapie postopératoire protocolaire a alors été
réalisée dans 69 % des cas et une radiothérapie seule,
dans 9 % des cas. Dans le bras radiothérapie préopératoire, malgré la brièveté du délai entre radiothérapie
et chirurgie, un downstaging a été observé. Le taux de
récidives locales à 3 ans a été réduit de 61 % en cas
de traitement préopératoire (p < 0,0001), ce qui se
traduit par une amélioration de 6 % de la survie sans
rechute (SSR), également significative (p = 0,013).
Lorsque la marge circonférentielle est insuffisante,
le taux de récidives locales à 3 ans est élevé, surtout
dans le bras chirurgie d’emblée (20,7 %). Une radiochimiothérapie postopératoire ne protège donc pas
de façon satisfaisante du risque de récidive locale.
Lorsque la marge circonférentielle est supérieure à
1 mm, l’incidence de récidive locale est de 3,3 % en
cas de radiothérapie préopératoire, mais de 8,9 % en
cas de chirurgie d’emblée (différence significative).
Cela indique que, tous stades confondus, le risque de
récidive locale, même après une TME et une marge
latérale suffisante, reste élevé (8,9 %). Le bénéfice de
la radiothérapie préopératoire est observé à tous les
stades, mais n’est significatif qu’aux stades II et III.
Contrairement aux données de l’analyse (rétrospective
en sous-groupes) de l’essai hollandais (1), le bénéfice
de la radiothérapie préopératoire est observé quelle
que soit la distance de la tumeur à la marge anale, et
le risque de récidive est similaire pour les tumeurs du
bas et du moyen rectum. Le risque de récidive locale
d’un cancer du tiers supérieur du rectum de tout stade
opéré d’emblée (et recevant une radiochimiothérapie
postopératoire en cas de marge insuffisante) est de
* Département d’oncologie médicale,
Centre Alexis-Vautrin, et service de
chirurgie digestive, Vandœuvre-lèsNancy.
La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 4 - avril 2010 | 269
Résumé
Mots-clés
L’utilité du traitement néoadjuvant par radiochimiothérapie préopératoire a été confirmée par deux études
cette année. Les récidives locales deviennent rares avec un traitement préopératoire bien mené et une
exérèse du méso-rectum. La qualité de vie après chirurgie du rectum devient une préoccupation majeure.
Cancer du rectum
Chirurgie
Radiothérapie
Chimiothérapie
Qualité de vie
Highlights
The benefit of a neo-adjuvant
treatment with chemoradiotherapy has been confirmed
in two studies this year. Local
recurrences have become rare
after a well done neo-adjuvant
treatment and a meso-rectum
excision. The quality of life after
a rectal surgery has become a
major concern.
Keywords
Rectal cancer
Surgery
Radiotherapy
Chemotherapy
Quality of life
6,2 % à 3 ans. Ce risque est réduit à 1,2 % en cas de
radiothérapie préopératoire.
