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4.2 Physique des diélectriques
4.2.1 Introduction
L’utilisation de matériaux diélectriques dans l’appareillage électrique, haute tension
comme basse tension, a pour but de séparer entres elles les pièces métalliques portées à
différents potentiels électriques comme par exemple l’âme centrale d’un câble souterrain
de distribution, portée à une tension de 14,4 kV par rapport au neutre pour le réseau 25
kV, du neutre concentrique mis à la terre. Cette situation est illustrée à la figure 4.1b) ci-
dessous. Le matériau diélectrique dans ce cas est un polymère extrudé, le polyéthylène.
Similairement, la figure 4.1a) illustre le schéma d’un câble extrudé à très haute tension.
L’épaisseur de l’isolation dans ce cas est plus importante mais le matériau isolant est le
même c’est-à-dire le polyéthylène. À l’exception de quelques lignes, les câbles de
transport de ce type ne sont pas actuellement très utilisés au Québec.
a) b)
Figure 4.1 : a) Schéma électrique d’un câble extrudé très haute tension [1]. Typiquement
le champ électrique est compris entre 6 et 15 kV/mm. b) Schéma électrique d’un câble
extrudé moyenne tension [2]. Typiquement le champ électrique près de l’âme centrale
est compris entre 2,5 et 4 kV/mm.
Un autre exemple de système d’isolation interne est le système d’isolation des
enroulements statoriques des grandes machines. Tel que mentionnée précédemment, ces
enroulements sont faits de barres (un tour) ou de bobines (plusieurs tours) pré-formées.
Ces barres ou bobines sont en effet fabriquées en usine et placées dans les encoches
statoriques sur site. Pour les machines 13,8 kV, la différence de potentiel phase-neutre
que doit supporter le système d’isolation est de 8 kV. Les figures 4.2a et 4.2b illustrent
en vue de coupe l’isolation de masse d’une barre et d’une bobine respectivement. La
barre est une barre d’un alternateur refroidi à l’eau et conséquemment les conducteurs
sont creux. La figure 2c illustre le système d’isolation de la partie hors fer d’une barre,
appelée aussi développante. Une complication importante qui survient dans cette région
du bobinage est l’apparition d’un fort champ tangentiel. Pour éviter la présence de
décharge de surface un revêtement spécial dit anti-effluves est utilisé. Cette
problématique sera traitée plus loin. Finalement la figure 4.2d est une photo de barres et
bobines utilisées pour des essais en laboratoire.
2
a) b)
c) d)
Figure 4.2 : Système d’isolation du bobinage statorique des grandes machines
tournantes : a) vue de coupe d’une barre [3]; b) vue de coupe d’une bobine [3]; c)
système anti-effluve [4]; d) barres et bobines de machines 13,8 kV.
Évidemment, le matériau diélectrique, en plus d’un rôle d’isolation électrique sert aussi
de support mécanique aux pièces métalliques en plus de devoir dissiper la chaleur
produite par le conducteur. Les propriétés électriques, mécaniques et thermiques de ces
matériaux doivent donc être soigneusement étudiées lors que la conception d’un système
d’isolation. Dans les sections qui suivent, nous verrons d’abord un aperçu des concepts
théoriques reliés à ces matériaux. Par la suite, les différentes applications en
électrotechnique seront abordées ainsi que les essais de maintenance et de diagnostique
utilisés dans cette industrie.
3
4.2.2 Théorie des diélectriques
4.2.2.1 Polarisation statique
Au chapitre 2, les phénomènes physiques entraînant la conductivité électrique ont été
étudiés. Dans les matériaux isolants, il n’y a pas, ou très peu, de charge libre permettant
la circulation du courant électrique. Nous reviendrons sur ce point à la section suivante.
Par contre, les charges électriques présentes dans le matériau, si elles ne peuvent se
mouvoir d’une électrode à l’autre peuvent se déplacer localement et entraîner une
variation des charges images sur les électrodes. Cette variation des charges se traduit par
un courant appelé courant de déplacement. Un appareil de mesure externe comme un
ampèremètre, ou un pico-ampèremètre pour la mesure de petits courants, ne peut faire la
distinction entre ce courant et un courant de conduction directe. Il est toutefois important
de garder en tête la grande différence physique entre ces deux courants.
