MISE AU POINT ! . Le traumatisé crânien : pronostic Traumatic brain injury: prognosis C. Benaïm1, 2, 3, I. Benatru1, 4 E n l’absence d’enquête épidémiologique nationale, l’incidence annuelle des traumatismes crâniens (TC) n’est pas connue en France. On peut toutefois l’estimer grâce aux études réalisées à l’étranger ou dans certaines régions françaises. Elle serait comprise entre 150 et 300 pour 100 000 habitants, et son taux de mortalité irait de 7 à 17 %. Parmi les survivants, le TC est considéré comme léger dans 80 % des cas, modéré dans 11 % et grave dans 9 %. Les TC graves étaient définis dans l’enquête d’Aquitaine par un coma (score à l’échelle de coma de Glasgow inférieur ou égal à 8) et/ou une image anormale sur les examens neuro-radiologiques. On peut donc estimer l’incidence des TC graves à environ 25/100 000 habitants/an. Les hommes sont plus touchés que les femmes (3/1), avec un pic de fréquence situé entre 15 et 25 ans. Les accidents de la circulation restent la cause principale, dans une proportion qui croît avec la gravité du TC. Les lésions associées sont fréquentes, d’autant plus que le TC est grave, et elles sont sources de séquelles. De nombreux auteurs ont tenté de trouver des indices pronostiques de récupération à court et long terme après TC, avec plus ou moins de réussite. La synthèse de cette littérature est difficile en raison de la diversité des protocoles d’études et, en particulier, de celle des indices utilisés pour mesurer le degré de récupération. Nous rappelons ici les principales séquelles rencontrées chez les personnes atteintes de TC ainsi que les principaux facteurs cliniques, radiologiques et neuro-physiologiques présentés dans la littérature comme susceptibles d’influencer l’évolution à court et à long terme. Principales séquelles des TC Les évolutions possibles après un TC vont de la mort à la récupération ad integrum, en passant par l’état végétatif chronique et par tous les degrés d’atteinte motrice et cognitive. L’échelle de devenir Glasgow Outcome Scale (GOS) [tableau I] est souvent utilisée pour classer les patients en fonction des séquelles (1). Ainsi parle-t-on de “GOS 2” pour un patient en état végétatif chronique, de “GOS 3” pour un patient présentant de lourdes séquelles imposant l’aide d’une tierce personne, etc. Les principales séquelles d’un TC isolé sont de plusieurs ordres : neurologiques, auxquelles s’ajoutent les inévitables conséquences sur l’appareil locomoteur, cognitives et psychologiques, en raison des répercussions sur la personnalité et le comportement. La complexité des tableaux cliniques résultant de ces atteintes nécessite, pour une évaluation précise, la prise en charge par une équipe multi­disciplinaire médicale (médecin physique, neurologue, psychiatre, Tableau I. Score de devenir Glasgow Outcome Scale. 1 Pôle rééducation-réadaptation, CHU de Dijon. Glasgow Outcome Scale (GOS) 5 : bonne récupération ; le patient est indépendant, sans déficit neurologique ou avec un déficit neurologique léger 4 : handicap modéré ; le patient a un déficit neurologique ou intellectuel mais est indépendant 3 : handicap sévère ; le patient est conscient mais totalement dépendant dans les activités de la vie quotidienne 2 : état végétatif 1 : décès Inserm U887, université de Bourgogne, faculté des sciences du sport, campus universitaire Montmuzard, Dijon. 2 3 CIC-P Inserm 803, Dijon. 