Un deuxième article portant sur le même essai (4)
a évalué la qualité des pièces opératoires, jugée par
l’état de la marge circonférentielle et l’aspect du
mésorectum, ce dernier étant classé en trois stades
(complet, presque complet, incomplet). La marge
circonférentielle s’est avérée plus fréquemment insuffisante (p = 0,0039) en cas d’amputation abdominopérinéale (16 %) qu’en cas de résection antérieure
(7 %). La résection était R1 pour 9 % des tumeurs des
tiers moyen et supérieur, et 15 % des tumeurs du tiers
inférieur. Le risque d’exérèse R1 augmente avec un
stade T ou N plus avancé et si la tumeur est en partie
antérieure. Cela se traduit à 3 ans par des différences
majeures de SSR (79 % si marge > 1 mm ; 50 % si
marge insuffisante ; p < 0,0001). Concernant la qualité
du mésorectum, évaluée pour 1 156 tumeurs (86 %),
il s’est révélé être de stade complet dans 52 % des cas,
presque complet dans 34 % des cas et incomplet (plaie
du mésorectum jusqu’à la musculeuse) dans 13 %
des cas. Fait intéressant, la proportion des stades I, II
et III est similaire dans les trois catégories de qualité
d’exérèse, ce qui indique que l’état du mésorectum ne
dépend pas du stade tumoral, mais de l’habileté du
chirurgien à rester dans le plan du mésorectum. Les
auteurs insistent sur l’aspect essentiel de la formation
des chirurgiens. Comme dans les études précédentes,
l’état du mésorectum a une valeur pronostique, le
taux de récidive locale à 3 ans étant de 13 % en cas
de mésorectum de stade incomplet, de 7 % en cas de
mésorectum de stade presque complet et de 4 % en
cas de mésorectum intact (p = 0,0039). En analyse
multifactorielle, les facteurs significativement associés à une récidive locale sont l’état du mésorectum,
l’envahissement du quadrant antérieur par la tumeur,
le stade T, le stade N et le bras chirurgie d’emblée.
Sur l’ensemble de la série, les patients ayant reçu une
radiothérapie préopératoire et ayant un mésorectum
complet ont un risque de récidive locale de 1 %, mais
l’effet bénéfique de la radiothérapie préopératoire
reste observé quelle que soit la qualité de l’exérèse.
Au final, ces résultats confirment le caractère indispensable du traitement néoadjuvant mais également
l’importance primordiale de la qualité de la chirurgie.
Ils viennent corroborer l’importance des comptesrendus anatomopathologiques standardisés, compor-
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tant la mesure de la marge circonférentielle et le plan
de résection dans le mésorectum.
L’essai NSABP R-03 (5) vient confirmer que la radiochimiothérapie préopératoire est le traitement standard
des tumeurs localement avancées. Sur les 900 patients
prévus, l’essai n’a recruté que 267 patients atteints de
tumeurs classées cT3, cT4 ou N+ entre 1993 et 1999.
Les patients ont été randomisés entre chimiothérapie
première suivie de radiochimiothérapie préopératoire
versus chirurgie d’emblée suivie de chimiothérapie
adjuvante, puis radiochimiothérapie postopératoire
et reprise de la chimiothérapie. La chimiothérapie était
une association de 5-FU à hautes doses et d’acide folinique hebdomadaire, d’où une fréquence inhabituelle
(29 %-36 %) de diarrhées sévères. Le volume cible de
la radiothérapie était l’ensemble du pelvis, et la dose
était de 45 Gy en 25 fractions, avec un boost de 5,4 Gy
en 3 fractions sur un petit volume. En cas de radiochimiothérapie préopératoire, le taux de pièces stérilisées a
été de 15 %; en ce cas, aucune récidive n’a été observée
à 5 ans. L’analyse des pièces opératoires montre plus de
tumeurs N0 en cas de stratégie préopératoire (66,6 %
versus 52,5 % ; p = 0,04). Par contre, l’incidence de
récidive locale reste similaire dans les deux bras (10,7
%). Ni le mésorectum ni la marge circonférentielle
ne semblent avoir été étudiés, probablement du fait
de la période de l’étude. Finalement, il existe une
amélioration significative de la SSR en faveur du bras
préopératoire, avec une différence de 11,3 % dans l’incidence brute des récidives. Ainsi, une différence de
survie à 5 ans qui approche la significativité statistique
(p = 0,065) en faveur de la stratégie préopératoire a été
notée. C’est le cinquième essai randomisé concluant en
faveur de la radiochimiothérapie préopératoire pour les
stades T3 et le sixième pour les stades T4. Dans l’éditorial qui l’accompagne, B.D. Minsky (6) conclut que la
radiochimiothérapie préopératoire reste le traitement
de choix des stades cT3 ou N+.