Un matériau diélectrique qui ne conduit pas ou très peu, est plutôt caractérisé d’un point
de vue électrique par sa permittivité. Cette dernière reflète l’intensité des mécanismes de
polarisation dans le matériau. Le phénomène de polarisation peut être dans un premier
temps illustré en considérant l’expérience suivante. Introduisons un matériau diélectrique
entre les armatures d’un condensateur plan-plan soumis à une différence de potentiel
continue Uo qui est maintenue constante par une source. Au moment où le diélectrique
est inséré, on note la présence d’un courant circulant entre la source et le condensateur.
C’est le courant de déplacement dont il a été fait mention au paragraphe précédent. Ce
courant diminue avec le temps, plus ou moins rapidement, tout dépendamment des
mécanismes de polarisation du matériau. En effet, sous l’action du champ électrique
externe, un champ interne s’opposant au champ appliqué apparaît dans le diélectrique.
Pour combattre ce champ, de nouvelles charges doivent être amenées par la source sur les
armatures du condensateur. Le champ interne dans le diélectrique est causé par le
phénomène de polarisation. La figure 4.3 ci-dessous illustre la situation d’un diélectrique
entre deux électrodes. On distingue deux types de charges sur les électrodes du
condensateur, les charges libres reliées au maintient de la tension sous vide ainsi que les
charges fixées nécessaire pour compenser le phénomène de polarisation.
4
Figure 4.3 : Illustration de la polarisation d’un diélectrique (adaptée de [5])
Le phénomène de polarisation provient en général de l’orientation d’un dipôle électrique,
induit ou permanent, en présence d’un champ appliqué. Un dipôle électrique est formé
par deux charges Q de signes opposés séparées par une distance l. Le moment dipolaire
électrique est défini par
l
r
r
qp = (4.1)
La figure ci-dessous illustre la structure d’un dipôle électrique
q
l
r
q
+
Figure 4.4 : Dipôle électrique
Ces dipôles électriques peuvent provenir de différentes sources microscopiques ou
macroscopiques. Habituellement, lorsqu’un matériau diélectrique se dégrade le nombre
5
de dipôles électriques augmente et conséquemment le courant de polarisation, celui relié
au mouvement des dipôles, augmente aussi. La polarisation due à ces dipôles correspond
à la somme vectorielle de tous les dipôles par unité de volume. On peut donc définir la
polarisation
P
r
par
Ω
Ω
=
ii
pP r
r
1 (4.2)
Ω est un volume dans le diélectrique et la sommation représente l’addition vectorielle
de tous les moments électriques. Si ceux-ci sont orientés de façon aléatoire, ce qui est
généralement le cas en l’absence d’un champ appliqué, alors la somme vectorielle donne
zéro. Le figure 4.5 ci-dessous illustre la variation de
P
r
en fonction de l’intensité du
champ appliqué. Certains matériaux, de par leurs structures, peuvent demeurer polarisés
en l’absence d’un champ extérieur. Ce sont les ferroélectriques. On utilise, par exemple,
ces matériaux pour la fabrication de sondes piézoélectriques, pour la détection ou pour la
génération de signaux ultrasonores. Le titanate de baryum est un exemple connu de
matériau ferroélectrique.
E
p
Figure 4.5 : Polarisation d’un matériau diélectrique
Pratiquement tous les matériaux utilisés en électrotechnique sont des diélectriques
linéaires. Les champs électriques peu élevés (par rapport aux champs typiques reliés aux
effets non linéaires) expliquent que ces matériaux opèrent dans leur région linéaire. Les
unités de la polarisation sont les 2
m
C. En effet, le potentiel produit par les dipôles est le
même que celui que produirait une densité surfacique de charge p
σ
donnée par
nP
p
r
r
=
σ
(4.3)
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