4 Service de neurologie, hôpital général, Dijon. La Lettre du Neurologue • Vol. XIII -n° 11 - décembre 2009 | 359 Points forts Mots-clés Traumatisme crânien Séquelles Pronostic Summary The incidence of traumatic brain injuries (TBI) in France has been estimated between 150 and 300.000 cases per year. Traumatic brain injury produces long term disabling effects in a young population. It is responsible for physical, cognitive and psychological deficiencies, whose assessments have to be performed by a multidisciplinary team (physicians, physiotherapists, occupational therapists, speech therapists, neuro-psychologists and psychologists). In moderate and severe TBI, physical and cognitive deficiencies are strongly associated with the ongoing disruption of social networks, employability, and return to work. The Glasgow Outcome Scale is widely used to grade the outcome according to the degree of recovery, that can take from a few weeks to several months or even years. After a TBI, the main prognosis factors are initial severity (as measured by the Glasgow Coma Scale), age, duration of the post-traumatic amnesia, the number, the depth and the variety of brain lesions. However, the initial severity of TBI does not necessarily correlate with the outcome, except for extreme cases, while the profile of recovery during the first days or the first weeks is a determining factor. Keywords Traumatic brain injury Sequelae Prognosis »» L’incidence des traumatismes crâniens (TC) en France est estimée se situer entre 150 000 et 300 000 cas par an. Parmi les survivants, 20 % sont considérés comme des cas modérés ou graves et garderont des séquelles incompatibles avec le retour à la vie antérieure. »» Les TC sont responsables de multiples déficiences physiques, cognitives et psychologiques dont l’évaluation doit être multidisciplinaire (médecins, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, neuropsychologues, psychologues, orthophonistes, etc.). »» Le score de devenir Glasgow Outcome Scale est largement utilisé pour classer l’évolution en cinq stades selon le degré de récupération. Celle-ci peut prendre plusieurs semaines, mois, voire années. »» Les principaux facteurs pronostiques sont : la sévérité initiale mesurée par le score de coma de Glasgow, l’âge, la durée de l’amnésie post-traumatique, le nombre, la profondeur et la diversité des lésions. Toutefois, en dehors des cas extrêmes, la sévérité initiale du TC n’est pas forcément corrélée à l’évolution, alors que le profil de récupération durant les premiers jours ou les premières semaines est déterminant. généraliste) et paramédicale (kinésithérapeute, ergothérapeute, neuropsychologue, psychologue, psychomotricien et orthophoniste). À partir de quel délai peut-on parler de séquelles définitives ? Cette question ne fait pas l’objet d’un consensus, et de nouvelles publications sortent régulièrement, venant contredire ce que nos maîtres nous enseignaient il y a 10 ou 20 ans. Néanmoins, il est possible de dégager quelques points de repère pour le patient présentant une lésion hémisphérique isolée. »» L’incapacité de préhension résultant de l’atteinte sensitivo-motrice du membre supérieur est de très mauvais pronostic si l’on n’observe pas l’amorce d’une récupération analytique à 1 mois. À l’inverse, la possibilité d’effectuer à ce stade un mouvement d’approche, une prise globale et un lâcher actif laisse supposer une évolution favorable, qui pourra demander des mois. »» La marche, conditionnée davantage par la récupération de l’équilibre du tronc que par la récupération motrice du membre inférieur peut se modifier sur plusieurs mois, et l’on peut voir évoluer des patients après 6 ou 9 mois. Il s’agit généralement non pas d’une amélioration de l’examen moteur analytique, mais d’une progression des performances en termes d’équilibre et d’endurance. »» L’évolution des fonctions supérieures peut se faire sur 1 année, parfois 2 ou plus, en fonction non seulement de la sévérité des déficiences, mais également de la motivation du patient (absence d’anosognosie), des possibilités de prise en charge spécialisée et de l’existence d’un environnement familial favorable. »» D’autres éléments comme les troubles sphinctériens ou de la déglutition peuvent également évoluer à distance du TC. »» Dans les cas les plus défavorables, la persistance