Le groupe PRODIGE (7) a publié les premiers résultats de l’étude ACCORD 12/0405-Prodige 2 évaluant
une intensification de la radiochimiothérapie préopératoire. L’essai a recruté 598 patients atteints de
tumeurs classées cT3 ou cT4 de fin 2005 à mi-2008. La
comparaison a porté sur une dose de radiothérapie de
45 Gy en 5 semaines, radiothérapie sensibilisée par de
la capécitabine versus une dose de 50 Gy en 5 semaines
sensibilisée par une association de capécitabine et
DOSSIER THÉMATIQUE
d’oxaliplatine. L’objectif principal était la stérilisation
complète de la pièce opératoire, qui a été observée
dans 13,9 % des cas avec 45 Gy-capécitabine et dans
19,2 % des cas pour le traitement intensifié (p = 0,09).
La différence devient significative si l’on y ajoute les
tumeurs presque stérilisées, n’ayant que peu de cellules
résiduelles. Il n’y a pas de différence sur le pourcentage
de marge envahie lorsque l’on prend un seuil supérieur
à 1 mm, mais elle est significative lorsque le seuil de la
marge latérale est fixé à 2 mm. Il n’y a pas de différence
en termes de préservation sphinctérienne. Il faudra
attendre les résultats de survie pour juger des éventuels
bénéfices de l’intensification de dose de la radiothérapie
et de l’apport de l’oxaliplatine.
Chirurgie
Une enquête prospective multicentrique nationale
portant sur la qualité de la prise en charge des cancers
du rectum a été réalisée en France courant 2008 (3).
Trente indicateurs de qualité ont été sélectionnés à partir
des recommandations de pratique clinique de 2005. Les
données de 1 360 patients opérés pour adénocarcinome
rectal dans 68 hôpitaux (43 publics, 25 privés) ont pu
être recueillies. La plupart des cas (53,1 %) émanent de
13 hôpitaux opérant plus de 30 cas par an. Il s’agissait
de stades T3 ou T4 dans 71 % des cas. Globalement, la
qualité est satisfaisante, surtout dans les centres opérant
plus de 30 cas par an. Dans cette situation, le bilan
local de la tumeur a compris une échoendoscopie dans
60 % des cas et une IRM pelvienne dans 57 % des cas.
Les décisions thérapeutiques ont été prises en réunion
de concertation disciplinaire dans 92 % des cas, mais
le texte ne précise pas si cette réunion était pré- ou
postopératoire. Le taux d’amputation abdomino-périnéale est faible (9 %). La ligature de l’artère mésentérique inférieure à son origine (81 %), la mobilisation
de l’angle colique gauche (86 %), la confection d’un
réservoir colique (51 %) et d’une stomie de protection
(78 %) sont plus fréquemment réalisées dans les centres
à haut volume. En revanche, le caractère complet du
mésorectum (79 %) n’est pas significativement influencé
par l’activité du centre. Dans les centres à haut volume
chirurgical, une radiothérapie préopératoire a été effectuée pour 82 % des stades T3 ou T4. Globalement, la
mortalité opératoire a été faible (2,4 %), alors que la
morbidité reste élevée, en particulier le taux de fistule
anastomotique et/ou d’abcès pelvien (12 %).
Valeur de l’IRM préopératoire
L’intérêt d’une deuxième IRM, en préopératoire,
pour évaluer l’efficacité de la radiochimiothérapie
néoadjuvante a été évalué dans deux études, en
corrélant le stade T déterminé par IRM (ymrT) à la
pièce opératoire (ypT) [8, 9]. Ces deux études ont
pour point commun de ne prendre en compte que
des images en pondération T2. Il n’est fait mention
ni de la distance de la tumeur au sphincter ni du
contrôle local. Ces deux études ont pour but de
tester la valeur de l’IRM pour permettre une éventuelle modulation du traitement chirurgical selon
la réponse à la radiochimiothérapie. La première,
menée par la polyclinique Gemelli (8), a inclus
53 patients atteints de tumeurs T3b-T4 d’histologie
non colloïde. L’IRM a été effectuée 6 à 8 semaines
après radiochimiothérapie. Une double lecture a été
organisée, puis une recherche de consensus en cas
de discordance d’experts (pourcentage des discordances non communiqué) sur le stade, alors classé
en ymrT. L’IRM s’est avérée performante pour prédire
la longueur maximale de la tumeur, mais a été prise
en défaut pour l’envahissement de la marge, avec
une valeur prédictive positive de seulement 42,8 %.
