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Nouvelles stratégies thérapeutiques :
“to go or not to go”
et
“stop and go”
des patients en rémission complète après une thérapie
ciblée avec ou sans chirurgie associée, ont montré que
cette stratégie était valide puisqu’un nombre signifi catif
de patients n’a pas montré de progression de la maladie
au premier et au second scanner de contrôle à 3 et
6 mois, contrairement à ce que l’on pouvait craindre
en utilisant des médicaments non cytotoxiques et non
directement dirigés vers la cellule cancéreuse.
Dans une première étude regroupant plusieurs centres
français, 64 cas de patients ayant présenté une rémission
complète après antiangiogéniques seuls (n = 36) ou
associés à un traitement local supplémentaire (n = 28)
ont été étudiés. Des 36 patients présentant une
rémission complète après antiangiogéniques seuls,
8 ont poursuivi le traitement médical au-delà, alors que
les 28 autres l’ont suspendu, parmi lesquels 17 (61 %)
étaient en rémission complète à 6 mois. Avec un recul
de près de 1 an (322 jours), 12 (48 %) des 25 patients
ayant bénéfi cié d’un traitement local complémentaire
et ayant arrêté le traitement médical sont en rémission
complète. Il faut noter que le pronostic était bon ou
intermédiaire pour la plupart des patients (95 %).
Dans une étude allemande rapportant uniquement le cas
de 5 patients, 3 ont bénéfi cié d’une chirurgie d’exérèse
dans un contexte de réponse partielle, et les 2 autres
ont présenté une rémission complète sous traitement
médical seul. Un patient a poursuivi le traitement médical
au-delà de la rémission complète. Tous ces patients
étaient toujours en rémission complète à 24 mois.
Il ne peut donc y avoir de standard de prise en charge,
mais seulement une tendance issue des discussions
d’experts.
La pause transitoire, qui peut être plus ou moins
longue dans le contexte (plus de 12 mois), ne peut
être envisagée que chez un patient pour lequel le
volume tumoral ou le siège des métastases ne font pas
craindre une évolution rapide des symptômes pouvant
pénaliser une prise en charge ultérieure adaptée à la
reprise évolutive, ce qui pourrait englober les locali-
sations hépatiques, ganglionnaires médiastinales ou
pulmonaires juxtahilaires de volume important, ou les
localisations vertébrales avec risque de compression
n’ayant pas bénéfi cié de traitement local (chirurgie et,
surtout, radiothérapie). Bien évidemment, il ne faut pas
que le patient ait présenté des rebonds de la maladie
dans les pauses prévues du sunitinib ni qu’il ait justifi é
d’un traitement continu ou à pause limitée, ce qui
sous-tend la nécessité d’une pression thérapeutique
quasi permanente jusqu’à progression. L’interruption du
traitement est plus aisée à envisager en cas de réponse
complète qu’en cas de réponse partielle ou de stabi-
lisation prolongée, mais théoriquement la réfl exion
est similaire. Dans le cas d’une réponse complète par
thérapie ciblée, la tendance en France est d’interrompre
le traitement spécifi que d’emblée ou, plus souvent,
après 2 à 4 cycles supplémentaires (11). En revanche,
si la réponse complète est obtenue grâce à un geste
local chirurgical d’exérèse ou d’éradication par radio-
thérapie ou radiofréquence, il n’est pas recommandé
de poursuivre la thérapie ciblée, de même que dans
le cas d’un traitement adjuvant ; rappelons qu’aucun
traitement adjuvant n’est actuellement validé après
traitement de la tumeur primitive. En cas de réponse
partielle ou de stabilisation, il n’y a aucun consensus
quant à la durée de la pause thérapeutique, mais il est
admis qu’elle doit être prolongée. En se fondant sur la
durée médiane de SSP avec les traitements de première
ligne, de l’ordre de 10 à 11 mois, cette approche ne
devrait être envisagée qu’au-delà de 12 mois de
traitement, et ce d’autant plus que cette durée de
réponse sera bien supérieure à 12 mois. En complément,
toute situation diffi cile induite par les eff ets indésirables
apportera des arguments en faveur de la suspension
du traitement.
Cette suspension transitoire doit s’accompagner d’un
suivi strict, sur un rythme similaire à celui de l’évaluation
des cycles thérapeutiques, et donc tous les 2 à 3 mois
au début, afi n de surveiller l’apparition de symptômes
susceptibles d’être induits par la reprise évolutive de la
maladie. Il est probable que ce rythme peut être allégé
si l'absence de progression se confi rme dans le temps,
mais aucune recommandation ne peut être proposée.
À la reprise évolutive, en dehors d’un geste local, qui
doit toujours être envisagé, ou de l’inclusion dans un
essai thérapeutique, le patient sera soumis au même
médicament ou à un autre de même mode d’action.
Conclusion
Le cancer du rein métastatique a profi té, de manière
exceptionnelle et heureuse pour les patients, de l’arrivée
des thérapies ciblées qui permettent, pour la plupart,
de les voir vivre plus longtemps et mieux. Malgré tout,
au-delà de cette phase d’euphorie engendrée par ces
gains exceptionnels, il est indispensable d’affi ner la
stratégie pour off rir à des populations choisies une prise
en charge optimale, notamment en ne commençant
pas le traitement trop tôt (not to go) ou en intégrant
une pause dans les temps thérapeutiques (stop).
Cette approche peut sembler lourde à l’aube des
avancées de la biologie moléculaire prédictive, mais
en attendant ses résultats pour nous aider à mieux
traiter, cette approche est plus subtile qu’il n’y paraît. ■
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Références