Communication courte J Pharm Clin 2015 ; 34 (1) : 37-8 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Nouveau standard en traitement de première ligne du cancer du sein HER2 positif : association pertuzumab + trastuzumab + docétaxel New standard treatment in first line HER2 positive metastatic breast cancer: pertuzumab + trastuzumab + docetaxel Vincent Launay-Vacher Service ICAR, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris, France <[email protected]> L’ étude Cleopatra est l’étude de phase III d’enregistrement du pertuzumab qui comparait l’association pertuzumab + trastuzumab + docétaxel vs. placebo + trastuzumab + docétaxel en première ligne métastatique du cancer du sein HER2 positif. Les premiers résultats avaient été publiés en 2012 [1]. Ceux-ci montraient une amélioration de la survie sans progression pour le bras pertuzumab de plus de 6 mois et avaient conduit à l’obtention de l’AMM dans cette indication. Au congrès européen de cancérologie 2014, les résultats matures sur la survie globale ont été présentés en session présidentielle [2], et ceux-ci sont réellement impressionnants, de l’avis des experts, et « on stage » par la voie du discussant qui a pris la parole après la présentation des résultats, et a qualifié l’association pertuzumab + trastuzumab + docétaxel de nouveau standard, et non une option, dans le traitement de première ligne du cancer du sein HER2 positif (sic). La survie globale dans le bras pertuzumab + trastuzumab + docétaxel était de 56,5 mois, une durée jamais atteinte jusqu’à présent, quelle que soit la thérapeutique, et de 40,8 mois dans le bras trastuzumab + docétaxel. L’addition du pertuzumab au trastuzumab et au docétaxel permet donc d’allonger la survie globale des patientes de 15,7 mois, avec un hazard ratio de 0,68, statistiquement significatif, p = 0,0002. Aucun effet cumulatif sur la toxicité cardiaque n’a été observé, l’incidence étant la même dans les deux bras (dysfonction ventriculaire gauche symptomatique 1,5 % avec le pertuzumab vs. 1,8 % avec le placebo ; diminution de la fraction d’éjection ventriculaire gauche 6,1 % avec le pertuzumab vs. 7,4 % avec le placebo). C’est ici l’occasion de rappeler les caractéristiques et mode d’action du pertuzumab. Le pertuzumab est un anticorps monoclonal, inhibiteur de la dimérisation du récepteur HER2 (Human epidermal growth factor receptor 2), indiqué dans le traitement des cancers du sein surexprimant HER2, en association avec le trastuzumab et le docétaxel, ayant obtenu une AMM (autorisation de mise sur le marché) le 8 juin 2012 aux États-Unis et le 5 mars 2013 en Europe, dans le traitement du cancer du sein HER2 positif en première ligne métastatique, suivies d’une nouvelle AMM aux États-Unis le 30 septembre 2013 en situation néoadjuvante. HER2 est un récepteur membranaire appartenant à la famille des récepteurs à l’EGF qui compte 4 soustypes : HER1, également appelé EGFR ou EGFR-1, HER2, HER3 et HER4. Lorsqu’ils sont activés (fixation du ligand/dimérisation) ces récepteurs induisent une cascade de réactions intracellulaires, principalement par les voies de signalisation MAP kinase et PI3 kinase, avec transmission d’un signal aboutissant à une stimulation de la prolifération cellulaire, une stimulation de l’angiogenèse tumorale, et une inhibition de l’apoptose. HER2 est le seul récepteur de cette famille à ne pas avoir de ligand connu, mais présente une capacité d’activation « spontanée ». À l’inverse, les autres récepteurs requièrent la fixation de leur ligand, qui induit un changement de conformation et une dimérisation, le plus souvent avec un récepteur HER2, aboutissant à la Pour citer cet article : Launay-Vacher V. Nouveau standard en traitement de première ligne du cancer du sein HER2 positif : association pertuzumab + trastuzumab + docétaxel. J Pharm Clin 2015 ; 34(1) : 37-8 doi:10.1684/jpc.2015.0296 37 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. V. Launay-Vacher formation d’hétérodimères HER2-HER1, HER2-HER3, ou HER2-HER4, entraînant l’activation de la voie de signalisation intracellulaire. L’hétérodimérisation HER2-HER3 est considérée comme la voie la plus active. Le pertuzumab se fixe sur les récepteurs HER2 présents à la surface des cellules tumorales, sur un épitope différent de celui du trastuzumab, et bloque ainsi toutes les dimérisations du récepteur HER2, parmi lesquelles l’hétérodimérisation HER2-HER3. L’association du pertuzumab et du trastuzumab permet donc un blocage par le trastuzumab des voies de signalisation liées à l’activation d’HER2, ainsi qu’un blocage par le pertuzumab des voies de signalisation activées par l’hétérodimérisation d’HER2 avec d’autres récepteurs de la famille EGF, et en particulier HER3. L’activation de l’immunocytotoxicité (ADCC : Antibody-dependent cell cytotoxicity) par le trastuzumab pourrait être renforcée par une activation de ce mécanisme par le pertuzumab également. Les résultats cliniques ont confirmé l’intérêt de ce blocage complet de la voie HER2 par le trastuzumab et le pertuzumab, en particulier dans l’étude CLEOPATRA, étude de phase 3 d’enregistrement dont les premiers résultats ont été publiés dans le New England Journal of Medicine en janvier 2012 [1]. Cette étude rapportait un bénéfice significatif de l’association docétaxel + trastuzumab + pertuzumab versus docétaxel + trastuzumab + placebo, chez des patientes présentant un cancer du sein HER2 positif traitées en première ligne métastatique. La survie sans progression (SSP) était significativement augmentée de 6,1 mois (18,5 vs. 12,4 mois ; HR 0,62 ; 38 IC95% [0,51-0,75] ; p < 0,001). Il existait une tendance à une augmentation de la survie globale (SG), confirmée aujourd’hui dans les résultats finaux présentés à Madrid. Un intérêt particulier a été apporté au suivi de la tolérance cardiaque, celle-ci constituant l’effet indésirable « type » des traitements bloquant la voie HER2, qui montre que l’ajout du pertuzumab au trastuzumab et à la chimiothérapie n’entraîne aucune majoration de la toxicité cardiaque [2, 3]. Article publié en ligne sur la plateforme spécialisée LeCancer.fr, rubrique Pharma (http://lecancer.fr/ actus-scientifiques/pharma/) Liens d’intérêts : Roche. Références 1. Baselga J, Cortés J, Kim SB, et al. Pertuzumab plus trastuzumab plus docetaxel for metastatic breast cancer. N Engl J Med 2012 ; 366 : 109-19. 2. Swain S, Kim S, Cortes J, et al. Final overall survival (OS) analysis from the CLEOPATRA study of first-line (1L) pertuzumab (Ptz), trastuzumab (T), and docetaxel (D) in patients (pts) with HER2positive metastatic breast cancer (MBC). European Society of Medical Oncology, Madrid, 2014 : abst 350 O_PR. 3. Swain SM, Ewer MS, Cortés J, et al. Cardiac tolerability of pertuzumab plus trastuzumab plus docetaxel in patients with HER2-positive metastatic breast cancer in CLEOPATRA : a randomized, double-blind, placebo-controlled phase III study. Oncologist 2013 ; 18 : 257-64. J Pharm Clin, vol. 34 n◦ 1, mars 2015