La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 10 - décembre 2012 | 495
MISE AU POINT
Cette approche sans chimiothérapie n’est néanmoins
pas envisageable pour l’instant, du fait de l’absence
de marqueurs prédictifs permettant de cibler les
patientes ne nécessitant pas de chimiothérapie
(cf. “Pertuzumab et biomarqueurs prédictifs”) [17].
Par ailleurs, la tolérance de la combinaison docé-
taxel-trastuzumab-pertuzumab associée à une
chimiothérapie à base de taxanes s’est révélée
comparable à celle du docétaxel-trastuzumab.
◆Étude TRYPHAENA
L’objectif principal de cette étude néo-adjuvante
de phase II était d’étudier la cardiotoxicité de diffé-
rents schémas de traitement, toutes les patientes
recevant du pertuzumab. Au total, 225 patientes
HER2+ ont été randomisées entre 3 bras : 3 cycles
de 5-FU-épirubicine-cyclophosphamide (FEC) suivis
de 3 cycles de docétaxel, avec introduction de la
combinaison pertuzumab-trastuzumab lors de l’ins-
tauration du FEC (bras A) ou lors de l’instauration
du docétaxel (bras B). Le bras C étudiait une combi-
naison sans anthracycline, avec 6 cycles de docé-
taxel-carboplatine-pertuzumab-trastuzumab (18).
Il est à noter que cette administration concomitante
des anticorps anti-HER2 avec les anthracyclines
correspond à une modalité d’administration rela-
tivement commune outre-Rhin, depuis les essais
GEPARTrio, GEPARQuattro et GEPARQuinto (19).
Les résultats de cette étude ont montré que l’inci-
dence des dysfonctions ventriculaires gauches
symptomatiques et asymptomatiques était faible
(moins de 5 %) et similaire quel que soit le type
de schéma. Aussi, bien qu’une cardiotoxicité ait
été imputée à l’association trastuzumab-anthra-
cycline (4), l’addition concomitante d’anthracycline
à l’association pertuzumab-trastuzumab semble ne
pas obérer le profil de tolérance cardiaque immédiate
(les données à long terme sont encore inconnues).
Les taux de pCR étaient respectivement de 51 %,
45 % et 52 %, sans différence significative.
L’ensemble des données issues des études NeoSphere
et TRYPHAENA souligne, d’une part, que, en situation
néo-adjuvante, l’association de 2 thérapies ciblant
HER2 et d’une chimiothérapie permet d’amé-
liorer l’efficacité antitumorale dans le traitement
des stades précoces du cancer du sein HER2+ et,
d’autre part, qu’une telle association est bien tolérée,
y compris lorsque la chimiothérapie administrée
comporte une anthracycline. Ces résultats positifs
ont conduit à effectuer une étude de phase III adju-
vante pivotale chez des patients ayant un cancer du
sein primaire opérable HER2+ : l’étude APHINITY
(ClinicalTrials.gov, numéro BO25126).
Pertuzumab en adjuvant :
l’étude APHINITY
APHINITY est une étude multicentrique, randomisée,
en double aveugle dans laquelle le traitement de
référence (chimiothérapie adjuvante-trastuzumab)
est combiné avec du pertuzumab ou du placebo. La
chimiothérapie adjuvante, dont le type est laissé au
choix de l’investigateur, peut comporter soit des
anthracyclines et des taxanes, soit uniquement des
taxanes. Les traitements anti-HER2 sont administrés
toutes les 3 semaines pendant 52 semaines. Cette
étude doit inclure à terme environ 4 000 patientes
opérées d’un cancer du sein HER2+, confirmé par une
analyse centralisée. Le critère principal de jugement
est la survie sans maladie invasive.
Pertuzumab
et biomarqueurs prédictifs
Il n’existe pas, à ce jour, de biomarqueurs prédictifs
de l’efficacité du pertuzumab contre les cancers
HER2+. En situation métastatique (CLEOPATRA),
les analyses de sous-groupes, en fonction des carac-
téristiques clinicohistologiques habituelles, n’ont
pas mis en évidence de population pour laquelle
l’ajout du pertuzumab à la combinaison docé-
taxel-trastuzumab serait significativement plus ou
moins efficace au sein de la population HER2+. En
néo-adjuvant, l’étude TRYPHAENA suggérait une
augmentation marquée du taux de pCR dans le sous-
groupe n’exprimant pas les récepteurs hormonaux si
le trastuzumab et le pertuzumab étaient introduits
dès le début du traitement néo-adjuvant, et non pas
après une phase initiale de traitement par anthra-
cycline seule. Les patientes ayant un cancer HER2+
et exprimant les récepteurs hormonaux semblaient
moins bénéficier de l’introduction précoce des
thérapies anti-HER2. L’absence de bras sans pertu-
zumab ne permet néanmoins pas de conclure si
l’effet était propre au pertuzumab ou s’il s’agis-
sait, plus généralement, d’un effet des thérapies
anti-HER2 (trastuzumab compris). Enfin, l’étude
NeoSphere a permis d’explorer de très nombreux
biomarqueurs “translationnels” : HER2, HER3, IGF1R,
PTEN, pAKT, c-myc, EGFR, PI3KCA, etc. (17). Ces
diverses analyses n’ont pas directement permis de
retrouver de biomarqueurs prédictifs permettant
d’isoler une sous-population particulièrement résis-
tante ou sensible de manière applicable en clinique.
À noter, néanmoins, que les taux de pCR étaient là
encore particulièrement augmentés par l’ajout du