Les sources d’erreur ont été le remplacement de la
tumeur par de la mucine et la persistance de cellules
tumorales dans une zone de fibrose. Une réponse
au traitement a été observée dans 73 % des cas,
mais 17,6 % des tumeurs de stade initial mrT3 (avant
radiochimiothérapie) se sont avérées incorrectement
classées en réponse (après radiochimiothérapie) par
l’IRM (ymrT0-2), alors que, sur la pièce, la tumeur
était encore de stade ypT3. L’évaluation par IRM
seule pour décider éventuellement d’un traitement
local conservateur chez les répondeurs aurait donc
présenté un risque.
Par ailleurs, 28 % des tumeurs étaient considérées
en non-réponse en IRM, dont un tiers par excès,
car elles étaient en réponse sur la pièce opératoire.
L’évaluation de la marge latérale a été erronée 4 fois
sur 7. En y ajoutant un autre critère, la réduction du
volume tumoral de plus de 70 %, les tumeurs en
réponse sont pour la plupart correctement classées,
alors que celles en non-réponse sont mal classées
par l’IRM 8 fois sur 14. Dans cette série, malgré une
double lecture, la deuxième IRM préopératoire prédit
donc mal l’absence de réponse et l’envahissement
de la marge latérale.
Dans l’expérience hollandaise similaire (9), trois
lecteurs indépendants ont évalué le downstaging
(tumeurs initialement classées mrT3-T4 devenant
après radiochimiothérapie ymrT0-2) et un seul
expert a évalué le volume tumoral. De principe,
les auteurs ont considéré que la persistance d’un
hyposignal dans une paroi rectale épaissie correspondait à un stade ymrT3. Il existe une discordance
La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 4 - avril 2010 | 271
DOSSIER THÉMATIQUE
XXIe Journée scientifique
FFCD-PRODIGE
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Cancer du rectum : actualités 2009
significative entre observateurs, ceux-ci étant tous
par ailleurs responsables d’une surestimation du
stade au moins 1 fois sur 4. Les erreurs touchent
surtout l’absence de réponse et l’évaluation du statut
ganglionnaire. En ne sélectionnant ensuite que les
petites tumeurs (< 50 cm3) et en reclassant parmi
les répondeurs toutes les tumeurs ayant réduit leur
volume tumoral de plus de 75 %, environ 40 % des
tumeurs de stade surestimé auraient pu être reclassées correctement. Globalement, l’IRM préopératoire
expose à une surestimation du stade après radiochimiothérapie. L’utilisation de produit de contraste ou
la réalisation d’une IRM de diffusion aurait peut-être
permis de ne pas sous-évaluer la réponse.
En conclusion, même des radiologues experts ne
peuvent prédire avec fiabilité une bonne réponse.
Le calcul de la réduction du volume tumoral peut
aider pour éviter de surestimer le stade, en particulier
pour les petites tumeurs, mais la reproductibilité du
calcul du volume tumoral n’a pas été testée.