d’un coma profond est heureusement très rare, l’évolution se faisant généralement vers un état végétatif ou paucirelationnel. Précisons ici que l’on ne parle d’ “état végétatif chronique” (ou “persistant”) qu’après 12 ou 18 mois d’évolution, contrairement aux étiologies médicales, pour lesquelles le délai n’est que de 3 à 6 mois. 360 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIII - n° 11 - décembre 2009 Séquelles physiques Les séquelles neurologiques sont de gravité variable. Elles dépendent essentiellement de la lésion cérébrale initiale et des lésions périphériques associées au TC. Ainsi, il n’est pas rare de retrouver chez un patient victime d’un accident de moto avec impact latéral un déficit hémicorporel controlatéral au côté de l’impact (par lésion cérébrale) et une paralysie flasque du membre supérieur du côté de l’impact (par lésion du plexus brachial), aggravant considérablement le pronostic fonctionnel. À cela s’ajoutent les polyneuro­ pathies de réanimation et les syndromes canalaires causés par le décubitus prolongé, heureusement peu fréquents dans leurs formes graves. Chaque déficience évolue alors pour son propre compte et le pronostic n’est pas toujours facile à établir. Séquelles cognitives Toutes les fonctions cognitives peuvent être touchées après un TC, en fonction du nombre et de la localisation des lésions. À la différence des accidents vasculaires cérébraux, où les lésions sont plus ou moins systématisées, la diversité des lésions traumatiques, à la fois focales et diffuses, explique une symptomatologie riche et complexe. Toutefois, les contusions frontales et temporales, résultant de chocs directs de l’encéphale contre la boîte crânienne, sont relativement plus fréquentes. Ainsi, les fonctions cognitives les plus touchées sont les fonctions exécutives et mnésiques, s’associant à des troubles psycho-affectifs et comportementaux que l’on considère souvent comme “spécifiques” du traumatisé crânien. Il faut d’ailleurs rappeler ici que, même en l’absence de lésions visibles des lobes frontaux, des lésions diffuses peuvent s’accompagner de dysfonctionnements frontaux, mis en évidence par les techniques de neuroimagerie fonctionnelle et probablement liés à un défaut d’activation de réseaux neuronaux impliquant les régions préfrontales et cingulaires (2). Depuis les travaux de Luria dans les années 1970, on distingue classiquement le syndrome préfrontal dorso-latéral, où les patients sont passifs et apragmatiques, du syndrome orbito-basal, caractérisé par une désinhibition et des comportements compulsifs. Plus récemment, O. Godefroy et al. ont proposé la MISE AU POINT Le traumatisé crânien : pronostic classification suivante des troubles comportementaux du syndrome frontal ou “syndrome dysexécutif” (3) : »» l’hypoactivité globale avec aboulie et/ou apathie et/ou aspontanéité ; »» l’hyperactivité globale avec distractibilité et/ou impulsivité et/ou désinhibition ; »» les persévérations et les stéréotypies ; »» le syndrome de dépendance à l’environnement avec des comportements de préhension pathologique, d’imitation et d’utilisation. À cela il faut ajouter la fréquente anosognosie, élément déterminant dans la prise en charge rééducative. Au maximum, on peut observer un mutisme akinétique, qui est à différencier des états de conscience altérée (état végétatif et état paucirelationnel). En dehors de ces tableaux typiques peuvent être observés, selon les cas, des troubles du langage, des praxies et des gnosies, sources d’incapacités plus ou moins sévères. Séquelles psychologiques Elles s’organisent autour de la réaction psychogène à l’accident et à ses conséquences en termes de déficiences, d’incapacités et de handicap social. La personnalité prétraumatique peut également orienter l’expression de ces troubles (un psychopathe reprendra sa trajectoire jusqu’au prochain accident…). Des manifestations paroxystiques soudaines, passagères, révélant des émotions non contenues d’anxiété, de peur intense, de colère, peuvent entraîner des accès d’agressivité. Ces troubles parfois spectaculaires sont particulièrement fréquents et bruyants en phase initiale, notamment lorsque les déficiences physiques sont mineures et que le patient est ambulatoire (risque de fugue). Un état psychopathologique antérieur normal, un environnement psycho-affectif favorable et une prise en charge spécialisée permettront généralement d’améliorer cette symptomatologie. Un épisode dépressif majeur est fréquent, réactionnel à la prise de conscience par le patient de son état et de la réaction de son entourage. De même que l’évolution des déficiences neurotraumatologiques et neuro­psychologiques est lente, le début du travail de deuil peut être tardif. lors qu’il y a eu une perte de connaissance, même brève. Il disparaît généralement aussi vite, ou au maximum en 1 à 2 ans. Interviennent ici des facteurs tant somatiques que psychologiques. Il comporte des symptômes physiques (céphalées, vertiges, troubles de l’équilibre, fatigue, nausées, vision floue, etc.), cognitifs (troubles de la mémoire, bradypsychie, difficultés de concentration, etc.) et émotionnels (irritabilité, anxiété, agitation, instabilité, etc.). Le mécanisme d’apparition de ce syndrome n’est pas connu. Il pourrait résulter de lésions cérébrales minimes, invisibles en imagerie cérébrale. Toutefois, il peut être observé chez des patients victimes d’un accident de travail responsable d’une commotion cérébrale minime avec amnésie post-traumatique très courte, mais chez qui les compensations financières peuvent être d’une grande importance. ◆◆ Le déficit posthypophysaire Le diabète insipide (DI) et le syndrome de sécrétion inapproprié d’ADH (SIADH), secondaires à une atteinte de l’hypophyse postérieure, sont généralement transitoires après la phase aiguë du TC. L’incidence du DI est faible (< 3 %) ; elle est plus élevée lorsque les lésions sont proches du chiasma (> 30 %). Dans une étude récente, l’incidence du SIADH a été estimée à 14 % après TC léger ou modéré (4). Autres séquelles ◆◆ Le déficit antéhypophysaire Sa prévalence à distance du TC est estimée se situer entre 28 % et 68 % selon les séries, les déficits en GH et en gonadotrophine étant les plus fréquemment observés (4). Ces déficiences peuvent régresser spontanément (surtout les déficiences gonadotrope et somatotrope), se stabiliser (thyréotrope) ou au contraire apparaître ou s’aggraver avec le temps (corticotrope), et il n’y a pas de facteurs prédictifs de ces différentes évolutions. Il existe des similitudes entre les tableaux cliniques résultant d’un TC et d’une insuffisance antéhypophysaire. C’est le cas en particulier du déficit en GH, qui peut être à l’origine de troubles attentionnels et mnésiques, d’une fatigabilité physique et mentale et d’une labilité émotionnelle. Il faut alors savoir y penser, le diagnostiquer et proposer un traitement substitutif tout en suivant l’évolution des troubles neuro­psychologiques. ◆◆ Le syndrome post-commotionnel ou syndrome subjectif C’est un ensemble de symptômes apparaissant quelques jours à quelques mois après un TC dès ◆◆ L’épilepsie post-traumatique L’épilepsie post-traumatique survient le plus souvent entre 8 jours et 2 ans après le TC, le délai de survenue pouvant toutefois se prolonger jusqu’à 30 ans. 362 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIII - n° 11 - décembre 2009 MISE AU POINT Son incidence se situe entre 26 % et 53 % selon les séries, le risque d’épilepsie post-traumatique étant plus important en cas de traumatisme avec hématome intracérébral, hématome sous-dural, contusion hémorragique ou séquelles neurologiques cliniques (5). Le traitement symptomatique n’est pas différent de celui de l’épilepsie primaire, mais 