Séquelles et qualité de vie
Les séquelles sexuelles liées aux traitements ont
été précisées en questionnant 990 patients en vie
sans récidive à 2 ans et inclus dans l’essai randomisé hollandais (1) : TME avec ou sans radiothérapie
préopératoire 5 × 5 Gy (10). L’article porte sur les
patients qui avaient gardé une vie sexuelle active
avant la maladie (79,2 % des hommes et 51,7 %
des femmes). Après traitement, les deux tiers des
hommes signalent l’apparition d’une dysfonction ou
d’une détérioration sexuelle sévère. Celle-ci a été
significativement associée à une radiothérapie préopératoire (problème des hautes doses par fraction)
ou à une stomie. En revanche, le risque de perte de
toute activité sexuelle (28,5 % des hommes et 13,7 %
des femmes) est associé chez l’homme à un âge
supérieur à 65 ans ou à un lâchage anastomotique,
et chez la femme à l’âge seulement. Les troubles de
l’érection (survenant dans 80 % des cas) sont liés
principalement à un lâchage anastomotique, mais ni
l’amputation abdomino-périnéale ni la radiothérapie
préopératoire ne sont significativement associées au
risque. Les troubles de l’éjaculation (signalés dans
72 % des cas) sont liés à la radiothérapie préopératoire, à une atteinte nerveuse peropératoire ou à un
lâchage anastomotique. Dans cette série, la présence
d’une sécheresse vaginale (56 % des cas) ou d’une
dyspareunie (59 % des cas) est liée à la présence
d’une stomie, qu’elle soit temporaire ou définitive.
Les auteurs concluent que, même si la radiothérapie
préopératoire est un facteur aggravant, les troubles
272 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 4 - avril 2010
sexuels après cancer du rectum sont principalement
dus à la chirurgie, et que l’information sur les risques
des traitements est donc primordiale.
Une série américaine (11) a évalué la qualité de vie
de 491 patients survivants 5 ans après un cancer
du rectum. Avec ce recul, ils n’ont plus peur d’une
récidive. La moitié d’entre eux avait une stomie. Un
antécédent de radiochimiothérapie préopératoire n’a
pas eu d’impact sur la qualité de vie. Celle-ci s’est
avérée liée à l’âge, aux comorbidités, au niveau de
revenus et au maintien d’une activité professionnelle.
Les patients stomisés ont significativement plus
souvent des idées suicidaires et une dépression. En
cas de stomie, les problèmes de fuites, d’odeurs et
d’intimité en voyage dégradent la qualité de vie. Sur
l’ensemble des patients, la qualité de vie des femmes
est identique à celle des hommes. Par contre, en cas
de stomie, la qualité de vie des femmes est inférieure à celle des hommes et à celle des femmes
sans stomie pour la qualité de vie globale, l’état
psychologique et la vie sociale. Les scores de vie
spirituelle sont altérés, en particulier du fait d’une
moindre “sensation d’apaisement” et d’une “impression qu’il n’y a plus aucun espoir”. Enfin, la vie sociale
est altérée chez les hommes stomisés.
Conclusion
➤➤ La radiochimiothérapie préopératoire est le
traitement néoadjuvant standard pour les adénocarcinomes du rectum cT3 ou cT4. Avec une radiothérapie préopératoire et une chirurgie de qualité
(mésorectum de stade complet), le risque de récidive
locale devient très faible.
➤➤ La qualité des soins dans les centres chirurgicaux
ayant participé à la série de l’AFC est satisfaisante,
mais les données sont meilleures dans les centres
ayant un haut volume chirurgical, opérant plus de
30 patients par an d’un cancer du rectum.
➤➤ La valeur d’une deuxième IRM préopératoire pour
juger de la réponse à une radiochimiothérapie néoadjuvante paraît limitée, avec un risque de surstaging.
Même les radiologues experts ne peuvent prédire
avec fiabilité une bonne réponse. La deuxième IRM
ne permet donc pas d’adapter le geste chirurgical
à la réponse obtenue.
➤➤ Les troubles sexuels après cancer du rectum
sont principalement dus à la chirurgie. Les facteurs
aggravant le risque sont la présence d’une stomie,
un lâchage anastomotique, une atteinte nerveuse
peropératoire, ainsi qu’une radiothérapie préopératoire. En cas de stomie, la qualité de vie des femmes
guéries est inférieure à celle des hommes.
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