25 % des patients pourront être difficiles à traiter. ◆◆ Les para-ostéo-arthropathies neurogènes (POAN) Les POAN sont une complication orthopédique redoutable sur le plan fonctionnel. Ce sont des ossifications ectopiques, développées par néoostéogenèse à proximité des grosses articulations (surtout hanches, genoux et coudes) dans les suites de lésions neurologiques centrales ou périphériques, notamment après sédation prolongée ou coma. Selon les séries, elles surviennent dans 11 % à 25 % des TC (6). Elles s’installent en quelques jours ou quelques semaines et réalisent un tableau d’ankylose progressive extrêmement douloureuse. Elles peuvent également comprimer un tronc nerveux. De mécanisme inconnu, les POAN n’ont pas de traitement spécifique. Ont été proposés avec plus ou moins de succès les AINS, les bisphosphonates et la radiothérapie, mais le recours à la chirurgie est de mise si la gêne est importante ou en cas de compression nerveuse. Contrairement au cortège de complications orthopédiques observées dans les maladies neurologiques (raideurs articulaires, rétractions musculotendineuses, algoneurodystrophie), les POAN ont la particularité de se développer aussi bien chez les patients à mauvais pronostic neurologique que chez les autres, et il n’est pas rare qu’une POAN bloque en position gênante une articulation alors que la commande volontaire a parfaitement récupéré. Facteurs pronostiques Plusieurs facteurs pronostiques ont été proposés dans la littérature, de nature essentiellement clinique, radiologique et neurophysiologique. Nous les rappelons ci-dessous. Facteurs pronostiques cliniques Le score de coma de Glasgow (GCS) [tableau II], proposé en 1974 par G. Teasdale et B. Jennett pour évaluer le niveau de conscience, est classiquement utilisé pour mesurer la sévérité d’un TC (7). Il évalue l’ouverture des yeux et les réponses verbale et motrice sur une échelle de 3 à 15 et permet de suivre l’évolution d’un patient au cours de l’éveil. Il en existe une version adaptée aux jeunes enfants. Le GCS est couramment utilisé pour qualifier le TC de “léger” (score entre 13 et 15), “modéré” (score entre 9 et 12) ou “grave” (score entre 3 et 8). Une équipe belge a proposé d’y associer les informations résultant de la recherche des réflexes du tronc cérébral, pour former l’échelle dite de “Glasgow-Liège”, très utile dans les phases de coma profond (8). L’étude des réflexes du tronc cérébral a également une valeur pronostique indéniable pour l’évolution à court terme. Non pas que les lésions primitives du tronc cérébral soient fréquentes, mais l’altération de ces réflexes est le plus souvent liée au volume des lésions sus-tentorielles et à l’hypertension intracrânienne qui en résulte. De nombreuses études ont, il y a longtemps, montré l’utilité du GCS initial dans la prédiction de l’évolution (9). Toutefois, une récente étude britannique a mis en évidence la perte progressive de cette valeur pronostique sur une série de 358 TC survenus entre 1992 et 2001 (10). Le score GCS était significativement corrélé à l’évolution à 6 mois (mesurée par le GOS) pour les patients victimes d’un TC de 1992 à 1995, mais ne l’était plus pour les patients suivants. L’âge, en revanche, restait inversement corrélé au pronostic sur toute la durée de l’étude. Bien que le recueil des données dans cette étude ne fût pas exhaustif, ces résultats remettent clairement en cause la valeur prédictive du GCS initial. Comme explication possible de cette évolution, on peut avancer les progrès réalisés dans la prise en charge des TC, mais également la sédation et l’intubation précoces, qui rendent plus difficile l’évaluation du GCS (11). Certains auteurs ont proposé l’utilisation de la seule réponse motrice, plus fiable que l’ouverture des yeux et que la réponse verbale. Couplée à l’examen des deux pupilles (mydriase) et à l’âge, elle serait un meilleur facteur prédictif de l’évolution clinique, notamment de la sortie du coma (12). Tableau II. Score de coma de Glasgow. Échelle de Glasgow adulte Ouverture des yeux Réponse verbale Réponse motrice 1 - Nulle 1 - Nulle 1 - Nulle 2 - À la douleur 2 - Incompréhensible 2 - Extension stéréotypée (rigidité décérébrée) 3 - Au bruit 3 - Inappropriée 3 - Flexion stéréotypée (rigidité de décortication) 4 - Spontanée 4 - Confuse 4 - Évitement 5 - Normale 5 - Orientée 6 - Aux ordres La Lettre du Neurologue • Vol. XIII -n° 11 - décembre 2009 | 363 MISE AU POINT Références bibliographiques 1. Jennett B, Bond M. Assessment of outcome after severe brain damage. Lancet 1975;1(7905):480-4. 2. Azouvi P. Neuroimaging correlates of cognitive and functional outcome after traumatic brain injury. Curr Opin Neurol 2000;13:665-9. 3. Godefroy O, Brigitte A, Philippe A et al. Syndromes frontaux et dysexécutifs. Rev Neurol (Paris) 2004;160(10):899-909. 4. Ciancia S, Raverot G, Tell L et al. Troubles neuroendocriniens après traumatisme crânien. In : Azouvi P, Joseph PA, Pélissier J, Pellas F (eds). Prise en charge des traumatisés cranio-encéphaliques. Paris : Masson, 2007:149-59. 5. Benardo LS. Prevention of epilepsy after head trauma: do we need new drugs or a new approach? Epilepsia 2003;44 (Suppl. 10):27-33. 6. Pélissier J, Petiot S, Bénaïm C, Asencio G. Prise en charge des paraostéoarthropathies neurogènes (POAN) chez le traumatisé cranio-encéphalique: étude de la littérature. Ann Readapt Med Phys 2002;45(5):188-97. 7. Teasdale G, Jennett B. Assessment of coma and impaired consciousness: a practical scale. Lancet 1974;2:81-4. 8. Born JD, Albert A, Hans P, Bonnal J. Relative prognostic value of best motor response and brain stem reflexes in patients with severe head injury. Neurosurgery 1985;16(5):595-601. 9. Colohan AR, Alves WM, Gross CR et al. Head injury mortality in two centers with different emergency medical services and intensive care. J Neurosurg 1989;71(2):202-7. 10. Balestreri M, Czosnyka M, Chatfield DA et al. 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Pour de nombreux auteurs, le pronostic des sujets âgés est moins bon et certaines études suggèrent que cette liaison se renforce au-delà de 50 ans (14). La durée de l’amnésie post-traumatique (APT) est considérée comme l’un des meilleurs facteurs pronostiques du statut cognitif à long terme. L’APT est définie comme “la période suivant le TC pendant laquelle le patient est confus, incapable de s’orienter, de mémoriser des événements courants, avec troubles de l’orientation, amnésie antérograde et amnésie rétrograde”. L’APT est donc évaluée chez les patients sortis du coma et elle est utile pour la prédiction du pronostic à long terme. Elle peut être qualifiée selon la classification de B. Jennett et G. Teasdale, de “très légère” lorsqu’elle est inférieure à 5 minutes à “très sévère” lorsqu’elle dépasse 4 semaines (15). Des questionnaires standardisés ont été proposés pour la quantifier, comme le Galveston Orientation and Amnesia Test (16). L’association à d’autres traumatismes osseux ou viscéraux grève, bien sûr, le pronostic vital immédiat et fonctionnel à long terme et est à considérer pour chaque patient. de leur utilité. La conférence de consensus organisée par la Société française de médecine physique et réadaptation (SOFMER) en 2001 a accordé un grade de recommandation “C” aux propositions suivantes (17) : »» les potentiels évoqués sensoriels et moteurs sont utiles pour identifier le locked-in syndrome et le mutisme akinétique ; »» l’enregistrement de potentiels évoqués cognitifs chez un patient dans le coma serait prédictif du réveil dans les jours qui suivent. En phase chronique, ils peuvent fournir des arguments en faveur de capacités conscientes résiduelles. Autres facteurs pronostiques À la phase aiguë, plusieurs facteurs d’agression cérébrale secondaire sont corrélés au pronostic vital post-TC, comme l’hypotension artérielle systémique, l’hypoxémie et l’hypercapnie. Dans la série de R.M. Chesnut, l’association d’un TC et d’un état de choc est responsable d’une mortalité de 65 % (18). Un monitoring multimodal peut être utile pour guider la thérapeutique à la phase aiguë, intégrant le doppler transcrânien, la pression intracrânienne (PIC), la saturation veineuse jugulaire en oxygène (SvJO2), la pression tissulaire en oxygène (PtIO2) et le glucose parenchymateux mesuré par microdialyse cérébrale (19). Facteurs pronostiques radiologiques La valeur prédictive de l’IRM est plus forte que celle de la TDM, car elle permet de détecter les lésions axonales diffuses et les lésions du tronc cérébral. Sont considérés comme étant de mauvais pronostic (17) : »» la profondeur des lésions : corps calleux, noyaux gris centraux, hippocampe, mésencéphale, partie dorso-latérale du tronc cérébral ; »» le nombre de lésions supérieur à 3 ; »» l’association de plusieurs types de lésions cérébrales : lésions axonales diffuses, hématomes. Le développement récent de nouvelles séquences d’IRM (diffusion, transfert magnétique, spectro­ scopie) devrait élargir la place de cet examen dans la phase précoce. Facteurs pronostiques neurophysiologiques Les examens neurophysiologiques à la phase aiguë ou subaiguë d’un TC n’ont pas clairement fait la preuve 364 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIII - n° 11 - décembre 2009 Conclusion Si tous les indicateurs épidémiologiques semblent montrer une inflexion de l’incidence annuelle des TC en France, attribuée en particulier aux récentes mesures de répression routière, ils restent néanmoins un problème majeur de santé publique, à l’origine d’incapacités physiques et cognitives à long terme. Les séquelles cognitives, parfois isolées ou prépondérantes, constituent un handicap “invisible” qu’il faut savoir évaluer, car son retentissement social, familial et professionnel est souvent important. Le pronostic à court et à long terme peut être estimé dans les premiers jours suivant un TC, grâce à des indices de sévérité cliniques, radiologiques et neurophysiologiques. Toutefois, en dehors des cas extrêmes, la sévérité initiale du TC n’est pas forcément corrélée à l’évolution, alors que le profil de récupération durant les premiers jours ou les premières semaines est déterminant. ◾ MISE AU POINT Références bibliographiques “Le traumatisé crânien : pronostic” 13. Dailler F, Di Roio C, Artru F. Facteurs prédictifs et marqueurs biologiques de la récupération après lésion encéphalique traumatique. In : Azouvi P, Joseph PA, Pélissier J, Pellas F (eds). Prise en charge des traumatisés cranio-encéphaliques. Paris : Masson, 2007:29-37. 14. Jiang JY, Gao GY, li WP, Yu MK, Zhu C. Early indicators of prognosis in 846 cases of severe traumatic brain injury. J Neurotrauma 2002;19:869-74. 15. Jennett B, Teasdale G. Management of head injuries. Contemporary neurology series. Vol. I. Philadelphia: Davis, 1981:20. 16. Levin HS, O’Donnell VM, Grossman RG. The Galveston Orientation and Amnesia Test. A practical scale to assess cognition after head injury. J Nerv Ment Dis 1979;167 (11):675-84. 17. Mazeaux JM, Bérard E, Colin C et al. Conférence de consensus : Les traumatisés crâniens adultes en médecine physique et réadaptation : du coma à l’éveil (éditorial). Ann Réadapt Med Phys 2002;45:415-6. 18. Chesnut RM. Secondary brain insults after head injury: clinical perspectives. New Horiz 1995;3:366-75. 19. Vespa PM, McArthur D, O’Phelan K et al. Persistently low extracellular glucose correlates with poor outcome 6 months after human traumatic brain injury despite a lack of increased lactate: a microdialysis study. J Cereb Blood Flow Metab 2003;23(7):865-77. La Lettre du Neurologue • Vol. XIII -n° 11 - décembre 2009 | 1